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Lettre de Mr. DESPREAUX à Mr. de BUSSI, du 25. Mai, 1673.

,,Monfieur. J'avoue, que j'ai été

,,il y répondroit, non feulement,,d'avances qu'il ne dût faire pour ,,pour juftifier fon Ouvrage, mais ,,mériter l'honneur de vos bon,,encore pour avoir l'honneur d'en-,,nes graces.“ ,,trer en lice avec un tel combatQue perfonne ne la lui ,,ayant montrée, il n'y avoit pas ,,fongé depuis: fon feul deffein ,,étant de répondre par un Ouvrage ,,d'efprit juftificatif, à un autre ,,Ouvrage qui avoit critiqué le fien,,,inquiet du bruit qui a couru, que ,,vous aviez écrit une Lettre par ,,mais fans y mêler les perfonnes. laquelle vous me dechiriez moi & ,,Que quand vous auriez dit pis,l'Épître que j'ai écrite au Roi fur ,,que pendre de lui, il étoit trop,,la Campagne de Hollande; car ,,jufte & trop honnête homme, ? ,,pour ne vous pas toujours efti- ",outre le jufte chagrin que j'avois ,,de me voir maltraiter par l'homme ,,mer, & par conféquent, pour en ,,du monde que j'eftime & que j'ad,,dire quelque chofe qui pût vous ,,deplaire. Que les chofes d'efprit mire le plus, j'avois de la peine „à digérer le plaifir que cela alloit ,,que vous aviez faites, fans ,,compter vos autres faits, 'étoient faire à mes ennemis. Je n'en ai ,,dignes de l'eftime de tout le pourtant jamais été bien perfuadé. Et le moyen de penfer que ,,monde & dureroient même à la ,,l'homme de la Cour qui a le plus ,,postérité, . . ., Là-deffus il me ,,montra une pièce manufcrite que "rêts de l'Abbé Cotin, & fe ré,,d'efprit, pût entrer dans les inté ,,Liniere avoit faite contre fon ,,Epitre, dans laquelle, après avoir foudre à avoir raifon même avec ,,lui? La Lettre que vous avez ,,dit cent chofes offenfantes, il ,,ajoûte, que Mr. de Buffi en dit écrite à Mr. le Comte de Limoges, ,,bien d'autres plus fortes, dans,,a achevé de me défabufer, & je ,,vois bien, que tout ce bruit n'a été ,,une Lettre qu'il a écrite à un ,,qu'un artifice très-ridicule de mes ,,de fes amis. Despreaux ,,me dit enfuite, qu'on lui avoit très ridicules Ennemis. Mais ,,quelque mauvais deffein qu'ils ,dit encore, que dans votre ,,Lettre il y avoit des chofes un ,,aient eu contre moi, je leur en ai ,,de l'obligation, puifque c'eft ce ,,peu contre le Roi, comme par ,,exemple, fur ce qu'il difoit, que qui m'a attiré les paroles obli,,le Roi prendroit tant de Villes geantes que vous avez écrites fur ,,qu'il ne le pourroit fuivre, &,,mon fujet. Je vous supplie de ,,qu'il l'alloit attendre aux bords de "Hellefpont ; vous mettiez au bout: Tarare pon pon.. Il ajoûta, † Réponse du Comte de BUSSI, ,,en fortant, qu'il vous feroit un A Chazeu, 30 Mai, 1673. ,,compliment, s'il croyoit, que fa ,,Lettre fût bien reçûe, parce qu'il ,,Je ne faurois affez dignement ,,favoit bien, qu'il n'y avoit point,,répondre à votre Lettre,Monfieur.

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croire, que je fens cet honneur ,,comme je dois, & que je fuis, &c.

*Cette Lettre a été imprimée dans la premiere partie des Nouvelles Lettres du Comte de Buffi, in 12. l'an 1709. pag. 288. avec quelques changemens que l'on a faits dans le tour & dans les paroles. §. Ces Nouvelles Lettres ont été inférées dans l'Édition des Lettres du Comte de Buffi, faite à Amfterdam en 1715. où toutes les Lettres font rangées felon l'ordre Chronologique. La Lettre citée ici fe trouve à la page 383. du Tom. II. de cette Edition.

Cette Lettre n'a pas été imprimée. §. On fe trompe. On la trouvera à la page 385. du Tom. II. de l'Édition d'Amfterdam, que nous venons de citer.

,,Elle eft fi pleine d'honnêtetés &,,avec vous: & puifque l'occafion ,,de louanges, que j'en fuis confus.,,s'en préfente aujourd'hui, je vous ,,Je vous dirai feulement, que je ,,en demande la continuation, & ,,n'ai rien vû de votre façon, que,,votre amitié, vous affùrant de la ,,je n'aie trouvé très beau & très-,,mienne. Pour mon eftime, vous ,,naturel ; & que j'ai remarqué dans ,,n'en devez pas douter, puifque ,,Vos Ouvrages un air d'honnête,,vos ennemis mêmes vous l'ac,,homme que j'ai encore eftimé plus,,cordent dans leur coeur, s'ils ne ,,que tout le refte. C'eft ce qui m'a,,font pas les plus fottes gens du ,,fait fouhaiter d'avoir commerce,,monde.

ÉPITRE V.

A M. DE GUILLERAGUES,

SECRETAIRE DU CABINET,

ESPRIT

SPRIT né pour la Cour, & Maître en l'art de plaire, GUILLERAGUES, qui fais & parler & te taire, Apprends-moi, fi je dois ou me taire, ou parler. Faut-il dans la Satire encor me fignaler,

s Et dans ce champ fécond en plaifantes malices,
Faire encore aux Auteurs redouter mes caprices?
Jadis, non fans tumulte, on m'y vit éclater:
Quand mon esprit plus jeune, & prompt à s'irriter,
Afpiroit moins au nom de difcret & de fage:

Lue fujet de cette Épître eft la Con- GUILLERAGUES, à qui elle eft

noiffance de foi même. L'Auteur adreffée, étoit de Bourdeaux, où il fait voir, que cette connoiffance eft avoit été Premier Président de la la fource de notre félicité: ce n'eft Cour des Aides. En ce temps-là il ni l'ambition, ni les richeffes, ni fe fit connoître à Mr. le Prince de les Sciences, ni enfin les biens ex- Conti, Gouverneur de Languedoc, térieurs, qui peuvent nous rendre qui le fit Secretaire de fes Commanheureux dans le monde : notre bon- demens, & l'obligea de quitter la heur dépend uniquement de nous; Province. Il eut l'agrément du Roi, & c'est dans nous-mêmes que nous pour la charge de Secretaire de la devons le chercher. Cette réflexion Chambre & du Cabinet de Sa Ma a été faite par un Écrivain célèbre.* jefté; & pendant quelque temps Nous cherchons, dit-il, notre bonheur eut la direction de la Gazette. Il hors de nous-mêmes, & dans l'opi- n'y avoit perfonne à la Cour, qui nion des hommes que nous connoiffons eût plus de Politeffe, qui parlât plus flatteurs, peu finceres, fans équité, agréablement, qui entendit mieux pleins d'envie, de caprices, & de pré- la fine raillerie, ni qui fût plus ventions: quelle bizarrerie! Cette généralement aimé, que Mr. de Epitre fut compofée en 1674. & pu- Guilleragues. Au mois de Decembliée l'année fuivante. Mr. de bre 1677. le Roi le nomma Ambassa

* Caractères de LA BRUYÈRE, chap. de l'Homme p. 395.

il

10 Que mes cheveux plus noirs ombrageoient mon visage.
Maintenant que le temps a meuri mes defirs,.
Que mon âge, amoureux de plus fages plaisirs,
Bientôt s'en va frapper à fon neuvieme luftre;
J'aime mieux mon repos qu'un embarras illuftre.
15 Que d'une égale ardeur mille Auteurs animés
Aiguifent contre moi leurs traits envenimés:
Que tout, jufqu'à Pinchêne & m'infulte & m'accable,
Aujourd'hui vieux Lion je fuis doux & traitable:
Je n'arme point contre eux mes ongles émouffés.
20 Ainfi que mes beaux jours, mes chagrins font paffés.
Je ne fens plus l'aigreur de ma bile premiere,
Et laiffe aux froids Rimeurs une libre carriere.
Ainfi donc Philofophe à la Raifon foûmis,
Mes défauts déformais font mes feuls ennemis.

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VERS 13. Bientôt s'en va frapper à fon neuvieme luftrc.) Un luftre eft l'efpage de cinq ans: ainfi le huitieme luftre comprend les années qui font depuis trente- cinq jusqu'à quarante. L'Auteur compofa cette Epitre à trente-huit ans: il'en avoit environ quarante, quand il la donna au Public; & par conféquent il approchoit de fon neuviême luftre; c'est-à-dire, de fa quarante-unieme année.

VERS 17. Que tout jusqu'à Pinchêne, &c.] Voyez la Remarque fur le vers 163. du cinquieme Chant du Lutrin, où il eft parlé de PINCHÊNE. Il avoit écrit quelque chofe contre notre Auteur, mais il ne fentit point la force de ce trait de Satire: ayant cru au contraire, que Mr. Despreaux lui demandoit grace en cet endroit, & il en tiroit vanité.

25 C'est l'Erreur que je fuis; c'est la Vertu que j'aime. Je fonge à me connoître, & me cherche en moi-même. C'est là l'unique étude où je veux m'attacher.

Que l'Aftrolabe en main, un autre aille chercher Si le Soleil eft fixe, ou tourne fur fon axe; 30 Si Saturne à nos yeux peut faire un parallaxe: Que Rohaut vainement féche pour concevoir, Comment, tout étant plein, tout a pû fe mouvoir:

IMIT. Vers 26. Je fonge à me connoître, & me cherche en moi-même.] Voila le fujet de cette Epître. Le texte s'en trouve dans ces deux mots du fententieux Perfe: Tecum habita. Sat. IV. à la fin. Et dans celui-ci Ne te quafiveris extra. Sat. I. v. 7. Et enfin dans ce vers, qui eft le 23. de la Satire IV.

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VERS 28. Que l'Aftrolabe en main, &c.] Voyez ce qu'on a dit fur le vers 429. de la Satire X.

§. Mr. Despreaux a fait dans ce vers & dans les fuivans deux ou trois fautes très - confidérables. 1. L'Aftrolabe n'eft pas un Inftrument propre à obferver fi le Soleil eft fixe, où s'il tourne fur fon axe, 2. Etre fixe par rapport au Soleil, & tourner fur fon axe, ne font pas deux chofes oppofees; car le Soleil est fixe, & il tourne en même temps fur fon axe: il n'y a donc point là d'alternative. Madame de la Sabliere avoit raifon d'en reprendre Mr.Despreaux,qui eût beaucoup mieux fait de profiter de la Critique de cette Dame, que de s'en venger, en la dépeignant comme une Savante ridicule dans fa X. Satire. Voyez la Remarque fur le Vers 429. de cette Satire. Du MONTEIL.

VERS 30, Si Saturne à nos yeux peut faire un parallaxe.) Les Aftronomes appellent Parallaxe, la différence qui eft entre le lieu véritable d'un Aftre, & fon lieu apparent; c'eft-à-dire entre le lieu du Firmament auquel l'Aftre répondroit s'il étoit vû du centre de la Terre; & le lieu auquel cet Aftre répond étant de la furface de la Terre. Cette différence ou Parallaxe eft d'autant plus grande, que l'Aftre eft plus près de l'Horifon, & qu'il eft moins éloigné de la Terre. Ainfi, il n'y a point de Parallaxe, quand l'Aftre eft fur notre tête ; & la grande distance qu'il y a entre Saturne & la Terre, fait que la Parallaxe de cette Planete n'eft prefque pas fenfible à notre égard. Tous les Aftronomes font le mot de Parallaxe, du genre féminin. Notre Auteur auroit pu dire: Si Saturne à nos yeux fait une Parallaxe. Mais il a prétére l'autre maniere comme plus poëtique.

S. Le mot de Parallaxe eft toûjours féminin, & jamais mafculin, comme l'a fait Mr. Despreaux, qui n'en favoit apparemment pas le genre. Cela eft bien plus vraisemblable, que de dire, comme fait le Commentateur, que Mr. Despreaux 4 préfére le mafculin comme plus poetique. Les Poëtes ne fe font jamais donné la liberté de changer les genres à leur fantaifie; & Mr. Des

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