SGANARELLE. C'est pour ne me point ennuyer. MARTINE. Et que veux-tu, pendant ce tems, que je fasse avec ma famille ? SGANARELL E. Tout ce qu'il te plaira. MARTINE J'ai quatre pauvres petits enfans sur les bras.... SGANARELLE, l'interrompant. Mets-les à terre. MARTINE. Qui me demandent à toute heure du pain! SGANARELLE. Donne-leur le fouet. Quand j'ai bien bu et bien mangé, je veux que tout le monde soit saoul dans ma maison. MARTINE. Et tu prétends, ivrogne! que les choses aillent toujours de même ? SGANARELLE. Ma femme, allons tout doucement, s'il vous plaît ! MARTINE. Que j'endure éternellement tes insolences et tes débauches? SGANARELLE. Ne nous emportons point, ma femme! MARTINE. Et que je ne sache pas trouver le moyen de te ranger à ton devoir. SGANARELLE. Ma femme, vous savez que je n'ai pas l'ame endurante, et que j'ai le bras assez bon! MARTINE. Je me moque de tes menaces! SGANARELLE. Ma petite femme, ma mie, votre peau vous démange, à votre ordinaire! MARTINE. Je te montrerai bien que je ne te crains nullement ! SGANARELLE. Ma chere moitié, vous avez envie de me dérober quelque chose. MARTINE. Crois-tu que je m'épouvante de tes paroles? SGANAREL LE. Doux objet de mes vœux, je vous frotterai les oreilles! MARTIN E. Traître, insolent, trompeur, lâche, coquin, pendard, gueux, belître, fripon, maraud, voleur!... SGANARELL E. Ah! vous en voulez donc ! (Sganarelle prend un bâton, et bat sa femme.) MARTINE, criant. Ah ah ah ! ah! SGANARELLE. Voilà le vrai moyen de vous appaiser. H OLA! holà! holà! Fi! qu'est-ceci? quelle infamie Peste soit le coquin, de battre ainsi sa femme ! M. ROBERT. Vous avez raison! MARTINE. Voyez un peu cet impertinent qui veut empêcher les maris de battre leurs femmes ! Et vous êtes un sot de venir vous fourser où vous M. ROBERT, à Sganarelle. Compere, je vous demande pardon, de tout mon cœur. Faites, rosser, battez, comme il faut, votre femme; je vous aiderai, si vous le voulez. SGANARELLE. Il ne me plaît pas, moi. M. ROBERT. Ah! c'est une autre chose. SGANA RELLE. Je la veux battre, si je le veux; et ne la veux pas battre, si je ne le veux pas. C'est ma femme, et non pas la vôtre ? Et vous êtes un impertinent de vous ingérer des affaires d'autrui. Apprenez que Cicéron dit qu'entre Farbre et le doigt il ne faut point mettre l'écorce. (Il bat M. Robert, et le chasse.) |