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135 Et mettant la cérufe & le plâtre en ufage,

Compofa de fa main les fleurs de fon vifage.
L'ardeur de s'enrichir chaffa la bonne foi.

Le Courtifan n'eut plus de fentimens à soi.

Tout ne fut plus que fard, qu'erreur, que tromperie. 140 On vit par-tout regner la baffe Flatterie.

Le Parnaffe fur-tout fécond en Impofteurs, Diffama le papier par fes propos menteurs. De là vint cet amas d'Ouvrages mercénaires, Stances, Odes, Sonnets, Épîtres liminaires, 145 Où toûjours le Héros paffe pour fans pareil, Et, fût-il louche & borgne, eft réputé Soleil.

Ne crois pas toutefois, fur ce difcours bizarre,
Que d'un frivole encens malignement avare,
J'en veuille fans raifon fruftrer tout l'Univers.
150 La louange agréable eft l'ame des beaux Vers.

Mais je tiens, comme toi, qu'il faut qu'elle foit vraie,

1

Et que fon tour adroit n'ait rien qui nous effraye.

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Alors, comme j'ai dit, tu la fais écouter,

Et fans crainte à tes yeux on pourroit t'exalter.

155 Mais fans t'aller chercher des vertus dans les nues: Il faudroit peindre en toi des vérités connues: Décrire ton Efprit ami de la Raison;

"

Ton ardeur pour ton Roi puisée en ta Maison;
A fervir fes deffeins ta vigilance heureuse;

160 Ta probité fincere, utile, officieuse.

Tel, qui hait à fe voir peint en de faux portraits,
Sans chagrin voit tracer ses véritables traits.
Condé même, Condé, ce Héros formidable,

Et non moins qu'aux Flamands aux Flatteurs redoutable, 165 Ne s'offenferoit pas, fi quelque adroit pinceau Traçoit de fes Exploits le fidele Tableau:

Et dans Senef en feu contemplant fa peinture,
Ne défavoûroit pas Malherbe ni Voiture.
Mais malheur au Poëte infipide, odieux,

170 Qui viendroit le glacer d'un éloge ennuyeux.
Il auroit beau crier: Premier Prince du Monde,

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Courage fans pareil, Lumiere fans feconde:
Ses Vers jettés d'abord, fans tourner le feuillet,
Iroient dans l'antichambre amufer Pacolet.

La même année 1664. il parut un
autre Poëme de Charlemagne, par
Mr. COURTIN, Profeffeur en
Rhétorique.

Prince de Condé. Quand Mr. le
Laboureur eut préfenté à ce Prince
fon Poëme de Charlemagne, il en
lût quelque chofe; après quoi il
donna le Livre à Pacolet, à qui il
renvoyoit ordinairement tous les

VERS dernier Amufer Pacolet.]
Fameux Valet de pied du Grand Livres qui l'ennuyoient.

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PRÉFACE

Sur les trois Épîtres fuivantes.

J.

e ne fais, fi les trois nouvelles Epitres que je donne ici au Public, auront beaucoup d'Approbateurs: mais je fais bien, que mes Cenfeurs y trouveront abondamment dequoi exercer leur critique. Car tout y eft extrêmement hazardé. Dans le premier de ces trois Ouvrages, fous prétexte de faire le procès à mes derniers Vers, je fais moimême mon éloge, & n'oublie rien de ce qui peut être dit à mon avantage. Dans le fecond je m'entretiens avec mon Jardinier de chofes très-basses & très-petites; & dans le troifieme je décide hautement du plus grand & du plus important point de la Religion, je veux dire de l'Amour de Dieu. J'ouvre donc un beau champ à ces Cenfeurs, pour attaquer en moi, & le Poëte orgueilleux, & le Villageois groffier, & le Théologien téméraire. Quelques fortes pourtant que foient leurs attaques, je doute qu'elles ébranlent la ferme réfolution que j'ai prife, il y a long-temps, de ne rien répondre, au moins fur le ton férieux, à tout ce qu'ils écri ront contre moi.

A quoi bon en effet perdre inutilement du papier? 1 Si mes Épîtres font mauvaifes, tout ce que je dirai ne Si

1. mes Épîtres font mauvaises.]
JOAN. OWEN, Epigr. ad Lecto-
rem, pag, m. 122.
Noftra patrocinium non pofcunt car-
mina: quare?
Si bona funt, bona funt: fi mala
funt, mala funt.

Il ajoûte dans une autre Épigramme:

Nemo poteft verfus (nec tanta potentia Regum)

Vel fervare malos, vel jugulare bonos.

les fera pas trouver bonnes: & fi elles font bonnes, tout ce qu'ils feront, ne les fera pas trouver mauvaifes. Le Public n'eft pas un Juge qu'on puiffe corrompre, ni qui fe regle par les paffions d'autrui. Tout ce bruit, tous ces Ecrits qui fe font ordinairement contre des Ouvrages où l'on court, ne fervent qu'à y faire encore plus courir, & à en mieux marquer le mérite. Il eft de l'effence d'un bon Livre d'avoir des Cenfeurs; & la plus grande difgrace qui puiffe arriver à un Ecrit qu'on met au jour, ce n'eft pas que beaucoup de gens en difent du mal, c'est que perfonne n'en dife

rien.

Je me garderai donc bien de trouver mauvais, qu'on attaque mes trois Épitres. Ce qu'il y a de certain, c'est que je les ai fort travaillées, & principalement celle de l'Amour de Dieu, que j'ai retouchée plus d'une fois, & où j'avoue, que j'ai employé tout le peu que je puis avoir d'efprit & de lumieres. J'avois deffein d'abord de la donner toute feule, les deux autres me paroiffant trop frivoles, pour être préfentées au grand jour de l'im preffion avec un Ouvrage fi férieux. Mais des Amis très-fenfés m'ont fait comprendre, que ces deux Épîtres, quoique dans le ftyle enjoué, étoient pourtant des Épí tres morales, où il n'étoit rien enfeigné que de vertueux: qu'ainfi étant liées avec l'autre, bien loin de lui nuire, elles pourroient même faire une diverfité agréable; & que d'ailleurs beaucoup d'honnêtes gens fouhaitant de

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