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Théatre, observe M. Bret, dans l'Avertissement qu'il a mis au-devant de cette Piece pour son édition de Moliere, avec des Commen. taires. >>

« Une critique d'Andromaque, sous le titre de La Folle querelle, eut, en 1668, plus de succès qu'elle n'en méritoit, et l'illusion du Public sur cette Parodie l'avoit fait attribuer à Moliere, quoiqu'elle fût de Subligny. (Voyez les Jugemens et Anecdotes sur Alexandre et sur Andromaque, tome dixieme des Tragédies de notre Collection.) »

« On sait combien Racine étoit délicat sur le chapitre de la gloire ; et l'erreur dans laquelle il étoit, avec une partie du Public, sur le véritable Auteur de La Folle querelle, ne lui permit pas d'abord de rendre assez de justice au nouveau chef-d'œuvre de Moliere. Il alla même jusqu'à reprocher à Despréaux d'avoir ri seul au Théatre à une des représentations de L'Avare. Je vous estime trop, lui répondit le Poëte satyrique, pour croire que vous n'y avez pas ri vous même, du moins, intérieurement. Il y a apparence que Racine, désabusé de l'opinion que Moliere avoit

cherché à lui nuire, ne compromit pas long-tems ses lumieres et son goût, en continuant de fronder une Piece dont le succès devenoit chaque jour plus assuré. »

« Le préjugé qui avoit fait tomber Le Festin de Pierre, parce qu'il étoit écrit en prose, avoit également nui, dit-on, au succès de L'Avare, en 1667; mais ce prétendu préjugé n'avoit pas empêché Le Pédant joué, de Cyrano Bergerac de réussir, en 1654, et Le Festin de Pierre étoit si peu digne de la raison supérieure de Moliere qu'il ne faut point chercher d'autres motifs de sa chûte que la bizarrerie du sujet. Quant à L'Avare, il faut toujours se souvenir que les ennemis de Moliere balancerent le succès de presque tous ses chef-d'œuvres. Ils avoient borné ses talens à la simple Farce, pour laquelle ils vouloient bien lui accorder quelques dispositions. Il falloit que la voix publique étouffât, par degrés, leur manége et leur cabale.... >>

« Le personnage de l'Avare, chez Plaute, s'appelle Euclio, observe encore M. Bret, dans ses Commentaires sur cette Comédie de Moliere. C'est le supplément de la Piece de Plaute par

Codrus Urceus qui a fourni à Moliere le nom d'Harpagon. Les maîtres de ce tems-ci sont avares. Nous les appelons des harpagons, des harpies, dit Strobile, personnage de L'Avare Latin, scene seconde du cinquieme acte. »

«Riccoboni, dans ses Observations sur la Comédie et sur le génie de Moliere, veut que cet Auteur ait emprunté l'épisode de l'amour de Valere et d'Elise de son Avare d'un canevas Italien joué à Paris le 13 Juin 1716) sous le titre dé Lélio et Arlequin, valets dans la même maison; mais il est aussi vraisemblable de penser que Moliere, dans le dessein où il étoit de nous montrer les désordres intérieurs de la maison d'un avare, ait imaginé lui-même le caractere d'une fille hors d'espérance de se voir mariée comme une autre, à cause de l'avarice de son pere, et se trouvant embarquée dans une intrigue beaucoup plus loin qu'elle ne devroit. Au reste, ce que Moliere ne devoit sûrement pas au canevas Italien, c'est d'avoir conservé à Elise assez de vertu et de décence pour ne pas trop faire redouter le séjour de Valere dans la même maison avec elle. Dès la premiere scene du premier acte, elle appelle sa tendresse

pour Valere un innocent amour. La reconnoissance d'Elise pour Valere, qui lui a sauvé la vie, est la source de l'attachement qu'elle a conçu pour lui. L'un et l'autre rassurent le Spectateur sur la légéreté de leur démarche par l'honnêteté de leurs sentimens ; et, comme dit Valere: L'excès d'avarice d'Harpagon, et la maniere austere dont il vit avec ses enfans, pourroient autoriser des choses plus étranges ( même scene ). Élise fait plus encore. Elle s'avoue coupable, lorsqu'elle dit à son frere, dans la scene suivante: Ne parlons point de ma sagesse. Il n'est personne qui n'en manque, du moins, une fois en sa vie ; et ce reproche qu'elle se fait ne regarde que la tendresse qu'elle a conçue pour Valere, sans l'aveu d'Harpagon.... >>

Riccoboni prétend aussi que les trois premieres scenes du second acte de L'Avare de Moliere, dans lesquelles se trouvent les détails des objets inutiles qu'Harpagon veut faire passer en compte de fournitures à l'emprunteur qu'on lui propose, et qui lui est d'abord inconnu, soient l'imitation d'une scene de la Picce Italienne Il dottor Bucchetone, Le Docteur dévot; mais l'Avertissement

que M. Bret a mis au-devant de Tartuffe, dans son édition de Moliere, nous a aidés à prouver, dans les Jugemens et Anecdotes sur Tartuffe (tome dix-septieme des Comédies du Théatre François de notre Collection) que cette Piece du Docteur dévot étoit postérieure aux Ouvrages de Moliere.

Dans la Piece Italienne, Pantalon ayant besoin d'argent, dit Riccoboni, s'adresse au Docteur, qui, après avoir pris sa vaisselle en gage, ne lui donne que les deux tiers de la somme dont ils sont convenus et lui fait voir une liste ridicule des choses

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qu'il doit lui donner pour l'autre tiers : ce sont de vieux meubles, de vieilles hardes et d'autres choses extravagantes, telles que la barbe d'Aristote, la ceinture de Vulcain, &c.

en

« Avec une plus grande connoissance de notre Théatre, Riccoboni auroit vu que La belle Plaideuse, mauvaise Comédie, (en cinq actes, vers ) de l'Abbé de Boisrobert, jouée en 1654, avoit fourni à Moliere le canevas de ces scenes plaisantes, observe M. Bret, dans ses excellens Commentaires sur L'Avare. »>

« Ergaste, fils de l'avare Amidor) et qui est

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