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§ 21. Les opposés qui le sont comme négation ou affirmation ne sont évidemment opposés d'aucune des façons qu'on a dites jusqu'ici; mais pour ces choses, et pour elles seules, il faut toujours nécessairement que l'une des deux soit vraie et l'autre fausse. § 22. Dans les contraires, il n'est pas toujours nécessaire que l'un des deux soit vrai et l'autre faux, ni dans les relatifs, ni dans les choses de possession et de privation. Ainsi, la santé et la maladie sont des contraires, et cependant ni l'une ni l'autre n'est ni vraie ni fausse. Et de même pour le double et la moitié, qui sont opposés comme relatifs, ni l'un ni l'autre ne sont ni vrais ni faux, non plus que les choses de privation ou de possession, par exemple, la vue et l'aveuglement. En général, les mots pris isolément n'expriment ni vérité ni erreur, et les mots dont on vient de parler sont tous pris sans combinaison. § 23. Toutefois, on pourrait croire que cette remarque s'applique surtout aux contraires exprimés avec combinaison de mots, et qu'ainsi : Socrate est bien portant est contraire à: Socrate est malade. Mais, même pour les contraires de ce genre, il n'est pas toujours nécessaire que l'un soit vrai, l'autre faux. Si Socrate existe, l'un sera vrai, et l'autre faux; si Socrate n'existe pas,

§ 21. Les opposés qui le sont comme négation, Quatrième espèce d'opposés. Voir plus haut, §§ 2 et 3.

· Que l'une des deux soit vraie ou fausse, Voilà le caractère spécial de cette opposition.

$ 22. Dans les contraires... Dans les trois espèces d'opposition autres que l'affirmation et la négation. En général les mots pris

isolément, C'est la pensée tout entière des Catégories. Voir plus haut, ch. 2, 81, et ch. 4, § 1. Dont on vient de parler, Les trois espèces d'opposition différentes de l'affirmation et de la négation.

$ 23. Avec combinaison de mots, Au lieu de considérer les mots dans leur isolement, comme on le fait dans tout ce traité.

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ils seront faux tous les deux; puisqu'en effet si Socrate
n'existe pas du tout, il ne peut être vrai, ni qu'il soit.
malade, ni qu'il soit bien portant. § 24. Dans les choses
de privation et de possession, quand l'objet n'existe pas,
aucun des deux contraires n'est vrai; et quand l'objet
existe, il ne s'ensuit pas toujours que l'un soit vrai et
l'autre faux. Ainsi, Socrate y voit, Socrate est aveugle,
sont deux propositions opposées comme possession et
privation. En admettant que Socrate existe, il n'est pas
nécessaire encore que l'un des deux soit vrai ou faux,
puisque si le moment naturel de la possession n'est pas
encore venu, tous deux sont faux; et si Socrate n'existe
pas du tout, les deux assertions sont également fausses,
qu'il est aveugle ou qu'il y voit. § 25. Au contraire, pour
la négation et l'affirmation, que l'objet existe ou n'existe
pas, il faut
que l'une soit fausse et l'autre vraie. Soit
par exemple, l'affirmation: Socrate est malade, et la né-
gation: Socrate n'est pas malade; si Socrate existe, il
faut nécessairement que l'une soit vraie et l'autre fausse;
et il en est encore de même s'il n'existe pas : s'il n'existe
pas, être malade est faux, n'être pas malade est vrai.
§ 26. Ainsi donc, les choses qui sont opposées, comme
négation et affirmation, ont seules cette propriété spé-
ciale que l'une des deux doit toujours être fausse ou

vraie.

$ 24. Dans les choses de privation et de possession, Après les contraires exprimés par des mots combinés, formant une proposition, il examine de même les opposés par privation ou possession expri

més aussi dans une proposition en forme.

§ 25. Ainsi donc, Propriété spéciale des opposés par négation et affirmation, et qui les distingue de tous les autres.

CHAPITRE XI.

DES CONTRAIRES.

Exemples divers de contraires. Un contraire peut exister sans l'autre. Le sujet des contraires est le même, soit

en espèce, soit en genre. Les contraires doivent être ou dans le même genre, ou dans des genres contraires, ou former eux-mêmes des genres contraires.

§ 1. Le mal est nécessairement contraire au bien; et cela est évident en parcourant les cas particuliers. La maladie est contraire à la santé, la justice à l'injustice, le courage à la lâcheté; et ainsi du reste. § 2. Mais si le bien est le contraire du mal, parfois aussi le mal est le contraire du mal : par exemple, le luxe qui est un mal, est le contraire de la misère qui est un mal aussi; et de même l'aisance, la médiocrité, qui est contraire à l'un et à l'autre, est un bien. Ceci, du reste, s'applique à un fort petit nombre de cas; dans la plupart, c'est le bien qui est le contraire du mal.

§ 3. En outre dans les contraires, l'existence de l'un

§ 1. Le mal est nécessairement, Pacius fait de cette remarque une première propriété des contraires. Cette distinction n'est pas très-juste, et je ne crois pas devoir l'adopter. § 2. Mais si le bien est le contraire du mal, Seconde propriété des contraires suivant Pacius: elle n'est pas plus réelle que la première. De même l'aisance est

un bien, On reconnaît là cette théorie morale d'Aristote, qui place la vertu, le bien, entre deux vices, deux maux extrêmes. Voir la Morale à Nicomaque, liv. II, ch 6, 7 et 8.

$3. En outre, dans les contraires, Pacius reconnaît ici une troisième propriété des contraires; j'en ferais plutôt la première, les deux autres n'étant pas vraiment

n'entraîne pas nécessairement celle de l'autre. Si tout le monde se porte bien, la santé existera et la maladie n'existera point; et de même si tous les objets sont blancs, la blancheur existera et la noirceur n'existera pas. § 4. Il y a plus; si : Socrate se porte bien est contraire à : Socrate est malade, comme il n'est pas possible que les deux choses existent à la fois dans le même individu, il est impossible aussi que l'un des contraires existant, l'autre existe aussi; car si ce fait : Socrate se porte bien, existe, cet autre fait: Socrate est malade, n'existe pas.

corps,

§ 5. Il est évident que les contraires sont naturellement applicables à un objet identique, soit en genre soit en espèce. Ainsi, la maladie et la santé sont naturellement placées dans le corps de l'animal; la blancheur et la noirceur ne peuvent être non plus que dans le la justice et l'iniquité, que dans le cœur de l'homme. § 6. Il faut nécessairement pour tous les contraires, qu'ils soient ou dans des genres contraires, ou dans le même genre, ou enfin qu'ils soient eux-mêmes des genres. Noir et blanc appartiennent à un même genre, puisque la couleur est le genre de tous les deux: justice et iniquité sont dans des genres contraires; car le genre de l'un c'est

des propriétés. - Si tout le monde se porte bien, Il faut remarquer qu'il ne s'agit ici que des contraires simples sans combinaison: la santé, la maladie.

84. Il y a plus, si: Socrate se porte bien, Il s'agit ici de contraires combinés, c'est-à-dire, représentés par des propositions entières.

$ 5. Il est évident que les contraires, On pourrait faire de ceci

une seconde propriété des contraires c'est la cinquième pour Pacius.

$ 6. Il faut nécessairement, Troisième propriété des contraires, la sixième pour Pacius. — Il faut rapprocher de ce chapitre et du précédent le chap. 10 du 5o liv. de la Métaphysique, où sont résumées la théorie des opposés et celle des contraires.

la vertu, celui de l'autre c'est le vice. Enfin, le bien et le mal ne sont pas dans un genre, mais ils sont euxmêmes genres de certaines choses.

CHAPITRE XII.

DE LA PRIORITÉ.

Quatre espèces principales de priorité : 4o relativement au temps; 2° relativement à la non-réciprocité; 5o relativement à l'ordre; 4o relativement au mérite.

On peut distinguer encore une cinquième espèce de priorité, la priorité de nature.

§ 1. Une chose peut être antérieure à une autre de quatre façons différentes.

§ 2. D'abord et de la manière la plus spéciale, relativement au temps, d'après lequel une chose est dite plus vieille ou plus ancienne qu'une autre. En effet, par cela seul qu'il s'est écoulé un espace de temps plus considérable, la chose est appelée plus vieille, plus ancienne. § 3. En second lieu, la priorité appartient à toutes

$1. Une chose peut être antérieure à une autre, Voir le 5o livre de la Métaphysique, ch. 2, où la priorité et la postériorité sont divisées autrement qu'ici et moins nettement.

82. Une chose est dite plus vieille, La guerre de Troie est antérieure à la guerre Médique, exemple cité au ch. 11 du 5e livre

de la Métaphysique.

§ 3. Qui ne rendent pas réciproquement la consécution d'existence, Les exemples que cite Aristote obscurcissent la pensée. Je n'ai pu trouver une traduction plus claire que celle que j'ai donnée. — Réciproquement l'existence d'une autre, Qui implique l'existence de la première.

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