Page images
PDF
EPUB
[ocr errors]

Difference

blecommun & du philofophique.

méde univerfel à touts les maux.

bout de la langue deffus, toutes les maladies font guéries. Artephius fe vante de pouvoir tranfmettre les efprits vitaux d'un corps dans un autre, & d'y faire paffer par ce moien, la force, la fanté & la jeuneffe.

diffous

L'or potable commun, difent les de l'or pota alchimiftes, n'eft qu'un or mort, qui a perdu fes efprits: un or groffiérement par divers menftruës, & par des efprits corrofifs mais l'or pota-' ble des philofophes eft un or vif en forme de poudre blanche, ou rouge trés fubtile, tirée de la femence la plus pure de l'or & de l'argent, qui a la vertu de pénétrer en un moment l'argent vif, & les autres métaux imparfaits, & de les purifier fi bien de leur craffe & impureté, & fuivant le langage chimique, de leur lépre, ou tache originelle, qu 'elle en fait auffitôt de l'or & de l'argent très pur.

Philalette dans le feptiéme chapitre de l'entrée ouverte, décrit la compofition de l'enfant hermaphrodite, qui eft feul capable de nettoier le vif argent de fa lépre, & de l'imprégner du foulfre fpirituel & féminal, principe actif de la pierre philofophale.

Cette quinteffence eft, pour ainfi dire, un cinquième élément compofé des quatre autres. Par les effences féminales graduées & exaltées au plus haut degré de perfection, les adeptes poffédent les merveilleux arcanes, qui renferment la vie, la fanté, les richeffes. La quintessence que Paracelfe appelle auffi teinture, ou pierre des philofophes, fleur, foleil,cicl,efprit éthérée, eft, felon le même auteur [a], un feu invifible qui dévore & confume toutes les maladies. Raymond Lul. le cherchoit auffi dans la chimie un re

[a] Paracelf.de tincturâ phyficorum. [b] M, de Mairan, dissertat, fur la glace,

20. Vertus de

Les chimistes fe vantent que leur ef la femence fence aurifique fortifie la chaleur natu- aurifique. relle, fans l'enflammer, ni la diffiper, comme les effences végétales, par exemple, l'efprit de vin, qui dans le temps qu'il réchauffe, brule en même temps, & confume les efprits. Elle répare l'humide radical, qui eft le principe de la vie, & elle contient un foulfre qui fait vivre l'animal. Elle rétablit tout ce qui peut être dérangé dans le microcofme, ou le petit monde, qui eft l'homme, & entretient l'harmonie, dans laquelle confifte la fanté.

C'est dans cette confiance, que les alchimistes ont porté leurs projets, jufqu'à une espéce d'immortalité, ou du moins à renouveller la durée de la vie des patriarches.

Le propre des effences féminales, étant de changer en leur nature les fujets qu'elles pénétrent, l'effence féminale de l'or, qui eft d'une pureté célefte & aftrale, ce ferment merveil leux, dans lequel fe trouve le mélange parfait des quatre éléments, changera en éléments très purs, les ferments naturels, & détruira tout ce qui eft défectueux dans le fang & dans les efprits: d'où il résulte que la femence aurifique peut être un rémede univerfel, en fortifiant touts les principes de la vie. Je me fouviens à ce propos du danger que courut autrefois Midas de mourir de faim, parce qu'il convertiffoit tout ce qu'il touchoit en or; n'y auroit-il pas un plus grand danger d'être tranfmué foi même en or par les effences aurifiques.

ai.

De la Pa

Il y a eu des chimiftes qui ont cru qu'en échauffant un peu les cendres lingénéfic d'une plante, ou d'un animal [b] feliii 3

part. 2. c. 2.

[ocr errors][merged small]

lon certaines régles, & avec certaines précautions, ces cendres devoient s'enfler, & s'élever en une fumée toutà-fait femblable à la figure, & même à la couleur de la plante, ou de l'animal. C'eft à cette espéce de réfurrection, ou de nouvelle naiffance, qu'on donna d'abord le nom de Palingénéfie. Enfuite on fe perfuada qu'en faisant geler une leffive des cendres d'une plante, on verroit la figure de cette plante, fon image ou, comme parlent ces auteurs, fon idée fidélement tracée fur la fuperficie de la glace; autre pa Jingénéfie, qui n'a pas moins fait de bruit que la prémiére. La plupart des auteurs qui difent avoir fait l'expérien'ce de la palingénéfie, n'ont pu la rencontrer qu'une fois après bien des ten. tatives inutiles, & enfuite ni la même leffive, ni une leffive nouvellement préparée n'ont pû leur redonner le même phénoméne. Auffi femble-t-il, qu'ils ont plûtôt regardé ce qu'ils en avoient vû, comme un effet du ha fard, que comme une fuite néceffaire de la prétendue inclination à fe rejoindre attribuée aux parties organiques des corps après leurs défunion. Boyle va plus loin [c]; il craint que l'imagination de ceux qui difent avoir vû de pareilles figures fur la glace, en conféquence de la palingénéfie,n'ait difpo fé leur yeux en faveur du phénoméne. Roger bacon [d] ofe dire, que quoique la nature foit puiffante & admirable

[] Et fanè magnoperè vereor, ne qui fe ejufmodi plantarum fimulachra in glacie vidiffe profitentur, imaginationem non minus quàm oculos ad hoc fpectaculum adhibuerint. Boyle, tentam. phyf. de experi mentis qua non fucceduns.

[d] Rog, Bac, de mirabilib. poteftatib, artis & natura.

[e] On peut appliquer ici ces paroles de Pli

milies.

dans fes effets, l'art qui fçait la met- des Chi tre en œuvre, eft encore plus puiffant & plus admirable qu'elle.

La témérité des alchimiftes a été jufqu'à publier & foutenir, que par l'alchimie, on pouvoit former un homme. Amatus Lufitanus [e] a affuré qu'il avoit vû un petit homme long d'un poulce, enfermé dans un verre que Julius Camillus, comme un autre Prométhée, avoit fait par la fcien ce alchimique.

Cette doctrine infenfée eft conforme aux dogmes de Paracelfe [f], qui enfeigne la façon de produire ces petits hommes ; & après plufieurs impiétés & inepties, il foutient que les Pygmées, les Faunes, les Satyres, & les Nymphes ont été engendrés par la chimie.

21.

Len: ob

Les chimiftes fe font renfermés, pour ainfi dire, dans des labyrinthes feurité af obfcurs, & ils ont enveloppé leurs fectèr. préceptes d'expreffions très difficiles à entendre. Les adeptes les plus verfés dans leurs myftéres ne les entendent pas, & il eft fort vraisemblable qu'ils ne s'entendent pas eux-mêmes. C'eft détruire entiérement ce qu'on cache avec tant de foin, fuivant la penfée de Tertullien [g], que de le mettre au grand jour.

George Syncelle [h] dit que Pamménés fut blamé d'avoir écrit de cette fcience d'une manière trop intelligible, fans parabole, & fans déguifément.

ne: Nullum reperiri tàm impudens mendacium, ut tefte careat. Plin. lib. 8. c. 22.

[f] Paracelf. de natura rerum, Lareligion du médecin, §. 36.

[g] Quod tanto impendio abfconditur, etiam folum modo demonftrare, deftruere eft. Tertull.

[b] Syncell. p. 248.

tion

24.

Paracelfe [] félicite les adeptes, de ce que Dieu en leur communiquant fes grands fecrets [k] leur donne en même temps la prudence de les tenir cachés, comme ils le feront jufqu'à la

venuë d'Elie l'artiste.

Outre les termes barbares [] forgés par Paracelfe, les vaines expreffions, & énigmes de ce métier font, le lion verd, le cerffugitif, l'aigle volant, le cra paudenflé, la tête de corbeau, le cachet de Mercure. Le ferpent crucifié eft le foulfre de l'or exalté en vertu; les deux bêtes de Nicolas Flammel, dont l'une a deux ailes, & l'autre eft fans ailes, font le fixe & le volatile. Un langage fi obfcur, qui devroit n'infpirer que de la défiance & du mépris pour leur art, le fait paroître fort recommandable [m], dans l'opinion de ceux qui n'admirent & ne recherchent que ce qu'ils ne comprennent point..

Ce qui eft le plus infupportable Prophana-dans ce langage des chimiftes, c'eft myiteres par la Profanation qu'ils font des myftéres de la religion, pour fervir de voile à leurs prétendus fecrets jufques-là

les Chimil

tes.

[il Paracelf. de tinctura phyficor. c. 4. [k] Qu'il nomme magnalia Dei. [1]Les termes les plus ordinairas à Paracelfe, font: Ens pagoycum, cagaftricum, cherionium, lefas, jefadach, trarames, ftannar, perenda relloleum & c. Le lecteur ne marche qu'en tatonnant parmi de tels Méandres, ne peut difcerner le plus fouvent, fi cet auteur parle d'une pierre ou d'un pain, d'un ferpent ou d'un poiffon, du diable ou de la nature. Naudé apol. ch. 14. Le difiionaire de Rulandus fait uniquement pour les termes de Paracelfe, ne peut même les rendre intelligibles. Bécher dans fon livre intitué. OEdipus Chimicus; a taché d'expliquer les termes les pluscbfcurs & les énigmes dont fe fervent les Alchimistes.

[m] Cupidine humani ingenii libentius obfcura creduntur. Plin.

Omnia enim ftolidi magis admiran

même, que plufieurs ont appliqué ce que la fainte écriture dit des vrais Chré, tiens, qu'ils font la race choifie, le facerdoce roïal, la nation fainte que Die s'eft acquife & qu'il a appellée des ténébres à fon admirate lumiére à la chimérique confrérie des Rosecroix, qui font, felon eux, des fages parvenus à l'immortalité, aïant trouvé le moien par la pierre philofophale de fixer leurs ames dans leurs corps, d'autant plus, difent-ils, qu'il n'y a point de corps plus fixe & plus incorruptible que l'or.

Les chimiftes [4]emploient plufieurs expreffions du cantique des cantiques entendant l'or par l'époux, & l'argent par l'époufe.

Ils puifent leurs allégories, dans la genéfe, dans l'apocalypfe, dans l'Odyffée, dans les métamorphofes, mêlant d'une maniére indigne le facré & le fabuleux. Etant même si infenfés [o], qu'ils attribuent à la chimie les miracles atteftés par la fainte écriture.

Suidas [p], Euftathe [q] & plufieurs

tur, amantque.

Inverfis quæ fub verbis latitantia cernunt. Lucres, l. 1.

[n] Sennert, de inventorib. & cultorib. Chimia.c 3.

[o] Volumina Mofis fcripta Salomonis, Joannis apocalypfin habuerunt pro defcriptione artis aurifabræ. Omitto nefandas de facrofancta Triade, de aliis reconditiffimæ religionis myfteriis & abominandas interpretationes... infaniâ denique eo ufque ruente, ut ipfam tandem re. rum geftarum hiftoriam, ipfa miracula, quibus doctrinæ conciliant fidem auctores facri, quis credat, in Alchemiæ placita converterint? Hermann. Boërhaave, de chemid errores fuos expurgante.

[p] Suid. in voce dipx6.

[q] Euftath, in Dionyf.geogr, v. 689.

25. La toifon

[blocks in formation]

Strabon [s] & Pline [] interprétant avec plus de vraisemblance cette fable des poëtes, par les riches mines de la cholchide, qui y attirent les Argonautes, qu'on doit regarder com me les plus anciens commerçants, qui aient entrepris une navigation éloignée. On trouve dans Tollius plufieurs femblables allégories des chimiftes: & Mayerus rapporte auffi les pommes d'or des Hefpérides au fymbole de l'art, qui a le pouvoir de transformer les métaux. Mais cet auteur ne se bornant pas àfaire des applications de la fable, avance que S. Dominique avoit eu le fecret de la pierre philofophale, qu'il l'avoit tranfmife à Albert le nique, AL grand, que par ce moïen Albert acbert le grandquitta en trois mois les groffes dettes mas, mis au de fon évêché de Ratisbonne, & qu'il nombre des enfeigna cette fcience à S. Thomas fon 'difciple.

26.

S. Domi

& S. Tho

Chimiftes.

[blocks in formation]

triarches,

la connoiffance parfaite de la nature mie ap qu'avoient les patriarches; & que les & à Saloricheffes immenfes de Salomon dont mon. parle la fainte écriture, venoient du fecret de faire de l'or, & de l'extraire de touts les corps terreftres,

Quelques auteurs ont rapporté l'origine de la chimie à Cham, fils de Noé [x]: mais d'autres ne trouvant pas ce commencement affez ancien, remontent à Tubalcaïn, qui vivoit avant le déluge, & à Adam lui même:

Les chimiftes difent que le fecret de la pierre philofophale a été poffedé par Job qui multiplia fes richesses au feptuple; par Abraham qui fit la guerre à quatre rois; par Joseph qui devint fi puissant tout d'un coup; par Moyfe qui convertit le veau d'or en cendres; par Gédéon qui a reprefenté cet arcane par fa toifon, quoiqu'elle ne fût pas d'or, comme celle des Argonautes; par Salomon, qui ne faifoit pas plus de cas de l'or que des pierres; par S. Jean Baptifte [y], qui en eft loué dans fon hymne.

gie de Chi

Les uns croient que le nom de chi- 28, mie eft Egyptien d'origine, & dérivé Etymolo de Chamie, ancien nom de l'Egypte: mic. d'autres, comme Golius, dans fon dictionaire Arabe, en tirent l'étymologie, d'un mot arabe, qui fignifie cacher, cet art devant être mystérieux: les autres la rapportent [z] au Grec.

[r] Τῖτο δὲ ἐκ ὡς ποιητικῶς φέ εται, ἀλλὰ βιβλίον ἦν ἐν δὲμασι γεγραμμένον, περιεχον ὅπως δεν γίνεσθαι δια χημείας χρυσόν. Suid. loc. citat.

[s] Strab. lib. 1.

[] Plin. lib. 33. c. 3.

(u) Athan, Kircher. Oedip. Egyptiac. t. 2. part. 2. claffi. 10. c. I. p. 391.

6) Inexhauftum fert thefaurum. Qui de virgis fecit aurum, Gemmas de lapidibus. Xnuía, comme l'écrit Photius, ou xnusia comme il fe lit dans Suidas, vient de Xew, fundo. Ceux qui écrivent chymie, rapportent l'étymologie de Xujuela à Xupos, fuccus Paracelfe appelle les Chimistes Spargiriques, nom compofe des deux verbes grecs, a educo,

(x) Joann. Albert.Fabricii Codex pfeudepigraphus veteris teftamenti, in Adamo && dyspa, congrego.

Chamo.

Aureurs

Chimic.

29. Les chimiftes niettent leurs livres [a] fuppotés des fous les noms d'Adam, de Moyfe, de livres de Marie foeur de Moyfe, de Salomon, de Mercure Trismegifte, de Démocrite, d'Ariftote, de Synefius, d'Albert le grand, de S. Thomas : ce que le pére Delrio traite avec raifon d'impoftures groffiéres, & de réveries méprifables. Un livre de la pratique de la pierre philofophale, & un autre intitulé les fecrets des fecrets, qui paroît dédié à Aléxandre le grand, où il eft traité de l'alchimie parmi plufieurs autres fujets, ont été fauffement attribués à [6] Ariftote.

30.

De l'an

Huet [c] croit que la chimie a été cienneté de trés ancienne en Egypte, mais qu'elle la Chimie a paffé fort tard en Grèce.

Le P. Delrio [d], & Naudé [e] obfervent que le plus ancien auteur qui ait écrit en grec de cette fcience, eft un cer tain Zofime, qui vivoit fous l'empire de Dioclétien, & qui eft furnommé Panopolitain, parce qu'il étoit de Panopolis ville d'Egypte. On prétend qu'Arifto te avoit connoiffance de la chimie, parce qu'on lit [f] dans un des problémes qui portent fon nom, qu'on peut tirer de l'huile du fel, ce qui ne peut fe faire que par le moïen des diftillations & des fourneaux: mais Patricius [g] & quel ques autres auteurs ont prouvé que ces problémes ne font point d'Ariftote:

Tom. I.

Henri Etienne a remarqué [b] que les livres de Théophrafte des fueurs & de la laffitude, y font tranfcrits en entier.

Cet ouvrage étant manifeftement fuppofé, il demeure conftant qu'Arif tote n'a pas connu la chiafie, non plus qu'Hippocrate, Platon, Pline, Galien. Les plus anciens témoignages de la chimie fe trouvent dans le trois auteurs fuivant. Les extraits de Conftantin rapportent comme un trait d'hiftoire écrit par Jean d'Antioche, que l'empereur Dioclétien voulant réprimer l'efprit féditieux des Egyptiens, fit bruler touts les livres de chimie, qui fe trouvérent parmi eux, pour les priver d'un art, qui pouvoit les rendre trop riches, & redoutables aux Romains. Suidas [] raconte le même fait, & Julius Firmicus, qui vivoit fous le regne de Conftantin, dit que la lune placée avec Saturne dans la neuvième maison, donne un tempérament propre à la fcience de l'alchimic.

Prépara

Grecs, ap

La feule préparation approchante de 31. celles qui fe font en diftillant [k] qui tion ufitée fut connue anciennement des Grecs, par les c'étoit une efpéce d'huile de poix. Pour prochante tirer cette huile, ils fufpendoient de la de l'a lainlaine, au deflus d'un vaiffeau, où ils faifoient bouillir de la poix. Quand la toifon ou les laines fufpendues etoient fuffisamment chargées, & imbibées de

Kkkk

bic.

[a] Rodolph. Agricola in prafat. duodecim libror. de re metallica.

Chryfopoiæ originem quidam nobis. valdé faciunt antiquam, qui præclaro Adami titulo libellum quemdam infignem obtrudunt, ut & alii Mofis, & Mariæ fororis ejus & Salomonis, & Hermetis Trismegifti, & Ariftotelis, & Pythagoreorum quorumdam libros venditant:hæc enim omnia pro impofturis habenda duxerim, & otioforum fomniis. Mars Delrius difquifit, magicar, lib. 1. 5.§. 1.

[b] Biblioth. Gefneri, in voce Ariftote.. les.

[c] Hueriana, §. 129.

[d] Delrius, disquisit, magicar, lib, 1. c. 5. §1.

[e] Naudé. apol.ch. 12.
[f] Ariftot, problem. §. 23.

[g] Patrit, difcuff. Peripatet, t. 1. lib. 4.
[b] Naudé, apol. ch. 12.
[i] Suid, in voce Xnusia.

[k] Le Clerc, hift. de la médecine, part. 3. liv. 2, ch. 2.

« PreviousContinue »