Page images
PDF
EPUB

(3) Des enfans de Japet. Audax Iapeti genus, a dit Horace : enclins aux forfaits comme ce Prométhée, fils de Japet, coupable pour avoir dérobé le feu du ciel, dont il anima l'homme. Le seul mot du poète fait toute l'histoire de la race humaine.

(4) Toujours une moitié

Fournira des armes à l'autre. L'image est juste, elle est fondée sur une expérience de tous les momens; mais l'application n'en est peut-être pas assez exacte, parce que ces armes ne viennent point de notre substance, comme les plumes de l'Oiseau.

Cet apologue fut mis en jeu par Julien l'Apostat, lorsqu'il voulut rendre raison de l'édit par lequel il défendoit aux chrétiens la lecture des livres grecs, et l'exercice des belles-lettres (Camer. pag. 144).

FABL E V I I.

La Lice et sa Compagne.

(Avant La Fontaine). ORIENTAUX. Sandaber, fab. 2. — LATINS. Phèdre, L. I. fab. 19. Justin, Histor. L. XLIII. ch. 4. Camérar. pag. 173.

UNE Lice étant sur son terme (1),

pressant,

Et ne sachant où mettre un fardeau si
Fait si bien, qu'à la fin sa compagne consent (2)
De lui prêter sa hutte, où la Lice s'enferme.
Au bout de quelque temps sa compagne revient.
La Lice lui demande encore une quinzaine.
Ses petits ne marchoient, disoit-elle, qu'à peine.
Pour faire court, elle l'obtient.

Ce second terme échu, l'autre lui redemande
Sa maison, sa chambre, son lit (3).

La Lice cette fois montre les dents, et dit:
Je suis prête à sortir avec toute ma bande (4),

Si vous pouvez nous mettre hors.
Ses enfans étoient déjà forts.

Ce qu'on donne aux méchants, toujours on le regrette(5).
Pour tirer d'eux ce qu'on leur prête,

Il faut que l'on en vienne aux coups;
Il faut plaider, il faut combattre.
Laissez-leur prendre un pied chez vous,
Ils en auront bientôt pris quatre.

(Depuis La Fontaine). FRANÇAIS. Fables en chans. L. I. fab. 8. NOTES D'HISTOIRE NATURELLE..

LICE, grosse Chienne. La Chienne porte cinq ou six petits à la fois, quelquefois davantage. Le temps de sa portée dure deux mois et deux ou trois jours. La mère lêche sans cesse ses petits, et avale leur urine et leurs excrémens, pour qu'il n'y ait aucune ordure dans son lit. Quand on lui enlève ses petits, elle va les chercher, les prend à sa gueule, et les rapporte dans sa cabane avec beaucoup d'attention. C'est-là où sa tendresse éclate; elle poursuit d'un air inquiet le ravisseur, elle réclame avec instance et même avec menaces.

OBSERVATIONS DIVERSES.

:

(1) Une Lice étant sur son terme. La prose diroit: touchant à son terme. La poésie plus précise, avec moins d'exactitude peutêtre, hasarde étant sur son terme. La Lice fait plus qu'y toucher, elle l'a atteint, elle y est. Cette situation rend plus pressante la demande de l'animal. Ce n'est qu'à la dernière extrémité qu'elle emprunte, tant il lui coûte de devoir! Le moyen de refuser?

(2) Fait si bien, qu'à la fin sa compagne consent. Le fardeau est si pressant! une étrangère seroit trop cruelle de lui refuser sccours, à plus forte raison sa compagne. Fait si bien qu'à la fin.

Encore ne l'obtiendra-t-elle qu'à force de sollicitations, tant celle-ci tient à sa propriété !

(3) Sa maison, sa chambre, son lit. Pas un mot oiseux pas un mot synonyme. Sa maison. On a bien le droit de redemander une maison que l'on a prêtée. Hors de chez soi, où peut-on se loger? Sa chambre. Cette maison n'est pas si vaste qu'on puisse la partager. C'est une chambre en tout. Son lit La chose de toutes la plus nécessaire, celle qui se prête le moins. Et voilà si long-temps qu'on en a fait le sacrifice!

(4) Je suis prête à sortir avec toute ma bande. Elle a bien soin de le déclarer ce n'est pas à elle seule que l'on aura affaire, mais à une bande entière, et bande de voleurs.

(5) Ce qu'on donne aux méchans, toujours on le regrette. J. Meschinot, dans son poëmc des Lunettes des Princes:

L'on perd ce qu'aux ingrats on donne.

Marseille, bâtie par une colonie de Phocéens, s'étoit rendue, dès sa naissance, redoutable aux peuples qui lui avoient permis de s'établir au milieu d'eux. Coman, successeur de Nannus, roi des Sigobriens, voulant engager ces peuples à s'armer contre la ville nouvelle, commence par la rendre odieuse, et la peint à leurs yeux comme la Lice de cet apologue, qui, dit-il, se voyant prés de mettre bas, supplie un berger du voisinage de lui prêter, par grace, un lieu pour y déposer ses petits. A ce premier service il faut bientôt joindre celui de permettre qu'on restât tout le temps nécessaire à l'éducation de ses petits. A la fin, ces mêmes petits étant déjà forts, et la Lice' se sentant bien escortée, s'adjugea elle-même la propriété du lieu.

FABLE VIII.

L'Aigle et l'Escarbot.

(Avant La Fontaine). GRECS. Esope, fab. 2. Planude ( Vie d'Esope, pag. 79, édit. de Nevelet, 47. ed. Rob. Steph. 1529 ). LATINS. Erasmus, ap. Camerar. pag. 464.

L'AIGLE donnoit la chasse à maître Jean Lapin (1),
Qui droit à son terrier s'enfuyoit au plus vîte.
Le trou de l'Escarbot se rencontre en chemin.
Je laisse à penser si ce gîte

Etoit sûr; mais où mieux? Jean Lapin s'y blottit.
L'Aigle fondant sur lui, nonobstant cet asile (2),
L'Escarbot intercède et dit :

Princesse des Oiseaux (3), il vous est fort facile
D'enlever, malgré moi, ce pauvre malheureux;
Mais ne me faites pas cet affront, je vous prie ;
Et puisque Jean Lapin vous demande la vie,
Donnez-la lui, de grace, ou l'ôtez à tous deux (4) :
C'est mon voisin, c'est mon compère.

L'Oiseau de Jupiter, sans répondre un seul mot (5),
Choque de l'aile l'Escarbot,

L'étourdit, l'oblige à se taire,

Enlève Jean Lapin. L'Escarbot indigné,

Vole au nid de l'Oiseau, fracasse, en son absence, Ses œufs, ses tendres œufs, sa plus douce espérance(6): Pas un seul ne fut épargné (7).

L'Aigle étant de retour, et voyant ce ménage,

:

1

Remplit le ciel de cris; et, pour comble de rage,
Ne sait sur qui venger le tort qu'elle a souffert.
Elle gémit en vain; sa plainte au vent se perd.
Il fallut, pour cet an, vivre en mère affligée.
L'an suivant, elle mit son nid en lieu plus haut.
L'Escarbot prend son temps, fait faire aux œufs le saut:
La mort de Jean Lapin de rechef est vengée.

Ce second deuil fut tel, que l'écho de ces bois
N'en dormit de plus de six mois (8).

L'Oiseau qui porte Ganimède (9),

Du Monarque des Dieux enfin implore l'aide (10),
Dépose en son giron ses œufs, et croit qu'en paix
Ils seront dans ce lieu; que pour ses intérêts,
Jupiter se verra contraint de les défendre:
Hardi qui les iroit là prendre.
Aussi ne les y prit-on pas.

Leur ennemi changea de note (11);
Sur la robe du Dieu fit tomber une crote:
Le Dieu la secouant, jeta les œufs à bas.
Quand l'Aigle sut l'inadvertance,

Elle menaça Jupiter

D'abandonner sa cour, d'aller vivre au desert;

De quitter toute dépendance;

Avec mainte autre extravagance.
Le pauvre Jupiter se tut.

Devant son tribunal l'Escarbot comparut,
Fit sa plainte, et conta l'affaire.

On fit entendre à l'Aigle enfin qu'elle avoit tort.
Mais les deux ennemis ne voulant point d'accord,
Le Monarque des Dieux s'avisa, pour bien faire,

« PreviousContinue »