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transportées en même sorte de C vers D, il faudroit dire aussi qu'elle se meut vers le côté opposé, à savoir du levant au couchant, et il y auroit en cela trop d'embarras; c'est pourquoi nous nous contenterons de dire que les corps AB et CD, et autres semblables, se meuvent, et non pas la terre. Mais cependant nous nous souviendrons que tout ce qu'il y a de réel dans les corps qui se meuvent, en vertu de quoi nous disons qu'ils se meuvent, se trouve pareillement en ceux qui les touchent, quoique nous les considérions comme en repos.

à

Mais encore que chaque corps en particulier n'ait qu'un seul mouvement qui lui soit propre, à cause qu'il n'y a qu'une certaine quantité de corps qui le touchent, et qui soient en repos son égard, toutefois il peut participer à une infinité d'autres mouvements, en tant qu'il fait partie de quelques autres corps qui se meuvent diversement. Par exemple, si un marinier se promenant dans son vaisseau porte sur soi une montre, bien que les roues de sa montre n'aient qu'un mouvement unique qui leur soit propre, il est certain qu'elles participent aussi à celui du marinier qui se promène, parcequ'elles composent avec lui un corps qui est transporté tout ensemble; il est certain aussi qu'elles participent à celui du vaisseau, et même à celui de la mer, parcequ'elles suivent

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32. Comment le

unique pro

son cours; et à celui de la terre, si on suppose que la terre tourne sur son essieu, parcequ'elles composent un corps avec elle: et bien qu'il soit vrai que tous ces mouvements sont dans les roues de cette montre, néanmoins, parceque nous n'en concevons pas ordinairement un si grand nombre à la fois, et que même il n'est pas en notre pouvoir de connoître tous ceux auxquels elles participent, il suffira que nous considérions en chaque corps celui qui est unique et duquel nous pouvons avoir une connoissance certaine.

Nous pouvons même considérer ce mouvement mouvement unique qui est proprement attribué à chaque corps comme s'il étoit composé de plusieurs autres mouqui est unique vements, tout ainsi que nous en distinguons deux. dans les roues d'un carrosse, à savoir un circulaire,

prement dit,

en chaque

corps, peut

aussi être pris

pour

plusieurs.

qui se fait autour de leur essieu, et l'autre droit, qui laisse une trace le long du chemin qu'elles parcourent. Toutefois il est évident que ces deux mouvements ne diffèrent pas en effet l'un de l'autre, parceque chaque point de ces roues, et de tout autre corps qui se meut, ne décrit jamais plus d'une seule ligne : et n'importe que cette ligne soit souvent tortue, en sorte qu'elle semble avoir été produite par plusieurs mouvements divers; car on peut imaginer que quelque ligne que ce soit, même la droite, qui est la plus simple de toutes, a été décrite par une infinité de tels mouvements.

Par exemple', si, en même temps que la ligne AB tombe sur CD, on fait avancer son point A vers B, la ligne AD, qui sera décrite par le point A, ne dépendra pas moins des deux mouvements de A vers B et de AB sur CD, qui sont droits, que la ligne courbe qui est décrite par chaque point de la roue dépend du mouvement droit et du circulaire. Et, bien qu'il soit utile de distinguer quelquefois un mouvement en plusieurs parties, afin d'en avoir une connoissance plus distincte, néanmoins, absolument parlant, nous n'en devons jamais compter plus d'un en chaque corps.

33. Comment en

chaque mou

vement il doit

y avoir tout

un cercle ou

anneau de

meuvent

ensemble.

Après ce qui a été démontré ci-dessus, à savoir que tous les lieux sont pleins de corps, et que chaque partie de la matière est tellement proportionnée à la grandeur du lieu qu'elle occupe, qu'il n'est pas possible qu'elle en remplisse un plus corps qui se grand, ni qu'elle se resserre en un moindre, ni qu'aucun autre corps y trouve place pendant qu'elle y est, nous devons conclure qu'il faut nécessairement qu'il y ait toujours un cercle de matière ou anneau de corps qui se meuvent ensemble en même temps; en sorte que quand un corps quitte sa place à quelque autre qui le chasse, il entre en celle d'un autre, et cet autre en celle d'une autre, et ainsi de suite jusques au dernier, qui occupe au même instant le lieu délaissé

par

le

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premier. Nous concevons cela sans peine en un cercle parfait, à cause que, sans recourir au vide et à la raréfaction ou condensation, nous voyons1 que la partie A de ce cercle peut se mouvoir vers B, pourvu que sa partie B se meuve en même temps vers C, et C vers D, et D vers A. Mais on n'aura pas plus de peine à concevoir cela même en un cercle imparfait et le plus irrégulier qu'on sauroit imaginer, si on prend garde à la façon dont toutes les inégalités des lieux peuvent être compensées par d'autres inégalités qui se trouvent dans le mouvement des parties: en sorte que toute la matière qui est comprise en l'espace EFGH peut se mouvoir circulairement, et sa partie qui est vers E passer vers G, et celle qui est vers G passer en même temps vers E, sans qu'il faille supposer de condensation ou de vide, pourvu que, comme❜ on suppose l'espace G quatre fois plus grand que l'espace E, et deux fois plus grand que les espaces Fet H, on suppose aussi que son mouvement est quatre fois plus vite vers E que vers G, et deux fois plus que vers F ou vers H, et qu'en tous les endroits de ce cercle la vitesse du mouvement compense la petitesse du lieu; car par ce moyen il est aisé de connoître qu'en chaque espace de temps qu'on voudra déterminer il passera tout

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autant de matière dans ce cercle par un endroit

que par l'autre.

Toutefois il faut avouer qu'il y a quelque chose

34.

là que la matière se divise en des parties

innombra

bles.

en ce mouvement que notre esprit conçoit être qu'il suit de vrai, mais que néanmoins il ne sauroit comprendre, à savoir une division de quelques parties de indéfinies et la matière jusques à l'infini, ou bien une division indéfinie, et qui se fait en tant de parties, que nous n'en saurions déterminer de la pensée aucune si petite que nous ne concevions qu'elle est divisée en effet en d'autres plus petites ; car il n'est pas possible que la matière qui remplit maintenant l'espace G remplisse successivement tous les espaces qui sont entre G et E, plus petits les uns que les autres, par des degrés qui sont innombrables, si quelqu'une de ses parties ne change sa figure, et ne se divise ainsi qu'il faut pour emplir tout justement les grandeurs de ces espaces qui

sont différentes les unes des autres et innombrables: mais, afin que cela soit, il faut que toutes les petites parcelles auxquelles on peut imaginer qu'une telle partie est divisée, lesquelles véritablement sont innombrables, s'éloignent quelque peu les unes des autres; car, si petit que soit cet éloignement, il ne laisse pas d'être une vraie division.

35. Que nous ne devons point douter que

Il faut remarquer que je ne parle pas de toute la matière, mais seulement de quelqu'une de ses parties: car, encore que nous supposions qu'il y a deux cette division

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