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lade quand elle ne l'eft pas : il y a assurément un peu trop de Poëfie dans cette fiction.

On a de la peine à deviner ce que veulent dire ces deux Vers.

Mais pour quelques vertus fi pures, fi finceres,
Combien y trouve-t-on d'impudentes fauffaires.

Par fauffaires on ne peut entendre que ceux qui contrefont, ou des Actes ou des fignatures. On n'a jamais oui parler que les Femmes fe meflaffent d'un tel meftier. Elles ont bien de la peine à former une vraye écriture, comment auroient-elles affez d'habileté pour en faire de fauffe? On entrevoit que par fauffaires il veut dire des hypocrites, mais cela ne s'entend que parce qu'on veut bien l'entendre.

Cecy eft encore un peu obscur:

Et que dans fon logis fait neuf en fon abfence.

On ne comprend point comment un homme revenant de la Ville chez luy, peut trouver fon logis fait neuf. S'il y avoit qu'il trouve qu'on a fait maison neuve chez luy, cela s'entendroit : car maison fignifie auffi-bien ceux qui habitent une maison, que la maifon mefme; mais logis ne fignifie que le lieu où l'on

habite.

Cecy eft plus étrange.

N'allons donc point icy reformer l'Univers,

Ni par de vains Difcours & de frivoles vers.

N'eft-il pas plaifant que le Poëte faffe parler un de fes Interlocuteurs, comme fi la converfation qu'il rapporte s'eftoit faite en Vers: c'eft comme fi Corneille avoit fait dire à Augufte en parlant à Cinna: Prête l'oreilles à mes Vers, au lieu de dire, comme il fait : Prête l'oreille à mes difcours.

On a de la peine à entendre ce que veut dire une Capanée. On ne fçait fi on voit un homme ou une femme. Une marque que c'eft une femme; & Capanée,

que c'est un homme: car c'êtoit un des fept Capi taines qui affiegeoient la Ville de Thebes, fort connu par fon impieté. Je ne fçai pas fi on peut dire qu'une femme eft une Capanée, pour fignifier qu'elle est une Impie; mais je fçai bien qu'on ne dira jamais qu'une femme eft une Thefée, pour dire qu'elle est une infidelle; qu'elle eft une Ciceron, pour dire qu'elle eft fort éloquente; ni qu'elle eft une Socrate, pour dire qu'elle eft fort fage. Il y a là, fi je ne me trompe, un folecifme, & des plus gros, peut-eftre que l'apprentie Autheur qui a precedé, authorife une Capanée, & qu'une Capanée authorife enfuite l'apprentie Autheur. Je doute cependant qu'ils fe puiffent maintenir l'un l'autre,ni mefme s'empêcher de tomber tous deux. Il dit que les Parifiens font

Gens de douce nature, & maris bons Chretiens.

Si on examine de prés ce que bons Chreftiens veut di re là, pour peu qu'on aime le nom de Chreftien, il fera difficile de n'eftre pas indigné de la fignification qu'on luy fait avoir.

Mais c'eft affez parler de la Satyre contre les Femmes, difons quelque chofe de leur Apologie. Je ne doute point que plufieurs gens du bel air ne trouvent étrange que je faffe confifter un fi grand bonheur dans l'amitié conjugale, eux qui ne regardent ordinairement le mariage que comme une voye à leur establissement dans le monde, & qui croyent que s'il faut prendre une femme pour avoir des Enfans, il faut choifir une Maiftreffe pour avoir du plaifir. Mais cette conduite vicieufe, quoiqu'affez ufitée, ne prévaudra jamais aux premieres loix de la Nature & de la Raifon, qui demandent une union parfaite entre ceux qui fe marient: loix fi fages, fi commodes & fi honneftes.

Je fuis encore perfuadé que quelques Femmes de la haute volée n'aimeront par ces meres & ces filles, qui travaillant chez elles,

Ne fongent qu'à leur tafche, & qu'à bien recevoir Leur pere ou leur époux quand il revient le foir. Elles trouveront ces manieres bien bourgeoises, & le fentiment que j'ay là-deffus bien antique pour un Défenfeur des Modernes; mais quoyqu'elles puiffent dire, & quelque authorifées qu'elles foient par l'ufage & par la mode, il fera toujours plus honnefte pour elles de s'occuper à des ouvrages convenables à leur fexe & à leur qualité, que de paffer leur vie dans une oifiveté continuelle.

Il y a quelques portraits dans mon Apologie, qui ne marquent perfonne en particulier; & fi quelqu'un fe les applique, c'eft qu'il le voudra bien, & qu'il trouvera que ces portraits luy reffemblent. Il n'en eft pas ainfi du portrait de l'Autheur de S. Paulin dans la Satyre. Quelque obfcur que foit cet Autheur, & quoyqu'il n'y ait point d'honnefte homme qui fçache s'il eft au monde un S. Paulin, plufieurs honneftes gens n'ont pas laiffé de le reconnoiftre,fans le fecours mefme de la premiere lettre de fon nom, & des deux étoiles qui marquent qu'il eft de deux fyllabes.

La Satyre paroît en quelque façon faire main basse fur toutes fortes de Mariages,& n'en approuver aucun, je ferois bien fafché qu'on cruft que je penfe la mefine chofè du Célibat. Non feulement je le loue & le revere dans ceux qui fe confacrent à l'Eglife, ou qui se retirent dans des Monafteres; je le loue encore dans ceux qui le choififfent pour mener une vie plus auftere, en demeurant dans le monde, ou pour vaquer plus librement à l'étude; je le loue mefme en ceux qui n'ayant pas le bien néceffaire pour foûtenir les charges & les dépenfes du Mariage felon leur qualité, s'en éloignent par prudence & par moderation. Je n'en veux qu'à ceux qui choififfent cet état par libertinage, pour ne pouvoir fouffrir aucun lien qui les retienne dans les bornes de la raison & de l'honnefteté; à ces hommes fans joug, à ces enfans de Bélial, comme

parle l'Ecriture, qui non contens de vivre fans regle & fans ordre, veulent que tout le monde vive comme eux, & qui prétendent, tout infenfez qu'ils font, paffer pour les plus fages d'entre les hommes.

L'APOLOGIE DES FEMMES.

TIMANDRE avoit un Fils, trifte, fâcheux, colere
Des Milantropes noirs le plus atrabilaire;
Qui mortel ennemi de tout le genre humain,
D'une maligne dent déchiroit le Prochain
5 Et fur le Sexe mesme, emporté par fa bile;
Exerçoit fans pué, l'acreté de fon ftyle.

Le Pere qui vouloit qu'une fuite d'enfans
Peuft tranfmettre fon nom dans les Siecles fuivans,
Cent fois l'avoit preffé, pour en avoir lignée
10 De vouloir fe foumettre aux Loix de l'Hymenée ;
Et cent fois par ce Fils de chagrins herisse,

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Se vit avec douleur vivement repoussé.

Un jour qu'il le trouva d'une humeur moins fauvage, Le tirant à l'écart il luy tint ce langage:

Ce qui plait, ce qui charme & qu'on aime en tous lieux Te fera-t-il toujours un objet odieux ?

Ne fçaurois-je efperer que ton dedain se passe,

Et qu'enfin le beau fexe avec toy rentre en grace?
Si tu t'en éloignois par un faint mouvement
20 Et pour ne regarder que le Ciel feulement,
Te blafmer fur ce point feroit une injuftice,
Et je t'applaudirois d'un fi grand facrifice;
Mais ce qui t'a jetté hors du chemin battu,
Ce n'eft que le Caprice & non pas la Vertu.

25

C'est un ordre éternel qu'encore toute pure
Au fond de tous les cœurs imprima la Nature,
De rendre à fes Enfans le dépoft precieux

De la clarté du jour qu'on tient de fes Ayeux.
Heureux! qui reverant cette fainte conduite,
30 N'arrefte pas en foy, de foy-même la fuite;
Mais je rend immortel au gré de fon defir.
Serois-tu bien, mon fils, infenfible au plaif

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De voir un jour de toy naître un autre toy-mefme,
Qui ferve l'Eternel, qui l'adore & qui l'aime?
35 Qui lors que le trépas aura fermé tes yeux,
Aprés toy rende hommage à fon nom glorieux,
Et d'où puiffe fortir une feconde race,

Qui jufqu'au dernier jour le beniffe en ta place?
Tu fçais, je te l'ay dit, à quoy tendent mes vœux
40 Et ce qui peut nous rendre & l'un & l'autre heureut.
Il eft, j'en fuis d'accord, des femmes infidelies;
Et dignes du mépris que ton cœur a pour elles;
Mais fi de deux ou trois le crime eft averé,
Faut-il que tout le fexe en foit deshonoré?

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Dans une grande Ville où tout eft innombrable, Comme il eft naturel de chercher fon femblable, D'aimer à le connoistre & d'en eftre connu Selon les divers goufts dont on eft prevenu, Chacun en quelque endroit que le hazard le porte i So Nerencontre & ne voit que des gens de la forte. Ceux qui par le fçavoir se font rendu fameux, Ne trouvent fur leurs pas que des fçavans comme eux § Ceux qui cherchant toûjours la Pierre bien aimée, Ont l'art de convertir leur argent en fumée, 55 Ne trouvent que des gens qui fondant le metal, Par le mefme chemin courent à l'Hospital. L'homme de fymphonie & de fine Mufique Abordera toujours un homme qui s'en pique s Et ceux qui de rubis fe bourgeonnent le nez, 60 En rencontrent par tout d'encor plus bourgeonnez. Ceux qu'à le bien fervir le Tout-puissant appelle, Ne trouvent que des Saints brûlans du mejme zele; Que des Cours où le Ciel fes dons a repandus: Faut-il donc s'étonner fi des hommes perdus, 65 Jugeant du fexe entier par celles qu'ils ont veuës, Affurent qu'il n'est plus que des femmes perduës.

Pour fix qui fans cer velle avec un peu d'appas, Feront de tous coftez du bruit & du fracas, Par leur dance, leur jeu, leurs folles mascarades, 70 Leurs cadeaux indifcrets, leurs fombres promenades Sans peine on trouvera mille femmes de bien, Qui vivent en repos & dont on ne dit rien.

A toute heure, en tous lieux la Coquette se montre Il n'eft point de Plaifirs ou l'on ne la rencontre,

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