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(4) fans examiner qui des deux partis au fond a droit ou tort, je leur vante toûjours comme le plus parfait Ouvrage de Profe, qui foit en noftre langue. Nous en venons quelquefois à des paroles affez aigres. A la fin neamoins tout le tourne en plaifanterie : ridendo dicere verum quid vetat? Ou quand je les vois trop fâchez, je me jette fur les louanges (5) du R. P. de la Chaife, que je révere de bonne foi, & à qui j'ay en effet tout recemment encore une tres-grande obligation, puifque c'eft en partie à fes bons offices que je dois la Chanoinie de la Sainte Chapelle de Paris, que j'ai obtenuë de Sa Majefté, (6) pour mon frere le Doyen de Sens. Mais, MONSIEUR, pour revenir à voftre Lettre, je ne fçay pas pourquoi les amist

REMARQUES.

nière dont il s'entretenoit avec les Jéfuites, & les ménagemens, qu'il gardoit, en leur faifant l'éloge des Provinciales: c'est que fans examiner qui des deux partis au fond avoit droit on tort, il leur vantoit toujours ces LETTRES comme le plus parfait ouvrage de profe qui foit en notre langue. Ainfi bien Join que les paroles, dont il s'agir, donnent à entendre que M. Defpréaux n'adoptoit point le fentiment de M. Arnauld au fujet des Provinciales ( car c'eft apparemment en cela qu'il veut faire confifter la franchife): elles infinuënt, au contraire, qu'il en jugeoit comme ce Docteur, mais qu'il ne trouvoit pas à propos de s'expliquer là-deflus avec les Jéfuites, qui l'alloient voir, de peur de les défobliger. Et en effet, il paroît par la Satire contre l'Equivoque que c'êtoit là fon fentiment, puifqu'il y répète les mêmes reproches que M. Pafcal

a faits aux Jéfuites. Du MONTEIL.

(4) CHANG. fans examiner qui des deux partis au fond a droit ou tort,] Ces Paroles manquent dans les Lett, d'Arn. fur quoi l'Editeur avertit que c'eft une addition fai te dans l'Imprimé. La Note de M. Broffette, que l'on vient de voir, & qu'il rapporte, lui fait dire en fuite: Cette Remarque tombe d'elle-même, puifque ces paroles ne fe trouvent point dans l'original que l'Auteur a envoié à M. Arnauld, que fi on veut savoir quels étoiens les fentimens de M. Defpréaux tonchant les Jéfuites, on peut lire fa Satire fur l'Equivoque, fon Epitre fur l'Amour de Dieu &c.

( ) CHANG, du R. P. de la ChaiSe. ] Lett. d'Arn. du Pere la Chaife.

(6) pour mon frere le Doyen de Sens. Le Roi lui avoit donné ce Canonicat l'année précédente, 1693. BROSS.

de Monfieur Perrault refufent de la lui montrer. Ja mais Ouvrage ne fut plus propre à luy ouvrir les yeux, & à luy infpirer l'efprit de paix & d'humilité, dont il a befoin aufli bien que moy. Une preuve de ce que je dis, c'eft qu'à mon égard, à peine en ay-je eu fait la lecture, que frappé des falutaires leçons que vous nous y faites à l'un & à l'autre, je lui ay envoyé dire qu'il ne tiendroit qu'à luy que nous ne fuflions bons amis: : que s'il vouloit demeurer en paix fur mon fujet, je m'engageois à ne plus rien écrire dont il pust fe choquer; & luy ay mefme fait entendre que je le laifferois tout à fon aife faire, s'il vouloit, un Monde renversé du Parnaffe, en y plaçant les Chapelains & les Cotins, audeffus des Horaces & des Virgiles. ce font les paroles que Monfieur Racine & Monfieur l'abbé Tallemant lui ont portées de ma part. Il n'a point voulu entendre à cet accord, & a exigé de moi, avant toutes chofes pour les Ouvrages une eftime & une admiration, que franchement je ne lui fçaurois promettre fans trahir la raison, & 1. a confcience. Ainfi nous voilà plus brouillés que jamais, au grand contentement des Rieurs, qui eftoient déja fort affligez du bruit qui couroit de noftre reconciliation. Je ne doute point que cela ne vous faffe beaucoup de peine. Mais pour vous montrer que ce n'eft pas de moy que la rupture eft revenuë; c'est qu'en quelque lieu que vous foyez, je vous déclare, MONSIEUR, que vous n'avez qu'à me mander ce que vous fouhaitez que je faffe pour parvenir à un accord, & je l'executerai ponctuellement; fçachant bien que vous ne me prescrirez rien que de jufte & de raifonnable. Je ne mets qu'une condition au Traitté que je ferai mais c'eft conditio fine quâ non. Cette condition eft que voftre Lettre verra le jour, & qu'on nẹ me privera point, en la fupprimant, du plus grand honneur que j'aye reçeu en ma vie. Obtenez cela de vous & de luy; & je lui donne fur tout le refte la

carte blanche. (7) Car pour ce qui regarde l'eftime qu'il veut que je faffe de fes Ecrits, je vous prie, MONSIEUR, d'examiner vous-mefme ce que je puis faire là-deffus. Voici une lifte des principaux Ouvrages qu'on veut que j'admire. Je fuis fort trompé fi vous en avez jamais lû aucun.

Le Conte de Peau-d'Afne &

l'Hiftoire de la Femme au nez de boudin, mis en Vers par M. Perrault de l'Académie Françoife.

La Métamorphofe d'Orante en Miroir.
L'Amour Godenot.

Le Labyrinthe de Versailles, ou les Maximes d'Amour & de Galanterie, tirées des Fables d'Efope. Elégie à Iris.

La Proceffion de Sainte Genevieve.

Paralleles des Anciens des Modernes, où l'on voit la Poëfie portée à fon plus haut point de perfection dans les Opera de Monfieur Quinault.

Saint Paulin, Poëme Héroïque.

Reflexions fur Pindare, où l'on enfeigne l'Art de ne point entendre ce grand Poète.

Je ris, MONSIEUR, en vous écrivant cette lifte, & je crois que vous aurez de la peine à vous empêcher auffi de rire en la lifant. Cependant je vous fupplie de croire que l'offre que je vous fais eft tres-ferieuTe, & que je tiendrai exactement ma parole. Mais foit que l'accommodement fe faffe ou non, je vous

REMARQUES.

(7) CHANG. Car pour ce qui regarde l'eftime qu'il veut que je faffe de fes Ecrits, je vous prie, Monfieur, d'examiner vous mefme ce que je puis faire la-deffus. Voici une life des principaux &c.] Lett. d'Arn. Car pour ce qui regarde l'estime qu'il went que je falle de fes Ecrits, mes

bôtes d'Auteuil m'indiqueront peutêtre quelque Auteur grave qui me fournira des moiens pour dire de bouche, fans bleffer la vérité,que j'eflime ce que je n'eftime point. Et afin, Monfieur, que vous examiniez vousmême ce que je puis faire là-dessus, voici une lifte des principaux &c.

réponds, puifque vous prenez fi grand intérest à la mémoire de feu Monfieur Perrault le Medecin, qu'à la premiere Edition qui paroiftra de mon Livre, il y aura dans la Préface un article exprès en faveur de ce Medecin, qui feurement n'a point fait la façade du Louvre, ni l'Obfervatoire, ni l'Arc de Triomphe, comme on le prouvera dans peu demonstrativement: mais qui au fond eftoit un homme de beaucoup de merite, grand Phyficien, & ce que j'eftime encore plus que tout cela, qui avoit l'honneur d'eftre vostre ami. Je doute mefme, quelque mine que je faffe du contraire, qu'il m'arrive jamais de prendre de nouveau la plume pour écrire contre Monfieur Perrault l'Académicien, (8) puifque cela n'est plus nécessaire. En effet, pour ce qui eft de fes Ecrits contre les Anciens, beaucoup de mes amis font perfuadés, que je n'ay déja que trop employé de papier dans mes Réflexions fur Longin, à refuter des Ouvrages fi pleins d'ignorance,& fi indignes d'eftre refutez. Et pour ce qui regarde fes Critiques fur mes mœurs & fur mes Ouvrages,le feul bruit,ajoûtent-ils,qui a couru que vous aviez pris mon parti contre luy, eft fuffifant pour me mettre à couvert de ses invectives. J'avoue qu'ils ont raison. La verité eft pourtant,que pour rendre ma gloire complette, il faudroit que voftre Lettre fuft publiée. Que ne ferois-je point pour en obtenir de vous le confentement? Faut-il fe dédire de tout ce que j'ay écrit contre Monfieur Perrault? Faut-il se mettre à genoux devant luy? Faut-il lire tout Saint Paulin ? Vous n'avez qu'à dire : Rien ne me fera difficile. Je fuis avec beaucoup de refpect, &c.

REMARQUES.

(8) CHANG. puifque cela n'eft puis que je n'en ai plus aucun be plus neceffaire.] Lettres d'Arnauld, foin.

Fin du I. Tome.

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