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chaude, les nuages qui se déploient au-dessus de la crête des arbres, les flots qui se précipitent de cascade en cascade, l'oiseau qui jase dans les bois, le boeuf qui paît dans le parc, l'agneau qui bondit sur le gazon. Car tous jettent leur note dans ce concert auquel nous assistons, et dont nous saisissons à peine les beautés, logés que nous sommes dans les galeries de ce théâtre borné par l'horizon de la nature.

Nous descendons cette montagne en évitant l'Epouvante, pic plus haut encore que la Repousse, et nous nous dirigeons vers le village de St-Faustin, qui n'était alors qu'une mission, situé dans le sixième rang du canton de Wolfe.

Ce canton Wolfe faisait ci-devant partie du comté d'Argenteuil et, après 1881, il fit partie du comté de Terrebonne déjà pourtant bien trop étendu.

Lors du recensement de 1881, St-Faustin n'était pas encore érigé, et le recensement n'était que pour le canton de Wolfe qui, à cette époque, comptait 461 habitants, tous catholiques.

Le recensement de 1891 accuse pour St-Faustin une population de 669 habitants, tous catholiques, partagés en 120 familles.

Il y avait alors 18,825 acres occupés dont 4,205 améliorés; 3,485 en culture; 703 en pâturage; 14,620 en forêt; 17 en jardinage.

En 1880, il y avait d'arpentés et en vente dans le canton de Wolfe, qui se trouve dans l'agence de M. Marchand, 28,621 acres de terre et il y avait d'arpentés, mais non en vente 2,000 acres. Le Guide du Colon de 1894 constate 25,867 acres arpentés et en vente.

Le sol du canton est accidenté par endroits et un peu rocheux, mais généralement propre à la culture.

En 1882, les travaux publics qui ont été faits dans le canton de Wolfe, sont: 1° déviation du grand chemin

conduisant de Ste-Agathe à St-Faustin, pour éviter la Repousse, suivant le tracé de l'explorateur Bureau,

Cette déviation, qui mesure environ six milles, part du canton de Beresford dans le 5e rang, traverse les quatre derniers lots de ce canton en biaisant et se continue jusqu'au No 22 dans le 6e rang de Wolfe; 2° chemin conduisant du 6e rang de Wolfe à l'église St-Faustin, formé de montées traversant les 5e, 4e et 3e rangs, et qui ouvre à la colonisation le plus beau terrain du canton Wolfe ; 3° chemin qui part du village St-Faustin au lac La Quenouille.

St-Faustin, qui comprenait en 1884 cent familles et quatre cents individus, n'avait pas de curé résident, et c'était le curé de St-Jovite qui venait tous les quinze jours y dire la messe dans une chapelle. C'était une maison n'ayant rien de distinct si ce n'est une cloche posée sur une chèvre à quelques pieds de là. Le village était alimenté d'un magnifique aqueduc qui fournit à ses habitants une eau remarquablement bonne et pure.

Il y avait deux hôtels à St-Faustin, mais l'un a été obligé de céder le pas à l'autre. L'hôtel Dusablon (nom noble, s. v. p.) est très bien tenu. Le propriétaire est très poli. Mon ami Beaubien s'est trouvé indisposé à cet endroit. Et il y avait de quoi. La marche, la chaleur, les repas sous le pouce... (à part la Repousse) pour un dyspeptique, c'est assez raide. C'est là que j'eus l'occasion de faire preuve de mes connaissances médicales. Une préparation de gingembre mit sur pied mon patient en moins d'une heure. Disons deux, car je me rappelle qu'on attendit que le soleil baissât. Tout de même, il faut avouer que c'est bien peu de temps pour guérir un malade qui souffrait des douleurs affreuses d'estomac et d'entrailles. Il faut tout dire, l'épicier du lieu, M. Villeneuve, un zouave (il y en a partout) est venu à ma rescousse en me fournissant une bouteille de Tue-douleur de Perry Davis, (Pain

Killer pour les Anglais). Mais je réclame l'honneur d'avoir prescrit ce spécifique unique,

Qui guérit les maux passés, présents, futurs, nouveaux.
Il est stomachique, odontalgique,

Je le cède à tous

Pour combien ? pour deux sous. bis.

Ça, c'était en 1884.

Aujourd'hui, St-Faustin n'est pas ce qu'un vain peuple pense. Il y a une église et un curé résident; le Rév. M.. Corbeil, qui a succédé à M. St Arnaud. Il y a cinq moulins dont l'un est mû par l'eau et contient une moulange; trois marchands se disputent les chalands, trois forgerons et quatre écoles élémentaires où, j'espère, on enseigne les rudiments de l'art agricole.

Je dois mentionner comme un exemple à suivre, qu'il existe à St-Faustin des marchands de bois du nom de Whelan & Barlow qui, tout en faisant de bonnes affaires rendent de grands services à la colonisation en recevant les colons recommandés par la Société de colonisation de Montréal. Ils les emploient à bûcher du bois à tant la corde, sur des lots qu'ils achètent au nom de ces colons qu'ils logent, et auxquels ils font des avances pour leur permettre de vivre, tout en défrichant leurs terres.

Bonjour, St-Faustin, au revoir; et en route pour St-Jovite par un chemin comparativement beau. Ah! quand je dis beau, il ne faut pas s'imaginer qu'on y puisse pousser les chevaux, mais au moins on peut y trotter par tache. Ah! nos reins, nom d'un p'tit bonhomme! L'air se fait frais et il faut se presser, car notre étape du jour est la Chute aux Iroquois. Touche, touche. Et nous faisons solennellement notre entrée à St-Jovite, le samedi, presque à la brunante, Reposons-nous un peu, car, vraiment, nos chevaux font pitié... tant ils sont bons.

Pauvres bêtes! Dire qu'ils se

que d'un

Vrai, on

mettent à notre disposition sans répliquer, tandis coup de pied ils pourraient nous envoyer paître. ne peut penser aux services que nous rendent ces animaux, et à la patience avec laquelle il nous servent, sans éprouver un sentiment de reconnaissance envers Celui qui leur a ordonné de nous obéir. Aussi méritent-ils qu'on les soigne bien. Entrons à l'hôtel, et ordonnons que nos courageuses bêtes aient chacune une bonne portion... quand elles seront ressuyées, bien entendu...

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X

SOMMAIRE: ST-JOVITE. -SES PERSONNAGES. SON INDUSTRIE. LA RIVIÈRE DU DIABLE. — LES ÉTABLISSEMENTS DE ST-JOVITE. SES PROGRÈS. NOS BOIS EN ÉBÉNISTERIE. LE CURÉ OUIMET. SA MÈRE. - LA MONTAGNE TREMBLANTE. LE SANITARIUM. EXTRAIT DU RAPPORT DE SIR WILLIAM HINGSTON. - LA CULTURE DES FLEURS, DES ABEILLES, DU TRÈFLE BLANC. CANTON SALABERRY.

Le village de St-Jovite, à 44 milles de Montréal, est situé sur un plateau d'environ un mille carré que cerne la rivière au Diable. J'ai examiné l'apparence de ce tributaire de la Rouge, pour m'assurer s'il ne ressemble pas à l'ancien Diable avec des griffes et la queue en tire-bouchon.— Je n'ai rien trouvé qui ressemblât à Belzebuth, si ce n'est sa forme tortueuse qui lui donne des faux airs de serpent. Mais ce n'est pas de ses sinuosités que cette rivière tire son nom. Ce sont les voyageurs qui, la trouvant difficile pour la descente du bois, l'ont apostrophée de nom de Diable et cette épithète lui est restée.

En 1878, tout l'espace entre Ste-Agathe et le Nominingue était forêt. Les établissements qui commençaient étaient comme des oasis au milieu des bois debout. C'est en septembre de cette année qu'y fut envoyé le révérend M. Ouimet pour desservir les cantons du Nord.

A son arrivée il se mit à l'œuvre pour construire un presbytère dont le haut devait servir de chapelle provisoire, et, au mois de janvier 1880, il s'installait dans sa résidence pour desservir les colons à 15 lieues à la ronde. Pendant plusieurs années il exerça son ministère dans les missions d'Arundel, Amherst et Ponsonby.

Les rues du village de St-Jovite sont larges de 60 pieds; les maisons sont bâties à la française et avec un goût remarquable.

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