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Par luy l'Erreur , toujours finement apprêtée,

Sortant pleine d'attraits de fa bouche empestée ; 195 De son mortel poison tout courut s’abbreuver,

Et l'Eglise elle-mesme eut peine à s'en sauver.
Elle-mesme deux fois presque toute Arienne ,
Sentit chez soy trembler la verité chrestienne;

Lors qu'attaquant le Verbe & fa Divinité, 200 D'une fyllabe impie un saint mot augmenté

Remplit tous les esprits d'aigreurs fi meurtrieres,
Et fit de fang chrestien couler tant de rivieres.
Le Fidele au milieu de ces troubles confus ,

Quelque temps égaré, ne se reconnut plus ; 205 Et dans plus d'un aveugle & tenebreux Concile

Le mensonge parut vainqueur de l'Evangile.

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CHANG. Vers 199. 200. 201. plit tous les esprits d'aigreurs fo & 202. Lors qu'attaquant le verbe meurtrières , Et fit de sang chresien @ sa Divinité, D'une fillabe im couler tant de rivieres. ] Le second pie , un saint mot augmenté, Rem. Vers êtoit de cette manière :

D'une adroite sillabe un saint mot augmenté.
Mais l'Auteur avoit première- ment fait ainsi ces quatre Vers,

Lorsque chez ses sujets l'un contre l'autre armez,
Et sur un Dieu fait homme au combat animex,
Tu fis dans une guerre & fi triste ca si longue

Périr tant de Chrestiens , Martyrs d'une diphthongue.
Les Ariens nioient la Consub- thongue ajoûtée au mot fuck-
ftantialité du Verbe , & rejet- Gas, auquel ils substituoient le
toient le mot ououous qui signi- moc oporoucros. Cette Diphthon-
fie consubstantiel. Ils disoient que gue est la Diphthongue ol que
le Fils étoit oporouous autpi; les Orthodoxes rejettoient,parce
c'est-à-dire , de substance Vemblable, qu'ils aimoient mieux soufrir
à celle du Père ; mais non pas le martire, que d'admettre cette
ouovoros', ou pluftôt , duościos, addition, qui , toute, legere
c'est-à-dire , de même subliance qu'elle est , détruit nécefl'aire-

le Père. Ainsi l'Hérélie des ment la Divinité du Verbe. Ariens consistoit en une diph. Bross,

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qu

Mais à quoi bon ici du profond des Enfers,
Nouvel Hisorien de tant de maux soufferts,

Rappeller Arius, Valentin & Pelage,
210 Et tous ces fiers Démons que toujours d'âge en âge,

Dieu pour faire éclaircir à fond ses veritez,
A permis qu'aux Chrestiens l'Enfer air suscitez?
Laissons hcurler là-bas tous ces damnez antiques,

Et bornons nos regards aux troubles fanatiques, 215 Que ton horrible fille ici sçuc émouvoir,

Quand Luther & Calvin remplis de ton sçavoir ,
Et soy disans choisis pour reformer l'Eglise ,
Vinrent du celibat affranchir la Preftrise ;

Et des væux les plus saints blasmant l'austerité, 220 Aux Moines las du joug , rendre la liberté.

Alors, n'admettant plus d'autorité visible;
Chacun fut de la Foy censé Juge infaillible,
Et sans eftre aprouvé par le Clergé Romain,

Tout Protestant fut Pape une Bible à la main. 225 De cette erreur dans peu naquirent plus de Sectes

Qu'en Automne on ne voit de bourdonnans insectes
Fondre sur les raisins nouvellement meuris ;
Ou qu'en toutes saisons sur les murs à Paris,

On ne voit affichez de recueils d'amourettes, 230 De vers, de contes-bleus, de frivoles sornettes ,

Souvent peu recherchez du Public nonchalant,
Mais vantez à

coup

seur du Mercure Galant.

R E MARQv E s.

VERS 228. - sur les murs à Pa. ris. Si je mettois sur les murs de ris. ] Quelqu'un proposa à l'Au. Paris, dit-il, cela signifieroit les teur de mettre sur les murs de Pau murailles de la Ville. BROSS,

Ce ne fut plus par-tout que fous Anabatistes;

Qu'orgueilleux Puritains , qu'execrables Deistes, 235 Le plus vil artisan eut ses dogmes à foy.

Et chaque Chrestien fut de differente loy.
La Discorde , au milieu de ces Sectes altieres ,
En tous lieux cependant déploya ses bannieres;

Et ta fille , au secours des vains raisonnemens 240 Appellant le ravage & les embrasemens ,

Fit en plus d'un pais , aux villes désolées,
Sous l'herbe en vain chercher leurs Eglises bruslées.
L'Europe fut un champ de massacre & d'horreur :

Et l'Orthodoxe mesme, aveugle en sa fureur , 245 De tes dogmes trompeurs nourrissant son idée,

Oublia la douceur aux Chrestiens commandée ;
Et crut, pour vanger Dieu de ses fiers ennemis ,
Tout ce que Dieu deffend, legitime & permis.

Au signal tout à coup donné pour le carnage, 250 Dans les villes , par-tout , théatres de leur rage, Cent mille faux zélez , le fer

main courans Allerent attaquer leurs amis,

leurs

parens,
Et, sans distinction, dans tout sein heretique,

Pleins de joie, enfoncer un poignard catholique. 255 Car quel lion, quel tigre, égale en cruauté

Une injuste fureur qu'arme la piété?

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R E M A Rev E s.

VERS 249. An signal tout d qu'arme la piété.) On a quelquer Coup_donné

pour

le carnage. ] Le fois entendu réciter à l'Auteur : massacre des Huguenots fait en Une injuste fureur qui se croit piété. France en 1972. le jour de saint Cette expression êroit plus harBarthelemi, BROSS.

die. BROSS. VERS 256. Une injuste fureur M, Du Monteil à la fin d'une

Ces fureurs , jusqu'ici du vain peuple admirées,
Estoient pourtant toûjours de l'Eglise abhorrées ;

Et dans ton grand crédit pour te bien conserver, 260 Il falloit que le Ciel paruft les approuver.

Ce chef-d'æuvre devoit couronner ton adresse.
Pour y parvenir donc, ton active souplesse,
Dans l'Ecole abusant tes grossiers Ecrivains ,

Fit croire à leurs esprits ridiculement vains , 265 Qu'un sentiment impie, injuste , abominable ,

Par deux ou trois d'entr'eux reputé soûtenable ,
Prenoit chez eux un sceau de probabilité,
Qui mesme contre Dieu lui donnoit seureté;

Et qu'un Chrestien pouvoit , rempli de confiance, 270 Mesme en le condamnant , le suivre en conscience.

C'est sur ce beau principe, admis fi follement,
Qu'aussi-tost tu posas l'énorme fondement
De la plus dangereuse & terrible Morale,

Que Lucifer , affis dans la Chaire infernale,
275 Vomissant contre Dieu ses monstrueux sermons,

Ait jamais enseignée aux novices Démons.

R E MAR eu E se Note qui contient des réfle. mis , quoique l'autre rimât plus xions fort inutiles, dit que M. richement. Bross. Despréaux auroit dû nous don. VERS 276. Ait jamais ensei. ner ce Vers tel qu'il le récitoit gnée. ) Dans l'Edition de Geneve quelquefois. Une iniulie fureur 1717. & dans toutes les Copies , qui le croit piété. La pensée en fe- qu'on en a faites en Hollanfoit bien plus juste, mais le de & en France, excepté celle Vers en seroit moins fort. Y de 1726. à Paris chés Esprit Bilperdroit-il ?

liot ; il s'est ici glislé une faute VERS 287. Ces fureurs, jusqu'ici allés fingulière. On a mis enseidu vain neuple admirées. ] Il avoit gné, au lieu d'enseignée , sans eu destein

mettre adorées, faire attention que ce Participe mais il a préféré le mot qu'il á se rapporte à Marale du Vers

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Soudain, au grand honneur de l'Ecole Payenne,
On entendit prescher dans l'Eglise Chrestienne.

Que sous le joug du vice un pécheur abbatu 280 Pouvoit, sans aimer Dieu ni mesme la vertu ,

Par la seule frayeur au Sacrement unie,
Admis au Ciel joüir de la gloire infinie;
Et que les Clefs en main , sur ce seul passeport ,

Saint Pierre à tous venans devoit ouvrir d'abord. 285 Ainsi pour éviter l'éternelle misere,

Le vrai zéle au Chrétien n'estant plus necessaire,
Tu sçus, dirigeant bien en eux l'intention,
De tout crime laver la coupable action.

Bien-tost se parjurer cessa d'estre un parjure. 290 L'argent à tout denier se presta sans'usure.

Sans fimonie , on put contre un bien temporel
Hardiment échanger un bien spirituel.
Du soin d'aider le pauvre on dispensa l’avare ;

Et mesme chez les Rois le superflu fut rare.
295 C'est alors qu'on trouva , pour sortir d'embarras ,

L'art de mentir tout haut en disant vrai tout bas.
Ceft alors qu'on apprit qu'avec un peu d'adresse,
Sans crime un Prestre peut vendre trois fois sa Messe;

R E M A Rev E s.
273. & que d'ailleurs avec en- lande & à celle de Paris 1726.
Seigné le Vers 276. est défectueux dans la manière de placer ces
par l'hiatus, qui se trouve à l'Hé, deux expressions. Dans l’Edition
mistiche. Ceite faute n'a pas êté de Genève, que celles de Paris de
corrigée dans l’Edition de Paris 1739. & de 1740. ont suivie ; on
1735. ni par conséquent dans lit au Vers 177. l'Eglise payenne :
celle de 1740. qui n'en est prel- & dans le Vers 278. l'Ecole
que que la Copie.

Chrestienne. On ne sauroit croi. VERS 277. & 278. Ecole Payen. re que ce déplacement de terne , Eglise Chrestienne. ] On s'est mes si ridicule soit de M. Delo conformé ici aux Editions d'Hol. préaux.

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