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toutes les armes qui leur tombent sous la main. Des rapports multipliés et dignes de foi nous assurent qu'ils ont été au nombre de quatre cents à trois petits quarts de licue de notre ville, etc., etc.

ils

D'ailleurs, s'ils attaquent partout où ils sont en force, s'ils cherchent des armes et s'en saisissent, c'est toujours à l'aide des mêmes moyens, par les mêmes excès, par le même système de terreur et d'intimidation. Entrent-ils, le 9 nivòse. de nuit et subitement dans la commune de Plumelec, c'est vers l'habitation de PierreMarie Le Breton qu'ils se dirigent sans coup-férir. Le malheureux était incommodé et retenu au lit; les brigands le saisissent et l'entraînent dans un courtil voisin; et là, à coups de sabre, le massacrent pour avoir donné des renseignements sur leur marche. Percent-ils dans le district de Blain, ils usent d'une autre méthode: Prenant le patient et le présentant au feu, ils lui brûlent les pieds jusqu'à ce qu'il ait déclaré le lieu où sont ses armes et son argent. Dans d'autres lieux, à Fougère et à Vitré, nous rencontrons des misérables appartenant aux bandes des frères Boisguy, qui égorgent chaque jour les patriotes et se livrent au cruel plaisir de couper la tête d'un officier municipal de Ferré pour la

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́clouer à un arbre, en même temps qu'ils marquent à la joue, d'une fleur de lys rougie au feu, les malheureux qui leur ont été désignés pour n'être pas de leur parti...... Ailleurs, et nous l'avons déjà vu, ils pillent, ils volent, ils tondent les patriotes, ils les désarment toujours, ils leur ont plusieurs fois coupé les oreilles. Et si, en vertu des actes de l'amnistie, ils se tiennent sur la réserve dans quelques cantons, il nous est encore appris par les rapports des administrateurs et des chefs de cantonnements, qu'ils ne cessent de faire valoir aux soldats, leur position et l'abondance où ils vivent, afin de les entraîner à la désertion.

De tels faits devaient conduire immanquablement les représentants et les généraux de la République à se défier de la conduite et des projets de leurs adversaires; non pas que je veuille dire que les soldats en cantonnements et les républicains étaient restés purs de toute récrimination dans ces circonstances difficiles. Ce que Hoche nous apprend lui-même de l'indiscipline des troupes que lui laissa Rossignol, prouverait le contraire. Mais s'il y eut ici et là quelques atrocités commises par les républicains, quelques chouans surpris à l'écart et inhumai

nement sacrifiés, nous pouvons dire hautement que ces excès ne furent depuis la trève que des exceptions à la règle. Une foule de chouans, pris les armes à la main, et remis à leur parti, attestent ce que nous avançons, et l'arrestation inopinée de Solihac avec deux autres chefs, armés comme lui, et cependant aussitôt relâchés, en témoignent encore. Mais si de tels actes de mansuétude dénotaient l'ardent désir qu'avaient les représentants de conclure une paix honorable, il ne faut pas croire qu'ils s'abandonnassent à une confiance aveugle envers des rebelles.

Dans la nuit du 10 au 11 nivôse, en effet, c'est-à-dire au moment même où Boishardy et Cormatin traitaient avec Humbert d'une suspension d'armes, quatre émigrés pourvus de faux assignats, d'or et de lettres secrètes étaient arrêtés près de Saint-Malo, dans la commune de PortBriac, au moment de leur arrivée des côtes de l'Angleterre. L'un, Prigent, ancien marchand de fruits en détail à Saint-Malo, jouait le plus grand rôle dans les relations de l'émigration avec les rebelles, et plusieurs fois déjà envoyé en France par le cabinet anglais ou les princes, c'est lui qui avait été chargé, lors du siége de Grandville, de prendre des informations sur l'état de l'armée

vendéenne, afin que le départ de l'expédition de lord Moyra pour les côtes de France pût être fixé d'après les chances favorables qui se présenteraient. Cette fois, sa mission n'était

pas

moins

importante; chargé des instructions de Pitt et de Puisaye, il devait communiquer avec le comité royaliste, afin de savoir quand il conviendrait de diriger vers nos côtes les forces réunies à Jersey. Voici ce qu'il écrivit lui-même de sa prison au représentant Boursault, qui lui avait fait entrevoir la possibilité de sauver ses jours en vertu de l'amnistie.....

« On lève des légions dans lesquelles on enrôle tout ce qui se présente. Il est indubitable qu'il se fera une descente. Ov a plusieurs points de débarquement en vue: Cherbourg et Saint-Malo offrent de grandes difficultés. Il est probable qu'on se dirigera sur Noirmoutier. Douze à quinze mille hommes sont destinés à cette expédition. Moyra doit commander: le lieu du rassemblement est près de Southampton. La garnison de Jersey se compose de 4,000 hommes de milice et environ 2,000 bommes de troupes de ligne. Une petite flotille de quatre canonnières, quatre lougres et un bâtiment de transport, est aux ordres du prince de Bouillon, surnommé Gode froy (1).

(1) Prigent, que Puisaye, en 1803, continuait à traiter

Et il est en effet si vrai, si positif que l'Angleterre et l'émigration s'occupent d'un débarquement, qu'à cette même époque Vasselot, aidede-camp de Puisaye, qui était à Londres, arrivait sur nos côtes, porteur de lettres du général en chef, du ministre de la guerre VVindham et du chevalier de Tinteniac, toutes datées des premiers jours de janvier (nivôse an III), et adressées au comité de l'armée catholique et royale, pour qu'il persistât dans ses efforts et qu'il continuât la guerre que la suspension d'armes du 3 janvier

avec la plus grande bienveillance dans ses mémoires, et qu'il offrait comme un modèle de dévouement, avait, ainsi que beaucoup d'autres, faibli en face de la mort. Nous ne chercherons et nous ne trouverons jamais notre plaisir à ternir aucune fidélité, quelle qu'elle soit, mais nous devons dire ici que la lettre et les révélations que nous citons et qui sont restées inconnues à Puisaye, devenaient des actes certains et officiels pour les représentants en mission dans l'Ouest, au moment où le chef des insurgés bretons remettait au ministre anglais Windham comme un témoignage de la loyauté de Prigent, le billet suivant, écrit de sa prison: Je serai fidèle à la mort comme je l'ai été pendant ma vie ; ils ne sauront rien. Vive le Roi!

Que de Bréchard, de Prigent et de Du Resto les guerres civiles n'offrent-elles pas!

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