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paré, ni aux articles que je viens d'indiquer, ni à l'ouvrage immortel de l'abbé Girard, j'ai osé insérer dans le second volume quelques articles de ma composition. J'ai mis à la fin de chacun la lettre initiale de mon nom (B), afin de ne pas surprendre, par une confusion affectée, les suffrages des lecteurs peu attentifs car les auteurs apparemment ne pourroient s'y méprendre. Si l'on juge que j'aie réussi, je m'applaudirai de mon travail: si on le condamne, mais qu'il donne lieu à quelques articles meilleurs, je serai encore content. Pour ceux que j'ai puisés dans différents écrits, j'en indique les sources à mesure; et c'est tout ce que l'on peut exiger de moi. Je dois pourtant prévenir qu'il y a un petit nombre de ces articles que j'ai pris sous mon nom, quoique j'en aie trouvé le germe ailleurs; il m'a semblé que les changements que j'y introduisois, m'autorisoient à prendre ce parti, ou m'y forçoient même, afin qu'on n'imputât pas à d'autres ce qu'il pourroit y avoir de repréhensible dans la forme et dans le développement qui viennent de moi au surplus, voilà ma déclaration faite, et la restitution annoncée à qui voudra y prétendre.

Quant au premier volume, il n'y a rien que de l'abbé Girard, si ce n'est quelques additions ou quelques notes qui ont été jugées nécessaires et qui sont toujours distinguées du texte original par l'indication de l'auteur; car on a cru que l'ouvrage primitif devoit rester intact. Quoique cela, ce premier volume est encore augmenté de soixante et quatorze articles nouveaux, sortis de la même main; addition considérable et intéressante pour le Public, qui les y reconnoîtra par cette marque (N) ajoutée au titre de chaque article. Soixante et dix ont été tirés des papiers que l'auteur avoit légués à M. le Breton, son imprimeur et son ami: les quatre autres sont extraits de son livre

des vrais principes de la langue Françoise, en seize discours, imprimé en 1747 ; ouvrage, si l'on en juge par le débit, qui a fait moins d'honneur à l'Académicien que celui des Synonymes, mais dont il ne faut pas juger par un moyen si équivoque. Le livre des Synonymes est plein d'agréments et de finesses, a le mérite si touchant de la variété, et le mérite plus touchant encore de ne point occuper, d'être à la portée de tous les esprits, et de convenir à toutes les heures. Celui des principes est un système suivi, qui a beaucoup plus coûté à l'auteur, et qui exige du lecteur une grande contention d'esprit et des lumières déjà acquises. Le premier a été applaudi universellement, parce qu'il a plu à tout le monde; le second n'a été approuvé que des maîtres de l'art et des savants, parce que le reste n'étoit pas en état d'en sentir le prix: mais tous deux ont eu l'avantage décisif d'être contrefaits dans toute l'Europe.

Au reste, l'ordre des articles des synonymes dans les éditions précédentes, étoit celui même dans lequel ils avoient été faits par l'auteur, qui les regardoit comme détachés et indépendants les uns des autres. Ils le sont en effet, et le second volume, comme le premier, peut être ouvert au hasard et lu sans aucune préparation. Cependant il y a des articles qui ont ou de l'analogie ou de l'opposition; et ces deux points de vue peuvent servir à répandre quelque lumière sur les objets qu'on traite. J'ai donc cru pouvoir, dans les deux volumes, rapprocher ces articles les uns des autres, sans pourtant affecter une trop grande rigueur; et, dans la même vue, j'ai mis à plusieurs articles des renvois d'un volume à l'autre ou quelquefois même sans sortir du volume: j'ai rapproché par-là des articles qui étoient corrélatifs

Cette vue a amené un changement d'une autre espèce; c'est que, pour abréger les citations de renvoi, il a fallu donner à chaque article son numéro: ce sera une commodité pour ceux qui croiroient pouvoir citer les synonymes, soit comme autorité, soit comme exemple.

Une table générale alphabétique, à la fin du second volume, met en état de retrouver tel article que l'on veut consulter. Une autre table, également alphabétique à la fin du premier tome, nous montre les restes de la tâche que l'abbé Girard s'étoit proposée; tout ce qui sort de la main des grands maîtres est précieux, jusqu'aux simples croquis.

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SYNONYMES

FRANÇOIS,

LEURS différentes significations, et le choix qu'il en faut faire pour parler avec justesse.

1. ABAISSEMENT. BASSESSE.

ces

UNE NE idée de dégradation, commune à deux termes en fonde la synonymie; mais ils ont des différences bien marquées.

Si on les applique à l'ame, l'abaissement volontaire où elle se tient, est un acte de vertu ; l'abaissement où on la tient, est une humiliation passagère qu'on oppose à sa fierté, afin de la réprimer mais la bassesse est une disposition ou une action incompatible avec l'honneur, et qui entraîne le mépris.

Si l'on applique ces termes à la fortune, à la condition des hommes, l'abaissement est l'effet d'un évènement qui a dégradé le premier état ; la bassesse est le degré le plus bas et le plus éloigné de toute considération. L'abaissement de la fortune n'ôte pas pour cela la considération qui peut être

due à la personne; mais la bassesse l'exclut entièrement ainsi les mandiants sont au-dessous des esclaves; car ceux-ci ne sont que dans l'abaissement, et ceux-là sont dans la bassesse.

On peut encore appliquer ces deux termes à la manière de s'exprimer, et la même nuance les différencie toujours. L'abaissement du ton le rend moins élevé, moins vif, plus soumis: la bassesse du style le rend populaire, trivial, ignoble. (B.)

2. HAUTAIN.

HAUT.

Hautain est toujours pris en mauvaise part; c'est l'orgueil qui s'annonce par un extérieur arrogant c'est le plus sûr moyen de se faire haïr, et le défaut dont on doit le plus soigneusement corriger les enfants. On peut être haut, dans l'occasion, avec bienséance.

Un prince peut et doit rejeter avec une hauteur héroïque des propositions humiliantes; mais non pas avec des hairs hautains, un ton hautain, des paroles hautaines.

Une ame haute est grande; une ame hautaine est superbe.

On peut avoir le cœur haut avec beaucoup de modestie; on n'a point d'humeur hautaine sans un peu d'insolence. L'insolent est à l'égard du hautain, ce qu'est le hautain à l'égard de l'impérieux ce sont des nuances qui se suivent, et ces nuances sont ce qui détruit les synonymes. ( Encycl. VIII. 67. )

3. SUFFISANT. IMPORTANT.

ARROGANT.

Le suffisant est celui en qui la pratique de certains détails, que l'on honore du nom d'affaires, se trouve jointe à une très-grande médiocrité d'esprit. Un grain d'esprit, et une once d'affaires plus

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