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Et

que

le Sort burlesque, en ce fiecle de fer, D'un Pédant, quand il veut, fçait faire un Duc & Pair. 65 Ainfi de la Vertu la Fortune fe jouë.

Tel aujourd'hui triomphe au plus haut de fa rouë,

REMARQUES.

&c.] Juvenal Satire

IMITATION. Vers 63. Et Pédant
que le Sort burlesque..... d'un VII. vers 197.

Si Fortuna volet, fies de Rhetore Conful:
Si volet hac eadem, fies de Confule Rhetor.

Pline le Jeune a dit à peu près
la même chose: Quos tibi, For-
tuna ludos facis? facis enim ex
Profefforibus Senatores, ex Sena-
toribus Profeffores.

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Ibid. En ce fiecle de fer.] M. le Duc de Montauzier condamnoit hautement les Satires de notre Auteur, & fur-tout ces deux vers, qu'il difoit être extrémement injurieux à la perfonne du Roi à caufe de ces mots: En ce fiècle de fer. Mais cette accufation ne fit aucun tort au Poëte dans l'efprit du Roi.

VERS 64. D'un Pédant... fait faire un Duc & Pair. ] L'Abbé de la Riviere, dans ce temps-là fut fait Evefque de Langres. Il avoit efté Regent dans un College. DE SP.

Louis Barbier, connu fous le nom d'Abbé de la Riviere, avoit êté Régent au Collège du PlefLis & enfuite Aumônier de

M. Habert Evêque de Cahors
& premier Aumônier de Gaflon
Duc d'Orléans. M. Habert mit
l'Abbé de la Riviere auprès de
Ice Prince, & l'Abbé entra fi ha-
bilement dans toutes les incli-
nations de fon Maître, qu'il de-
vint lui-même le maître abfolu
de fon cœur & de fon efprit ;
mais il ne fe fervit de la con-
fiance de Monfieur Gaston, que
pour le trahir, en découvrant
tous fes fecrets au Cardinal Ma-
zarin. Il en fut récompenfé par
plufieurs Abbaies, qu'il obtint
fucceffivement & enfin par l'E-
vêché de Langres, qui lui fut
donné en 1655. Il mourut à Pa-
ris en 1670. Il avoit êté nom-
mé au Cardinalat.

CHANG. Vers 65. Ainfi de la
vertu.] Avant ce vers il y en
avoit vingt-quatre autres, que
l'Auteur retrancha dans l'Edi-
tion de 1674, ne les trouvant
pas dignes du refte. Les voici;

Je fçai bien que fouvent, un cœur lâche & fervile
A trouvé chez les Grands un esclavage utile:
Et qu'un Riche pourroit, dans la fuite du temps,
D'un flateur affamé payer les foins ardents.
Mais avant que pour vous il parle, ou qu'il agiffe
Il faut de fes forfaits devenir le complice,
Et fachant de fa vie & l'horreur, & le cours
Le tenir en état de vous craindre toûjours:
De trembler qu'à toute heure, un remors légitime
Ne vous force à le perdre, en découvrant fon crime

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Qu'on verroit de couleurs bifarrement orné,
Conduire le carroffe où l'on le voit traîné,

Si dans les droits du Roi fa funeste science
70 Par deux ou trois avis n'eust ravagé la France.
Je fçai qu'un jufte effroi l'éloignant de ces lieux,
L'a fait pour quelques mois difparoiftre à nos yeux :
Mais en vain pour un tems une taxe l'exile :
On le verra bien-toft pompeux en cette Ville,
75 Marcher encor chargé des dépouilles d'autrui,
Et jouir du Ciel mesme irrité contre lui.

REMARQUES.

Car n'en attendez rien, fi fon efprit difcret
Ne vous a confié qu'un honnefte fecret.
Pour de fi hauts projets je me fens trop timide:
L'incefle me fait peur, & je hais l'homicide:
L'adultere & le vol allarment mes efprits.

Je ne veux point d'un bien qu'on achete à ce prix.
Non, non, c'eft vainement qu'au mépris du Parnasse,
J'irois de porte en porte étaler ma difgrace.

Il n'eft plus d'honnefte homme, & Diogene en vain
Iroit, pour en chercher, la lanterne à la main,
Le chemin aujourd'hui par où chacun s'éleve,
Fut le chemin jadis qui menoit à la Greve :
Et Monléron ne doit qu'à fes crimes divers,
Ses fuperbes lambris, fes jardins toûjours verts.
Ainfi de la vertu, &c.
Monléron, dans le pénultiéme
vers, êtoit un fameux Partifan,
dont le nom êtoit tout au long
dans la première compofition de
cette Satire. Il avoit fait bâtir
dans la rue neuve faint Augu-

ftin, près de la porte de Riches lieu, une belle maifon, qui eft à préfent l'Hôtel de Gramont.

IMIT. Vers 76. Et jouir du Ciel mefme irrité contre lui.] JUVENAL, Sat. I. v. 47.

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SENEQUE in Hercule Furente, dire à Junon, en parlant d'HER Acte I. Scene I. vers 33. fait

CULE.

-Superat & crefcit malis,

Iráque noftra fruitur.

Tandis

Tandis que Colletet, crotté jufqu'à l'échine, S'en va chercher fon pain de cuifine en cuisine : Sçavant en ce métier fi cher aux beaux Esprits, 80 Dont Monmaur autrefois fit leçon dans Paris,

REMARQUES,

VERS 77. Tandis que Colletet.]Fa-. meux Poëte fort gueux, dont on a encore plufieurs ouvrages. DESP. Il y avoit ainfi dans la première Edition; mais depuis, à la prière de M. Ogier, ami de Colletet, on mit PELLETIER. Jamais perfonne ne fut moins Parafi.

te, dit RICHELET, Traité de la
Verfification Françoise, page 161.
que le bon homme du Pelletier :
hors qu'il alloit montrer en ville,
c'étoit un véritable Reclus. C'est
pourquoi Guéret dans fa Guerre
des Auteurs a fait parler ains
du Pelletier dans un Sonnet,

On me traite de Parafite
Moi, qui plus reclus qu'un Hermite,
Ne mangeai jamais chez autrui.
O fatalité fans feconde !
Faut-il qu'on déchire aujourd'hui,
Celui qui loüa tout le monde ?

Ce n'eft que dans les dernières Editions des Satires que M. Defpréaux a remis le nom de Colletet; & c'eft François Colleaet fils de Guillaume, qu'il a voulu défigner. Ils ont êté Poetes tous les deux. Guillaume Colletet êtoit mort dès l'année 1659. & fa place à l'Académie Françoife avoit êté remplie par Gilles Boileau, frere de notre Auteur.

VERS 80. Dont Monmaur autrefois fit leçon dans Paris. ] Celebre Parafite dont Menage a écrit la vie. DES P.

Pierre Monmaur êtoit né dans la Marche. Il avoit êté Avocat, & fut enfuite Proteffeur Roïal en Langue Grecque. Ce qui le fit furnommer Monmaur le Grec, Il logeoit au Collège des Cholets. & alloit chercher fa vie de table en table. Son plaifir êtoit de médire de tous les Savans, tant vivans que morts; & il ap

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pliquoit tout fon efprit à faire des allufions ou jeux de mots fur les noms propres. Ces allufions êtoient toujours tirées du Grec & du Latin; & on les appella des Monmaurifmes. Tous les beaux Efprits de ce tems-là se déchaînèrent contre Monmaur à l'envi les uns des autres, & ce fut Ménage, qui fut l'Auteur de cette confpiration celebre. En 1636. il écrivit en Latin la vie de Monmaur, qu'il mafqua du nom de Gargilius Mamurra. C'est dans cet Ouvrage qu'il exhorte tous les Savans à prendre les armes contre cet ennemi commun. Il y feint aufi que Monmaur donnoit des leçons du métier de Patafite, & lui attribue plufieurs Ecrits imaginaires fur ce fujet. C'eft à quoi M. Def préaux fait allufion. M. Bayle, dans fon Dictionnaire, Article de Monmaur avertit que ce

Il eft vrai que du Roi la bonté fecourable
Jette enfin fur la Mufe un regard favorable,
Et reparant du Sort l'aveuglement fatal,
Va tirer deformais Phebus de l'hofpital.
85 On doit tout efperer d'un Monarque fi jufte.
Mais fans un Mecenas, à quoi fert un Augufte?
Et fait comme je fuis, au ficcle d'aujourd'hui,
Qui voudra s'abaiffer à me fervir d'appui ?

Et puis, comment percer cette foule effroïable
90 De Rimeurs affamez dont le nombre l'accable,
Qui, dés que fa main s'ouvre, y courent les premiers,
Et raviffent un bien qu'on devoit aux derniers ?
Comme on voit les Frelons, troupe lâche & fterile,
Aller piller le miel que l'Abeille diftile.

REMARQUES.

Profeffeur n'êtoit pas fi mépri-
fable qu'on l'a dit; & qu'on ne
doit pas juger de lui par les Por-
traits Satiriques que l'on en fit,
& qu'il ne faut regarder que
comme des jeux d'efprit & des
fictions. M. de Sallengre a publié
en 1716. à la Haye, l'Hiftoire de
Pierre de Monmaur en 2 Vol. in
8°. C'eft un Recueil curieux de
toutes les Pièces faites contre
Monmaur.

VERS 81. Du Roi la bonté
fecourable. ] LE ROI en ce temps-

là à la follicitation de M. Celbert, donna plufieurs penfions aux Gens de Lettres. DE SP.

Ces gratifications, qui commencèrent en 1663. furent diftribuées dans le Roïaume, & dans les Païs étrangers.

CHANG. Vers 94. Aller piller le miel que l'Abeille difiile, ] Après ce vers il y en avoit huit qui font remarquables: cependant l'Auteur les a fupprimés dans l'Edition de 1674. & dans toutes celles qui ont êté faites depuis. Enfin je ne fçaurois, pour faire un juste gain, Aller bas & rampant flechir fous Chapelain. Cependant, pour flater ce Rimeur tutélaire Le frere, en un befoin, va renier fon frere; Et Phebus en perfonne, y faifant la leçon, Gagneroit moins ici qu'au métier de maçon : Ou pour eftre couché fur la lifle nouvelle S'en iroit chez Bilaine admirer la Pucelle Ceffens donc d'afpirer, &c.

95 Ceffons donc d'aspirer à ce prix tant vanté, Que donne la faveur à l'importunité. Saint-Amand n'eut du Ciel que fa veine en partage: L'habit, qu'il eut fur lui, fut fon feul héritage: Un lit & deux placets compofoient tout fon bien, too Ou, pour en mieux parler, Saint-Amand n'avoit rien.'

REMARQUES.

Quand le Roi eut réfolu de faire des gratifications aux Gens de Lettres, M. Colbert chargea Chapelain de faire la lifte de ceux que leur mérite en rendoit dignes. Cette commiffion fit beaucoup d'honneur à Chapelain, & lui attira les refpects intéreffés d'une infinité d'Auteurs de tou

te efpèce, qui briguoient fa faveur en donnant des loüanges à fon Poëme de la Pucelle d'Orléans: C'eft pourquoi il eft ici appellé, Rimeur tutelaire.

M. Despréaux êtoit brouillé avec Gilles Boileau fon aîné. La caufe de cette brouillerie eft expliquée dans cette Epigramme de Liniere

fçavoit pas le Latin, & eftoit fort pauvre. DES P.

Vous demandez pour quelle affaire Boileau le Rentier aujourd'hui En veut à Defpréaux fon frère, C'est qu'il fait des vers mieux que lui. Gilles Boileau faifoit fa cour à Chapelain aux dépens de fon cadet, & c'eft à quoi fe rapporte le quatriéme vers: Le frère en un befoin va renier fon frère. Dans la fuite notre Auteur voulut effacer jufqu'aux moindres veftiges de ce démêlé : & c'est la principale raifon pour laquelle il a retranché ces huit vers.

Dans la première Edition, l'Auteur n'avoit défigné ChapeLain que par la première lettre de fon nom à la fin du fecond vers. Dans les Editions fuivan

tes,

il mit, Pucelain.

VERS 97. Saint-Amand n'eut du Ciel, &c. Vers 103. & 104. Et tout chargé de vers.... il parut à la Cour. Vers 107. & 108. Et la Fièvre.... Fit par avance en lui ce qu'auroit fait la Faim. ] On a plufieurs Ouvrages de lui où il y a beaucoup de genie. Il ne

Le Poëme qu'il y porta (à la Cour) eftoit intitulé, le Poëme de la Lune, & il y loüoit le Roi, furtout de fçavoir bien nager. DES P.

Marc-Antoine-Gerard de Saint

Amant de l'Académie Françoife, êtoit né à Rouen, & paffoit pour fils d'un Gentilhomme Verrier. Il eft pourtant dit dans l'Hiftoire de l'Académie que fon Pere avoit êté Chef d'Efcadre au fervice d'Elifabeth Reine d'Angleterre. On voit par les Poëfies de Saint-Amant, qu'il n'avoit pas attendu auffi tard que notre Auteur le dit, à mettre au jour les Vers qu'il avoit faits pour la Cour, & à folliciter fes graces. Mais il eft à préfumer que M. Defpréaux ne s'eft ici fervi d'un nom connu, que

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