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Ne point céler sa maladie,

Lui Loup gratis le guériroit :

Car le voir dans cette prairie

Paître ainsi sans être lié

Témoignoit quelque mal, selon la médecine.
J'ai, dit la bête chevaline,

Une apostume sous le pied.

Mon fils, dit le Docteur, il n'est point de partie
Susceptible de tant de maux.

J'ai l'honneur de servir nosseigneurs les Chevaux,
Et fais aussi la Chirurgie.

Mon galant ne songeoit qu'à bien prendre son temps,
Afin de haper son malade.

L'autre, qui s'en doutoit, lui lâche une ruade,
Qui vous lui met en marmelade

Les mandibules (5) et les dents.

C'est bien fait, dit le Loup en soi-même fort triste;
Chacun à son métier doit toujours s'attacher.

Tu veux faire ici l'Herboriste,
Et ne fus jamais que Boucher.

(Depuis La Fontaine). FRANÇAIS. Fables en chansons, L. II. LATINS. Le Beau, Carmina, pag. 19.

fab. 50.

OBSERVATIONS DIVERSES.

(1) Ont l'herbe rajeunie. La transposition ne sauve pas titude: on voit bien que rajeunie est pour la rime; mais

La rime est une esclave, et ne doit qu'obéir.

l'inexac

Du reste, nous croyons que cette légère imperfection, est la seule à relever dans cette narration. L'enjouement qu'elle respire, la fine plaisanterie qui l'assaisonne feroient oublier bien des fautes même plus importantes. Esope a manqué son sujet, en y plaçant

un âne au lieu du cheval. L'âne a sans doute des qualités; mais l'esprit n'est pas son côté brillant.

(2) Qu'on avoit mis au vert. Dans le pré, à l'herbe verte.

(3) Tu me serois hoc. Tu serois à moi. Par allusion à une sorte de jeu de cartes qu'on nomme le Hoc, où l'on dit hoc en jetant sur le tapis certaines cartes qui font gagner ceux qui les jouent. (Coste.)

(4) Ecolier d'Hippocrate, Médecin. Hippocrate tient une place distinguée dans l'histoire du génie. Il naquit un peu moins de 500 ans avant l'ère chrétienne. Nous avons de ce père de la médecine des ouvrages qui en font encore, après tant de siècles, le bienfaiteur de l'humanité.

(5) Les mandibules. Rabelais: A l'autre feut démanchée la mandibule supérieure ( Pantagr. L. IV. ch. 15; et plus bas : le recors démandibulé ).

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(Avant La Fontaine), GRECS. Esope, fab. 22 et 174. LATINS. Faerne, fab. 35.

TRAVAILLEZ, prenez de la peine:

C'est le fonds qui manque le moins (1).

Un riche Laboureur, sentant sa mort prochaine, Fit venir ses enfans, leur parla sans témoins. Gardez-vous, leur dit-il, de vendre l'héritage Que nous ont laissé nos parens :

Un trésor est caché dedans.

Je ne sais pas l'endroit ; mais un peu de courage Vous le fera trouver; vous en viendrez à bout. Remuez votre champ dès qu'on aura fait l'oût (2).

Creusez, fouillez, bêchez, ne laissez nulle place

Où la main ne passe et repasse.

Le père mort, les fils vous retournent le champ,
Deçà, delà, par-tout; si bien qu'au bout de l'an
Il en rapporta davantage.

D'argent, point de caché. Mais le père fut sage
De leur montrer avant sa mort,
Que le travail est un trésor.

(Depuis La Fontaine). FRANÇAIS. Benserade, fab. 169. Fables en chansons, L. IV, fab. 44.—LATINS. Jaius, Bibl. Rhetor. T. I. pag. 753. Desbillons, L. V. fab. 7. - ITAL. Luig. Grillo, fav. 32.

OBSERVATIONS DIVERSES.

(1) Travaillez, prenez de la peine :

C'est le fonds qui manque le moins. La précision de ees vers nuit à leur clarté. Le poète veut dire que le défaut de succès ne vient point de la terre, mais de l'homme, et que le produit est toujours en raison de la culture.

(2) Dès qu'on aura fait l'Out. Après la moisson, qui se fait au mois d'Août. On dit encore dans les campagnes: faire l'Août.

་་.

FABLE X.

La Montagne qui accouche.

FRANÇAIS.

(Avant La Fontaine), LATINS. Phèdre, Liv. IV. fab. 20. Anonyme, fab. 25. Horace (Art Poét. v. 139). Rabelais, Pantagr. L. III. ch. 24, pag. 132.

UNE Montagne en mal d'enfant,

Jetoit une clameur si haute,
Que chacun, au bruit accourant,
Crut qu'elle accoucheroit, sans faute,
D'une Cité plus grosse que Paris :
Elle accoucha d'une Souris (1)

Quand je songe à cette fable,
Dont le récit est menteur,
Et le sens est véritable,

Je me figure un Auteur,

Qui dit : Je chanterai la guerre

Que firent les Titans au maître du tonnerre.
C'est promettre beaucoup; mais qu'en sort-il souvent?

Du vent.

(Depuis La Fontaine). FRANÇAIS. Boursault, comédie des fables d'Esope, act. V. fab. 4. Fables en chansons, L. I. fab. 22. M. l'abbé Aubert, L. V. fab. 12 (*). Mérard S. Just, L. V. f. 14. ALLEM. Hagedorn. Voyez Lessing, Iere. Dissertation sur la Fable, p. 113, traduct. d'Antelmy. -ITAL. Luig. Grillo, fav. 62.

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(*) Aux cris que jette une Poule, on croit qu'elle va mettre un Eléphant au monde.

Dame Poule pondit un œuf.

De maint petit Auteur c'est l'image fidelle.

OBSERVATIONS DIVERSES.

(1) Rabelais : « La mocquerie est telle que de la Montaigne d'Horace, laquelle crioit et lamentoit énormément comme femme en travail d'enfant. A son cry et lamentation, accourut tout le voisinaige, en expectation de veoir quelcque admirable et monstrueux enfantement; mais enfin ne nasquit d'elle qu'une petite Souris ». Horace a renfermé ce sujet dans un seul vers, qui est un modèle inimitable de précision et d'harmonie imitative. Le ridiculus mus a été imité par La Fontaine dans ces derniers mots: Mais qu'en sort-il souvent ?

Du vent.

Peut-être Boileau est-il aussi précis qu'Horace, mais moins pittoresque :

La Montagne en travail enfante une Souris. (Art. Poét. ch. 3.) La fable de Boursault est plus chargée en description : ce n'étoit point une saillie, c'étoit un tableau que son genre exigeoit de lui. Hagedorn, pour se donner plus de carrière, imagine une espèce d'ordre composite; et il faut lui savoir au moins gré d'avoir reculé les bornes de l'art. Nous avons en déjà occasion de parler de cette fable. (Voyez plus haut, pag. 63.)

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LATINS

(Avant La Fontaine). GRECS. Esope, fab. 256. Abstemius, fab. 33. Rimicius, edit. Rob. Stephani, pag. 191.

SUR le bord d'un puits très-profond,

Dormoit, étendu de son long,
Un Enfant alors dans ses classes.

Tout est aux Ecoliers couchette et matelas.

Un honnête homme, en pareil cas
Auroit fait un saut de vingt brasses.
Près de-là tout heureusement

La Fortune passa, l'éveilla doucement

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