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CHAPITRE VII.

SUITE DE LA TERREUR.

COMMISSIONS MILITAIRES.

RENNES.

La terreur était donc à l'ordre du jour, elle était le point de doctrine fondamentale des représentants qui parcouraient nos départements. Aussi Nantes seul n'en fut-il pas doté, et si nous voyons Bréard à Brest, solliciter l'établissement d'un tribunal révolutionnaire, en citant l'exemple de son collègue Carrier, qui marche comme un brave b....., il faut nommer encore Jean-Bon-SaintAndré et Prieur qui instituèrent à Saint-Malo et à Antrain deux commissions militaires révolutionnaires, quand déjà Pochole en avait établi une à Rennes, et que les représentants, attachés à

l'armée d'opération, en avaient aussi créé au Mans, à Laval, à Angers.

Eminemment révolutionnaire, plus peut-être que les comités et les tribunaux exceptionnels dont on a tant parlé, c'est surtout au sein de ces commissions et dans leurs registres qu'il faut chercher la pensée, toute d'action et de terreur, que professèrent les hommes qui, luttant contre la Vendée et l'étranger, se posèrent comme les apôtres du sans-culottisme, régime nouveau, pour lequel il fallait au préalable faire table rase. — Ecoutons-les, et nous en jugerons. C'est Pochole qui, arrivé à Rennes, quand Carrier en partait pour Nantes, a reçu sa pensée et ses confidences.

<< Considérant que la sévérité de la discipline militaire et la punition des lâches et des traîtres qui cɔmpromettent le salut de la République, peuvent seules assurer le succès de nos armes;

» Que le sang versé par l'ineptie ou par la malveillance des chefs doit crier vengeance contre ceux qui l'ont fait répandre ;

» Qu'il est utile à la patrie d'épouvanter par la rigueur de l'exemple ceux qui semblent se faire un jeu de la vie de leurs semblables et sacrifient à leur incxpérience les plus braves défenseurs de la liberté;

» Que tout délit, quel qu'il soit, dans une armée,

quand il tend à y introduire la désorganisation ou à y répandre des principes contraires au républicanisme, mérite la mort;

» Arrête: Qu'une commission militaire révolutionnaire, composée de cinq membres, jugera en dernier ressort, et sans antre forme que la décision de la majorité de ses membres, d'après un interrogatoire et une audition de témoins, tous les brigands pris les armes à la main; tous les coupables convaincus d'avoir crié Vive le Roi! etc., etc.

Et ajoutant de nouvelles instructions à cet arrêté, daté du 19 brumaire an 2, il disait aux membres de cette commission (le 24 brumaire):

« Aucune considération politique ne peut vous empêcher d'exécuter la loi du 19 mars 1793. Des républicains révolutionnaires ne doivent pas connaître le pardon. Les traîtres ont trop souvent abusé de votre indulgence. L'armée vous observe, et sans doute elle n'attend pas que le glaive de la loi épargne ceux qu'elle n'eut pas épargné sur le champ de bataille. Ces décisions, citoyens, qui coûtent à l'humanité, sont dictées par l'intérêt de la patrie, qui doit l'emporter sur tout autre sentiment. »> (1)

(1) L'arrêté de création de l'une des commissions de la Loire-Inférieure portait: qu'en l'absence de deux témoins, le procès-verbal d'un fonctionnaire en exercice, suffirait pour la démonstration du fait et la condam

Puis, il les autorisait à faire faire une nouvelle guillotine; celle qui existait sur la place du Palais de la Loi ne suffisant plus.

Mais, soit que cette commission ne répondit point aux vues et aux projets des représentants, soit qu'elle ne suffit point réellement à expédier tous les jugements qui lui étaient remis, tant est-il que, le premier frimaire an II, un autre arrêté signé des représentants Bourbotte, Prieur et Turreau, ajoutait aux deux commissions déjà instituées à Rennes et à Saint-Malo, une troisième commission, chargée de punir avec célérité les scélérats qui avaient pris les armes contre la liberté, et tous les contre- révolutionnaires qui cherchaient à fomenter dans l'armée l'indiscipline, pour parvenir à la désorganiser et à la dissoudre. Et chacun des membres de cette commission, composée des citoyens Brutus Magnier, président ;-Defiennes, accusateur; —Coulon ;— Bossenge; Remaëly - et Scoevola, greffier, recevant une indemnité de 12 liv. par jour, se mirent à la besogne, après s'être pourvus de 7 bon

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nation de l'accusé. J'ai lieu de penser que cette jurisprudence devint plus tard commune à toutes les commissions militaires en exercice dans nos départements.

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