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(6) Fait folie. Dites fait une folie.

P. Pithou (sous le nom de M. D'Anbray) a fait une belle application de cet apologue, dans le discours qu'il suppose avoir été tenu à l'Asssemblée des Etats-Généraux, sous la Ligue : « Vous avez fait comme le cheval qui, pour se défendre du cerf, lequel il sentoit plus viste et plus vigoureux que lui, appela l'homme à son secours; mais l'homme lui mit un mors, etc. ». (Sat. Ménippée, T. I. p. 170.)

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(Avant La Fontaine ). GRECS. Esope, fab. 5 ( aliàs, fab. 11).
LATINS. Phèdre, L. I. fab. 7. L'Anonyme, 34. Faerne,

66.

LES
Es grands, pour la plupart, sont masques de théâtre:
• Leur apparence impose (1) au vulgaire idolâtre.
L'Ane n'en sait juger que par ce qu'il en voit:
Le Renard, au contraire, à fond les examine,
Les tourne de tout sens; et quand il s'apperçoit
Que leur fait n'est que bonne mine,
Il leur applique un mot qu'un buste de héros
Lui fit dire fort à propos.

C'étoit un buste creux et plus grand que nature.
Le Renard, en louant l'effort de la sculpture (2):
Belle téte, dit-il, mais de cervelle point!

Combien de grands Seigneurs sont bustes en ce point (3)!

(Depuis La Fontaine). FRANÇAIS. Boursant, comédie des Fables d'Ésope, act. I. sc. 3. Cesar de Missy (Paraboles ou Fables, etc. vol. in-8°. Londres, 1770) fab. 20. Fables en chansons, Liv. I. fab. 8. Richer Martelli, Liv. I. fab. 15 (les deux Singes et le

Masque). Mérard S. Just. Liv. VIII. fab. 4.-ALLEM. M. Lessing, fab. 14. ITAL. Grillo, fav. 3.

OBSERVATIONS DIVERSES.

(1) Leur apparence impose. Impose n'est plus français en ce sens. On impose un tribut; on en impose au peuple.

(2) Le Renard en louant, etc. La Mothe a censuré cette fable: Je me déclare

Pour le Renard gascon qui renvoie aux goujats

Des raisins mûrs qu'il n'atteint pas;

Mais il n'a plus sa grace naturelle

Avec la tête sans cervelle.

Son mot, est excellent; d'accord;
Mais un autre devoit le dire.

(Liv. I. fab. 4.)

Pourquoi, répondrai-je, cet animal, que la nature elle-même présentoit à l'apologue comme un modèle de finesse, ne seroit-il point capable de ce mot plein de finesse comme de vérité, sur-tout le mérite de l'épigramme consistant dans le mot lui-même, et non dans le personnage qui le dit?

(3) Combien de grands Seigneurs ; etc.

Prenez-le tête-à-tête, ôtez-lui son théâtre;

Ce n'est plus qu'un cœur bas, un coquin ténébreux;
Son visage essuyé n'a plus rien que d'affreux.

(Boileau, Epitr. IX.)

Il y avoit à Thèbes un certain homme appelé Renard, etc. (Palophat des Histoires incroyables, ch. 8.)

FABLE

X V.

Le Loup, la Chèvre et le Chevreau.

(Avant La Fontaine). GRECS. Esope, fab. 138. - LATINS. Anonyme, 29. Herman, edit. Robert. Stephani, pag. 122. Burman, Append. ad Phædr., fab. 32. Rimicius, L. II. f. 9. Anonyme dans l'Appendice du Phèdre de Barbou, pag. 135.

LA Bique (1) allant remplir sa traînante mamelle (2),
Et paître l'herbe nouvelle,

Ferma sa porte au loquet,
Non sans dire à son Biquet:
Gardez-vous, sur votre vie,
D'ouvrir que l'on ne vous die,
Pour enseigne et mot du guet,
Foin du Loup et de sa race!
Comme elle disoit ces mots,
Le Loup, de fortune (3), passe,
Il les recueille à propos,

Et les garde en sa mémoire.

La Bique, comme on peut croire,

N'avoit pas vu le glouton.

Dès qu'il la voit partie, il contrefait son ton,
Et d'une voix papelarde (4),

Il demande qu'on ouvre, en disant, foin du Loup!
Et croyant entrer tout d'un coup.

Le Biquet soupçonneux par la fente regarde: Montrez-moi patte blanche, ou je n'ouvrirai point, S'écria-t-il d'abord. Patte blanche est un point

Chez les Loups, comme on sait, rarement en usage.

Celui-ci fort surpris d'entendre ce langage,
Comme il étoit venu s'en retourna chez soi.

Où seroit le Biquet s'il eût ajouté foi

Au mot du guet, que, de fortune,
Notre Loup avoit entendu?

Deux sûretés valent mieux qu'une;
Et le trop en cela ne fut jamais perdu.

(Depuis La Fontaine). FRANÇAIS. Benserade, fab. 27. Fables

en chansons, L. I. fab. 6. LATINS.

Deshillons, L. III. fab. 8.

Le Beau (Carmina, p. 22).

OBSERVATIONS DIVERSES.

(1) Bique, Biquet. La Chèvre et son Chevreau.

(2) La Bique allant remplir sa traînante mamelle. On peut comparer ce vers à ce que Virgile a de plus beau, pour l'harmonie imitative. Du reste, je ne vois pas de remarques particulières à faire sur cette fable. Elle n'a point de ces beautés d'un ordre supérieur que l'on cite, que l'on retient; mais on y sent d'un bout à l'autre une aisance de style, une justesse d'expressions, une mollesse accompagnée d'une gaîté douce, ce molle atque facetum d'Horace, que l'on ne traduira jamais, parce que la grâce ne peut ni se copier, ni même se définir.

(3) De fortune. Par hasard. « Arrivant de fortune près l'église de Saint Léonard, etc.» (Hist. Maccaron. L. III. p. 77. ).

(4) D'une voix papelarde. Douce et mignarde. « Les abus d'un tas de papelards et faulx prophêtes ». (Pantagr. L. II. ch. 29.) Papelus, papelards, papelats, tous ces mots-là ont une source commune, l'injuste prévention contre le siege de Rome et ses adhérens. Papelard n'est d'usage qu'en substantif.

FABLE XV I.

Le Loup, la Mère et l'Enfant.

(Avant La Fontaine). GRECS. Esope, fab. 138. Aphtone, fab. 39. Avien, fab. 1. Faerne, fab. 76. Philibert Hegemon, f. 13.

CE Loup me remet en mémoire

Un de ses compagnons qui fut encor mieux pris.
Il y périt: voici l'histoire.

Un Villageois avoit à l'écart son logis:

Messer Loup attendoit chape-chûte (1) à la porte:
Il avoit vu sortir gibier de toute sorte,

Veaux de lait, Agneaux et Brebis,

Régiment de Dindons, enfin bonne provende (2).
Le larron commençoit pourtant à s'ennuyer.
Il entend un enfant crier.

La mère (3) aussitôt le gourmande,
Le menace, s'il ne se tait,

De le donner au Loup. L'animal se tient prêt,
Remerciant les Dieux d'une telle aventure:
Quand la mère, appaisant sa chère géniture,
Lui dit: Ne criez point; s'il vient, nous le tuerons.
Qu'est-ceci? s'écria le mangeur de Moutons :
Dire d'un, puis d'un autre! Est-ce ainsi que l'on traite
Les gens faits comme moi? Me prend-on pour un sot?
Que quelque jour ce beau marmot

Vienne au bois cueillir la noisette!...

Comme il disoit ces mots, on sort de la maison:

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