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Le 30. du même mois de Mai, le Comte de Bulli fit de Chazeu cette (8) Réponse à nôtre

Poëte.

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"Je ne faurois affés dignement répondre à vô,, tre Lettre, Monfieur. Elle eft fi pleine d'honnêtetés & de louanges, que j'en fuis confus. Je ,, vous dirai feulement, que je n'ai rien vu de vôtre façon, que je n'aie trouvé très-beau & trèsnaturel, & que j'ai remarqué dans vos Ouvra,,ges un air d'honnéte homme que j'ai encore estimé plus que tout le refte. C'est ce qui m'a fait , fouhaiter d'avoir commerce avec vous ; & puif,, que l'occafion s'en préfente aujourd'hui, je vous ,, en demande la continuation, & vôtre amitié, », vous affurant de la mienne. Pour mon eftime vous n'en devés douter, pu's que vos ennepas mis mêmes vous l'accordent dans leur cœur s'ils ,, ne font pas les plus fottes gens du monde,,.

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REMARQUES.

(8) M. Broffette difoit en 1717. que cette Réponse du Comte de Buffi à M. Defpréaux, n'avoit pas êté imprimée. Il fe

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trompoit. On la trouve à la page 38. du II. Tome de l'Edit. des Lettres du Comte de Buffi, de laquelle on vient de parler.

EPISTRE IV.

EPISTRE I V.

AURO Y.

EN vain, pour Te louer, ma Muse toûjours presté,

Vingt fois de la Hollande a tenté la conqueste :
Ce païs, où cent murs n'ont pû Te refifter,

GRAND ROY, n'eft pas en Vers fi facile à domter.
5 Des Villes, que Tu prens, les noms durs & barbares
N'offrent de toutes parts que fyllabes bizarres ;
Et l'oreille effrayée, il faut depuis l'Iffel,
Pour trouver un beau mot, courir jufqu'au Teffel.

REMAR Ó Ù È S.

CHANG. Vers 7. Et l'oreille Dans les premières Editions, it effrayée il faut depuis l'Iffel. ] y avoit :

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Pour trouver un beau mot, des rives de l'Iffel, Il faut toujours bronchant, courir jusqu'au Teffel. L'Auteur mit enfuite ainfi dans l'Edition de 1688. Pour trouver un beau mot, il faut depuis l'Iffel, Sans pouvoir s'arrêter, courir jusqu'an Teffel.

Oui, par tout de fon nom chaque Place munie, 10 Tient bon contre le vers, en détruit l'harmonie. Et qui peut, fans frémir, aborder Woërden? Quel Vers ne tomberoit au feul nom de Heufden ? Quelle Muse à rimer en tous lieux disposée, Oferoit aprocher des bords du Zuiderzée? 15 Comment en Vers heureux affieger Doëfbourg, Zutphen, Wageninghen, Hardervic, Knotzembourg;

REMARQUES.

Mais n'en êtant pas content, qu'on fit de toutes fes Oeuil tourna ces deux Vers de vres en 1674. in-quarto & incette manière dans l'Edition douxe.

On a beau s'exciter: il faut depuis l'Iffel,
Pour trouver un beau mot, &c.

Ce fut enfin dans l'Edition de
1701. que ces Vers parurent
comme ils font ici.

Ibid. Il faut depuis l'Iffel.] Rivière des Païs-Bas, qui fe jette dans le Zuider-zée, ou la Mer de Sud. Cette Rivière reçoit les eaux du Rhin par un canal qui fut tiré depuis Arnheim jufqu'à Doelbourg, par Drufus Père de l'Empereur Claude & de Germanicus. Le Prince d'Orange, qui commandoit les Troupes des Hollandois, abandonna l'If fel, le 22. de Juin 1672.

VERS 8. -courir jufqu'au Tef fel.] Ile de la Hollande, dans 'Ocean Germanique, à l'entrée du Golphe nommé le Zuiderzée.

VERS II. - aborder VVoërden.] Ville du côté de Hollande, fituée fur le Rhin.

CHANG. Vers 12. -au feul nom de Heulden?] Dans les premières Editions on li.oit, Narden.

Ibid. -au feul nom de Heufden? Autre Ville de la même

Province près de la Meufe.

VERS 14. des bords du Zui derzée. Le Zuider-zée eft un grand Golphe entre les Provin ces de Frife, d'Over-Iffel, de Gueldre, & de Hollande. Anciennement c'êtoit un Lac & des Marais formés par la branche Septentrionale du Rhin jointe à 1iffel; & les anciens Géographes le nommoient Fle vus, ou Flevilacus. Les eaux de la Mer ont dans la fuite couvert & inondé tous ces marais, & il s'en eft formé le Zuider - zée, Mare Aullrinum Sinus Auflrinus. En Flamand, Zuid, fignifie le Sud; & Zée, la Mer.

VERS 15.

en

affieger Doëf bourg.] Les Hollandois prononcent Dousbourg. Deesbourg Latin Drufiburgum, eft une Ville du Comté de Zutphen, fituée à l'endroit où les eaux du Rhin fe joignent à l'ifel, par le canal de Drufus. Cette Ville fut prife le 22. de Juin 1672. par MON. SIEUR, Frère du Roi.

VERS 16. Zutphen,

VV age

Il n'eft Fort entre ceux que Tu prends par centaines,
Qui ne puiffe arrefter un Rimeur fix femaines :

Et

par tout fur le Whal, ainfi que fur le Leck,

20 Le vers eft en déroute, & le Poëte à fec.

Encor, fi Tes exploits, moins grands & moins rapides, Laiffoient prendre courage à nos Mufes timides, Peut-être avec le temps, à force d'y rêver,

Par quelque coup de l'art nous pourrions nous fauver. 25 Mais dés qu'on veut tenter cette vaste carriere, Pegâze s'effarouche & recule en arriere :

Mon Apollon s'étonne & Nimegue eft à Toy,
Que ma Muse eft encore au camp devant Orfoy.

REMARQUES.

ninghen, Hardervic Knotzembourg. 1 ZUTPHEN: Ville Capitale du Comté de Zutphen, prife par MONSIEUR, le 26. de Juin. Vvageninghen, Hardervic: Villes du Duché de Gueldre, qui fe rendirent au Roi, les 22. & 23. de Juin. Knotzembourg, elt un Fort fitué fur le vabal, vis-à-vis de Nimégue: il eft auffi nommé le Fort de Nimégue. 11 fut affiégé le 15. de Juin, & pris le dix-fept par M. de Tu

renne.

VERS 19. Et par tout fur le Vubal, ainfi que fur le Leck. ] Le vabal & le Leck, font deux branches du Rhin,qui fe mêlent avec la Meufe.

VERS 24. Par quelque coup de l'art nous pourrions nous fauver. ] L'Auteur donne ici l'exemple avec le précepte. Cette Epitre eft un jeu d'efprit, par lequel il fe fauve de la difficulté, en la

montrant.

VERS 27.

Nimegue eft à Toy. ] Ville confidérable des Provinces-Unies, Capitale du Duché de Gueldre. Elle fut prife le 9. de Juillet 1672. par M. de Turenne, après fix jours de fiége. Cette Ville eft fameufe par la Paix générale, qui y fut conclue en 1678. entre la France, l'Efpagne, & les Provinces-Unies; & en 1679. entre la France & l'Empire.

VERS 28. - au Camp devant Orfoy.] Ville & Place forte fur la rive gauche du Rhin, dans le Duché de Clèves. Au commencement de la Campagne, le Roi fit affiéger Orfoy, le premier de Juin, & le prit en deux jours. Il tint long-tems fon Camp devant cette Place,après qu'elle cût êté prife; de forte que les Gazettes & les Lettres particulières, datoient toujours, du Camp devant Orfoy. C'eft à quoi l'Auteur fait allufion.

Aujourd'huy toutefois mon zele m'encourage;
30 Il faut au moins du Rhin tenter l'heureux passage,
Un trop jufte devoir veut que nous l'effayons.
Muses, pour
le tracer, cherchez tous vos crayons.
Car, puifqu'en cet exploit tout paroift incroyable,
Que la verité pure y ressemble à la fable,

35 De tous vos ornemens vous pouvez l'égayer.
Venez donc, & fur tout gardez bien d'ennuyer.
Vous fçavez des grands vers les difgraces tragiques;
Et fouvent on ennuye en termes magnifiques.

Au pié du mont Adulle entre mille roseaux,
40 Le Rhin tranquille, & fier du progrés de fes eaux,
Appuyé d'une main fur fon urne penchante,
Dormoit au bruit flatteur de fon onde naiffante,
Lors qu'un cri tout à coup fuivi de mille cris,
Vient d'un calme fi doux retirer fès efprits.

45

Il fe trouble, il regarde, & par tout sur ses rives
Il voit fuir à grands pas fes Naïades craintives,

REMARQUES.

CHANG. Vers 31. Un trop jufle devoir, &c.] Ce Vers n'a paru

que dans l'Edition de 1701. Dans les premières il y avoit :

Le malheur fera grand, fi nous nous y noyons.

Ce qu'il changea de cette ma- nière en 1694.
Il fait beau s'y noyer, fi nous nous y noyons.
VERS 39. Au pié du mont
Adulle, &c.] Montagne d'où le
Rhin prend fa fource. DESP.

Adula, felon Ptolémée, & Strabon. On l'appelle maintenant, le Mont faint Godard. Le Poëte emploie le nom ancien foit parce qu'il eft plus beau & plus poëtique, foit auffi parce que voulant parler du Dieu du Rhin & des Naiades, il auroit fait un

anachronifme poetique, s'il en
avoit ufé autrement. Le lieu par-
ticulier, où eft la principale
Source du Rhin (car il y en a
deux) eft une Montagne,qui fait
partie du Mont faint Godard
& qui eft appellée Vogel-berg
ou Monte d'Uccello: le Mont de
l'Oifeau : Avicula. Ce dernier
mot a peut être êté formé d'A
dula.

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