Dans un Fauteuil doré Phédre tremblante & blême (5) Dit des Vers où d'abord perfonne n'entend rien. Sa Nourrice lui fait un Sermon fort chrétien Contre l'affreux deffein d'attenter fur foi-même. Hippolite la hait prefque autant qu'elle l'aime ; Rien ne change fon cœur ni son chaste maintien. La Nourrice l'accufe; elle s'en punit bien Théfée a pour fon Fils une rigueur extrême. (6) Une groffe Aricie,au teint rouge,aux crins blonds, N'eft là que pour montrer deux énormes tetons, Que, malgré fa froideur, Hippolite idolâtre. Il meurt enfin, traîné Ce Sonnet fut à peine compofé, qu'on eut foin de le répandre dans Paris. Dès le lendemain matin REMARQUES. (<) Dit des Vers où d'abord per-` fonne n'entend rien. ] "Ce qu'il y a de plus remarquable c'eft ,, que cette Dame blâme fans le favoir, une des plus belles Tel excelle à rimer, C'eft la réflexion, que les deux premiers Vers du Sonnet de Madame Deshoulières fourniffent à l'Auteur de la vie de M. Racine, que l'on trouve à la tête de l'Edition de fes Oeuvres, qui • parut à Paris en 1736. chés Prault Fils. (6.) Une groffe Aricie, &c. [ C'étoit la Demoiselle Desaillets, Perfonne peu jolie à la vérité, mais Actrice excellente; & dont Scénes, qui aient jamais êté ,,compofées,& qui eft prefque la feule chofe que M. Racine ait empruntée d'Euripide dans cet Ouvrage : tant il eft vrai, que qui juge sottement,,, la réputation a duré long-tems au Théatre. Je me fouviens d'avoir entendu Mademoiselle Le Couvreur (& c'êtoit affés peu de tems avant fa mort) dire avec un air de fatisfaction, qu'elle êtoit extrèmement flatée des éloges, que les gens de la vieille Cour lui donnoient, à caufe qu'ils retrouvoient dans fon jeu, le goût & la plus grande partie du jeu de Mademoiselle Desaillets (7) l'Abbé Tallemant l'ainé,vint en aporter une Copie à Madame Deshoulières, qui la reçut comme d'une Nouveauté, qu'elle ne connoiffoit pas. Elle fut enfuite la première à montrer fon Sonnet, qu'elle difoit tenir de l'Abbé Tallemant. Les Amis de M. Racine crurent que ce Sonnet êtoit l'ouvrage de M. le Duc de Nevers. Pour Pradon lui-même, ils ne lui firent pas l'honneur de le foupçonner d'en être l'Auteur. En quoi certainement ils faifoient au Sonnet beaucoup plus d'honneur qu'il n'en méritoit. Quoiqu'il en soit, il fut parodié fur les mêmes Rimes contre le Duc de Nevers. Dans un Palais doré Damon jaloux & blême REMARQUES. (7.) L'Abbé Tallemant l'aîné.] FRANÇOIS Tallemant des Réaux Abbé de Val-Chrétien, & Prieur de faint Irénée de Lion, êtoit né à la Rochelle d'une Famille, qui s'êtoit extrèmement fignalée pendant les Guerres de Religion. On l'appelloit l'Ainé pour le dittinguer de Paul Tallemant fon coufin, qui étoit auffi Eccléfiaftique. Ils furent tous deux de l'Académie Françoife. François y fut reçu en 1651. à la place de Jean de Montereul, Chanoine de Toul, & Secretaire de M. le Prince de Conti; & il en mourut fous-Doïen le 6. de Mai 1693. âgé de 73. ans. Il fut Aumônier du Roi pendant 24. ans, & en. fuite premier Aumônier de Madame. Il favoit fort bien l'Ita lien, l'Efpagnol & l'Anglois. Il ne tint pas à lui qu'on ne crut qu'il entendoit tout aufli-bien le Grec. Il emplora une grande partie de fa vie à traduire les Vies des Hommes Illuftres de Plutarque; & fa traduction fut géné ralement méprifée. Celle qu'il fit enfuite de l'Hiftoire de Venise du Procurateur Nani réülsit mieux, & l'on en fait encore affés de cas. Il faifoit paffablement bien des Vers, & l'on trouve plufieurs Pièces de fa façon dans le Recueil de Vers choifs, publiê par le P. Bouhours. Voïés Epitre VII. Vers 90. La Muse, par malheur, le hait autant qu'il l'aime. Il veut juger de tout, & n'en juge pas bien. Cette Parodie, encore plus maligne que fon Original, & moins dépourvue de fel, fut faite en commun par (10) le Chevalier de Nantouillet, par (11) le Comte de Fiefque, par (12) le Marquis REMARQUES. (8.) Il a pour le Phébus une tendree extrême. ] Ce Vers caractérise le ftile de la plus grande partie des Poeftes du Duc de Nevers. (9.) Une Sœur vagabonde,&c.] Hortenfe Mancini, trop connue par fes Avantures, & par les Ouvrages de Saint-Evremond, pour qu'il foit befoin de s'étendre beaucoup à fon fujet, fut mariée le 28 de Février 1661, avec Armand Charles de la Porte, Duc de la Meilleraie, Pair de France, Chevalier des Ordres du Roi, Grand'Maître de l'Artillerie, Gouverneur & Lieutenant-Général pour le Roi de la Province d'Alface, &c. Il prit le nom de Duc de Mazarin, après la mort du Cardinal, qui l'avoit fait fon de Manicamp, par (13) le Marquis d'Effiat, & par (14) M. de Guilleragues, comme on le fut dans la fuite de M. Defpréaux, & de M. Racine, auxquels dans le tems-même cette Parodie fut attribuée, du moins par M. le Duc de Nevers, qui, piqué du peu de menagement, qu'on avoit eu pour fa Sœur & pour lui, repliqua par ce pitoïable Sonnet fur les mêmes Rimes. Racine & Defpréaux, l'air trifte & le teint blême, Viennent demander grace, & ne confeffent rien. (15) Il faut leur pardonner, parce qu'on eft Chretien, Mais on fait ce qu'on doit au Public, à soi-même. Damon, pour l'intérêt de cette Sœur qu'il aime, Doit de ces fcélérats châtier le maintien : Car il feroit blâmé de tous les gens de bien, S'il ne puniffoit pas leur infolence extrême. Ce fut une Furie, aux crins plus noirs Qui leur preffa du pus de fes affreux tetons, Ce Sonnet qu'en fecret leur cabale idolâtre. que blonds; Vous en ferés punis, Satiriques ingrats, REMARQUES. lui dans les Ouvrages fatiriques du Comte de Buffi-Rabutin. (13.) Le Marquis d'Effiat. ] ANTOINE Rufe, Marquis d'Effiat, Chevalier des Ordres du Roi, Grand Ecuïer de Monfieur, & enfuite de feu M. le Duc d'Orleans, Confeiller d'Etat & au Confeil de Regence mort le 3. Juin dans fa 81. année, êtoit 1719. petit-Fils d'Antoine Coiffier-Rufe; connu fous le nom de Maréchal d'Effiat, & Neveu du célèbre & malheureux Henri Coiffier-Rufe Marquis de Cinq-Mars, décapité à Lion le 12. de Septembre 1642. (14.) M. de Guilleragues. ] Vorés Epitre 7. Sommaire. (15.) Il faut leur pardonner, parce qu'on efl Chretien, Mais on La La menace, qui termine ce Sonnet, fut fuivie de quelque réalité, fi l'on s'en rapporte à ces quatre Vers: Dans un coin de Paris, Boileau tremblant & blême, Fut hier bien froté, quoiqu'il n'en dife rien. Voila ce qu'a produit fon ftile peu chrêtien. C'est ainsi que commence le Sonnet, que le P. Louis Sanlecque, alors âgé de vingt-cinq ans, & profeffant la Rhétorique au College de Nanterre, compofa, pour faire ja cour au Duc de Nevers, fur les mêmes Rimes que les précédens. Le refte eft à la louange de ce Seigneur, à ce que dit le Supplément de Moreri. Ce fut ce Sonnet, qui valut, (16) comme je l'ai déja dit, au P. Sanlecque, la nomination à l'Evêché de Bethleem, (17) dont il n'a jamais joži. On auroit ici cette Pièce entière, fi j'avois pu la recouvrer. Mais j'en ai fait une recherche inutile. Peut-être n'y perdt'on pas grand'chofe, à juger du tout par le Quatrain, qu'on vient de voir, & dont le deuxième Vers contient une horrible calomnie, ( 18) que Pra REMARQUES. fait ce qu'on doit au Public, à foimême. Voilà ce qu'on appelle un Pardon à l'Italienne, (16) comme je l'ai déja dit. ] Voiés l'Avertiffement fur l'Epitre I. Remarque 5. (17) dont il n'a jamais joйi. ] Quoique le P. Sanlecque n'ait ja mais êté réellement Evêque de Bethleem, fa Famille n'a pas laitlé de le faire peindre avec une foutane violette, ainfi que je l'ai vu chés un de fes Parens. (18) que Pradon avoit en la noirceur d'inventer. ] Voïés la Remarque fur le Vers 60, de l'Epitre VI. |