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L'Honneur trifte & honteux ne fut plus de faifon.

Alors, pour foûtenir fon rang & fa naiffance,

110 Il fallut étaler le luxe & la dépense;

Il fallut habiter un fuperbe palais,

Faire par les couleurs diftinguer fes valets:
Et traînant en tous lieux de pompeux équipages,
Le Duc & le Marquis fe reconnut aux Pages.

Bientôt pour fubfifter, la Nobleffe fans bien
Trouva l'art d'emprunter, & de ne rendre rien ;
Et bravant des Sergens la timide cohorte,
Laiffa le Créancier fe morfondre à fa porte.
Mais pour comble, à la fin, le Marquis en prison
120 Sous le faix des procès vit tomber sa maison.
Alors le Noble altier, preffé de l'indigence,
Humblement du Faquin rechercha l'alliance,

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L'autre a fait le Mercure Armorial, qui eft le Livre défigné par notre Poëte. Cependant au lieu de Segoing, il mit Segond, dans l'édition de 1664. & cette faute a été répétée dans toutes les éditions. Dans celle de 1713. on a mis Segoind. L'Auteur du Tréjor Héraldique, ou Mercure Armorial, imprimé en 1657. à Paris, fe nommoit CHARLES SEGOING, Avocat, &c.

VERS 114. Le Duc & le Marquis fe reconnut aux Pages.] En ce tempslà tous les Gentilshommes avoient des Pages.

Avec

Et trafiquant d'un nom jadis fi précieux.

VERS 125. Et corrigeant ainfi la fortune ennemie, &c.) Le Poëte ayant befoin de deux vers féminins, fit ceux-ci par néceffité. Le fens étoit fini au vers précédent: Par un lâche contrat vendit tous fes Ayeux. Il étoit bien difficile de trouver une penfée qui renchérît fur ce qui précédoit, & plus difficile encore de renfermer cette penfée en deux vers: c'eft pourtant ce qu'il a fait heureusement.

La mandille &

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Re

VERS 132. CHANG. Vers 122. chercha l'alliance. L'Auteur avoit mis Paris.) Mandille, eft une espece de d'abord: Emprunta l'alliance. cafaque ou de manteau que les Laquais portoient autrefois, & même encore dans le temps que cette Sati

VERS 123. Avec lui trafiquant.] Avant l'édition de 1701. il y avoit re fut compofée. La Mandille étoit

par

Avec lui trafiquant d'un nom fi précieux, Par un lâche contrat vendit tous fes Ayeux; 125 Et corrigeant ainfi la fortune ennemie, Rétablit fon honneur à force d'infamie.

Car fi l'éclat de l'or ne releve le fang,
En vain l'on fait briller la fplendeur de fon rang,
L'amour de vos Ayeux paffe en vous pour manie,
r30 Et chacun pour parent vous fuit & vous renie.
Mais quand un homme eft riche, il vaut toûjours fon prix:
Et l'eût-on 'vu porter la mandille à Paris,
N'eût-il de fon vrai nom ni titre ni mémoire,
D'Hozier lui trouvera cent Ayeux dans l'Hiftoire.

Toi donc, qui de mérite & d'honneurs revêtu,
Des écueils de la Cour as fauvé ta vertu,
DANGEAU, qui dans le rang, où notre Roi t'appelle

135

particuliere aux Laquais, & les faifoit diftinguer des autres Valets. Elle étoit compofée de trois pièces, dont l'une leur pendoit fur le dos, & les deux autres fur les épaules. Furetiere.

VERS 134. D'Hozier lui trouvera &c.) PIERRE D'HOZIER, Généalogifte de la Maifon du Roi, Juge général des Armes & Blazons de France. Il a laiffé CHARLES d'HOZIER fon fils, qui a les mêmes titres. L'Abbé de BoisROBERT parlant de la faveur dont le Cardinal de Richelieu l'honoroit, a dit dans une Épître :

On m'adoroit, & les plus apparens
Payoient d'Hozier pour être mes
Tome I.

parens.

L'Auteur avoit fini fa Pièce à ce
vers: mais Mr. de DANGEAU,
à qui elle eft adreffée, lui confeilla
d'y mettre quelques vers à la louan-
ge du Roi, afin que la Piece fur
mieux reçue à la Cour; & il ajoû-
ta les quatorze vers fuivans: Toi
donc, qui de mérite, &c. Avant que
cette Satire fût imprimée, Mr. de
Dangeau la lut à quelques Seigneurs,
dans une Salle où le Roi étoit à
jouer. Le Roi qui le remarqua, vou-
lut favoir ce que c'étoit, & quitta
le jeu pour fe la faire lire. C'eft
la premiere Pièce de l'Auteur, qui
ait paru devant Sa Majefté: quelque
temps après on lui lut le Difcours au
Roi, qui étoit déja compofé.

CHANG. Vers 137. Dangeau, qui dans le rang, où notre Roi t'ap pelle] VERS 148.

F

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Le vois toûjours orné d'une gloire nouvelle,

Et plus brillant, par foi, que par l'éclat des lis, 140 Dédaigner tous ces Rois dans la pourpre amollis; Fuir d'un honteux loifir la douceur importune: A fes fages confeils affervir la Fortune;

Et de tout fon bonheur ne devant rien qu'à foi, Montrer à l'Univers ce que c'eft qu'être Roi. 145 Si tu veux te couvrir d'un éclat légitime,

Va par mille beaux faits mériter fon eftime:
Sers un fi noble Maître; & fais voir qu'aujourd'hui
Ton Prince a des Sujets qui font dignes de lui.

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SATIRE VI.

Q

UI frappe l'air, bon Dieu! de ces lugubres cris? Eft-ce donc pour veiller qu'on fe couche à Paris? Et quel fâcheux Démon, durant les nuits entieres, Raffemble ici les chats de toutes les gouttieres? s J'ai beau fauter du lit plein de trouble & d'effroi, Je pense qu'avec eux tout l'Enfer eft chez moi. L'un miaule en grondant comme un tigre en furie: L'autre roule fa voix comme un enfant qui crie. Ce n'eft pas tout encor. Les fouris & les rats 10 Semblent, pour m'éveiller, s'entendre avec les chats, Plus importuns pour moi, durant la nuit obfcure, Que jamais, en plein jour, ne fut l'Abbé de Pure. Tout confpire à la fois à troubler mon repos: Et je me plains ici du moindre de mes maux. Fij

1

Cette Satire contient la de

fcription des embarras de Paris. Elle a été compofée dans le même temps que la Satire I. dont elle faifoit partie, comme on l'a expliqué ci-devant. C'est une imitation de la Satire III. de Juvénal, qui décrit les incommodités de la ville de Rome, depuis le vers 232. jusqu'à la fin. Martial a fait une Epigramme fur le même fujet. L. XII. Epig. 57.

83

§. Mr. DE MURALT a fait la Critique de cette Satire dans fes Lettres fur les Anglois & les François, & fur les Voyages, Lettre VI. p.418. & fuiv. de la premiere édition imprimée à Geneve en 1725. in S. Le P. BRUMOY, Jéfuite, a dé

fendu Mr. Despreaux contre cette Critique. Son Ouvrage eft intitulé: Défenfe de la VI. Satire de Mr. Despréaux, & a été imprimé à Paris en 1726. in 12. à la fin de l'Apologie du Caractère des Anglois & des François par l'Abbé Desfontaines. MONTEIL,

DU

IMIT. Vers 2. Eft-ce donc pour veiller qu'on fe couche à Paris?] Juvénal, Sat. III. v. 232.

Plurimus hic ager moritur vigilando, VERS 12. L'Abbé de Pu re.) Ennuyeux célèbre. Voyez la Remarque fur le vers 1S. de la Satire II.

Is Car à peine les coqs, commençant leur ramage,
Auront de cris aigus frappé le voisinage:
Qu'un affreux Serrurier, laborieux Vulcain,
Qu'éveillera bientôt l'ardente foif du gain,
Avec un fer maudit, qu'à grand bruit il apprête,
20 De cent coups de marteau me va fendre la tête.
J'entends déja par-tout les charrettes courir,
Les maçons travailler, les boutiques s'ouvrir;
Tandis que dans les airs mille cloches émues,
D'un funebre concert font retentir les nues,
25 Et fe mêlant au bruit de la grêle & des vents,
Pour honorer les morts, font mourir les vivans.

Encor je bénirois la bonté fouveraine,

Si le Ciel à ces maux avoit borné ma peine: Mais fi feul en mon lit je pefte avec raifon, 30 C'est encor pis vingt fois en quittant la maison.

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