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et qu'il est prêt à tout entreprendre pour la ravír à son rival. D. Pedre découvre l'intrigue, et fait tous ses efforts pour s'y opposer; mais Adraste a appris que D. Pedre vouloit faire faire le portrait d'Isidore, et il va trouver le Peintre qui en est chargé, et qui est un de ses amis, afin d'obtenir de lui d'être envoyé à sa place, avec une lettre de recommandation, pour faire ce portrait. Adraste a, de tout tems, cultivé la peinture, pour s'amuser; et c'est même par son goût pour cet art qu'il a été conduit en Italie. Il fait le portrait d'Isidore, en présence de D. Pedre. Pendant ce tems, Hali, travesti en Espagnol, vient consulter D. Pedre sur un prétendu point d'honneur, afin de faciliter à Adraste le moyen d'entretenir Isidore, et de la faire consentir à se laisser enlever par lui. Dès qu'Adraste s'est assuré d'elle, il suspend le travail du portrait, et envoie une esclave, nommée Zaïde, qu'il suppose être son épouse, et feint de poursuivre, pour la punir de s'être, sans voile, montrée, un moment, à quelqu'un. Elle vient se réfugier voilée chez D. Pedre, à qui elle demande un asyle contre les prétendues fureurs de son

époux. D. Pedre la fait cacher dans l'appartement d'Isidore, et ménage sa paix avec Adraste, qui consent à se raccommoder avec elle. D. Pedre veut la remettre entre les mains d'Adraste; mais c'est Isidore, qui se couvre du voile de Zaïde, qu'il livre, lui-même, à son heureux rival. Zaïde ressort aussi-tôt de l'appartement d'Isidore, et découvre la ruse à D. Pedre, qui est au désespoir. Il court se plaindre à un Sénateur, qui ne l'écoute pas, et qui veut l'entretenir d'une Mascarade de Maures et de Mauresques, dont il veut se donner le divertissement. D. Pedre s'en retourne furieux ; et la Piece finit par la danse des Maures et des Mauresques, qui est exécutée en présence du Sénateur.

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CETTE petite Comédie fut jointe au Ballet des Muses, de Benserade, que l'on reprit à Saint-Germain-en-Laye au mois de Janvier 1667, dit M. Bret, dans l'Avertissement qu'il a mis au-devant de cette Piece pour son édition de Moliere, avec des commentaires. Elle ne parut sur le Théatre du Palais-Royal que le 10 Juin suivant, par l'indisposition de Moliere, qui devoit y jouer le rôle de D. Pedre. Sa poitrine déja affoiblie, et qui dès-lors auroit dû lui faire quitter une profession trop pénible, l'avoit contraint à se mettre au lait, pour quelques mois. C'est ce

que nous apprenons de Robinet, dans ses Lettres en vers des 11 et 19 Juin de cette même année où il rend compte de la représentation du Sicilien sur le Théatre de Paris.

« Depuis hier..... (dix Juin, dit-il, }
>> On a pour divertissement

» Le Sicilien, que Moliere,

» Avec sa charmante maniere,
» Mêla dans le Ballet du Roi, (1
» Et qu'on admire, sur ma foi!
» Il y joint aussi des Entrées
Qui furent très considérées
» Dans ledit ravissant Ballet;
» Et lui, tout rajeuni du lait
»De quelqu'autre infante d'Inache,
>> Qui se couvre de peau de vache,
» S'y remontre enfin à nos yeux,
>> Plus que jamais, facétieux.... »

«Moliere moins satisfait que personne des deux Ouvrages qu'il avoit joints au Ballet des Muses, dans le mois de Décembre précédent, continue M. Bret, avoit travaillé à réparer son honneur dans la reprise que Louis XIV devoit

(1) Le Ballet des Muses.

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faire de ce Ballet au mois de Janvier. Ce fut Ze Sicilien qu'il mit à la place de Mélicerte et de La Pastorale comique, Ouvrages qu'il n'avoit pu terminer, et dont le genre insipide et froid, en général, n'étoit pas fait pour lui. ( Voyez le Catalogue des Pieces de Moliere, tome treizieme des Comédies du Théatre François de notre Collection.)

« Le Sicilien, observe Voltaire, dans ses Jugemens sur les Pieces de Moliere, est la seule Comédie en un acte de cet Auteur, où il y ait de la grace et de la galanterie. Ses autres petites Pieces, qu'il ne donnoit que comme des Farces, ont d'ordinaire un fonds plus bouffon et moins agréable. »

« C'est aussi le premier de ces Drames ingénieux que Saint-Foix a multipliés parmi nous et dont le tableau fait le mérite principal, ajoute M. Bret. Une intrigue vive et plaisante offre, en même tems, et la jalousie d'un Italien et l'amour industrieux d'un jeune François, qui n'a pu se faire encore entendre que par des regards. Un stratagême, heureusement inventé, le met aux pieds de ce qu'il aime, en présence du ja

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