363 CHÉNIER. FRAGMENT DE CHARLES IX, TRAGÉDIE. [Voyez l'extrait du troisième chant de la Henriade, page 315.] REMORDS ET DÉSESPOIR DE CHARLES IX. À ME tromper encor leur perfidie aspire! ..........En ces lieux qui vous a rassemblés? Et je suis tout couvert du sang de mes sujets. Ces lieux en sont baignés: sous ces portiques sombres, Dieu! quel spectre hideux redouble mon effroi ! Pardon, Dieu tout-puissant, Dieu qui venges les crimes; Des cruels ont instruit ma bouche à l'imposture; REGNARD. FRAGMENT DU JOUEUR, DANS le Joueur, Regnard a montré une gaîté intarissable et un grand esprit d'observation; rien de plus heureux que toutes les saillies qu'il met dans la bouche du Joueur et d'Hector son valet ; il est impossible de caractériser avec plus de rapidité et en même temps de vérité, les désordres qui résultent du vice qu'il s'applique à peindre, de marquer de couleurs plus vives les alternatives de fortune et de revers, d'espérance et de désespoir qu'entraîne la passion du jeu. HECTOR. LE voici: ses malheurs sur son front sont écrits; VALÈRE. Non, l'enfer en courroux et toutes ses furies Je te loue, ô destin, de tes coups redoublés; Je n'ai plus rien à perdre, et tes vœux sont comblés. Tu ne peux rien sur moi; cherche une autre victime. Il est sec. HECTOR, à part. VALÈRE. De serpents mon cœur est dévoré, Tout semble en un moment contre moi conjuré. [Il prend Hector à la cravate.] Parle. As-tu jamais vu le sort et son caprice HECTOR. Mais ce n'est pas ma faute. VALÈRE. As-tu vu, de tes jours, trahison aussi haute? HECTOR. Heureusement pour vous, vous n'avez pas un sou VALÈRE. Que la foudre t'écrase! Ah! charmante Angélique, en l'ardeur qui m'embrase, vos seules bontés je veux avoir recours. À Je n'aimerai que vous; m'aimeriez-vous toujours? Notre bourse est à fond, et, par un sort nouveau, Quel livre voulez-vous lire, en votre chagrin ? VALÈRE. Celui qui te viendra le premier sous la main; Hé! vous n'y pensez pas, Je n'ai lu de mes jours que dans des almanachs. "CHAPITRE SIX. Du Mépris des richesses. La fortune offre aux yeux des brillants mensongers; Tous les biens d'ici-bas sont faux et passagers; Leur possession trouble, et leur perte est légère: Le sage gagne assez quand il peut s'en défaire." Lorsque Sénèque fit ce chapitre éloquent, Il avait, comme vous, perdu tout son argent. VALÈRE, se levant. Vingt fois le premier pris! Dans mon cœur il s'élève Allons, poursuis, achève. HECTOR. "L'or est comme une femme: on n'y saurait toucher N'ayant plus de maîtresse, et n'ayant pas un sou, VALÈRE. De mon sort désormais vous serez seule arbitre, HECTOR. VALÈRE. "Que faut-il ?..." Je bénis le sort et ses revers, Puisqu'un heureux malheur me rengage en vos fers. HECTOR. "Que faut-il à la nature humaine? Moins on a de richesse, et moins on a de peine : C'est posséder les biens que savoir s'en passer." Que ce mot est bien dit, et que c'est bien penser ! Ce Sénèque, monsieur, est un excellent homme. Était-il de Paris? VALÈRE. Non, il était de Rome. Dix fois à carte triple être pris le premier! HECTOR. Ah! monsieur, nous mourrons un jour sur un fumier. Il faut VALÈRE. que de mes maux enfin je me délivre ; J'ai cent moyens tout prêts pour m'empêcher de vivre : La rivière, le feu, le poison et le fer. HECTOR. Si vous vouliez, monsieur, chanter un petit air; VALÈRE. Que je chante! HECTOR. Monsieur!... |