C'est-à-dire environ le temps Que tout aime et que tout pullule dans le monde, Tigres dans les forêts, alouettes aux champs. Avait laissé passer la moitié d'un printemps D'imiter la nature, et d'être mère encore. Elle bâtit un nid, pond, couve, et fait éclore, : Les blés d'alentour mûrs avant que la nitée a De mille soins divers l'alouette agitée Vient avecque son fils, comme il viendra,” dit-elle, 66 Chacun de nous décampera." Sitôt que l'alouette eut quitté sa famille, Le possesseur du champ vient avecque son fils. Nous vienne aider demain dès la pointe du jour." Trouve en alarme sa couvée. L'un commence: "Il a dit que, l'aurore levée, a La nichée. Le mot nitée est en usage dans quelques pro vinces. b Avecque est ici de trois syllabes, licence fréquente dans La Fontaine, et que tous les poëtes de ce temps se permettaient. "S'il n'a dit que cela," repartit l'alouette, "Rien ne nous presse encor de changer de retraite ; Sa ronde ainsi qu'à l'ordinaire. "Ces blés ne devraient pas," dit-il, " être debout. Les prier de la même chose." L'épouvante est au nid plus forte que jamais. "Il a dit ses parents, mère ! c'est à cette heure..." "Non, mes enfants; dormez en paix : Ne bougeons de notre demeure." L'alouette eut raison; car personne ne vint. a "Ainsi dit-on un oiseau être allé à l'essor, quand il a prins l'amont suivant le vent."-NICOT, Thrésor de la langue françoyse, in-folio, 1606. Cette définition de Nicot explique parfaitement l'expression de La Fontaine; et ces mots l'alouette à l'essor veulent dire que l'alouette s'éleva en l'air, et vola suivant le vent. b C'est-à-dire il a tort aussi celui qui se repose, etc. Les exemples de ces sortes d'ellipses sont fréquents dans La Fontaine. "C'est ce coup qu'il est bon de partir, mes enfants!" Et les petits, en même temps, Le petit Poisson et le Pêcheur. Un carpeau, qui n'était encore que fretin, Mettons-le en notre gibecière." Laissez-moi carpe devenir: Je serai par vous repêchée; Peut-être encor cent de ma taille Pour faire un plat: quel plat! croyez-moi, rien qui vaille." "Rien qui vaille! eh bien! soit," repartit le pêcheur: "Poisson, mon bel ami, qui faites le prêcheur, Vous irez dans la poële; et, vous avez beau dire, Dès ce soir on vous fera frire." Un Tiens vaut, ce dit-on, mieux que deux Tu l'auras: L'un est sûr; l'autre ne l'est pas. a Voletants. La règle de l'indéclinabilité du participe présent, aujourd'hui invariable, n'existait pas lorsque La Fontaine écrivait ses fables, ou plutôt l'usage contraire prévalait. Molière, Boileau et Racine en offrent de fréquents exemples. Ce ne fut que vers 1680 que l'Académie se détermina à ne plus décliner ce participe. b La Fontaine, usant d'une licence accordée aux poëtes de son temps, a donné une syllabe de plus au mot culbutants, afin de donner à son vers le nombre de syllabes nécessaire. Le Laboureur et ses Enfants. Travaillez, prenez de la peine : C'est le fonds qui manque le moins. Un riche laboureur, sentant sa mort prochaine, Un trésor est caché dedans. Je ne sais pas l'endroit; mais un peu de Le père mort, les fils vous retournent le champ, D'argent, point de caché. Mais le père fut sage Le Cerf et la Vigne, Un cerf, à la faveur d'une vigne fort haute, Les veneurs, pour ce coup, croyaient leurs chiens en faute; "J'ai mérité," dit-il, "ce juste châtiment : L'Ours et les deux Compagnons. La peau d'un ours encor vivant, Mais qu'ils tueraient bientôt; du moins à ce qu'ils dirent; Elle garantirait des froids les plus cuisants; Se couche sur le nez, fait le mort, tient son vent, Que l'ours s'acharne peu souvent Sur un corps qui ne vit, ne meut, ni ne respire. Seigneur ours, comme un sot, donna dans ce panneau : Il voit ce corps gisant, le croit privé de vie ; Et, de peur de supercherie, Le tourne, le retourne, approche son museau, "C'est," dit-il, "un cadavre; ôtons-nous, car il sent.” Mais a Marchand de moutons, dans Rabelais, Pantagruel. |