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longueur d'une demi-pique ; & le te- PESCHE DES nant attaché avec une corde, ils n'ont NEGRES. pas de peine à le retirer après l'avoir lancé.

Ils font fécher le petit poiffon, & mettent le grand en pieces. Mais comme ils ne le falent jamais, ils fe corrompt ordinairement avant que d'être fec. C'est alors qu'ils le trouvent meilleur & plus délicat. Les Pêcheurs vendent ce poiffon dans l'intérieur des terres, & pourroient en tirer un profit confidérable, s'ils avoient moins de pareffe à le transporter. Mais les Habitans & les Pêcheurs redoutant également le travail, il demeure quelquefois fur le rivage, jufqu'à ce qu'il foit entierement corrompu (4).

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Le nombre des Pêcheurs eft fort grand à Rufifco & dans d'autres lieux, fur les côtes voifines du Sénegal. Ils fe mettent ordinairement trois dans une Almadie ou un Canot, avec deux petits mâts qui ont chacun deux voiles, & quelquefois trois à l'imitation des grands Vaiffeaux. Si le tems n'eft pas orageux, ils fe hazardent quelquefois quatre ou cinq lieues en mer. L'heure de leur départ est toujours le matin avec le vent de terre. (4) Le Maire, ubi fup.

PESCHE DES NEGRES.

S'ils ont fini leur pêche, ils reviennent à midi avec le vent de mer. Lorsque le vent leur manque, ils fe fervent d'une forte de pelle pointue, avec laquelle ils rament fi vîte, que la meilleure Pinnace auroit peine à les fui

vre.

?

Avec la ligne, ils ont des filets de leur propre invention, compofés, comme leurs lignes, d'un fil d'écorce d'arbre. D'autres pêchent pendant la nuit,en tenant d'une main une longue piece d'un bois combuftible qui leur donne affez de jour; & de l'autre, un dard, dont ils ne manquent gueres le poiffon lorfqu'il s'approche naturellement de la lumiere. S'ils en trouvent de fort gros, ils les attachent avec une ligne à l'arriere de leur Canot, & les amenent ainsi jusqu'au rivage (5):

Les Négres de la Côte qui veulent pêcher dans le Sénegal', fe joignent quelquefois au nombre de trente ou quarante, pour en aller demander la permiffion au Seigneur de la riviere. Après l'avoir obtenue, ils paffent huit ou dix jours fur l'une ou l'autre rive, d'où ils prennent toutes leurs mefures

(5) Le Maire, p. 105, & Barbot, p. 41.

PESCHE DES

pour affurer le fuccès de leur entreprise. Leur méthode ordinaire (6) eft NEGRES. de gagner, avec de grands filets, le milieu de la riviere, les uns à gué lorfqu'ils en trouvent le moyen, d'autres à la nage. Enfuite faifant un demi-cercle, qui embraffe une affez grande étendue, ils fe rapprochent de la rive avec leurs filets, qu'ils tirent immédiatement à terre. Comme ils font fort adroits à cet exercice, ils, ne manquent gueres de faire une pêche abondante. Le droit du Seigneur est un vingtiéme de leur prife.

Ils ont une autre méthode pour la pêche du cheval marin. L'expérience leur ayant appris que ce monftre amphibie aime beaucoup (7) le feu, ils en allument un grand à cent pas de la rive, & fe cachent aux environs. Lorfqu'ils le voyent affez proche pour ne pouvoir leur échapper, ils le tuent à coups de fleches & de zagayes. En mourant, il jette un cri terrible Sa chair eft fort bonne, & l'on attribue à ses dents une vertu particuliere (8).

(6) Ibidem.

(7) Ily a ici quelque erreur; car on a vû lur d'autres témoignages, que cet animal craint le fea. Ainfi c'eft peut-être moins pour l'attirer hors de l'eau que

les Négres allument du
feu, que pour le faire for-
tir des plantations, & le
tuer lorfqu'il regagne la
riviere.

(8) Jannequin,

, P. 173

Cy

PESCHE DES

NEGRES.

CHASSE DES NEGRES.

Sur la Gambra, les Négres ont une maniere de pêcher, qui leur eft propre. Lorfque la riviere eft baffe, les femmes s'y rendent en grand nombre, pour prendre une forte de petits poiffons qui reffemblent à la Melette. Au lieu de filets, elles ont un affez long panier, au fond duquel elles ont mis pour amorce un morceau de pâte. Elles le tiennent quelques momens dans l'eau, & l'en retirent fi doucement qu'il ne s'en échappe rien. Les petits poiffons qu'elles y trouvent font jettés auffi-tôt fur un endroit fec de la rive, ou d'autres femmes les pilent dans un mortier de bois, pour en faire une pâte, qu'elles divifent en boules d'environ trois livres, & qui leur fervent pendant toute l'année. Cette provifion porte le nom qui lui convient le mieux; car les Négres l'appellent dans leur langue, Poiffon puant. C'est un de leurs mets les plus délicieux. Ils le mêlent (9) avec du riz & d'autres grains. L'Auteur rend témoignage qu'il en a quelquefois mangé de fort bon appétit (10).

Les Négres de la riviere de Gam

(9) Ce mets reffemble beaucoup au dabbaba de Gumée, qui eft de la fa

rine bouillie & mêlée d'un peu de harang rouge.

(10) Moore, p. 159.

CHASSE DES

bra, du Sénegal, & du Cap-Verd font excellens tireurs, quoique la plû- NEGRES. part n'ayent pas d'autres armes que leur arc & leurs fleches, qui leur fervent à tuer des cerfs, des lievres, des pintades, des perdrix (11) & d'autres fortes d'animaux. Ceux qui habitent plus loin dans les terres, ont beaucoup moins d'habileté pour cet exercice, & n'y prennent pas tant de plaifir. Un Facteur François (12) de l'Ifle S. Louis auSénegal, eut un jour la curiofité d'aller avec eux à la chaffe de l'éléphant. Ils en trouverent un, qui fut percé de plus de deux cens coups de balles ou de fleches. Il ne laiffa pas de s'échapper; mais le jour fuivant il fut trouvé mort à cent pas du même lieu où il avoit été tiré. Les Négres du Sénegal fe joignent pour la chaffe, au nombre de foixante, armés chacun de fix petites fleches & d'une grande. Lorfqu'ils ont découvert la trace d'un éléphant, ils s'arrêtent pour l'attendre ; & le bruit qu'il fait en brifant les branches, le fait bien-tôt reconnoître. Alors ils fe mettent à le fuivre, en lui déchargeant continuelle

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(12) Burbot, p. 40 &

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