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Les loups reffemblent entiérement à ceux de France; mais ils font un peu plus gros & beaucoup plus cruels.

HISTOIRE NATURELLE,

Loups.

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CHAPITRE XVII.

Bétes fauvages & privées.
S. I.

Eléphans, buffles, vaches fauvages, &c.

L n'y a point d'animal terreftre qui Defcription puiffe le difputer à l'éléphant pour

la groffeur. On en trouve peu au Nord du Sénegal; mais les Régions du Sud en font remplies. S'il paroît que la matiere n'ait point été employée avec épargne dans la compofition de cet animal, on ne peut pas dire que la nature ait pris autant de foin de fa forme. Sa tête eft monftrueuse. Ses oreilles, quoique longues, larges & épaiffes, fes yeux, quoique fort grands, paroiffent d'une petiteffe extrême dans cette maffe d'énorme groffeur (10). Son nez eft fi épais & fi long qu'il touche à la terre. On l'appelle probofcide ou trompe. Il est char

(10) Voyez la Figure.

NATURELLE.

HISTOIRE nu, nerveux, creufé en forme de tuyau, fléxible, & d'une force fi finguliere, qu'il lui fert à brifer ou à déraciner les petits arbres, à rompre les branches des plus gros, & à fe frayer le paffage dans les plus épaiffes forêts. Il lui fert auffi à lever de terre fur fon dos (1) les plus lourds fardeaux. C'est par ce canal qu'il refpire & qu'il reçoit les odeurs. Le nez de l'éléphant va toujours en diminuant depuis la tête jufqu'à l'extrémité, où il fe termine par un cartilage mobile, avec deux ouvertures, qu'il ferme à fon gré. Sans ce préfent de la nature (12) il mourroit de faim; car il a le cou fi épais & fi roide, qu'il lui eft impoffible de le courber affez pour paître comme les autres animaux. Auffi périt-il bien-tôt, lorfqu'il eft privé de cet utile inftrument par quelque bleffure. Sa bouche eft placée au-deffous de fa trompe dans la plus baffe partie de fa tête, & femble jointe à fa poitrine. Sa langue eft d'une petiteffe qui n'a point de proportion avec la masse du Il n'a dans les deux machoi

corps.

(11) Jannequin dit qu'un éléphant porte avec fa rompe un gros canon Pefpace d'une lieuc.

(12) Il s'en fert auffi facilement que nous nous fervons des doigts,

res (13) que quatre dents pour broyer

HISTOIRE

Ses dents.

fa nourriture; mais la nature l'a four- NATURELLE. ni, pour fa défense, de deux autres dents qui fortent de la machoire fupérieure, & qui font longues de plufieurs pieds. Il fe fert furieufement de ces deux armes. Ce font les dents qui s'achettent,& qui font mieux connues fous le nom d'yvoire. Leur groffeur eft proportionnée à l'âge de l'animal. La partie qui touche la machoire est creuse. Le refte eft folide & fe tourne en pointe. Comme les Européens payent ces dents affez cher, c'est un motif qui arme continuellement les Négres contre l'éléphant. Ils s'attroupent quelquefois pour cette chaffe, avec leurs fleches & leurs zagayes. Mais leur méthode la plus commune eft celle des foffes, qu'ils creufent dans les bois, & qui leur réuffiffent d'autant mieux qu'on ne peut gueres fe tromper à la trace des éléphans (14).

La chair de ces animaux eft un mets délicieux pour les Négres, fur-tout lorfqu'elle commence à fe corrompre. Un bon éléphant en contient plus que

(13) Celles de la machoire d'en-bas font plus longues de deux doigts que celles d'en haut. Voyez l'abregé des tranfactions Phi

lofophiques, Vol. V. pag.
121.

(14) Afrique Occiden
tale, Vol. III. p. 270.

Sa chair, fa mefure.

Son carac

tere,

HISTOIRE que quatre ou cinq boeufs. La mefure NATURELLE. ordinaire de ceux d'Afrique eft de neuf ou dix pieds de long, fur onze ou douze de hauteur. On en diftingue trois fortes; mais cette différence vient moins de leur forme que des licux (15) qu'ils habitent. Les éléphans qui fe retirent dans les cantons deferts & montagneux, font plus farouches & plus adroits que les autres; ce qu'il faut fans doute attribuer à leur fituation parmi les tigres & les lions, & quantité d'autres bêtes féroces. Ceux qui vivent dans les plaines font moins intraitables, parce qu'ils font accoutumés à la vue des hommes. Ceux du Sénegal ne s'éloignant guéres des habitations & des terres cultivées, feroient encore plus familiers, fi les fréquentes attaques des Négres ne les rendoient inquiets & défians. Cependant il n'arrive guéres qu'ils infultent les hommes, s'ils ne font infultés les premiers.

Sa légereté.

Quoique la taille des éléphans faffe juger qu'ils doivent être pefans dans leur marche & qu'ils ont peu de légereté à la course, ils marchent & courent fort légerement. Leur pas ordinaire égale celui de l'homme le plus

(15) Ibid.

NATURELLE.

agile. Leur courfe eft beaucoup plus HISTOIRE prompte; mais il eft rare de voir un éléphant courir. Avec un ventre (16) pendant, un dos courbé, des jambes fort épaiffes & des pieds de douze ou quinze pouces de diametre, ils ne peuvent aimer beaucoup le mouvement. Leurs pieds font couverts d'une peau dure & épaiffe, qui s'étend jufqu'à l'extrémité de leurs ongles. L'éléphant d'Afrique eft prefque noir, comme ceux de l'Afie. Sa peau eft dure & ridée, avec quelques poils longs & roides, qui font répandus par intervalles & fans aucune continuité. Sa queue eft longue & femblable à celle du Taureau, mais nue, à l'exception de quelques poils qui fe raffemblent à l'extrémité, & qui lui fervent à fe délivrer des mouches: fecours d'ailleurs affez peu néceffaire, puifque fa peau eft à l'épreuve de la balle. On s'eft perfuadé fauffement Erreur vulqu'il n'a point de jointure aux pieds, gairs. & qu'il lui eft impoffible par conféquent de fe lever & de fe coucher. Cette erreur vulgaire eft détruite par

(16) Quatre jambes qu'on prendroit pour des colomnes, les pieds courts, ceux de devant plus larges

& plus ronds. Voyez les
tranfactions Philofophi-
ques, ubi fup.

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