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de Chiros.

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Tacite [q] parle ainfi de l'oracle d'ADe l'oracle pollon Clarien: Germanicus alla confulter l'oracle de Claros, Ce n'eft point une femme, qui y rend les oracles comà Delphes, mais un homme qu'on choifit dans certaines familles,& quieft prefque toujours de Milet. Il fuffit de lui dire le nombre, & les noms de ceux qui viennent le confulter: enfuite il fe retire dans une grotte, & aïant pris de l'eau d'une fource qui y eft cachée,il vous répond en versà ce que vous avez dans l'efprit, quoique cet homme le plus fouvent foit très ignorant.

7.

De l'oracle

phée,

Dion Caflius [r] explique la maniére, de Nym dont l'oracle de Nymphée en Epire rendoit fes réponses. Celui qui le confultoit prenoit de l'encens, & après avoir fait fes priéres,il jettoit cet encens dans le feu. Si l'on devoit obtenir ce que l'on fouhai toit, l'encens étoit d'abord embrafé, & même en cas qu'il ne fût pas tombé dans le feu,la flamme le pourfuivoit & le confumoit. Mais fi la chofe ne devoit pas réüffir, l'encens n'approchoit pas du feu, ou quand il tomboit dans la flamme, il s'en retiroit & la fuïoit. Cela arrivoit ainfi pour prognoftiquer l'avenir, à l'égard de tout ce qu'on pouvoit demander, à l'exception de la mort & du mariage, fur lefquels il n'étoit pas permis de faire des queftions.

Ceux qui confultoient l'oracle d'Am.

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2. De l'er

phiarais [s], couchoient fur les peaux des victimes, & recevoient les réponses d'Amp de l'oracle en fonge. Virgile[] attefte la ris,& plufieu même chofe de l'oracle de Faunus en utres Italie.

Il y avoit encore d'autres oracles fort anciens, comme celui de Mars, dont il eft fait mention dans [u] Denys d'Halycarnaffe, celui de Podalirius, dont Lycophron parle dans le poëme de Caffandre, & plufieurs autres.

L'oracle de Sérapis rendoit fes réponfes en fonge, comme ceux de Faunus, & d'Amphiaraüs. Pendant la derniére maladie d'Alexandre à Babylone [x], les principaux chefs de fon armée allérent paffer une nuit dans le temple de Sérapis, pour confulter la divinité s'il feroit plus avantageux de tranfporter Ale-. xandre dans le temple. Il leur fut répon-, du en fonge, qu'il valoit micux ne le point tranfporter; & peu de temps après ce conquérant expira. Les magiftrats de Sparte couchoient dans le temple de Pafiphaé,pour être inftruits en fonge de ce qui concernoit le bien public.

Eunapius a écrit que le philofophe Oedefius reçut en fonge un oracle d'une maniére bien finguliere [y]. Ille trou." va à fon reveil écrit dans fa main gau che, en vers héxamétres. Cet oracle lui promettoit une grande renommée, foit qu'il demeurât dans les villes foit qu'il fe retirât à la campagne.

Un gouverneur de Cilicie [z] qui avoit peu de foi aux oracles, & qui

petivit.

étoit

Multa modis fimulachra videt volitantia miris,

Et varias audit voces, fruiturque deo

rum

Colloquiis. Virgil. Eneid. lib.7. [u] Denys d'Halycarn antiq.liv.. [x] Arrian. de expedit. Alex. lib.7. [y] Eunapius de vitis philofophor.in Oedefio. [z] Plutarq.de la cessation des oracl.

cles.

9.

Des oracles

étoit toujours environné d'Epicuriens incrédules, envoïa un billet cacheté à l'oracle de Mopfus, demandant une de ces réponfes que l'on recevoit en fonge. Lemeffager chargé du billet le lui rapporta cacheté,dans le même état,n'aïant point été ouvert; & lui dit qu'il avoit vû en fonge un homme fort bien fait, qui lui avoit dit, Noic, fans rien ajoûter autre chofe. Alors le gouverneur ouvrit le billet, & fit voir qu'il demandoit à la divinité, s'il facrifieroit un taureau blanc ou noir.

Dans le temple de la déeffe de Syrie, lorfque la ftatuë d'Appollon [a] veut rendre des oracles, elle fe remue fur fon piè d'eftal; alors les prêtres la met. tent fur leurs épaules; fans cela elle fueroit, & s'agiteroit d'elle-même. Elle les pouffe & les tourne de touts côtés, & le grand prêtre l'interrogeant fur toute forte d'affaires, fi elle refufe fon confentement, elle fait reculer les prêtres, fi elle confent, elle les fait avancer.

On lit [b] dans la fainte écriture, que le roi Ochofias envoia confulter Beelzebuth, pour fçavoir s'il guériroit de fa maladie.

Les ftatues des dieux dans le Pédu Térou,& rou [c], qui étoient de plufieurs figu laini les res étranges, & dont il y en avoit d'effroïables, fervoient à rendre les oracles dans leurs pagodes, comme les oracles de la Grèce.

Cannibales.

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Le faux Orphée [e], ou Onomacrite dit que la pierre appellée Siderités (après cles porta. que celui qui l'interroge s'eft préparé tifs. par l'abftinence & le bain) répond aux queftions qu'on lui fait fur l'avenir. Les pierres nommées Botiles étoient [f] comme de petits oracles portatifs.

Les Platoniciens avoient une grande vénération pour les oracles, qu'ils attribuoient aux démons. Les Epicuriens, les Gyniques, les Péripateticiens en fai. foient fort peu de cas.

II.

Plufieurs

oracles.

Plufieurs réponses des anciens oracles font venues jufqu'à nous. Laïus, réponfes roi de Thebe en Bootie, & plus des anciens ancien que le fiége de Troïe, reçut de l'oracle cette réponfe: Prends garde d'avoir un fils, car il te maf facrera, & il remplira ton palais de fang. De-là s'enfuivirent l'expofition & les malheurs d'Oedipe, puni rigoureufement par les dieux, des crimes [g]aux quels il n'avoit jamais donné fon confentement.

La prêtreffe de Delphes appella Lycurgue [b]ami des dieux, & dicu plutôt qu'homme, Long-temps après elle donna à Socrate le titre du plus fage de touts les hommes.

Daphidas le Grammairien [i] fut puni d'avoir voulu fe mocquer de la Pythie, en lui demandant s'il retrou veroit bientôt fon cheval qu'il n'avoit pas perdu. Apollon lui fit répondre qu'il le retrouveroit bientôt. Peu de temps après, Attalus fit mourir Daphidas, dans un lieu appellé le

cheval.

L'oracle confulté par les Athéniens Bbb

[f] Differtat.de M Falconet, dans les mémoir, de l'acad.des bell. lettr. 1.6.

[g] Sophocle. Senéque le tragique, Cor

neille. M de Voltaire.

[h] Hérodor. Clio.

[i] Val, Max, lib. 1, c, 2.

[k] aiant répondu, que l'armée dont le chef périroit feroit victorieufe. Codrus roi d'Athènes fe déguifa en païfan, & fe fit tuer par les ennemis.

Les Melléniens, étant en guerre [1] contre les Lacédémoniens, l'oracle répondit aux prémiers, que pour obtenir la victoire, ils immolaffent une fille du fang le plus noble. Auffitôt on tira au fort les noms de toutes les filles du fang roïal. Le fort tomba fur la fille de Ly cifcus. Le devin Epébole la rejetta. Ariftodéme offrit la fienne. Son fiancé foutint qu'elle n'étoit plus vierge. Le pére en fureur la tua fur le champ, & & lui ouvrit le fein, pour juftifier qu'elle étoit vierge. Epébole prétendit que c'étoit un meurtre, & non un facrifice. Mais Euphaës roi des Mefféniens, & touts les Epitides furent d'avis que l'oracle étoit accompli, & les dieux fatisfaits. Les Lacédémoniens en furent fi conflernés, que leurs rois demeurérent campés pendant fept ans, fans ofer préfenter la bataile. Ce fut alors qu'ils envoïerent à leurs femmes de jeunes foldats, pour avoir des enfants, & renouveller la jeunesse de Lacédémone, & de là font venus les Parthéniens, qui ont fondé Tarente. Enfin la fanglante journée d'Ithome arriva, les Lacédémoniens furent battus, leur Roi Théopompe fait prifonnier fut immolé à Jupiter, avec trois cents Lacédémoniens.

L'oracle [m] confulté par les fils de Tarquin le fuperbe, accompagnés de Brutus, répondit que celui qui embrafferoit le premier fa mére auroit à Rome une autorité fouveraine. Brutus,qui jufques-là avoit contrefait le ftupide

pour le garantir des embuches de la tyrannie, pénétra le fens de l'oracle & il l'accomplit, en fe laiffant tomber, pour baifer la terre la mére commune de touts les hommes.

Un ancien oracle portoit [n], que le noeud Gordien ne pourroit être dénoué,que par le vainqueur de l'Afie. Ce nœud fut préfenté à Aléxandre, en prefence d'un grand nombre de Phrygiens, & de Macédoniens. Les uns craignoient qu'il ne le dénouât, les autres qu'il ne hazardât fa réputation, Alexandre n'en pouvant découvrir le commencement ni la fin, Qu'importe, dit il, comment on le dénoue, & le trancha d'un coup d'épée.

Après la mort d'Alexandre, on publia un oracle, par lequel il étoit prédit, que le lieu de la fépulture feroit le plus heureux de l'univers, & que l'empire y feroit attaché. Touts les chefs fe difputoient, à qui auroit les précieux reftes de ce conquérant; Perdiccas vouloit qu'on les tranfportât en Macédoine. Prolémée l'emporta [], & après deux ans de préparatifs, le corps d'Alexandre fut tranfporté en grande pompe de Babylone en Egypte, déposé prémiérement à Memphis, & mis dans un monument à Aléxandrie. Le cercueil d'or où il étoit enfermé aiant été enlevé par Seleucus Cybiofactés [p], fes os furent mis dans une chaffe de verre. Octavien Céfar, qui fut depuis furnommé Augufte [9], vifica ce tombeau avec de grands témoignagnes de refpect, avant que de quit. ter Alexandrie.

[k] Juftin.lib. 2.

[1] Paufan. in Meffaniac. [m] Tit. Liv. lib. 1. [n] 2. Curt. lib. 3.

[o] Prideaux, hift. des Juifs, t. 2. part. 1. li 8. p. 488.

[p] Strab. lib. 17.

[q] Suer, in Octav, c. 18, Dio Caff, lib. 51.

12.

cret du

Mance

Suétone [r] à écrit que quelques at au fu- mois avant la naiffance d'Augufte, il de la fe répandit un oracle portant que la Augafte. nature travailloit à la production d'un roi, qui feroit le maître de l'empire Romain; que le fénat effraïé avoit défendu d'élever aucun des enfants mâles qui naîtroient cet annéelà, mais que les fénateurs dont les femmes étoient groffes, eurent le crédit d'empêcher que l'arrêt ne fût infcrit dans les regiftres publics. I femble que la prédiction, dont Augufte n'étoit que le type, regardât la naiffance de Jefus-Chrift roi fpirituel de tout le monde, ou que le malin efprit voulût en fuggérant ce decret rigoureux au fenat, difpofer Hérode par cet exemple à tendre au Meffie les embuches dans lesquelles [] ce tyran fit périr touts les enfants, qui n'avoient que deux ans, & au dessous. L'univers étoit alors rempli de l'at13. tente prochaine du Meffie. On voit toit alors par la quatrième éclogue de Virgiempli de le, que ce poëte applique au fils du Mellie. conful Afinius Pollion les prophéties

L'univers

'attente du

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qui de la bouche des Juifs avoient alors paffé dans celle des nations étrangères. Cet enfant, l'objet de la flatterie de Virgile, mourut [t] neuf jours après la naiffance. Tacite [], Suétone [x], & Jofeph [y] l'hiftorien appliquerent à Vefpafien les prophéties qui regardoient

le Meffic.

[r] Suet. in Olav.c. 94.

[s] Matth.c.2.Macrobe auteur Payen.rap. porte ce fait d'une maniére conforme à lévangile. Macrob. Saturnal.l.2.c.4.

[1] Serv.comment.in Eclog.4.Virgil.

[u] Pluribus perfuafio inerat antiquis facerdotum litteris contineri, eo ipfo tempore fore ut valefceret Oriens, profectique è Judæâ rerum potirentur, quæ ambages Vefpafianum ac Titum prædixerant. Tac. bift. lib. 5.

1x1 Suet. in Vefpaf. 6.4.

Equivo

Cræfus aïant reçu de la Pythie cet- 14. te réponse [x], qu'en traverfant le ques des fleuve Halys il détruiroit un grand oracles. empire, il entendit l'empire de fon ennemi, au lieu qu'il détruifit fon propre empire. L'oracle confulté par Pyrrhus rendit une réponse [a], qui pouvoit également s'entendre de la victoire de Pyrrhus, & de la victoire des Romains fes ennemis. L'équivoque dépendant de la conftruction de la langue latine, ne peut être exprimé en notre langue, qui a bien plus de netteté.

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des oracles.

Les oracles étoient toujours fi obfcurs, qu'on n'en comprenoit la fignification qu'après l'événement. Et Obleurité il y a bien de l'apparence que la plûpart de ces anciens oracles, ont été ininventés, ou rajuftés après coup. La Pythie avertit Crœfus [b]de fe garder du mulet. Le roi de Lydie ne comprit rien à cet oracle, qui défignoit Cyrus iffu de deux nations différentes des Médes par Mandane fa mére, fille d'Aftyage; & des Perfes par fon pére Cambyfe, dont la race avoit beaucoup moins de grandeur & d'élévation.

Le poëte Eschyle à qui il avoit été prédit [c] par un oracle, qu'à un jour marqué il auroit la tête caffée par la chûte de quelque corps folide & pefant qui tomberoit d'en haut, croïoit fe mettre en fûreté, étant au grand air Bbb 2

[y] Jofeph dans fa vie écrite par lui-même. [2] Κροῖσος Αλυν διαβὰς μεγάλην αρχήν και ταλύσει.

[a] Aïote, acida, Romanos, vincere poffe. S. Hieronym. in Isale, c. 4.2. [b] Hérodot, Clio.

[c] Ingenium eft ei (aquila) teftudines raptas frangere é fublimi jaciendo: quæ fors interemit poëtam Æfchylum prædictam fatis, ut ferunt, ejus diei ruinam fecurâ cœli fide caventem Plin.lib.1.c.3. Suid. in voce Χελώνη.

en pleine campagne, où il n'avoit que le ciel au deffus de fa tête; mais un aigle qui tenoit une tortue dans fes ferres, prit la tête chauve d'Efchyle pour une pierre, & jetta de toute fa force la tortue contre la tête pour l'y brifer, & la manger enfuite. Le poëte eut la tête caffée, & l'oracle fut accompli.

L'oracle avoit annoncé à Denys l'ancien, tyran de Syracufe [d], qu'il mourroit lorfqu'il feroit vainqueur de ceux qui valoient mieux que lui. Il interprétoit cette prédiction de quelque victoire fur les Carthaginois, qu'il croïoit meilleurs foldats que les Siciliéns; & dans cette penfée il donnoit touts fes foins à entretenir la paix: mais à peine cut-il reçu la nouvelle qu'une tragédie qu'il avoit compofée avoit remporté le prix, qu'il mourut, lorsqu'il venoit de vain cre de meilleurs poëtes que lui.

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Philippe fut averti [e] par l'oracle de Delphes de prendre garde au chariot. Non feulement il s'éloignoit avec une grande attention de toute forte de chariots, & avoit entiérement renoncé à leur ufage mais il évitoit même un lieu de la Bootie qui étoit nommé le chariot. L'oracle fut accompli malgrè fes précautions; il fut affaffiné par Paufanias, & percé d'une épée, fur la garde de laquelle étoit gravé un chariot. Pyr rhus aïant pris Argos [f] d'affaut, apperçut dans la place publique un loup & un taureau de bronze, qui paroiffoient prêts à fe battre. Cette vûë rappella dans fon efprit un ancien oracle, qui lui avoit prédit que fa deftinée étoit de mourir, lorqu'il verroit un loup combattre con

tre un taureau. Quelques heures après, il fut bleffé à mort d'un coup de thuile qui lui fut jettée par une femme.

Seleucus qui étoit resté le dernier des capitaines d'Alexandre, aïant paflé en Macédoine pour s'en emparer, après la défaite & la mort de Lyfimachus, il rencontra un autel dont on lui dit que le nom étoit Argos. Il fe fouvint [g]alors d'un oracle qui l'avoit averti d'éviter Argos, & dont il avoit fait l'application à la ville d'Argos. Pendant qu'il faifoit diverfes queftions fur cet autel, Ptolémée Ceraunus le poignarda.

Néron eut pour réponse de l'oracle de Delphes, qu'il fe donnât bien de garde des foixante-treize ans. Il croïoit être à l'abri de tout danger [b] jusqu'à cet âge, mais fe trouvant abandonné de tout le monde, & entendant proclamer empereur Galba qui étoit âgé de foixan. te-treize ans, il connut la tromperie de l'oracle.

Un autre oracle avoit prédit que celui qui feroit mourir fa mere [i], feroit le dernier Empereur de la famille des Céfars; ce qui fut vérifié dans Né

ron.

Trajan voulut [k] fonder l'oracle d'Héliopolis par un billet blanc cacheté; mais l'oracle fans ouvrir le billet, connut la vérité, & ordonna que pour toute réponse on reportât un papier blanc à l'empereur. Trajan revint à confulter l'oracle férieufement fur la guerre contre les Parthes ; & l'oracle fit prendre un ceps de vigne, qui étoit une des offrandes de fon temple, & l'envoia à l'empereur rompu par mor

[d] Died. Sic. lib. 15.

[e] Val. Max. lib. 1. c 8. Cic. de fato. Plutarch. in Alex.

[f] Plutarch in Pyrrh.

[g] Juftin. lib. 17. Appian. in Syriac. Mem

non.ap Phot biblioth.cod 224.Paufan,in Attic. [h] Suet. in Ner.c. 10. [1] Εσχατος Α' ινεάδωνμετροκτόνος ἡγεμο νείσι

[k] Macrob, Saturnal, lib.

1.6, 23.

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