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La production générale des Compagnies s'est élevée, en capitaux assurés, à 574,505,551 francs, et en rentes viagères à 2,794,489 francs. Nous ne donnons pas ces résultats comme l'expression exacte et irréductible des opérations directement réalisées par chaque Compagnie prise à part.

Chacun des nombres qui leur sont attribués dans notre tableau comprend à la fois, notamment en ce qui concerne les capitaux assurés, les affaires directes et les réassurances, et ces dernières, qui figurent d'abord comme affaires directes dans telle et telle Compagnie, font évidemment double emploi en figurant dans la production de la Compagnie réassureur.

Les comptes rendus officiels que nous publions en juillet ne manquent pas de faire cette distinction, qui a son intérêt et permet d'apprécier les diverses sources de production. Mais, aujourd'hui, nous ne nous préoccupons que de noter la marche de l'institution. Ce que nous avons à cœur de constater, c'est que les assurances sur

la vie continuent à se développer dans notre pays, voilà pour nous le point essentiel.

Non pas que ce développement se soit manifesté par une importante augmentation des capitaux assurés sur ceux de l'exercice précédent. Cette augmentation est insignifiante. Ce qui est autrement significatif, c'est que les Compagnies aient pu, à travers une crise financière qui a duré toute l'année 1882 et pèse encore sur le pays, maintenir une production considérable qui avait marqué, en 1881, le progrès le plus accentué que nous eussions eu à signaler.

Ce résultat général ne se répartit pas entre les Compagnies dans la même proportion que celui de 1881. Quelques-unes ont conservé leur position; d'autres ont un peu rétrogradé ; d'autres ont gagné du terrain, comme on peut le voir par le tableau comparatif ci-dessus; finalement, il y a eu dans l'ensemble des assurances une légère augmentation de deux millions.

Le chiffre de rentes viagères constituées a diminué; mais on se tromperait si l'on tirait de ce résultat spécial une induction fâcheuse. Au taux où est descendu le loyer de l'argent, il n'y a aucun avantage pour les Compagnies à rechercher les rentes viagères qui sont devenues plus coûteuses que lucratives, et beaucoup d'entre elles les négligent systématiquement.

Quoi qu'il en soit, l'année 1882 a donné beaucoup plus qu'on ne supposait pouvoir attendre d'elle; et dans ce qu'ont réalisé nos Compagnies, nous sommes heureux de voir que leur activité et leurs efforts ne se sont laissé rebuter ni par des difficultés exceptionnelles ni par les tendances déplorables, les trahisons et le désordre du marché, et que notre population, au milieu d'embarras de toute nature, non seulement n'a pas perdu le sentiment de la prévoyance, mais cherche, de plus en plus, dans l'assurance sur la vie, la garantie de l'avenir.

A. V.

UNE NOUVELLE TABLE DE MORTALITÉ ALLEMANDE

On sait que l'assurance sur la vie est basée sur la connaissance du contingent que les habitants de chaque catégorie d'âges d'une population fournissent à la mortalité de cette population. C'est ce contingent que les tables de mortalité, ou, si l'on veut, de survivance, sont destinées à faire connaître.

En l'absence de recensements par âges, les tables de mortalité ont longtemps été calculées uniquement d'après les décès par âges. On était alors obligé de supposer que, dans le pays auquel elles s'appliquaient, les naissances étaient égales aux décès, que, par conséquent, la population était stationnaire. Dans ce cas, la mortalité par âges représentait exactement la population également par âges. Mais cette hypothèse était démentie par les faits, les populations complètement, absolument stationnaires n'existant pas, tandis que, presque partout, elles sont progressives, et, dans le plus petit nombre de cas seulement, décroissantes. Elles sont décroissantes notamment dans quelques départements français et parmi les naturels des régions transocéaniques que la conquête a mis en contact avec les Européens.

Pour remédier à l'inexactitude obligée des tables de survivance calculées sur des décès seulement, quelques statisticiens ont eu la pensée de répartir entre les décédés par âges, proportionnellement à leur nombre, les excédents des naissances. Mais ce procédé, purement empirique, ne pouvait avoir aucune valeur.

De rapides données historiques sur les tables de mortalité les plus connues seront peut-être lues avec intérêt. Dans tous les cas, elles épargneront aux hommes spéciaux les recherches auxquelles nous avons dû nous livrer pour en réunir les éléments. Nous commencerons par la France, pour finir par l'Allemagne, dont la nouvelle table de survivance, calculée d'après l'expérience des plus importantes Compagnies d'assurances sur la vie de ce pays, est considérée comme un véritable événement scientifique.

La plus ancienne des tables françaises de mortalité qui ont été calculées avec les décès est celle de Deparcieux, construite avec des têtes tontinères ou choisies, observées de 1689 à 1696. Elle a été complétée, pour les premiers âges, par M. Mathieu, de l'Institut, qui a pris pour éléments: les résultats du recensement de 1851, le nombre des naissances masculines et des survivants à 21 ans (recrues), enfin le nombre des électeurs inscrits pour les élections au suffrage universel qui ont suivi la révolution de 1848. Les bonnes conditions mathématiques dans lesquelles la table de Deparcieux a été construite, et qui ont consisté à suivre les tontiniers de chaque âge depuis leur entrée dans la tontine jusqu'à leur extinction complète, l'ont fait adopter par le gouvernement français pour le calcul des tarifs de la Caisse des retraites pour la vieillesse. Les Compagnies françaises et beaucoup de Compagnies étrangères l'ont prise comme base du même calcul pour les assurances en cas de vie.

La seconde table française par ordre de date est celle de Duvillard, construite, à la fin du dernier siècle, avec des décès par âges dont on ne connaît pas le nombre, et qu'il a'publiée, en 1806, dans son Analyse de l'influence de la petite vérole sur la mortalité.

La table de Duvillard, qui donne une mortalité rapide, a été adoptée par un grand nombre de Compagnies de divers pays pour les assurances en cas de mort.

Il faut remonter jusqu'en 1838 pour trouver une nouvelle table de mortalité française. Nous voulons parler de celle de M. de Montferrand, qui, en l'absence de recensements par âges, l'a calculée avec les décès par âges de la période 1820-1834. L'auteur a, tout d'abord, établi, par un procédé qui nous est inconnu, une population hypothétique par âges à laquelle il a rapporté la moyenne des décès des mêmes âges. On lui a reproché d'avoir éliminé les années d'épidémies, qui jouent un certain rôle dans la mortalité, en ce sens que ces années sont toujours suivies, dans une ou deux des suivantes, d'une diminution très notable des décès. Il a cru devoir éliminer également les départements à mortalité rapide (à cette époque, les Landes, les Basses-Pyrénées, la Corse et l'Ain).

En 1867, le bureau de la statistique de France a calculé et publié (tome XVIII de sa collection) la première table de survivance qui ait été construite dans notre pays avec des recensements (1851, 1856, 1861) par ages et des décès par Ages (1860-65). Elle indique une mortalité aussi lente que celle de Deparcieux, quoique calculée pour l'ensemble de la population.

Signalons encore, pour la France, la table de mortalité des pensionnaires civils de l'État établie, sur la demande du ministre des finances, par MM. Charlon et Achard (Journal des Actuaires français, avril 1879).

La première table de mortalité calculée en Angleterre est celle de Carlisie. Elle l'a été, il y a plus d'un siècle, avec les décès par âges de cette ville (1770). Peu de temps après, paraissait celle de Northampton, construite dans les mêmes conditions, avec les décès par âges de cette ville pour une période de 30 années. On sait qu'elle a été publiée par le docteur Price dans son livre Reversionary payements (1771). Dans la seconde moitié de ce siècle, M. Rickman, alors directeur du Registra general, se défiant de l'exactitude des recensements par âges', a construit avec des décès la première table de

1. C'est M. Rickman qui a dit qu'il n'avait jamais pu connaître exactement l'âge de sa femme et de sa servante.

mortalité pour l'Angleterre entière. Plus tard (1859), son successeur médiat, le docteur Farr, a publié la première table qui ait été construite avec des recensements et des décès par âges; mais elle ne s'applique qu'aux comtés anglais qui ont la moindre mortalité. C'est en 1869 qu'a paru la célèbre table dite des 17 Compagnies anglaises, calculée avec des décès d'assurés. Elle a été adoptée par le plus grand nombre des Compagnies du Royaume-Uni. La table des 20 Compagnies, calculée plus tard par Woodhouse, d'après l'expérience de ces Compagnies, de 1840 à 1862, a obtenu le même succès. Citons encore celle de Morgan, construite spécialement pour la Société l'Equitable, une des plus anciennes de l'Angleterre et d'après les décès de cette Compagnie, puis celle de la Law life Society, établie, dans les mêmes conditions, d'après des observations embrassant la période 1823-1875; enfin la table de Babbage, dont les éléments nous sont inconnus.

Nous ne saurions oublier les tables calculées d'après les décès des porteurs de rentes viagères de l'État (annuitants) par les Finlaison père et fils, actuaires du gouvernement, ni celles de MM. Neison père et fils pour les Sociétés de secours mutuels, travaux très méritants et établis dans les meilleures conditions d'exactitude.

Pour l'Autriche (nous continuons l'ordre alphabétique des noms de pays commencé avec l'Angleterre), nous ne connaissons guère qu'une table de décès par âges publiée par Joseph Hain dans sa Statistique de l'Autriche (1852), et celle de M. Schimmer, membre de la Commission centrale de statistique, construite avec des décès par âges, mais rapportés à la population par âges recensée en 1869.

En Belgique, M. Quetelet a publié sa première table de mortalité (construite avec des décès par âges) dans l'Annuaire de l'Observatoire de Bruxelles pour 1834. Il en a calculé une seconde à la fois avec le recensement par âges de 1856 et un certain nombre d'années de décès. Elle a été publiée dans le tome VIII du Bulletin de la Commission centrale de statistique.

La Hollande possède deux bonnes tables, l'une calculée pour des têtes choisies (rentiers de l'État), en 1748 par Kerseboom; l'autre récemment par M. de Baumhauer, directeur de la statistique au ministère de l'intérieur, avec des décès et des recensements par âges.

Nous ne connaissons, jusqu'à ce moment, pour l'Italie, que la table publiée en 1867 par M. William Rey, alors directeur de la Compagnie Royale d'assurances de Milan et auteur d'une brochure estimée

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