LE MISANTHROPE COMÉDIE ÉDITION PUBLIÉE CONFORMÉMENT AU TEXTE DES GRANDS ÉCRIVAINS DE LA FRANCE AVEC UNE NOTICE, UNE ANALYSE ET DES NOTES PHILOLOGIQUES ET LITTÉRAIRES PAR R. LAVIGNE Agrégé des lettres, professeur au lycée Henri IV PARIS LIBRAIRIE HACHETTE ET CIE 79, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, 79 1882 AVERTISSEMENT Dans cette édition du Misanthrope, comme dans celles que nous avons données de l'Avare et du Tartuffe, de Molière, de l'Andromaque et des Plaideurs, de Racine, nous ne nous proposons qu'un but: offrir aux jeunes gens un texte pur et les conduire, par la lecture de ces vers, d'un style si fort et si original, à la connaissance de la langue française. Nous bornerons donc nos remarques à quelques notes, surtout philologiques et grammaticales, sans négliger toutefois de donner les renseignements historiques et les explications littéraires que le sujet réclame. MM. les professeurs de rhétorique complèteront notre humble travail : nous n'avons pas eu la prétention de nous substituer à eux et d'empiéter sur leur cominentaire, le plus vivant, et par là le meilleur de tous; nous avons voulu simplement fixer en quelque sorte, par avance, aux yeux des élèves, quelques-unes des observations qui leur seront faites: scripta manent. Notre texte est celui de l'édition des Grands écri LE MISANTHROPE. vains de la France, publiée à la librairie Hachette et Cie, sous la savante direction de M. Régnier. Nous avons profité pour nos remarques des travaux de M. Eugène Despois, malheureusement interrompus par la mort, et que MM. Desfeuilles et Paul Mesnard ont continués avec un soin si scrupuleux. R. LAVIGNE. NOTICE SUR LE MISANTHROPÉ Je relis sans cesse le Misanthrope, comme une des pièces du monde qui me sont les plus chères, » disait Goethe dans un de ses Entretiens recueillis par Eckermann. Le poète philosophe trouvait dans la comédie de Molière une peinture spirituelle de la société française au dix-septième siècle, et une étude approfondie du cœur humain. C'est sans doute pour la même raison que Boileau estimait particulièrement le Misanthrope et que Voltaire écrivait sans hésiter: «L'Europe regarde cet ouvrage comme le chefd'œuvre du haut comique 1. » Toutefois, s'il faut en croire une tradition fort accréditée?, la pièce qui a réuni tant d'illustres suffrages n'aurait pas eu ceux du public et serait même tombée dès la quatrième représentation sans le secours du Médecin malgré lui, que Molière s'empressa d'ajouter sur l'affiche pour la soutenir. Nous n'avons besoin d'invoquer sur ce point aucun témoignage le registre de La Grange, qui nous fournit un tableau exact des recettes de la troupe de Molière, est le plus fidèle et le plus sûr des documents. 1. Sommaire des pièces de Molière. 2. Elle remonte à Grimarest (Vie de M. de Molière); il affirme, ce qui est absolument contraire à la vérité, que l'auteur dut ajouter le Médecin malgré lui au Misanthrope dès la quatrième représentation. Voltaire dit que la pièce eut le premier jour les applaudissements qu'elle méritait, mais que dès le troisième le théâtre fut désert. -- |