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75 Allez au Cours, au Bal;

allez à l'Opera ,
Ala Foire, il est sûr qu'elle s'y trouvera.
Il semble à regarder l'effor de sa folie ,
Que pour eftre par tout elle se multiplie.

Pour des femmes d'honneur , dans ces lieux hazardeux , 80 De cent que l'on connoist on n'en verra pas deux.

Rejerie donc , mon fils, cette fauffe maxime Qu'on trouve rarement une femme sans crime, C'est seulement ainsi que parle un Suborneur,

Qui de femmes sans foy , Jans honte ng fans honneur
85 Fait prés de son Iris, une liste bien ample,
Pour la faire tomber par le mauvais exemple.

Au lieu d'eftre toujours dans les lieux de plaisir
A repaistre tes yeux :

à charmer ton loisir,
A regarder sans cessé au Cours, aux Thuilleries,
90 Du Fard du Brocard chargé de Pierreries,

Va dans les Hopitaux ou l'on voit de longs rangs
De Malades plaintifs, de Morts ego de Mourans,;
tu rencontreras en tout temps, à toute heure',

Malgré l'air infecté de leur triste demeure ,
95 Mille femmes d'honneur dont souvent la beauté

Que cache en qu'amortit leur humble pieté,

A de plus doux appas pour des ames bien faites ,
Que iout le vain éclat des plus vives Coquettes.

Descens dans des caveaux , *monte dans des greniers 100 des Pauvres obscurs fourmillent à milliers ,

Tu n'y verras pas moins de Dames vertueuses
Frequenter fans dégouft ces retraites affreuses;
Et par leur zele ardens , leurs aumosnies, leurs soins ,

Soulager tous leurs maux , remplir tous leurs besoins. 105 Entre dans les Reduits des bonnestes familles

Et vois-y travailler les Meres do les Filles ,
Ne songeant qu'à leur tâche, ego qu'à bien recevoir
Leur pere ou leur époux quand il revient le soir.

Charmé de leur conduite doo si simple don se sage, 110 Tu te verras contraint de changer de langage.

Peux-tu ne sçavoir pas que la Civilité
Chez les Femmes naquit avec l'Honnesteté?"
Que chez elles se prend la fine Politessé,

Le bon air, le bon gouft, e la Delicatesse? ais Regarde un peu de prés celuy qui Loupgaron,

Loin du sexe a vescú renfermé dans son trou,

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Tule verras crasseux, mal-adroit de Sauvage ,
Farouche dans jes moeurs, rude dans son langage ,

Ne pouvoir rien penser , de fin, d'ingenieux , 120 Ni dire jamais rien que de dur ou de vieux.

S'il joint à ces talens l'amour de l' Antiquaille ,
S'il trouve qu'en nos jours on ne fait rien qui vaille,
Et qu'à tout bon Moderne il donne un coup de dent;

De ces dons rafsemblez se forme le Pédant, 125 Le plus fastidieut , comme le plus immonde,

De tous les animaux qui rampent dans le monde,

Quand le Sexe s'oublie , e de tant de façons
Sert de folle matiere à de folles chansons,

N'as-tu pas remarqué que de tout ce scandale, 1 30 Les Mares sont souveni la fause principale :

Soit par le dur excés de leur séverité,
soit par leur indolence go leur trop de bonté.
S'il arrive qu'un jour aux noeuds

du mariage En suivant mes desirs ton heureux fort t'engage 5 135 Ne t'avise jamais d'affecter la rigueur ,

De vivre en Pedagogue avec trop de hauteur ,
Temoignes de l'amour, du respect, de l'estime ;
En Mári toutefois qui conduit eo qui prime :

On a beau publier en prôner en tous lieux.
140 Que le Sexe est hautain, qu'il est imperieus ;

La Femme en son époust aime à trouver son maistre ,
Lorsque par ses vertus il merite de l'estre;
Si l'on la voit souvent resoudre de decider ,
C'est que le foible Epoux ne sçait

pas commander. 145

il en est , il est vray, qui dans leurs mariages
N'ont pas toûjours trouvé des Epouses bien sages;
Mais auroient-ils le front d'en oser murmurer ?
Ont-ils en épousant tâché d'en rencontrer ?

Eux & leurs vieux Parens n'ont avec leurs besicles iso Pendant des mois entiers , relû des articles

REM A Â ē v E S. (118) Dans le Recueil des raule, qui fit imprimer son Re. Ouvrages de M. Perrault, que cueil' après la réconciliation j'ai ciré , cet Hemistiche est avec M. Despréaux , supprima de cette manière : & rude en son ces huit Vers, à cause de l'aplangage. La Phrase finit là. Les plication, qu'on en pouvoit faihuit Vers suivans ne s'y trou- re à son Adversaire. vent point. Ils étoient dans la (149 & 150) Ces deux Vers première Edition , & M. Pero croient ainsi dans la I. EDITION :

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Qu'afin de parvenir par leur soin diligent ,
A bien apparier deux tas d'or ego d'argent ,
Sans regarder plus loin, sans voir si les parties

D'esprit , d'âge ego d'humeur seroient bien afforties. iss Ils ne comprennent point que pour vivre content ,

Le choix de la perfonne est le plus important;
C'est une verité qui leur semble bizare ,
Et
gur

n'entra jamais dans le coeur d'un Avære.

Quand le premier Mortel fut mis dans l'Univers, 160 Pour commander lui seul à tant d'Estres divers,

Son qil , n'en doutons point, vit avec complaisance ;
Ses richesses sans nombre de la vaste puisance ;
Mais lorsque degagé de son premier sommeil ,

Le Seigneur lui montra la femme à son reveil, 165 La femme sa moitié, sa compagne fidelle ;

Quittant tout , il tourna tous les regards sur elle ,
Et charmé de la voir, trouva moins de douceur
A regir l'Univers qu'à regner dans son cæur.

La Gloire nous ravit par la beauté suprême,
170 L'Or nous rend tout- t-puisans dos nous charme de même,

Mais malgré tout l'éclat dont ils frappent nos yeux ,
Des biens le plus solide ego le plus precieux,
Est de voir pour jamais unir la destinée

Avec une Moitié sage , douce do bien née, 175 Qui couronne fa Dot d'une chaste pudeur,

D'une vertu sincere don d'une tendre ardeur.
A ces dons precieux, fi le Ciel favorable
Se plaisant à former un chef-d'oeuvre admirable ,

D'une beauté parfaite a joint tous les attraits , 180 Le vif éclat du teint , la finesse des traits ;

Si ses beaux yeux , ornés d'une brune paupiere ,
Jettent, sans y penser , de longs traits de lumiere ;
Si sa bouche enfantine eg d'un corail sans prix,
A tous les agremens que forme un doux souris ;

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Eux & leurs vieux Parens avecque leurs besicles

N'ont pendant plusieurs mois la , relu des articles. (161) Ce Vers êroit de cette manière dans la première EDIT.

Il vit, n'en doutons point, avocque complaisance.

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185 Si fa main le dispute à celles de l'Aurore,

Et si le bout des doigts est plus vermeil encore :
Faudra-t-il deplorer le sort de son Epoux
Et pourrois-tu le voir Jans en eftre jaloux ?

Il n'eft rien icy-bas de plus digne d'envie , 190 Ni qui mesle tant d'or au tissu d'une vie.

Les matheurs les plus grands n'ont rien d'aspre, d'affreux,
Quand deux cours bien unis les partagent entre eux,
Et le moindre bonheur

que
le Ciel leur

envoye,
Les inonde à l'envi d'un Ocean de joye.
195

Si dans la bonne chere un Epoux emporté
En dissipant son bien altere sa janté,
Par de sages repas, dos fans dépense vaine ,
Chez elle adroitement l’Epouse le rameine ;

Et retranchant toujours la superfluité, 200 Le remet pas à pas dans la frugalité.

Si son oeil apperçoit quelque intrique galante,
Alors elle se rend encor plus complaisante,
Souffre tout, ne dit mot, tant qu'enfin la douceur

L'attendrit , le desarme ego regagne son coeur. 205 Par elle tous les jours la Jeunesse volage

Se retire du vice der du libertinage,
Par sa bonne conduite une famille en paix
A des enfans bien nez ego de sage valets,

Par elle une Maison tombée en decadence, 210 Voit revivre en son sein l'éclat o l'abondance.

Ce ri’est point seulement dans les premiers beaux jours,
Ni dans la jeune ar deur des naissantes amours,
Que d'un heureux hymen se goûtent les délices,

Son cours n'est pas moins doux que ses tendres premices. 215 C'est un bonheur égal , un bien

tous les temps.
Ah! combien d'un Epoux les yeux sont-ils contens ,
Quand il voit prés de lui pendant la maladie ,
Une Epouse attentive, do qui ne s'étudie

Qu'à prevoir ses besoins de qu'à le foulager, 220 Et qui pleure in secret dés le moindre danger ;

Tout plaist d'elle, il n'est plus de medecine amere
Dés qu'elle passe à lui par une main ji chere ;
Et fi'le Ciel'enfin ordonne son trépas;

Sans peine dor sans murmure il meurt entre ses bras.
225_Ainsi s'acheve en paix l'heureuse destinée
De celuy qu'en ses næuds engage l'hymenée,

Ff üj

que

Pendant le Prôneur du libre Celibat,
Luttant contre la mort sur son triste grabat,

Confus , embarasé d'un si penible role ,
230 Voit l'æeil à demy clos, jon valet qui le vole ,

Et sent quoy qu'abbattu de douleur don d'ennuy,
Qu'on tire

impudemment fon drap de deffous luy. Si fon deftin permet qu'un serviteur fidele

Luy donne en ces momens des marques de fon zele, 339 Ses Amis font ailleurs, dos pour comble de maux

Son lit est entouré d'aspres Collateraux ,
Qui craignant que des legs ne gâtent leur affaire
Veillent à détourner Confeseur de Notaire",

Apprehendent toûjours qu'un bol de Quinquina 250 En faisant son effet ne le tire de .

N'est-il pas vrai , mon fils, que cette seule image
Des aimables douceurs d'un heureux mariage,
Et surtout de l'horreur qui suit le Celibat ,

Te trouble, te saisit , te confond do t'abat,
245 Que ton esprit émů de ce qu'il vient d'entendre,

Des deux routes qu'il voit ne sçait laquelle prendre ?
Je sçay qu'à mon avis tu viendras te ranger,
Mais je te donne encor du temps pour y Songer.

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