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Des fymbo

ordinaire des féves, les eftimant ftrés faines.

Les fymboles de Pythagore ont été les de Py- recueillis par plufieurs fçavants. On peut les voir dans les adages d'Erafme au commencement, ou dans la traduction que Dacier en a faite.Ces fymboles contenoient des inftructions morales, que les commentateurs ont taché de deviner. Comme lorfque Pythagore ordonne de chauffer le piédroit le prémier, & de laver le pié gauche avant le pié droit, il a fait entendre, dit-on, de faire les affaires utiles les prémieres, & de ne donner que le fecond rang aux occupations agréables. La défense de manger de la main gauche a été expliquée de la prohibition de tout gain illicite: quand il commande de fe grater le devant de la tête en fortant, & le der riére de la tête en rentrant, il enfeigne à fonger attentivement le matin à ce que l'on doit faire, & le foir à fe rendre un compte exact de ce qu'on à fait pendant la journée. La défenfe de s'affeoir à table,fi le fel n'y a été mis auparavant, eft un précepte d'obferver la juftice en toutes nos actions; & l'avertiffement de ne souffrir aucune hirondelle fous le toit eft un avis de bannir les amis intéreffés. Le fymbole de ne pas manger fon cœur eft une exhortation de ne pas fe laiffer accabler par le chagrin, celui de ne pas porter un anneau étroit s'en tend aifément de la confervation de la liberté ; & celui de ne pas remuer le feu

tum enim maxime excitat, & alvum ciet. Quamobrem eâ maxime uíus eft. Ariftoxen. ap Aul. Gell. lib. 4. c. (I.

[x] Reuchl. de art. Caballist, lib. 2. Dasier, vie de Pythagore.

[y] Diog. Laert.in Pyth.Ouid.met.lib. x5. [x] Herodot, Enterp.

[4] Morte carent animæ, femperque priore relicta

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De la Mé

pinion de la métempsychose au rang tempfycho des fymboles, & ils prétendent que fe. Pythagore ne l'a jamais enfeignée que parallégorie,& pour infpirer l'horreur des vices, enfeignant que l'ame qui s'étoit laiffé dominer par la colére, paffoit dans le corps d'un ours; que celle qui étoit fouillée par les débauches, étoit envoiée dans le corps d'un porc,la parelfeufe,dans un poiffon;l'inconftante,dans un oifeau; fe fervant d'autres pareilles defcriptions capables de faire impref. fion fur les entendements groffiers.

Pythagore n'avoit pas défendu de fe nourrir de la chair des animaux,à cause de l'opinion de la métempsychose, mais par un motif d'humanité [y], & pour accoutumer fes difciples à une nourriture plus aisée à préparer, plus faine & plus propre à rendre l'efprit fubtil & délié.

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depuis la guerre de Troïe par le corps d'Hermotime, & enfin par celui d'un pêcheur de l'ifle de Délos, nommé Pyrrhus. Pour convaincre quelques incré dules, illesmena avec lui dans le temple de Junon à Argos, & leur montrant un bouclier [b]fufpendu parmi plufi curs autres, il leur dit: Voilà le bou clier dont je me fervois, lorsque j'étois Euphorbe [], & ce bouclier aïant été détaché, on trouva le nom d'Euphorbe écrit en dedans.

C'est à ce sujet que Lactance[d] fait cette invective contre Pythagore: S'il eûteu bonne opinion des hommes, aufquels il parloit, s'il les eût regardès comme des perfonnes raisonnables, ĉut il ofé proférer des menfonges fi impudents, & étaler à leurs yeux une vani té fi ridicule? Lucien [e] dans la con verfation de Mycillus avec fon coq, fait dire à cet oifeau qu'il fe fouvient d'avoir été Pythagore, & enfuite Afpafie femme de Périclés.

Hermippus [f) rapporte que Pythagore s'étant caché quelque temps dans une demeure fouterraine, & en étant forti fort maigre & fort pâle, voulut perfuader qu'il revenoit des enfers. Il feignoit d'entendre la mufique produite par le mouvement réglé des plané tes & des cieux, & il enfeignoit que la vertu & la fanté n'étoient que des harmonies: que l'homme étoit formé

du rapport de certains nombres, éta bliffant l'unité pour principe de la géneration, & la pluralité pour principe de la corruption. Ceux qui veulent juftifier fa doctrine, prétendent qu'il n'emploïoit les nombres, que comme les fignes, & non comme les principes des chofes. Ariftote [g] & Cicéron [b] attribuent aux Pythagoriciens, & non à Pythagore, d'avoir rapporté l'o rigine de tout ce qui exifte aux nombres. Pythagore a eu la réputation d'ê tre magicien. Ona raconté de lui[i]; qu'il avoit apprivoifé une aigle avec laquelle il conversoit qu'il fit fortir un baruf d'un champ de féves, en prononçant quelques paroles; qu'il montra une de fes cuiffes[k]qui étoit d'or, dans l'affemblée des jeux Olympiques; qu'il prédifoit les chofes futures; & qu'il fe fic voir le même jour & à la même heure, en la ville de Crotone & en celle de Métapont.

Calius Rhodiginus [7], l'ancien commentateur d'Ariftophane en la comédie des nuées, & Stanlei [m] té moignent que Pythagore traçoit des lignes avec du fang fur un miroir convexe d'une telle compofition, qu'en l'expofant à la face de la lune, lorf qu'elle étoit pleine, on appercevoit dans le rond de cet aftre les mêmes traits, qui étoient marqués fur la gla. ce du miroir. Campanella foutient [#]

Nuper Abanteis templo Junonis in Argis.
Ovid. metam lib. 15.
[6]..... clypeo Trojana refixo
Tempora teftatus. Hor.

[c] Diog Laert in Pythag.

[d] Quod fi benè fenfiffet de his quibus hæc locutus eft, fi homines eos exiftimaffet, nunquam fibi tam petulanter mentiendi licentiam vindicaffet: fed deridenda hominis leviffimi vanitas. Lastant. inftit lib 3.c. 18,

[e] Lucien, dial, intitulé le fonge.
[f] Hermipp. ap. Diog.Laërt. in Pythag
[g] Ariftor metaphys. lib. 12. c. 3.
[h] Cic. academ, quaft. lib. 2.
[i] Cal. Rhodigin. ib. 19. c. 7.
[k] Origen contr. Celf. lib. 6.
[1] Cal Rhodig. lib. 9. c. 23.

[m] Stanleïus, hift. philof. part. 8. v. 18. p. 687.

[n] Campanell, de fenfu rerum, lib. 4.

416.

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Quand Agrippa; dit Naudé [], s'eft vanté [p] d'avoir le fecret du miroir de Pythagore, & que Noël Defcomtes [9] a écrit que du temps de François I. & de Charles-Quint, on fçavoit à Paris la nuit; tout ce qui s'étoit paffé le jour, au château de Milan, le prémier ne le difoit, que pour le vanter & mettre en vogue; & la relation du dernier eft une pure fable & bourde controu vée par ceux qui ont voulu joindre la magie aux armes de ces deux grands princes, comme l'on dit que firent autrefois Ninus & Zoroaftre, Pyrrhus, Cræfus, Nectanebus, & Philippe de Macédoine.

Pythagore enfeignoit de commencer la journée par la musique, la méditation, & la prière, & de la finir par l'examen de toutes les actions de la journée. Aristote[r] dit que Pythagore eft le prémier,qui ait traité de la morale. Il fut redevable de fes plus beaux préceptes [√] à fa fœur Teoclée.·

A l'égard de fa phyfique, il a connu la forme ronde du globe terreftre & les Antipodes. Il a éte le prémier qui ait découvert l'obliquité du zodiaque, & qui fe foit fait une idée nette du cercle,

& de la route que le foleil ou la terre décrit en un an. Il a fait voir que la lune reçoit fa lumiére du foleil, que l'arc en ciel n'eft que la réfraction d'une lumiére refléchie que l'étoile du foir, nommée Venus & Vefper, eft la même que l'étoile du matin, appellée Lucifer & Phofphore. C'eft fur ces prémiéres découvertes, que toute l'aftronomie & la phyfique le font élevées depuis.

Pythagore fe vantoit d'entendré l'harmonie produite par le concert célefte, ou par les mouvements réguliers des révolutions des cieux & des planétes. Il fera traité plus au long de cette opinion, dans le chapitre de l'aftronomie.

Diogéne de Laërce & Plutarque rapportent[]que Pythagore fit le facrifice de l'hécatombe ou de cent bœufs, pour remercier les dieux d'avoir trouvé la démonftration [] de ce problé me, quele quarré de l'hypothénufe, dans le triangle rectangle,eft égal à la fomme des quarrés des deux autres côtés. Suivant Cicéron, il n'immola qu'un boeuf en cette occafion.

Pythagore faifoit paffer fes difciples par beaucoup d'épreuves, il obfervoit leurs difcours, leur ris, leur démar che. Il les affujétifloit à un filence de cinq ans. Pendant ce noviciat, ils étoient appellés Auditeurs, & s'ils étoient admis, on les nommoit Initiés. D'autres, comme Porphyre [x], ont

Prétendu

[o] Naudé, apologie, c. 10.

[p] C'eft dans le premier livre de la philofophie occulte, c. 6. qu'Agrippa fe vante de favoir la compofition du miroir de Pythagore.

[q] Cet auteur est plus connu fous fon nom latin de Natalis Comes.

[r] Ariftot.magnor, moral. lib. 1. c. 1.
[s] Suid, in voce Пuday

[t] Diog. Laert, in Pythag. Plutarq,réfut. d'Epicur.

[u] C'est la 47. propofition du prémier livre des éléments d'Euclide.

[x] Porphir.in Pythag.

Union &

prétendu que ces deux claffes étoient deux états fixes, fuivant les difpofitions & les talents, que Pythagore trouvoit en fes difciples. Les Pythagoriciens, aprés avoir achevé leur noviciat, portoient touts leurs biens en commun. Si quelqu'un quittoit la fecte, touts les autres le regardoient comme mort, célébroient fes obféques [y], & lui élevoient un tombeau. Un certain Hipparque aïant révélé quelqu'un des myftéres, fut chaffé de l'échole [z], & fes confréres lui firent dreffer un monument comme à un défunt. Il y a voit entr'eux une parfaite union, & une obligation indifpenfable, de fe fecourir mutuellement.

Jamblique [a] rapporte à ce sujet morale des qu'un Pythagoricien tomba malaTythagori de dans une hôtellerie; aiant é

ciens.

puifé tout fon argent, l'hôte lui fournit les fecours néceffaires. Le malade fe fentant prés de mourir écrivit en peu de mots fon hiftoire, mit au bas un fymbole de Pythagore, pour marquer qu'il étoit Pythagoricien, & recomanda à l'hô. te d'afficher ce placard. L'hôte qui comptoit peu fur le placard, ne laiffa pas de l'afficher. Un difciple de Pythagore paffa, lut cette affiche, vit par le fymbole qu'elle étoit d'un confrére, païa à l'hôte touts fes frais & le récompenfa encore de fon humanité.

Les Pythagoriciens regardoient le ferment, comme une prophanation de la divinité: Syllus & Clinias ai.

Tom. I.

[y] Orig. contr.Celf. lib. 2.

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[x] S.Clem. Alex. Stromat. lib. 5. [a] Jamblich. in Pythag. Dacier, vie de Pyrbag.

[b] Athén. déipnof. liv. 1.c. 3. [c] Suid, in voce Epardex.

mérent mieux païer ce qu'ils ne de voient pas, que de jurer qu'ils ne devoient rien. Il s'abftenoient de chair & de poiffen, & généralement de tout ce qui avoit été animé. Ils fe nourriffoient de fruits, de pain, & de légumes: ils n'ufoient même de ces aliments, qu'avec une grande fobriété. Empédocle d'Agrigente [b]aiant remporté la victoire aux jeux Olym piques, & ne pouvant, comme Pythagoricien, régaler le peuple, fuivant la coutume, ni en viande ni en poiffon, il fit faire la repréfentation d'un boeuf, compofée avec une pâte de myrrhe, d'encens, & de toute forte d'aromates, & le diftribua par morceaux à ceux qui fe préfentérent : Empédocle fut un des plus illuftres Pythagoriciens; il florifloit vers la 84. Olympiade. Suidas [c] nous apprend qu'il fut difciple de Parménide, & enfuite de Télaugés fils & fucceffeur de Pythagore.

Empédocle difoit qu'il avoit été fille, plante, oifeau, poisson. H refufa de régner [d] dans Agrigente fa patrie, pour fe donner tout entier à la philofophie. Quant à l'hif toire qui rapporte qu'Empedocle fe précipita [e] dans les flammes du mont Gibel, afin de paffer pour un dieu, & de perfuader, en difparoif fant, qu'il avoit été enlevé aux cieux, Paufanias & Timée la maintiennent fauffe [ƒ], dans Diogéne de Laërce qui eft de leur fentiment: & il y a lieu de croire que s'il tombât dans ces flammes, ce fut par un me

Y

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tif & par un malheur femblable à celui de Pline qui fut englouti par l'embrafement du mont Véfuve, pour avoir voula en examiner la caufe de trop prés.

Une preuve de l'excellence de la morale Pythagoricienne, c'eft que Rufin, qui traduifit en Grec le recueil des maximes d'un Pythagoricien, nommé Sextus, l'attribua au pape S. Sixte. Pélage cita cet ouvrage, &. Auguftin [g] tacha de donner un fens orthodoxe au paffage allégué par Pélage S. Auguftin reconnut depuis [b] que Pélage l'avoit trompé, & il avertit que l'ouvrage traduit par Rufin étoit d'un philofophe, & non pas d'un Chrétien. S. Jérôme s'éleve [i] contre cette fourberie de Rufin, qui avoit ofé attribuer à un pape l'ouvra. ge d'un Pythagoricien. Baronius [k] a conjecturé avec beaucoup de vrai femblance, que Rufin avoit ajouté à l'ouvrage de Sextus plufieurs traits tirés de l'écriture fainte, afin de micux perfuader que c'étoit l'ouvrage d'un Chrétien.

Dans le feiziéme fiécle, Reuchlin effeïa de reffufciter la philofophie de Pythagore en Allemagne, comme Marfile Ficin avoit rétabli la philofophie de Platon en Italie: mais cette entreprise de Reuchlin eut peu de fuccés, & la philofophie de Pythagore eft reftée en poffeffion de fon ancienne renommée, fans acquerir rien de

nouveau.

ભક

CHAPITRE ONZIEME.

De la fecte Elé ate.

SOMMAIRE.

1. De Xénophane. 2. De Parménide. 3. De Leucippe. 4. De Democrite. 5. D'Héraclite. 6. De Protago

ras.

Xenophane de Colophon: qui A fecte Eléate [a] a eu pour chef L fut contemporain d'Hiéron roi de Sicile, & du poëte Epicharme, fuivant faint Clément d'Alexandrie, ou du philofophe Anaximandre, fuivant Diogéne de Laërce: ce qui revient au même, c'eft-à-dire qu'il floriffoit vers la foixantiéme olympiade, environ 540. ans avant Jésus-Chrift. Xénophane a vécu [b]quatre-vingt douze ans. Il ne fuivit nila fecte Italique, ni l'lonienne. Il témoigna cependant beaucoup plus de penchant pour la philofophie de Pythagore, quoiqu'il s'en écartât en

I.

De X.0 phane.

[g] S. Aug. de nat. & grat. [h] S. Aug.retractat, lib. 2. [i] S. Hieronym ad Crefiph. adverf. Pelagian.

[k] Baron, annal 1. 5. ad ann. 410. [a] Nobilis difciplinæ hujus, ut fcriptum video, princeps Xenophanes, quem

modò nominavi : deinde eum fecuti Parmenides & Zeno. Itaque ab his Eleatici philofophi nominabantur. Nomen ab Eleâ five Veliâ Lucanorum oppido. Cic. acad. quaft. lib. 4.

[b] Stanl. hift.philof.in Xenophan.
[c] Diog, Laërt, in Xenophan.

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