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les choses qui ne rendent pas réciproquement la consécution d'existence. Ainsi, un précède deux, parce que deux existant, il s'ensuit sur-le-champ qu'un existe; tandis qu'un existant, il ne s'ensuit pas nécessairement que deux existe; et d'un ne suit pas réciproquement l'existence du reste. Ainsi donc, une chose semble être première quand il n'en sort pas réciproquement l'existence d'une autre.

§ 4. En troisième lieu, l'idée de priorité s'applique à un ordre quelconque, comme dans les sciences et dans les discours. Dans les sciences démonstratives, il y a la priorité et la postériorité selon un certain ordre : ainsi, les éléments précèdent en ordre les démonstrations de géométrie; et dans la grammaire, les lettres précèdent les syllabes. Et de même dans les discours, l'exorde est selon l'ordre avant la narration.

§ 5. Outre ces priorités qu'on vient d'énumérer, on peut dire encore que le mieux, le plus honorable, tient par nature le premier rang: c'est ainsi que l'on dit généralement que l'homme qu'on estime le plus, qu'on aime le plus, est le premier des hommes. Mais de tous les modes de priorité, ce dernier est le moins commun. § 6. Tels sont, à peu près, tous les modes de prio

rité.

$ 5. Dans les sciences démonstratives, Les mathématiques, comme le prouve l'exemple cité plus bas. Les démonstrations de géométrie, Ou, comme le texte dit, les figures qui servent en géométrie pour faire les démonstrations. - L'exorde est selon l'or

dre, Voir la Rhétorique, liv. III, ch. 14.

$ 5. Outre ces priorités, Quatrième espèce de la priorité.

§ 6. Mais peut-être pourrait-on croire, Cinquième espèce de la priorité : la réalité est antérieure au jugement qui l'énonce. Simpli

§ 7. Mais peut-être pourrait-on croire qu'outre tous ceux-là il en existe encore un autre. Ainsi, dans les choses qui se rendent réciproquement la présupposition d'existence, celle qui d'une façon quelconque est cause de l'existence de l'autre, semblerait naturellement devoir être appelée première. Or, il est évident qu'il y a certaines choses de ce genre. Par exemple, quand on dit: L'homme existe, il y a rapport réciproque entre l'existence de l'homme, et le jugement vrai qu'on énonce sur cette existence; en effet, si l'homme existe, le jugement par lequel nous déclarons que l'homme existe est vrai. Et la réciproque n'est pas moins juste; car si le jugement par lequel nous déclarons que l'homme existe est vrai, l'homme existe aussi véritablement. Mais un jugement, quelque vrai qu'il puisse être, n'est pas cause qu'une chose est; et la chose, au contraire, semble être en quelque sorte la cause de la vérité du jugement, puisqu'en effet, c'est selon que la chose est ou n'est pas que le jugement est faux ou vrai.

§ 8. Ainsi donc, l'on peut dire de cinq façons qu'une chose est antérieure à une autre.

cius affirme que, dans d'autres ouvrages, Aristote énonçait beaucoup plus d'espèces de priorité qu'il ne le fait ici, et que Straton, dans sa

monographie sur l'Antérieur et le postérieur, en distinguait aussi bien davantage. Schol., p. 89, a, 40 et p. 90, a, 12.

CHAPITRE XIII.

DE LA SIMULTANÉITÉ.

Trois espèces de simultanéité : 4° en temps; 2o par nature; 5o par division spécifique.

§ 1. On dit en général, et dans le sens le plus spécial du mot, que deux choses coëxistent quand leur exis tence a lieu dans le même temps. L'une n'est pas antérieure, ni l'autre postérieure; elles sont dites exister à la fois dans le temps.

§ 2. On appelle simultanées par nature, les choses qui se rendent réciproquement la présupposition d'existence, sans que l'une soit cependant pour l'autre cause d'existence. Tels sont, par exemple, le double et la moitié; car ces deux choses sont réciproques, parce le double existe, la moitié existe; et que que dès que réciproquement, la moitié existant, le double existe aussi; mais l'un n'est pas la cause de l'existence de l'autre.

§ 3. Les choses d'un même genre, mais placées dans des divisions différentes les unes des autres, sont dites

$ 1. On dit en général, La simultanéité la plus ordinaire est celle qui est considérée dans le temps.

$ 2. Qui se rendent réciproquement la présupposition, Voir au ch. précédent, § 3. — Par nature, Ou dans la nature.

$ 3. Sont dites aussi simulta

nées par nature, L'expression d'Aristote est la même qu'au paragraphe qui précède. La formule est pareille, mais les choses qu'elle comprend sont différentes : ici, les divisions opposées d'un même genre; là, des choses réciproques l'une à l'autre. Il faut soigneusement faire cette distinction.

aussi simultanées par nature. Placées dans des divisions différentes les unes des autres, se dit des choses comprises dans une même division: par exemple, le volatile est divisé par opposition en terrestre et en aquatique; terrestre et aquatique, en effet, sortis du même genre, sont des divisions opposées l'une à l'autre. L'animal se divise, en effet, en toutes ces classes: en volatile, en terrestre, en aquatique; et de toutes ces choses, aucune n'est antérieure ou postérieure à l'autre ; elles coëxistent naturellement. Au reste, chacun de ces genres pourrait encore se décomposer en espèces diverses, le volatile aussi bien que le terrestre et l'aquatique. On appelle donc simultanées par nature les choses sortant d'un même genre, et comprises dans une même division.

§ 4. Les genres, du reste, précèdent toujours les espèces; car ils ne rendent pas réciproquement la supposition d'existence. Par exemple, du moment que l'espèce aquatique existe, le genre animal doit exister; mais l'animal peut exister sans qu'il y ait nécessité que l'aquatique existe.

§ 5. Ainsi donc, on appelle simultanées par nature, les choses qui, réciproques quant à la supposition d'existence, ne sont pas causes d'existence l'une pour l'autre, et les choses d'un même genre, séparées par divisions opposées entre elles. D'une manière générale, on appelle simultanées, les choses dont l'existence se produit dans le même temps.

$ 4. Les genres précédent touours les espèces, Logiquement parlant l'exemple donné fait bien comprendre la pensée.

85. Ainsi donc on appelle, Résumé des diverses espèces de simultanéité développées dans tout ce chapitre.

CHAPITRE XIV.

DU MOUVEMENT.

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Six espèces de mouvement: rapports et opposition de ces espèces entre elles.

§ 1. On distingue six espèces de mouvement: naissance ou génération, destruction, accroissement, décroissement, modification, déplacement dans le lieu.

§ 2. Évidemment tous ces mouvements diffèrent entre eux la naissance n'est pas la destruction; l'accroissement n'est pas le décroissement, non plus que le déplacement, et ainsi du reste.

§ 3. Quant à la modification, on peut demander s'il n'est pas toujours nécessaire que ce ce qui est modifié le soit selon un des autres mouvements. § 4. Mais cette supposition n'est pas juste. Dans toutes nos sensations, ou du moins dans la plupart, il arrive que nous sommes modifiés sans qu'aucun autre mouvement vienne nous affecter. Il n'est pas nécessaire, en effet, que ce qui

§ 1. On distingue six espèces de mouvement, Voir la théorie générale du mouvement dans les Leçons de Physique, liv. 5 et suiv., et dans la Métaphysique, liv. 11, chap. 12, et liv. 12, ch. 7. — Modification, Ou altération, l'action de devenir autre. J'ai préféré le mot de modification comme plus général. Celui d'altération présente en français un sens trop spécial, et

par conséquent infidèle.

$ 2. Different entre eux, Quelques-uns sont contraires les uns aux autres. Voir plus bas, § 6. $ 3. Quant à la modification, Ou altération.

8 4. Cette supposition n'est pas juste, La modification ou altération est une espèce toute particulière de mouvement, qui ne peut se confondre avec aucune autre.

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