En quelque endroit que j'aille, il faut fendre la preffe D'un pas lugubre & lent vers l'Églife s'avance: Et des Couvreurs, grimpés au toit d'une maison, Fiij Triftia robuftis luctantur funera "fens de ce vers: Là je trouve une plauftris. croix &c. puifque c'eft une chofe "que dans tout Paris & pueri fciunt, "que les Couvreurs, quand ils font fur le toit d'une maifon, laiffent pendre du haut de cette maison une croix de lattes, pour avertir les paffans de prendre garde à eux, & de paffer vite; Qu'il y en a quel"quefois des cinq ou fix dans une »même rue; & que cela n'empêche "pas qu'il n'y ait fouvent des gens bleffés: C'eft pourquoi j'ai dit: "Une croix de funefte préfage.. VERS 40. Une croix de funefte préfage.) C'eft une de ces croix, compofées de deux lattes attachées au bout d'une corde,que les Maçons & les Couvreurs font obligés de fufpendre devant les maifons fur lefquelles ils travaillent; afin d'avertir les paffans de n'en pas approcher. Ce figne ou cette croix s'appelle Avertiffement ou Défenfe. Il y à des Villes, où les Couvreurs ne fufpendent qu'un fimple bâton, ou une tuile, pour fervir d'Avertiffe- IMIT. Vers 43. Là fur une charretment. Ce vers ayant befoin d'être te &c.) Juvénal, Satire III. v. 254. éclairci, j'en écrivis à l'Auteur, qui me répondit ainfi par fa Lettre du 5. de Mai 1709... ,,Je ne fais pas pourquoi vous êtes en peine du .... Modo longa corufcat, Sarraco veniente, abies, atque altera pinum D'un carroffe en tournant il accroche une roue, Et du choc le renverfe en un grand tas de boue: Quand un autre à l'inftant, s'efforçant de paffer, 50 Dans le même embarras fe vient embarrasser. Vingt carroffes bientôt arrivant à la file, Y font en moins de rien fuivis de plus de mille: Et pour furcroît de maux, un fort malencontreux Conduit en cet endroit un grand troupeau de boeufs. 35 Chacun prétend paffer: l'un mugit, l'autre jure; Des mulets en fonnant augmentent le murmure. Auffi-tôt cent chevaux dans la foule appellés, De l'embarras qui croît ferment les défilés, Et par-tout des paffans enchaînant les brigades, 60 Au milieu de la paix font voir les barricades. On n'entend que des cris pouffés confufément. Dieu, pour s'y faire ouir, tonneroit vainement. Moi donc, qui dois fouvent en certain lieu me rendre, Le jour déja baiffant, & qui fuis las d'attendre, 65 Ne fachant plus tantôt à quel Saint me vouer, Plauftra vehunt, nutant alte, popu loque minantur. le prononce au fingulier, m'oblige d'avertir que ce mot fe prononce : Beus; ainfi il rime avec Malencon→ treux, qui eft dans le vers précéEt Horace, parlant des mêmes em- dent. On prononce auffi des Oeus, barras, L. II. Ep. II. v. 73. quoi qu'on écrive Oeufs. Torquet nunc lapidem, nunc, ingen's machina tignum, &c. VERS 54. Un grand troupeau de bœufs.] L'ufage vicieux de quelques Provinces, où l'on prononce Baufs au pluriel, comme on VERS 57. Auffi-tôt cent che vaux &c.] Ce vers & les trois fui→ vans n'étoient pas dans la premiere édition, faite en 1666. VERS 60. -Font voir les barricades.] L'Auteur défigne ici celles qui fe firent à Paris, au mois Je me mets au hazard de me faire rouer. Je faute vingt ruiffeaux, j'efquive, je me pouffe: Guenaud fur fon cheval en paffant m'éclabousse; Et n'ofant plus paroître en l'état où je fuis, 70 Sans fonger où je vais, je me fauve où je puis. Tandis que dans un coin en grondant je m'effuie, Souvent, pour m'achever, il furvient une pluie. On diroit que le Ciel, qui fe fond tout en eau, Veuille inonder ces lieux d'un déluge nouveau. 75 Pour traverser la rue, au milieu de l'orage, Un ais fur deux payés forme un étroit passage: Le plus hardi Laquais n'y marche qu'en tremblant. Il faut pourtant paffer fur ce pont chancelant; Et les nombreux torrens qui tombent des gouttieres so Groffiffant les ruiffeaux, en ont fait des rivieres. J'y paffe en trébuchant; mais malgré l'embarras, La frayeur de la nuit précipite mes pas. Car fi-tôt que du foir les ombres pacifiques D'un double cadenas font fermer les boutiques; d'Août, 1648. pendant la guerre civile de la Fronde. VERS 68. Guenaud fur fon cheval, &c.) GUENAUD, fameux Médecin, dont il a été parlé dans la Satire IV. vers 32. On le voyoit VERS 70. Sans fonger où je vais, je me fauve où je puis.) Ce vers a de la conformité avec celui-ci, qui eft le dernier du Difcours au Roi. Fiv Je me fauve à la nage, & j'aborde où je puis. VERS 73. On diroit que le Ciel..., Veuille inonder &c.] Veuille: bien des gens préférent : Veut. IMIT. Vers S3. Car fi-tôt que du foir les ombres pacifiques, &c.] Juvé», nal, Satire III. v. 303. Nam, qui fpoliet te Non deerit: claufis domibus, poftquam omnis ubique 85 Que retiré chez lui, le paifible Marchand Va revoir fes billets, & compter fon argent; Malheur donc à celui qu'une affaire imprévue Bientôt quatre Bandits, lui ferrant les côtés: La bourfe: il faut fe rendre; ou bien non, résistez; 95 Afin que votre mort, de tragique mémoire, Des maffacres fameux aille groffir l'Hiftoire. Pour moi, fermant ma porte, & cédant au fommeil, Tous les jours je me couche avecque le Soleil. Mais en ma chambre à peine ai-je éteint la lumiere, 100 Qu'il ne m'eft plus permis de fermer la paupiere. Des Filous effrontés, d'un coup de pistolet, Fixa catenata filuit compago ta- avoit de fe trouver dans les rues berna. Interdum & ferro fubitus graffator agit rem. VERS 87. Que dans le Marché neuf &c.] Place de Paris deftinée à tenir le Marché, entre le pont St. Michel, & le petit pont de l'Hôtel-Dieu. VERS 88. Les Voleurs à l'inftant s'emparent de la Ville.] Les défordres que les Voleurs commettoient dans Paris, & le danger qu'il y pendant la nuit, font ici décrits fort naivement. En 1667. le Roi pourvut à la fûreté publique, par Tétabliffement des Lanternes, par le redoublement du Guet & de la Garde: par un reglement fur le port d'armes, & contre les gens fans aveu; & par plufieurs autres fages Ordonnances, dont l'exécution fur confiée à Mr. DE LA REYNIE, Lieutenant Général de Police. En peu de temps la fûreté fut rétablie dans Paris. VERS 96. Des massacres fameux aille groffir l'Hiftoire.) Il y a un Livre intitulé: l'Hiftoire des Larrons ; Ébranlent ma fenêtre, & percent mon volet. J'entends crier par-tout: au meurtre, on m'affaffine Ou, le feu vient de prendre à la maifon voifine. 105 Tremblant, & demi mort, je me leve à ce bruit, Et fouvent fans pourpoint je cours toute la nuit. Car le feu, dont la flâme en ondes fe déploye, Fait de notre quartier une feconde Troye; Où maint Grec affamé, maint avide Argien, 110 Au travers des charbons va piller le Troyen. Enfin fous mille crocs la maison abîmée Entraîne auffi le feu qui fe perd en fumée. Mais le jour eft venu quand je rentre chez moi. 115 Je fais pour repofer un effort inutile: Ce n'est qu'à prix d'argent qu'on dort en cette Ville. Il faudroit, dans l'enclos d'un vafte logement, Avoir loin de la rue un autre appartement. F v où font décrits plufieurs meurtres cette Ville. Mais, à prix d'argent, & affaffinats. a bien plus de force & d'énergie; C'est comme fi l'on difoit, que l'on dort mieux à proportion de ce que l'on donne pour acheter son repos; plus il en coute, & mieux on dort. Martial, Livre XII. Épigr. 57. Nec cogitandi fpatium, nec quiefcendi In Urbe locus eft pauperi. Martial a fait plufieurs Epigrammes contre les Perturbateurs du fommeil: Liv. IX. Ep. 69. Liv. X. Ep. 74. Liv. XII. Ep. 57. & 69. |