Page images
PDF
EPUB

AVIS

AU LECTEUR

SUR CETTE

NOUVELLE ÉDITION.

„A bien confidérer le grand nombre d'É

ditions, qu'on a fait des Oeuvres de Despreaux, on peut les reduire à celles, qui ont été publiées avec le Commentaire de Mr. Broffette, & des Remarques de Mr. du Monteil.

Toutes les précédentes font imparfaites en comparaison de ces dernieres. Parmi cellesci les Éditions in Folio & in Quarto, trèsprécieufes par la Beauté des Eftampes, & des autres ornemens d'Impreflion, ne conviennent qu'à un certain nombre de Perfonnes, & trouvent place que dans les Bibliotheques des Gens aifés.

ne

La plus ufuelle, la plus commode, & la plus convenable à la multitude des Lecteurs, c'eft fans contredit l'Edition de la Haye, en IV. Volumes in douze. Auffi eft-ce celle

f

qui a eu le plus de debit, & dont je me fuis apperçû, que les Exemplaires commençoient même à devenir rares en Hollande. Cette Raifon m'a déterminé à en entreprendre une nouvelle Edition, dont je vais rendre compte.

J'ai préféré le Format in Octavo à l'in douze, parce qu'avec tous les Avantages de ce dernier, il a de plus celui du coup d'œil, des Marges, & qu'il m'a laiffé plus de liberté pour l'arrangement des Notes, & le choix des Caractères. Je n'ai d'ailleurs rien negligé de ce que j'ai cru pouvoir contribuer à embellir, & à perfectionner cette Edition. Papier, Caractères, Eftampes, Vignettes, Correction, j'ai taché d'égaler en tout les Impreffions étrangeres. J'ofe me flatter, que celle-ci ne le cédera en rien aux Éditions dont il vient d'être fait mention, & il n'a pas tenu à moi, qu'elle ne les furpaffat. J'ai mis les Notes & Remarques fur deux Colonnes, ce qui me femble faire un meilleur effet à la Vûe, & plus diftinct du Texte. D'ailleurs j'ai exactement fuivi les dernieres Editions, dont il a été parlé ci-deffus, à la Réserve de la Vie de l'Auteur, dont j'ai augmenté celle-ci. J'ai long-temps balancé, fi je la ferois réimprimer avec les ouvrages du célèbre Boileau, ou non. D'un coté la Pièce eft de bonne main, & vient d'un Écrivain qui s'est acquis de la réputation par d'autres Ouvrages de ce genre, & particulierement par les Vies de

Bayle & de St. Evremont; je veux parler de Mr. Des Maizeaux. Et d'ailleurs on eft na turellement charmé de connoître personnellement, pour ainfi dire, un homme, dont on lit depuis près d'un Siecle les Ouvrages avec admiration. On s'intéreffe à tout ce qui le regarde, & on voit avec fatisfaction jusqu'aux moindres occafions de fes différentes Productions. Mais d'un autre coté, on trouve un bon Nombre de Remarques & des Anecdo tes, qui entrent dans cette Vie, répandues dans les Commentaires de Mr. Broffette, quoique ce dernier ne l'ait citée nulle part, & que le temps de l'Impreffion de l'ouvrage de Mr. Des Maizeaux fit affez voir, que ce n'est point lui qui a été plagiaire. J'ai cru cependant devoir paffer par-deffus cette Confidération, & qu'on ne feroit pas fâché d'avoir les Anecdotes & ces Remarques tout de fuite, & dans un Ordre chronologique. Outre qu'il y a une infinité de chofes, dont Mr. Broffette n'a pas fait ufage.

Il eft pénible & ennuyant de ramaffer une quantité de Remarques & de petits faits répandus en cent endroits d'un Livre & dans des Volumes différens, tandis qu'on peut les voir dans leur fource, les trouver raffemblés en un feul Corps, qui fait l'hiftoire fuivie & abregée de l'Auteur & de fes Ouvrages. On n'est pas fâché non plus, de les retrouver où l'Intelligence du Texte le demande, fans être obligé de recourir à la

4

Vie; Et voilà ce qui m'a enfin engagé à mettre cette Vie à la tête des Oeuvres de Despreaux, fans retrancher du Commentaire de Mr. Broffette les Remarques qui paroiffent en avoir été tirées.

Quelques perfonnes m'avoient fuggéré l'idée, de ramaffer en un Volume, ce qui a été publié en différens temps contre cè célèbre Auteur, & d'en former une espece d'Anti-Boileau. Mais excepté ce que MM. B. & D. M. en ont récueilli dans leurs Remarques & à la fin du Livre, je ne crois pas qu'il ait rien paru contre notre Auteur qui méritât d'être réimprimé & de renchérir l'Ouvrage. Ce qu'on m'avoit indiqué de mieux, fe bornoit à peu près aux Lettres Antipoëtiques de Mlle. Hooghart, & à celles de l'Auteur des Lettres fur les Anglois, les François &les Voyages, où il critique rigoureusement la Satire de Despreaux. Mais d'autres Perfonnes m'ont déconfeillé d'en faire ufage. Elles m'ont fait confidérer, que les Lettres de Mlle. Hooghart attaquoient la Poëfie & les Poëtes en général, & ne regardoient, point directement notre Auteur; & que tous ces Reproches bien appréciés se réduifoient à celui d'avoir écrit en Vers. Encore ne le trouve-t-on pas fort bien appuyé. Il eft fondé fur une Averfion, fur un Mépris de toute Poëfie en général. Ce qu'on appelle Génie, Efprit poëtique, déplait fouveraine

[ocr errors]

ment à cette Savante; elle trouve le Langage des Poëtes peu naturel, & ne se sent nullement affectée de l'harmonie, qui résulte de la Cadence & des Rimes, & qui rend les bons Vers fi touchans pour d'autres. Pour échapper à fa Cenfure, il eût fallu que Despreaux eut écrit naturellement, & arrangé fes Mots dans le même Ordre où les Idées se préfentent à l'Efprit, & avec la même Précifion; c'est à dire, qu'il eut fallu que Boileau n'eût pas été Poëte, & n'eût jamais écrit qu'en Profe. Quand on eft fait & qu'on penfe de cette maniere-là, il n'y a qu'à rejetter toutes fortes de Poëtes & de Poëfie, & on a tort de vouloir critiquer tel ou tel Poëte en particulier. On n'eft pas Juge compétent, & on s'expofe au même Reproche que méritent ceux, qui nés fans oreilles & fans goût pour la Mufique, s'amusent à décider d'un Concert, où de tel autre ouvrage dans ce genre. C'eft ce qu'on me dit de plus modéré fur ce fujét. Ón y ajouta, que ces mêmes Réflexions pouvoient fervir contre la Lettre de Mr. Muralt, qui témoignoit à peu près autant d'éloignement pour la Poëfie, que Mlle. Hooghart. Que d'ailleurs cette Lettre étant mieux écrite, se faifoit lire avec plus de plaifir que celles du Panégyrifte de Mlle. Schurmann: Mais qu'en revanche elle étoit remplie de faux Jugemens, & de Réflexions qui paroiffoient vifiblement dictées par l'envie de critiquer

« PreviousContinue »