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timent plus forte que leur convoitise, et par l'incertitude du succès d'une tentative périlleuse.

Nous savons bien que ces mesures préventives et comminatoires déplairont à un certain nombre d'assurés ou irréfléchis ou peu sûrs d'eux-mêmes; mais nous avons la conviction qu'elles n'inquiéteront jamais les assurés qui ont conscience de leur honnêteté. Tous les pays civilisés sont dotés d'un code d'instruction criminelle; il ne s'est trouvé personne pour demander qu'on le supprime comme injurieux pour la population.

A. VAUZANGES.

Comme en Autriche, comme en France, comme partout où les incendies se sont multipliés, dans le cours de ces dernières années, on se préoccupe en Angleterre des causes plus ou moins accidentelles auxquelles ils sont dus.

Vers la fin de janvier, le Bureau métropolitain des travaux publics, de Londres, a reçu une communication du Ministre de l'intérieur qui proposait l'établissement d'un service spécial d'enquête dans les cas d'incendies non suivis de mort d'hommes. Le Bureau métropolitain a émis un vou conforme. Une enquête aurait lieu sur son avis ou sur celui du Ministre de l'Intérieur chaque fois que l'utilité en apparaîtrait, mais le Bureau n'a pas été d'avis que ce service fût confié au jury habituel du Coroner; il a invité le ministre à nommer un fonctionnaire spécial sur le rapport duquel le Bureau métropolitain aurait le droit de faire comparaître des témoins et d'exiger la production de toutes pièces et de tous documents propres à l'éclairer sur les causes des sinistres.

A. V.

ASSURANCES PAR L'ÉTAT

L'ASSURANCE PAR L'ÉTAT EN FRANCE
D'APRÈS LES DOCUMENTS OFFICIELS

Avant de devenir assureur, l'État, en France, exerçait déjà des industries variées; il était même négociant, puisqu'il vendait, et à gros bénéfices, les produits de ces mêmes industries. Ainsi, il fabriquait, et fabrique encore, des imprimés de toute sorte (Imprimerie

nationale), des tapis (Gobelins et Beauvais), des porcelaines (Sèvres), des canons, de la poudre, du tabac, des phares, des navires de guerre et leurs accessoires. Il ne dédaigne même pas la fabrication du papier timbré et des jeux de cartes. Comme agriculteur, il cultive des fermes dites modèles et qui n'ont jamais couvert les frais d'exploitation; il élève des chevaux et autres gros animaux de ferme ; il se livre, en outre, sur une grande échelle, à la culture forestière.

On aurait pu croire qu'il avait ainsi, dans une proportion suffisante, les moyens de donner satisfaction à ses goûts comme producteur et négociant. Il n'en a rien été ; il a risqué un pas de plus dans la même voie il s'est fait assureur.

Il l'était, il est vrai, depuis longtemps et dans une assez large mesure, comme dépositaire, par l'intermédiaire de la Caisse des Dépôts et Consignations, des fonds des Caisses d'épargne, auxquels il assurait un intérêt assez élevé, en même temps qu'il les garantissait contre les risques résultant, dans d'autres pays, de l'improbité des administrateurs. Il lui est bien arrivé quelquefois, notamment après la révolution de 1848, de faire de mauvaises affaires dans cette branche d'assurances; mais, loin de se décourager, il a étendu le cercle de ses opérations, en offrant aux classes ouvrières de faire valoir leurs économies sous d'autres formes très séduisantes. Il trouvait, il est vrai, une compensation aux aléa de sa nouvelle profession d'assureur dans le fait d'avoir à sa disposition, pour satisfaire à des besoins personnels, pas mal de centaines de millions, qui le dispensaient de recourir à des emprunts beaucoup plus onéreux que l'intérêt qu'il devait leur servir. C'est ainsi que l'idée lui est venue, ses besoins financiers s'accroissant sans relâche, d'entreprendre, au profit des mêmes classes ouvrières, l'assurance sur la vie- mais tout d'abord en cas de vie seulement - par la création de la Caisse des retraites pour la vieillesse. Mais il a débuté par une mauvaise spéculation. Il a cru devoir, en effet, pour se faire rapidement un gros portefeuille, bonifier à ses assurés l'intérêt énorme de 5 p. 100, alors qu'il ne tirait de leur argent, sous forme d'achats de rentes, que 4 à 4 1/2, et plus tard, 3 à 3 1/2 p. 100. Il est vrai que cette bonification d'un intérêt exceptionnel a eu le résultat prévu : les assurés sont venus. Toutefois, comme ils n'arrivaient pas assez vite et en nombre suffisant pour procurer à l'État les ressources sur lesquelles il comptait, il a eu l'ingénieuse pensée d'étendre les bienfaits de sa nouvelle institution, des classes ouvrières aux classes moyennes, en portant le maximum de la pension de retraite, de 600 à 1,000 francs, puis à

1,200, puis à 1,500 francs. Oh! alors l'argent est venu en quantité notable. C'est ainsi que, depuis la mise en activité de la Caisse en 1851, jusqu'au 31 décembre 1881, l'État a reçu, en versements et en arrérages de rentes, l'assez joli denier de 520 millions de francs en 7,940,258 versements (nous regrettons de ne pas connaître le nombre des auteurs de ces versements).

Sur cette somme de plus d'un demi-milliard, il a remboursé, sous des formes diverses, 40,223,470 francs.

A son insu et, il faut le reconnaître, contre ses prévisions, l'État n'a pas accordé seulement aux heureux clients de la Caisse le bienfait d'un intérêt exceptionnel; il leur a appliqué, en outre, une table de survivance qui, construite, il y a près de deux siècles, pour des têtes choisies, s'est trouvée donner une mortalité supérieure à la mortalité réelle de ces mêmes clients. Il en est résulté, d'une part, qu'un plus grand nombre qu'il ne l'avait prévu est arrivé à l'âge de l'entrée en jouissance de la pension, et de l'autre, qu'un plus grand nombre en a joui plus longtemps qu'il ne l'avait calculé. De là une nouvelle perte pour l'État, que les contribuables ont dû couvrir en vertu de l'axiome latin :

Quidquid delirant reges, plectuntur Achivi.

Il eût semblé que l'expérience était décisive et qu'il n'y avait pas lieu de la renouveler. Il n'en a rien été. Avec la Caisse des retraites, l'État ne faisait que l'assurance en cas de vie; il a voulu la faire en cas de mort. De là la création, en 1868, d'une caisse spéciale à cet effet. Mais, ici, soit que les avantages fussent moins grands pour les intéressés, soit que l'État ne lui ait pas donné une publicité suffisante, soit que la crise douloureuse traversée deux années après par le pays ait détourné l'attention générale de la nouvelle création, soit, enfin, que les classes auxquelles s'adresse la nouvelle caisse ne se sentent que peu de sympathie pour des placements qui doivent profiter à d'autres qu'à ceux qui les font, l'insuccès à été assez grand. C'est ce qu'indique le résumé officiel des opérations au 21 décembre 1881.

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A cette date, l'État n'a reçu, en primes et en arrérages de rentes, que la modeste somme de 680,984 francs pour 1,488,273 francs de capitaux assurés. Sur cette somme, il a dépensé, tant en payement de ces capitaux qu'en remboursements divers, 619,585 francs, c'està-dire qu'il a déjà presque autant dépensé qu'il a reçu, et que,

cependant, il est tenu de faire face, avec un excédent de recettes de 61,399 francs, au payement du surplus des capitaux assurés, soit 868,688 francs. Au premier aperçu, cette situation n'est rien moins que brillante. L'usage de la table de Deparcieux et la bonification probable du même intérêt qu'aux assurés en cas de vie, nous permettent, d'ailleurs, de croire que les contribuables seront également obligés de combler tôt ou tard le déficit de cette seconde caisse. La même année (1868), l'État, croyant n'avoir pas assez fait pour ces classes ouvrières, qui sont, de plus en plus, de sa part, l'objet de prédilections exceptionnelles, peut-être parce que le suffrage universel en a fait les arbitres des destinées du pays, créait une troisième classe, la Caisse des assurances contre les accidents.

Cette troisième création était au moins prématurée; car l'État ne connaissait — et ne connaît encore — des accidents, mortels ou non' que ceux qui se produisent annuellement dans les houillères et dans les mines métalliques, peut-être aussi sur les chemins de fer. Il se chargeait donc de couvrir un risque dont il ne connaissait pas l'intensité; c'était s'exposer à de très graves déceptions. Il est vrai que, pour les assurances qu'il entreprend, l'État a derrière lui un fonds de réserve et de garantie presque inépuisable: le budget.

Quoi qu'il en soit, de sa fondation au 31 décembre 1881, la Caisse des accidents a fait une recette de 3,587,081 francs, dont 2,000,000 de francs provenant de la subvention de l'Etat et 1,000 francs (somme. restée invariable depuis la création) de dons et legs. La recette effective ou du chef des assurances a donc été de 1,586,081 francs, soit, par année moyenne, 1,133 francs! Sur la recette totale, la Caisse a dépensé en secours en cas de décès (art. 12 de la loi du 12 juillet 1863), en transports à la Caisse des Retraites pour la vieillesse (art. 11), en remboursements et frais divers, la somme de 63,392 francs. Décidément, la classe ouvrière se montre médiocrement touchée des témoignages d'ardente sympathie de l'État.

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N'y aurait-il pas, dans cette abstention en ce qui concerne la Caisse accidents, en dehors d'une publicité insuffisante et du peu de popularité de l'assurance en général dans les classes ouvrières, une raison analogue à celle qui les dissuade de s'assurer en cas de mort, c'est-à-dire une très faible sympathie pour une institution dont elles se figurent n'avoir jamais besoin?

1. Des accidents mortels, l'État n'est informé que de ceux qui arrivent à la connaissance de l'autorité judiciaire.

2. Autre faveur spéciale accordée à cette autre catégorie d'assurés.

Nous nous refusons, d'ailleurs, à croire que, parmi les motifs qui les éloignent des deux dernières caisses d'assurances, figure, comme cependant on l'a dit, une certaine défiance de la solvabilité de l'État, non pas en temps ordinaire, mais dans le cas d'un de ces nouveaux naufrages de la société, si fréquents dans notre pays, qui s'appellent révolutions.

Encore moins croyons-nous à l'espérance que donnent aux ouvriers français certains de leurs coryphées qu'avant peu ils deviendront propriétaires, sans bourse délier, de tous les éléments de la production, c'est-à-dire de tous les éléments de la richesse publique en France.

A. L.

ASSURANCES CONTRE LES ACCIDENTS

LES ACCIDENTS DE CHEMINS DE FER

Sauf en Angleterre, et, dans une moindre mesure, en Allemagne, l'assurance contre les accidents de chemins de fer est relativement rare en Europe. L'explication, fort naturelle, en est dans ce fait qu'en l'absence de renseignements dignes de foi sur le nombre et l'intensité des accidents, les Compagnies qui seraient tentées de l'entreprendre sont dans l'impossibilité de calculer, avec un degré d'approximation quelconque, le tarif de leurs primes.

En ce qui nous concerne, nous avons reproduit tous les documents de cette nature qu'ont publiés, jusqu'à ce jour, les gouvernements et les particuliers, notamment les décès par accidents de la population générale en Angleterre (d'après un mémoire lu à la Société des actuaires par un de ses membres) et les accidents industriels selon leur degré de gravité en Allemagne, d'après une enquête officielle du gouvernement impérial pendant les quatre derniers mois de 1881, enquête qui se poursuit en ce moment.

Nous continuons aujourd'hui pour la compléter plus tard en ce qui concerne les accidents dans les mines et houillères cette étude statistique, en faisant connaître les accidents de chemins de

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