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à la tête du septieme livre de ses fables, qu'il avoit jugé à propos de donner à la plupart des suivantes un air et un tour un peu différent de celui qu'il avoit donné aux premieres, pour des raisons dont on auroit pu tirer un profit considérable, si La Fontaine eût voulu nous les expliquer avec plus de précision, au lieu d'en laisser le soin à ses lecteurs, comme il a trouvé bon de le faire. J'ai remis cet avertissement à sa place, d'où il avoit été chassé par une licence tout-à-fait inexcusable.

Voilà tout ce que j'ai fait pour rendre cette édition plus parfaite que toutes celles qui paroissent depuis long-temps. Tout cela, dans le fond, se réduit à peu de chose. In tenui labor. Mais je serai plus que satisfait de ce travail, quelque peu considérable qu'il soit, si sur le tout je puis dire que, sans mériter des louanges, je me suis mis hors de bláme.

Non laudem merui,

Vitavi denique culpam,
Hon. Art. poet

AVERTISSEMENT

SUR L'ÉDITION DE 1746,

lequel est lié nécessairement avec le précédent.

J'ALLOIS commencer cet avertissement par rendre compte en peu de mots des avantages de cette nouvelle édition sur celle de 1743, quand j'ai appris que j'étois sévèrement critiqué pour avoir rempli l'édition de 1743 de notes puériles, triviales et fort communes. C'est, dit mon délicat censeur, ce que je me suis proposé dans les définitions des mots les plus communs, les plus usités, les plus familiers; mais bien éloigné de faire ces définitions-là, je n'y ai ni songé, ni pu songer, comme je le vais démontrer avec la derniere évidence. L'auteur de ces notes, qui m'ont toujours paru à-peu-près aussi triviales et enfantines qu'à mon censeur, les a publiées, il y a plus de vingt dans une édition accompagnée d'une approbation signée par M.de Fontenelle, le 7 juillet 1715; et c'est pour les enfants qu'il les a composées, comme il le déclare lui-même dans un petit avis au lecteur de cette premiere édition faite à Paris, ces notes enfantines ont passé dans plusieurs éditions imprimées à Paris, à Amsterdam et ailleurs, où elles fourmillent encore, toujours copiées d'après l'édition de 1715. Et voilà qui démontre évidemment que ce n'est pas à moi qu'ap

ans,

:

partiennent les notes enfantines qui d'une de ces anciennes éditions sont entrées dans la mienne, et qu'il n'est pas possible que je, me sois proposé de les composer moi-même.

:

Que dirai-je maintenant du censeur qui me les a imputées tout ouvertement? Rien qui puisse lui déplaire c'est que, quoiqu'elles ne m'appartiennent pas plus à moi qu'à lui-même, il ne pouvoit que me les attribuer, les voyant confondues avec les miennes. C'étoit à moi à les distinguer; et d'abord, pour en venir là, je me suis proposé de les faire voir, dans cette nouvelle édition, marquées par des lettres de notre alphabet. Mais, après avoir employé cinq ou six minutes à cet ennuyeux travail, je me suis déterminé tout d'un coup à l'abandonner. Ayant considéré que, pour donner distinctement toutes ces notes à leur auteur, je devois prendre la peine de les recueillir une à une d'un exemplaire où elles ont été imprimées depuis long-temps, j'en ai ouvert un, imprimé à Amsterdam en 1722 et muni de l'approbation que je viens de citer. A cette occasion, m'étant avisé d'observer ces notes avec plus d'attention que je n'avois fait auparavant, j'ai vu qu'en effet elles sont pour la plupart très enfantines, trop triviales, trop communes, sans compter celles que de vaines répétitions rendent extrêmement dégoûtantes; et sur-le-champ je les ai chassées presque toutes de la copie de cette nouvelle édition, comme absolument indignes de reparoître aux yeux du public.

(

Je vais présentement indiquer en peu de mots les avantages de cette nouvelle édition sur celle de 1743. Plus agréable au public, par cela même qu'elle sera dégagée de ce fatras de notes triviales et enfantines dont celle-ci avoit été embrouillée, elle plaira davantage encore par la beauté du caractere, et par la restitution du vrai texte des fables de La Fontaine, lesquelles charmeront toujours l'esprit des lecteurs par la noble simplicité et le tour inimitable dont elles sont écrites.

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Quoique l'édition de 1743, imprimée d'après les meilleures qui aient paru du vivant de La Fontaine, ait été très bien reçue du public, j'ose dire que celle-ci à qui elle a servi de copie lui est supérieure, parceque j'ai épuré de quelques fautes d'impression assez considérables l'exemplaire qui a été mis entre les mains du compositeur, et que j'y ai rectifié la ponctuation en plusieurs endroits; réparation dont bien des lecteurs profiteront sans s'en appercevoir.

On trouvera d'ailleurs dans cette édition plusieurs notes toutes nouvelles, qui m'ont paru nécessaires. Sans m'arrêter ici à faire voir de quelle importance' elles peuvent être, ce que je dois laisser au jugement du public, je conclus, de ces petits avantages, que cette édition a gagné sur celle de 1743, qu'elle pourra fort bien servir de modele à toutes celles

(1) Savoir, celle qui fut imprimée in-4°. en 1668; une autre án-12, publiée en 1678; et un

qu'on fera à l'avenir,

petit volume publié en 1694, qui contient les fables dont est composé le douzieme livre.

pourvu qu'on veuille bien prendre la peine de l'accompagner d'un bon errata.

Nul livre dont on fait plusieurs éditions no peut être conservé dans sa pureté originale sans cette précaution, qui ne peut être trop fortement recommandée, et que j'indique ici aux libraires en faveur des fables de La Fontaine : car comme il échappe toujours de nouvelles fautes dans la nouvelle édition d'un livre (ce que tout correcteur reconnoît sans peine, et dont tout lecteur attentif est aisément convaincu), il est impossible qu'un livre ne soit insensiblement défiguré par les éditions qu'on continue d'en faire, si l'on néglige d'en marquer constamment les fautes dans un errata fort exact. Il en est d'un bon errata comme des digues de la Hollande: ces digues bien entre tenues empêchent que la Hollande ne soit submergée. Un errata exact empêche de même qu'un bon livre ne soit gâté par les fautes qui s'y glissent nécessairement toutes les fois qu'on l'imprime et qu'enfin il n'en soit inondé jusqu'à devenir le jouet et le mépris de ceux qui sans cela l'auroient acheté avec empressement.

Une autre chose dont je me crois obligé d'avertir encoret e pubiic, c'est que cette édition ayant été composée d'après les trois éditions que je viens d'indiquer, les meilleures sans doute qui aient paru du vivant de La Fontaine, elle est par cela même fort au-dessus de celles qui paroissent depuis long-temps, où l'on a inséré des pieces qui ne se trouvent point dans le dernier volume des fables, imprimé en 1694,

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