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Implorez ce Dieu défenseur;

» En faveur de ses fils qu'il arme sa vengeance:
>> Est-il aveugle et sourd? est-il d'intelligence
» Avec l'impie et l'oppresseur?

» Méchans, suspendez vos blasphemes: »Est-ce pour le braver qu'il vous donna la voix? » Il nous frappe, il est vrai; mais, sans juger ses lois, >> Soumis, nous attendons qu'il vous frappe vous-mêmes. >> Ce soleil, témoin de nos pleurs,

» Amène à pas pressés les jours de sa justice : » Dieu nous paîra de nos douleurs;

>> Dieu viendra nous venger des triomphes du vice.

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Qu'il vienne donc ce Dieu, s'il a jamais été!

Depuis que du malheur les vertus sont sujettes,

» L'infortuné l'appelle, et n'est point écouté:

» Il dort au fond du ciel sur ses foudres muettes.
» Et c'est là ce Dieu généreux !

» Et vous pouvez encore espérer qu'il s'éveille!
» Allez, imitez-nous, et, tandis qu'il sommeille,
» Soyez coupables, mais heureux. »

Quel bruit s'est élevé? la trompette sonnante
A retenti de tous côtés;

Et sur son char de feu la foudre dévorante

Parcourt les airs épouvantés!

Odes.

Ces astres teints de sang, et cette horrible guerre
Des vents échappés de leurs fers,
Hélas! annoncent-ils aux enfans de la terre

Le dernier jour de l'univers?

L'Océan révolté loin de son lit s'élance

Et de ses flots séditieux

?

Court, en grondant, battre les cieux, Tout prêts à le couvrir de leur ruine immense. C'en est fait, l'Éternel, trop long-temps méprisé, Sort de la nuit profonde

Où, loin des yeux de l'homme, il s'était reposé : Il a paru; c'est lui! son pied frappe le monde, Et le monde est brisé!

Tremblez, humains; voici de ce juge suprême
Le redoutable tribunal !

Ici perdent leur prix l'or et le diadême;
Ici l'homme à l'homme est égal;

Ici la Vérité tient ce livre terrible

Où sont écrits vos attentats;

Et la Religion, mère autrefois sensible,
S'arme d'un cœur d'airain contre ses fils ingrats.

Sortez de la nuit éternelle,

Rassemblez-vous, âmes des morts,

Et, reprenant vos mêmes corps,

Paraissez devant Dieu; c'est Dieu qui vous appelle!

Arrachés de leur froid repos,

Les morts du sein de l'ombre avec terreur s'élancent, Et près de l'Éternel en désordre s'avancent,

Pâles et secouant la cendre des tombeaux!...

O Sion! ô combien ton enceinte immortelle
Renferme en ce moment de peuples éperdus!
Le musulman, le juif, le chrétien, l'infidèle
Devant le même Dieu s'assemblent confondus.
Quel tumulte effrayant! que de cris lamentables!
Ciel! qui pourrait compter le nombre des coupables?
Ici, près de l'ingrat,

Se cachent l'imposteur, l'avare, l'homicide,
Et ce guerrier perfide

Qui vendit sa patrie en un jour de combat.

Ces juges trafiquaient du sang de l'innocence
Avec ses fiers persécuteurs :

Sous le vain nom de bienfaiteurs

Ces grands semaient ensemble et les dons et l'offense.
Où fuir? où vous cacher? l'œil vengeur vous poursuit,
Vous, brigands, jadis rois, ici sans diadême;
Les antres, les rochers, l'univers est détruit :
Tout est plein de l'Être suprême!

Coupables, approchez :

De la chaîne des ans les jours de la clémence
Sont enfin retranchés.

Insultez, insultez aux pleurs de l'innocence :

Son dieu dort-il? Répondez-nous!...

Vous pleurez: vains regrets ; ces pleurs font notre joie, Et l'enfer demande sa proie!...

Mais d'où vient que je nage en des flots de clarté ?
Ciel! malgré moi s'égarant sur ma lyre,
Mes doigts harmonieux peignent la volupté!
Fuyez, pécheurs, respectez mon délire.
Je vois les élus du Seigneur

Marcher d'un front riant au fond du sanctuaire :
Des enfans doivent-ils connaître la terreur
Lorsqu'ils s'approchent de leur père?

Quoi! de tant de mortels qu'ont nourris tes bontés
Ce petit nombre, ô ciel! rangea ses volontés
Sous le joug de tes lois augustes!

Des vieillards! des enfans! quelques infortunés!
A peine mon regard voit, entre mille justes,
S'élever deux fronts couronnés.

Que sont-ils devenus ces peuples de coupables
Dont Sion vit ses champs couverts?

Le Tout-Puissant parlait; ses accens redoutables
Les ont plongés dans les enfers.

Là tombent condamnés et la sœur et le frère,
Le père avec le fils, la fille avec la mère;
Les amis, les amans, et la femme et l'époux,
Le roi près du flatteur, l'esclave avec le maître;

Légions de méchans, honteux de se connaître,
Et livrés pour jamais au céleste courroux.

Le juste enfin remporte la victoire,

Et de ses longs combats, au sein de l'Eternel,
Il se repose, environné de gloire.

Ses plaisirs sont au comble, et n'ont rien de mortel;

Il voit, il sent, il connaît, il respire

Le Dieu qu'il a servi, dont il aima l'empire;
Il en est plein; il chante ses bienfaits.
L'Eternel a brisé son tonnerre inutile;
Et d'ailes et de faux dépouillé désormais,

Sur les mondes détruits le Temps dort immobile.

GILBERT.

L'IMMORTALITÉ DE L'HOMME,

ODE EN STANCES IRRÉGULIÈRES.

« DE ses livides mains quand la Mort nous embrasse,

>> Tout en nous est anéanti;

» Avec le corps l'âme s'efface,

» Et tout l'homme est rentré d'où l'homme était sorti.»

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