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nation ait jamais exifté. Palaphatus eft de même avis que Strabon. Arrien [p] regarde comme fort fufpect tout ce qu'on à écrit des Amazones. D'autres ont entendu par les Amazones des ar mées d'hommes commandées par des femmes guerriéres, & ils montrent que ces éxemples ne font pas rares dans l'antiquité; que les Médes & les Sabéens obéiffoient à des reines; que Sémiramis avoit commandé aux Affyriens, Thomyris aux Scythes, Cléopatre aux Egyptiens, Baudicée aux Anglois, Zénobie aux Palmyréniens.

Appien [9] croit que les Amazones n'étoient pas une nation particuliére, mais qu'on appelloit ainfi toutes les fem. mes qui alloient à la guerre, de quel que nation qu'elles fuffent. Quelquesuns ont avancé que les prétendues Amazones ont été des peuples barbares, qui étoient vêtus de longues robes, qui rafoient leurs barbes ; & avoient un habillement & des ornements de tête femblables à ceux qui étoient en ufage parmi les femmes de Thrace. Selon Diodore [r] de Sicile, Hercule fils d'Alcméne à qui il avoit été enjoint par Euryfthée de rapporter le baudrier d'Hippolyte reine des Amazones, alla les combattre fur les bords du Thermodon, & détruifit cette nation guerriére.

Cependant les traits les plus célébres de leur hiftoire font plus récents que Hercule Grec ou fils d'Alcméne. Car l'enlèvement d'Antiope par Théfée excita les Amazones à entreprendre la guerre dans laquelle elles conquirent toute l'Attique, & campérent dans la place même de l'Areopage. Pentéfilée

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reine des Amazones alla au fecours de Troïe [s] & y fut tuée par Achille : & long-temps aprés Thaleftris [t] autre reine des Amazones, accompagnée de trois cents de fes guerriéres, vint trouver Alexandre en Hircanie,& paffa avec lui treize nuits pour entirer de la race. Dion Chryfoftome raconte [] qu'Hérodote demanda aux Corinthiens quelque récompenfe des hiftoires Grecques qu'il avoit écrites: mais qu'aiant eu d'eux cette réponse qu'ils ne vouloient pas acheter de l'honneur à prix d'argent, il changea tout le récit de la bataille navale de Salamine, chargeant Adimanthius général des Corinthiens d'avoir fui dés le commencement de la bataille avec toute l'efcadre qu'il commandoit.

Thymoléon délivra Corinthe fa pa. trie de la tyrannie de Timophane fon frére. Voici comment Plutarque raconte cette action. Thymoléon prit avec lui deux de fes amis remplis de zéle pour la liberté,ils allérent enfemble chez Timophane. Ils le conjurérent avec les plus for. tes inftances de fe démettre de la tyrannie de fon païs; mais n'en aïant pû rien obtenir, Thymoléon fe retira un peu, fe couvrit la tête fondant en larmes, & dans ce moment fes deux amis fe jettérent fur Timophane & le tuérent. Diodore de Sicile conte la chofe tout autrement,& dit que Thymoléon tua lui-même fon frère dans la place publique. Le prémier de ces hiftoriens pour concilier la nature avec l'amour de la liberté [x]. adoucit le plus qu'il peut l'atrocité de cette action; le fecond l'exaggére dans le deffein de relever davantage le zéle pour la patrie [[. Au milieu de tant

[u] Dio Chryfoft. orat. 37.

[x] Dacier, not. fur Plutarq, vie de Thymoléon.

[y] Cornelius Nepos ne s'accorde ni avec Plutarque, ni avec Diodore : il raconte que

d'écueils du charactére, des motifs, des paflions des hiftoriens,la vérité fait naufrage, & ne paffe point à la postérité. Cyrus meurt tranquillement dans fon lit, fuivant Xénophon [z]. Onéficrite, Arrien [a], Hérodote, Juftin, Valére Maxime rapportent que Thomyris reine des Meffagétes l'aïant vain cu & fait prifonnier, le fit mourir, & fit plonger fa tête dans un vaiffeau plein de fang, afin qu'il fe défaltérât de fang humain, dont il avoit eu toute fa vie une foif fi ardente. Ctéfias écrit que Cyrus fut tué par un Indien d'un coup de fléche. Diodore [b] raconte que Cyrus fut fait prifonnier & attaché à une croix par l'ordre d'une reine des Scythes. Suivant Lucien [c], il mourut de douleur de ce que Cambyfe fon fils avoit fait tuer fous le prétexte d'un faux ordre la plupart de ceux que Cyrus aimoit. C'est undes traits des plus célébres de l'histoire Romaine que la défaite des Fabiens à la journée de Crémére. Cette armée compofée d'une feule famille, & que Florus appelle une armée Patricienne, fut toute taillée en piéces [d],& de trois cents fix Fabiens il ne refta qu'un jeune homme de quatorze ans qui s'étoit trouvé trop jeune pour porter les armes. Il y a peu de faits atteftés plus unanimement & par un plus grand nombre d'auteurs. Tite-Live, Ovide, Aurélius Victor, Silius, Feftus, Valére Maxime rapportent cet événement d'une manière conforme, Denys d'Hali

Thymoléon dans le temps qu'on affaffinoit fon frére, fuivant les ordres qu'il en avoit donnés, étoit occupé dans la citadelle à empêcher que les gens de guerre ne fecouruffent Timopha ne. Cornel. Nep. in Thymol.

[2] Xenoph.Cyrop. lib. 8. [a] Arrian. lib. 6.

[6] Diod. Sic, lib. 2.

[c] Lucien dans les Macrobies

carnaffe le rejette comme entiérement fabuleux,

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Tite-Live [e] place les morts & les dévouements des deux Décies dans la guerre contre les Latins & dans celle contre les Samnites: Cicéron [f] dans la guerre contre les Etrufques & contre Pyrrhus.

Le filence de Polybe eft un préjugé de plufieurs fçavants contre tout ce qu'on a dit de Régulus [g] depuis fa captivité.

Aurélius Victor [b] rapporte que l'empereur Claude II. aïant appris que les livres desSibylles promettoient beaucoup de victoires & de profpérités à l'empire, fi celui qui étoit à la tête du Sénat, s'immoloit par une mort volontaire,il ne voulut point céder cette gloire au prémier Sénateur qui s'y offroit généreusement, & il foûtint que la qua lité d'empereur lui donnoit celle de chef de cette compagnie. Le même auteur ajoûte que cette action magnanime fut la caufe pour laquelle on érigea une ftatuë d'or de cet empereur dans le temple de Jupiter, & fon bufte d'or dans le Sénat; & que le Sénateur qui offrit de donner fa vie pour accomplir la prédiction des Sibylles, fe nommoit Pompo nius Baffus. Trébellius Pollio ni Eutrope n'ont rien dit de tout cela, & ils ont écrit que cet empereur mourut de maladie.

Letrait de fermeté de fe couper la langue avec les dents à la question, a été attribué à Timycha Pythagoricienne K 3

[d] Una dies Fabios ad bellum miferat omnes;

Ad bellum miffos perdidit una dies, &c. Ovid. Faftor. lib. 2. [e] Tit. Liv. lib. 8. & 10.

[f] Cic. Acad. quafi. lib. ■.

[g] Hoc caverat mens provida Regu li, &c. Hor. lib. 3.Od. 5.

[6] Aurel. Vit, in Cland

par Jamblique [], à la courtifanne Léa na par Tertullien [k]; à Anaxarque par Valére Maxime, par Pline, Diogène de Laërce, & Philon Juif; à un martyr par faint Jérôme [dans la vie de faint Paul hermite.

Les uns racontent que Placidie fit figner à l'empereur Honorius fon frére une requête par laquelle il accordoit cette princeffe en mariage à un de fes plus bas officiers, & que comme elle en eut porté fes plaintes à Honorius, cet empereur n'en pouvant demeurer d'accord, elle lui fit voir fa fignature, & lui fit des remontrances fur le danger de fon extrême facilité. Les autres rapportent ce trait d'hiftoire à Pulchérie qui fit figner à fon frère Théodofe II. une requête par laquelle il donnoit fon confentement à la vente de fa femme l'impératrice Eudoxie.

C'est la prévention des hiftoriens qui adonné lieu à raconter fi diversement la mort de l'empereur Julien l'apoftat. Les uns ont écrit que ce prince étant frappé d'un trait en la bataille qu'il li vra aux Perfes, & fe fentant expirer, jetta du fang vers le ciel,& s'écria plein de défefpoir, Nazaréen,tu as vaincu. Ammien Marcellin & Eutrope témoins oculaires de cette expédition, n'ont point parlé de ce défefpoir, quoiqu'ils aient écrit toutes les circonftances de fa mort.Les autres ont rapporté qu'il effaïa d'arracher le trait dont il étoit percé, mais que l'aïant trouvé tranchant, il

[Jamblich.in Pythag

[k] Tertull. Serm. ad martyr.

Alius inter flores molliter vinctus, cùm ad eum impudentiffimum fcortum veniffet, ut in libidinem concitaret, præcitam morfu linguam in blandientis faciem refpuit.

[m] Boccace, de claris mulierib. c. 104. 1. Paul Emyle, liv. 1.) ean du Tiller, évêque de Meaux en fa chronique & Papyre Mason annal.liv. Le Fortunat évêque de Poitiers loue

fe coupa la main, & qu'il ne pût le tirer de la plaie. Il demanda d'être porté en cet état dans la mêlée pour encourager fes foldats, & il dit en mourant, qu'il remercioit les dieux de lui avoir envoïé une mort digne de fon courage, dans la fleur de fon age &dans le cours de fes viEtoires,avant que fa gloire ni fes profpérités fuffent ternies par aucun revers, & il ajoûta que long-tempsauparavant les dieux l'avoient averti de cette mort.

Les malheurs & la mendicité de Bel

lifaire font au nombre des problémes douteux de l'histoire.

Frédegaire & Aimoin ont imputé à la reine Brunehaud des vices & des cru autés horribles, dont faint Grégoire de Tours n'aïant point parlé,& au contraire le pape faintGrégoire le grand l'aïant comblée d'éloges, quelques hiftoriens [m]ont entrepris de juftifier cette reine,

C'eft un trait d'hiftoire fort fufpect & fort incertain que le fupplice de cette même reine,qui fut, dit-on, jugée par Clotaire II. & condamnée pour la mort de dix rois à être attachée & traînée à la queue d'un cheval, & mife en piéces .

Mariana qui traite cette hiftoire de pure tragédie, & de fable [n] dit que les hiftoriens François avoient un grand penchant à croire & à raconter des événements extraordinaires, & il ne fçait fi l'on doit les taxer de fimplicité ou d'impudence. Pafquier réfute en détail toutes les accufations dont on a chargé cette reine.

la modestie, la bonté, l'efprit, les attraits &la nobleffe de cette reine: Pulchra, modefta, decens, folers & grata, benigna,

Ingenio, vultu, nobilitate potens.

[n] Adeò ad portenta fcribenda fcriptores Galli proclives fuerunt, pudendâ fecuritate, fi fecus, impudentiâ mirabili meram tragoediam autores idonei confirmant, nullo judicio ex populi rumoribus confictam.

Le pére le Cointe foûtient qu'il n'y a point eu en France de rois fainéants; que plufieurs qui ont porté ce titre, ont fait de belles actions, & que files autres n'ont rien fait,c'eft qu'ils ont peu régné, ou qu'ils font décédés fort jeunes. Ilavance auffi que les François n'ont point confulté le pape Zacharie fur la dépofition de Childéric III. & fur l'élection de Pépin.

Les hiftoriens font fort partagés fur la caufe du changement de nom des papes. Fra-Paolo [o] l'attribuë aux Alemands qui ont été élevés au pontificat, dont les noms étoient rudes & mal fonants aux oreilles Italiennes. Coûtume, ajoûte-t-il, que les papes ont depuis gardée, pour marque qu'ils change oient leurs affections privées en penfées publiques & divines. Platine prétend que Sergius II. a le prémier changé de nom, parce qu'il s'appelloit Grouin de porc. Baronius [p] fe mocque de cette raifon, & attribue ce changement à Sergius III. qui fe nommant Pierre, ne voulut pas par humilité porter le nom du prince des Apôtres. Onuphre croit que Jean XII. donna cet éxemple pour ne pas porter le nom d'Otavien qu'il trouva tenir trop du Gentilisme [9] Plufieurs font d'avis que ce changement de nom eft une imitation de faint Pierre qui fe nommoit Simon, avant que nore Seigneur l'eût appellé Céphas.

Quoique la fable de la papeffe Jeanne ait été réfutée par les Proteftants mê

[o] Fra-Paolo, hift. duconcil. de Trente, liv. S.

[p] Baron.annal. t. 10. ad ann, 844. [9] Selon quelques hiftoriens Jean XII. fut porté à changer de nompar la flatterie de fes courtisans, qui lui appliquoient les paroles de Tévangélifte fur faint Jean-Baptifle. Non furrexit inter natos mulierum major Joanne Baptiftâ. Matth. c. 11. v. 11.

[r] Mémoir. d'Amelot de la Houffaïe. t. 2. p.292.

[5] C'est l'opinion de Jornandés dans fa chro

mes, & entr'autres par David Blon del, il s'eft trouvé des fçavants de répa tation qui ont voulu établir la vérité d'un fait fi infoûtenable.

L'inftitution des Electeurs eft fort contestée [r]. Quelques-uns l'attribuent à Charlemagne [f]; Blondus, Nauclerus, & Platine la rapportent à Grégoire V. Maimbourg [], & Paf quier [u]à un concile tenu fous ce même pape.Plufieurs prétendent que Grégoire V. l'empereur Othon III. & les princes d'Alemagne concoururent enfemble pour accorder ce droit auxElecteurs privativement aux autres princes. Selon Machiavel [x], Grégoire V. chaffé par le peuple de Rome, & rétabli par l'empereur Othon III. pour se venger des Romains transféra le droit qu'ils avoient d'élire l'empereur, aux archevêques de Maïence, de Tréves & de Cologne, & aux trois princes féculiers, le comte Palatin, le duc de Saxe, & le marquis de Brande bourg.

Les feuls Alemands[y] avoient droit d'élire l'empereur. Albert abbé de Sta den auteur contemporain de l'empe. reur Frédéric II. dit en termes formels que Grégoire IX. qui avoit excommunié Frédéric II. en 1239. aiant écrit aux princes Alemands pour qu'ils procédaffent à l'élection d'un autre empereur, ils lui firent réponse que ce n'étoit point au pape à décider de l'élection de l'em& que le droit de l'élire n'apnique.& ce fentiment femble appuié fur l'au torité d'Innocent III. dans le chapitre Venerabilem: mais il ne peut fe concilier avec les témoignages de l'histoire.

pereur,

[r] Maimb. de la décad. de l'empire, p.1076 [u] Pafq. recherch. liv. 3. c. 4. [x] Machiav. iftor. Fior. lib. 1.

[y] Ainfi qu'il paroit par le chapitre Venerabilem de electione, tiré de l'épitre d'Innocent III. à Berthold, duc de Zéringhen, après l'élection de l'empereur Othon IV. en

1208.

partenoit qu'à eux feuls. Albert abbé de Staden ajoûte enfuite qu'en vertu d'un décret que ces princes avoient fait auparavant d'un commun confentement, ceux qui élifent l'empereur font les archevêques de Maïence, de Tréves & de Cologne, le comte Palatin, le duc de Saxe, le marquis de Brandebourg, & le roi de Bohéme. Longtemps auparavant il étoit [z] d'ufage de préfenter celui qui avoit les fuffrages de la diéte, aux fept grands officiers de l'empire. Suivant Aventin dans fes an nales, & Onuphre dans le traité des diétes impériales, le droit d'élire l'empereur a été reftreint aux feptElecteurs par Grégoire X. Dans une fi grande diverfité d'opinions, ce qui paroît de plus affuré, c'est que l'inftitution des Electeurs [a] ne peut remonter plus haut qu'au treizième fiécle après Frédéric II. Jufques-là touts les auteurs contemporains témoignent que c'étoient encore les princes, les prélats, & les feigneurs Alemands qui élifoient l'empereur. Lampadius jurifconfulte Alemand commence l'inftitution du collége Electoral au temps de l'empereur Frédéric II. & Othon de Frifingue dit que Frédéric I. furnommé Barberouffe, fut élû par touts les princes de l'empire. Tritheme dans fa chronique rapporte le commencement des fuffrages des Ele&curs à l'élection de Guil laume comte de Hollande en 1247. Suivant Frédéric Bockelman le feptemvirat électoral n'a commencé qu'à l'election du comte Adolphe de Naffau;

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par les trois archevêques, & les trois princes féculiers déja nommés, & par une procuration du roi de Bohéme. Louis de Baviére fut élû par les archevêques de Tréves & de Maïence, par le roi de Bohéme, & par une procuration du marquis de Brandebourg. L'archevêque de Cologne, le comte Palatin, & le duc de Saxe élurent de leur côté Frédéric d'Autriche. Cette divifion des Electeurs conftate d'une maniére très-affûrée qu'ils étoient alors au nombre de fept. L'ordre électoral n'a eu une forme ftable & permanente, que par la bulle d'or de l'empereur Charles IV. de Luxembourg.

Guillaume du Bellai de Langei, & du Haillan ont écrit que la pucelle d'Orléans n'a point été brûlée. Le pére Vignier ajoûte qu'elle a épousé Gilles d'Armoife, depuis qu'elle eut été prife par les Anglois, & qu'elle a laiffé des enfants. L'auteur du poëme latin de la pucelle dit [b] que fa mémoire fut réhabilitée par arrêt, après qu'elle eut fouffert le fupplice du feu, auquel les Anglois l'avoient condamnée. Suivant Boulainvilliers, dans fon abregé chronologique, quoique l'exécution de la pucelle eût été faite à la vûë de plus de dix mille perfonnes, il parut peu à prés en lorraine une fille guerriére & adroite aux armes, qui fe dit être la pucelle, & qui fe maria à Mets, où fa poltérité subLifte encore.

Les hiftoriens contemporains [c] ne font point d'accord fur l'affaffinat du duc de Bourgogne à Montereau-Faut

Yonne

Darcida, concordi conclamant ore, modumque

Angligenas violaffe fori, jurifque

tenorem.

Valerandus Varanius, de virgine Aurelianenfi.

[c] Chalon, hift. de France.

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