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la France et redouté par elle. Le clergé ne réussira pas davantage en répétant ce que l'on trouve avec surprise et douleur dans la lettre adressée au Pape, le 30 mai 1819.... On y a introduit les mots de tyrannie et d'usurpation. Ces expressions doivent être à jamais bannies de la bouche de ceux qui ont servi Napoléon et qui ont reconnu son gouvernement. C'est se raviser trop tard pour s'apercevoir de la tyrannie et de l'usurpation, que d'attendre que le tyran et l'usurpateur aient disparu, et qu'on ait reçu les bienfaits d'un autre. Un seul rôle convient sur cet article, le silence; l'accusation ne peut avoir aucune convenance. La direction du clergé sera tournée plus avantageusement pour la religion et pour lui vers la France que vers Rome; la première est tout pour lui, la seconde peu de chose la préférence est due à la France sous tous les rapports.

La direction du clergé a été entamée sans réflexion, poursuivie sans connaissance de cause: et d'un essai sans succès, il n'y a qu'un pas à une persévérance remplie de dangers.

Tout corps comme toute règle a ses exceptions; en traitant du clergé, on n'a en vue que la direction générale et l'esprit du corps, celui qui domine au milieu de lui. Il existe un grand nombre d'honorables exceptions qui montrent,

dans le clergé, des hommes qui unissent de vives lumières à des vertus élevées, qui anobliraient toutes les associations dont ils feraient partie, et qui,comme Élie montant au ciel, devraient laisser

leur manteau aux héritiers de leur ministère. Ce ne sont pas ceux-là qui s'irriteront des vérités salutaires que le seul désir de servir a inspirées; pour les autres, s'ils me retirent leurs bonnes grâces, fasse le ciel que ce ne soit pas aux malheurs prévus d'avance que j'en doive le retour. Il en est des corps comme des individus; tous aiment cette espèce de flatterie qui consiste dans l'approbation et dans la représentation de nos propres idées : on supporte avec impatience l'opposition qu'elles éprouvent. Un peuple célèbre dans les annales de la religion, importuné des reproches que lui adressait un prophète, lui demandait de substituer à ses lamentations des paroles mieux sonnantes à ses oreilles nobis placentia, lui disait-il; et pour se débarrasser de ses tristes pronostics, il le jeta dans une fosse. Tel est à peu près le salaire qui attend celui qui représente aux hommes la vérité, pour leur propre intérêt; ils le haïssent et le regardent comme un ennemi. Mais ce n'est pas ainsi que doit juger et sentir un corps dont la destination sublime est de montrer aux hommes la vérité; revêtu par son ministère, de

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la fonction de combattre les passions, il ne s'associera pas à elles; il écoutera donc les vérités qui lui sont présentées dans cet écrit, avec cette bienveillance éclairée, fruit des lumières et de la justice qui ne s'attache qu'aux services réels, et qui fait à la fois prévoir et craindre le prix auquel est mis toute flatterie.

FIN.

PIÈCES

JUSTIFICATIVES.

N° 1.

'Lettre des Cardinaux, Archevêques et Evêques de France, à S. S. le Pape · Pie VII.

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TRÈS SAINT-PÈRE, il nous est enfin donné de rompre un silence que les circonstances difficiles où nous nous trouvions exigeaient de nous, et dont la prudence, si fortement recommandée à ses disciples par le divin Maître, nous avait fait, jusqu'à ce jour, un devoir. Enfin, il nous est permis de déposer, dans votre sein paternel, les angoisses de notre âme, les amertumes de notre cœur, et les pénibles sollicitudes dont nous sommes agités; c'est la seule consolation qui nous reste dans notre abattement.

Elle a été de courte durée, très Saint-Père, la joie que nous avait fait éprouver la convention passée entre votre Sainteté et le Roi très chrétien, et que nous avions conçue des grands

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et heureux desseins qui avaient déjà en partie reçu leur exécution, et dont l'entier accomplissement promettoit pour l'avenir des avantages plus précieux encore; les anciens noeuds qui existaient entre la France et le Saint-Siége resserrés de nouveau; les articles contraires à la doctrine et aux lois ecclésiastiques, qui avaient été faits à l'insu de votre Sainteté, et publiés sans son aveu, abrogés; une circonscription nouvelle des diocèses plus avantageuse au bien de la religion; leur augmentation proportionnée aux besoins des fidèles autant que les circonstances pouvaient le permettre, le rétablissement des siéges, dont l'origine remonte à la plus haute antiquité, et rappelle les plus beaux souvenirs; l'assurance d'une dotation convenable stipulée pour les églises; la résolution prise de travailler insensiblement à réparer les maux de la religion; la nomination des évêques, leur préconisation; l'union de l'épiscopat resserrée; tout nous annonçait que l'Église gallicane touchait à la fin de ses trop longues épreuves, et marchait vers une restauration tant désirée. Déjà le peuple chrétien commençait à louer le Seigneur, et toute la France chantait un cantique nouveau d'allégresse et d'actions de grâces.

Mais, helas! très Saint-Père, la joie de notre cœur s'est évanouie, et nos concerts ont été changés en lamentations, lorsque nous avons été té

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