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qu'ils avaient embrassée. Aux pratiques pieuses du cloître, ils ont joint l'étude approfondie des sciences humaines. Philosophie, littérature, histoire, critique, beaux-arts, sciences exactes et industrielles, rien ne leur a été étranger, et grâce à l'inaltérable patience qui brillait au nombre de leurs plus belles vertus, grâce à des travaux assidus qui absorbaient la vie tout entière, non pas seulement d'un seul homme, mais de plusieurs hommes, ils ont amassé dans l'ordre intellectuel des trésors immenses, auxquels viennent puiser tous les jours après eux, ceux qui ont hérité de leur ardent amour pour les sciences et les lettres.

Des hommes éminents en savoir et en sainteté dirigeaient ces illustres enfants du cloître. Ils avaient avant tout pour but de leur faire conserver l'esprit de leur état, de les préserver des séductions et des préoccupations mondaines. Les ont-ils cependant détournés de ces études, de ces recherches scientifiques et littéraires? Bien loin de là, Messieurs, ils les ont encouragés au contraire; souvent ils leur en ont fait une obligation consciencieuse. Pourquoi? Parce qu'ils savaient que c'était un moyen précieux de rendre à la société d'immenses services, et, en échange des biens temporels qu'ils en avaient reçus, de lui offrir des biens d'un ordre tout à fait supérieur, les biens de l'intelligence et de la pensée.

Et un autre avantage est venu, comme par surcroît, se joindre à ce premier résultat. En même temps qu'ils ont fait le bien pour les autres, ils l'ont fait aussi pour euxmêmes. Par cette heureuse communauté d'efforts, de sacrifices et de dévouements pour se rendre utiles, ils ont senti se resserrer encore davantage les liens de fraternité qui déjà les unissaient devant Dieu et devant les hommes,

et, on l'a remarqué dans tous les temps, les congrégations religieuses qui ont le mieux conservé l'esprit de leur vocation, c'est-à-dire l'esprit de paix, de charité, de bienveillance, ce sont précisément celles qui se sont livrées avec le plus d'ardeur à l'étude des sciences et des lettres.

Ce sentiment, Messieurs, ne s'est pas perdu au milieu de nous. Il a survécu à la ruine de ces savantes congrégations auxquelles maintenant, plus que jamais, on s'accorde à rendre justice. Partout encore, il se trouve des hommes de cœur et de génie qui se recherchent les uns les autres, afin de se livrer ensemble aux travaux de l'intelligence, et les rapports qui s'établissent entre eux, sont, par la nature du but qu'ils se proposent, pleins de douceur, de cordialité et de confiance.

Voilà l'origine de ces associations intellectuelles, de ces Académies qui se multiplient tous les jours sous nos yeux; voilà aussi ce qui en forme le lien principal, ce qui les rend solides et durables. Elles sont donc un bien, un véritable bien, non-seulement pour les membres qui les composent, mais encore pour la société tout entière. Puisse cet esprit s'étendre, se propager de plus en plus ! Ce sera une précieuse compensation à l'esprit d'intérêt et d'égoïsme qu'on reproche si souvent, peut-être même trop souvent, à notre siècle.

Messieurs, il ne m'appartient pas de faire l'éloge du corps savant que j'ai l'honneur de présider aujourd'hui pour la dernière fois. Dans ma bouche, cependant, cet éloge serait moins suspect que dans toute autre, puisque je n'aurais rien à en revendiquer pour moi-même. Mais qu'il me soit permis de le dire ici en finissant, cette

amitié, cette confraternité littéraires que je viens de décrire, bien imparfaitement sans doute, je les ai constamment trouvées parmi mes confrères; et si j'ai la confusion de les représenter si mal au milieu de cette Assemblée, je suis du moins heureux et fier de pouvoir leur rendre ce public et solennel témoignage.

CLASSE DES SCIENCES.

Rapport

FAIT

PAR M. J. GIRARDIN,

SECRÉTAIRE perpétuel de LA CLASSE DES SCIENCES.

MESSIEURS,

En prenant pour la première fois la parole comme organe officiel de la classe des Sciences de l'Académie, je reporterai tout d'abord vos souvenirs sur mon honorable prédécesseur, dont le brusque départ a causé dans cette ville de si justes et de si unanimes regrets. M. Levy a occupé avec une grande distinction, et à deux reprises différentes, les délicates fonctions de secrétaire perpétuel. Il m'est agréable de vous rappeler avec quel talent il résumait les questions les plus abstraites, avec quel art il exposait les travaux si divers de ses confrères, avec quelle facilité il savait faire parler aux sciences le langage de la raison.

SCIENCES

En présence de l'obligation qui m'est imposée de présenter, après lui, un tableau fidèle des occupations scientifiques annuelles de l'Académie, je sens renaître toutes les hésitations qui sont venues m'assiéger lorsque j'ai été appelé à l'honneur de lui succéder. Ce qui m'enhardit quelque peu, c'est de savoir qu'un auditoire est d'autant plus porté à l'indulgence qu'il est plus éclairé et plus intelligent.

Toutes les sciences, vous le savez, Messieurs, se prêtent un mutuel appui, et les progrès de l'une ne sont pas sans influence sur la marche et le développement des autres. Toutes, d'ailleurs, viennent plus ou moins aboutir à des applications qui rendent les conditions de la vie commune plus faciles et plus douces, et qui servent, elles aussi, aux progrès des sciences dont elles dérivent; car les applications mettent les doctrines à l'épreuve, et l'erreur ne peut subsister longtemps. Il est donc rationnel d'envisager toutes les branches des connaissances humaines sous le double point de vue de la théorie et de la pratique ; c'est ce que comprend l'Académie, qui n'a jamais séparé l'art de la science, qui a constamment cherché à faire servir les données les plus élevées de l'observation et de l'expérience à l'amélioration matérielle et morale de la Société. Cette année encore, vous allez en acquérir la preuve, notre compagnie, fidèle à sa grande mission, a accueilli avec le même intérêt les spéculations de la théorie et les résultats positifs de la pratique industrielle.

Je commencerai cette revue rétrospective, par ce qui a MATHÉMATIQUES trait aux mathématiques, qui viennent en aide à toutes les sciences sans exception, et qui en sont, pour ainsi dire, l'instrument le plus précieux.

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