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145 La Vertu n'estoit point sujette à l'Ostracisme

Ni ne s'appelloit point alors un Jansenisme.
L'Honneur beau par soi-mesme , & sans vains ornemens ,
N'étaloit point aux yeux l'or ni les diamans

Et jamais ne sortant de ses devoirs austeres , 150 Maintenoit de la Sæur les regles salutaires.

Mais une fois au Ciel par les Dieux appellé,
Il demeura long temps au Séjour étoilé.

Un Fourbe cependant affez haut de corsage ,
Et qui lui ressembloit de geste & de visage ,
Iss Prend son

temps,

&

partout ce hardi Suborneur
S'en va chez les Humains crier , qu'il est l'Honneur :

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REMARQUES

VERS 145. La Vertu n’eloit clésiastiques les plus sçavans & point sujette à l'Osiracisme. ] Loi les plus vertueux , erant expod par laquelle les Athéniens avoient sés à être soupçonnés de Janfé. droit de releguer tel de leurs Ci- nisme , se trouvoient par-là éloitoiens qu'ils vouloient. DES P. gnés des Emplois , où ils au

Ils faiscient ordinairement roient fait beaucoup de fruit. usage de cette Loi à l'égard des Un Evêque reprenant un Abbé Personnes, dont la trop grande de condition de ce que la con. autorité étoit lulpecte au Peu duite n'étoit pas alles reglée , ple , & faisoit craindre qu'elle ene voulez-vous que l'on falle, ne dégénérâc en tirannie. Ce pondit l'Abbé ? Si nous étions plus bannissement, n'êtant la puni. regiés, on nous prendroit pour des tion d'aucun crime, n'êtoit pas Jansenistes. BROSSETTE. infainant, L'Ostracisine duroit or- Le foupçon de Jansénisme bien dinairement dix ans, & pen- ou mal fondé, a rendu parmi. dant ce tems le Banni jouissoit nous la Vertu sujette à une els de ses biens,

pèce d'ostracisme. Ed. P. 1735. VERS 146. Ni ne s'appelloit VERS

147. L'Honneur beau point alors un Jansenisme.' ) On par soi mesme , &c. ] On voit sur voit dans une Lettre écrite au des Médailles Romaines , l’Hon. Roi par M. Godeau , Evêque de NEUR sous la figure d'un Jeune Vence , pendant les grands trou. Homme, qui porte d'une main bles du Jansénisme , que ce Pré. la Halte , espèce de Pique , attrilat se plaignoit a Sa Majesté , but de la Divinité ; & dans l'aur des maux, que le Jansénisme fais tre , la Corne d'Abondance. Ce soit à l'Eglile, en ce que les Ec- qui prouve qu'alors commc

Qu'il

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Qu'il arrive du Ciel , & que voulant lui-mesme,
Seul porter desormais le faix du Diadême,

De luy seul il prétend qu'on reçoive la loy.
160 A ces discours trompeurs le Monde ajoûte foy.

L'innocente Equité honteufement bannie
Trouve à peine un desert où fuir l'ignominie.
Aussi-tost sur un Trône éclatant de rubis;

L'Imposteur monte orné de superbes habits.
'765 La Hauteur , le Dédain , l’Audace l'environnent ,

Et le Luxe & l'Orgueil de leurs mains le couronnene.
Tout fier il montre alors un front plus sourcilleux.
Et le Mien & le Tien , deux Freres pointillesx,

Par son ordre amenant les Procés & la Guerre, 170 En tous lieux de ce pas vont partager la Terre;

En tous lieux , sous les noms de Bon Droit & de Torty
Vont chez Elle établir le seul droit du plus Fort.
Le nouveau Roy triomphe , & sur ce droit inique

Bâtit de vaincs loix un Code fantastique ;
175 Avant tout aux Mortels preferit de se vanger;

L'un l'autre au moindre affront les force à s'égorger.
Et dans leur ame en vain de remords combattuë ,
Trace en lettres de sang ces deux mots ; Meurs, ou Tnë.

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Aujourd'hui , l'on faisoit entrer Meurs, ou Tuë. ] Ils sont tirés l'Abondance dans l'idée de l'Hon. du Cid; Act. 1. Sc. V. Don Dies meur , & que les Richelies ont gue y dit à Rodrigue son fils, foûjours attiré le respect,

pour l'animer à le vanger du VERS 178. ces deux mots : Comte de Gormas,

Va contre un Arrogant éprouver ton courage,
Ce n'elt

que dans le sang qu'on lave un tel outrage.
Meurs, ou I
Tome I.

р

Alors, ce fut alors , sous ce vrai Jupiter, 180 Qu'on vit naistre ici bas le noir Siecle de Fer.

Le Frere au mesme instant s'arma contre le Frere :
Le Fils trempa ses mains dans le sang de son Pere :
La soif de commander enfanta les Tyrans,

Du Tanaïs au Nil porta les Conquerans : 185 L'Ambition passa pour la Vertu sublime :

Le Crime heureux fut juste & cessa d’estre Crime.
On ne vit plus que haine & que division,
Qu'envie , effroi , tumulte, horreur, confusion.

Le veritable Honneur sur la voute celeste
190 Est enfin averti de ce trouble funeste.
11
part

sans differer , & defcendu des Cieux
Va par tout se montrer dans les terrestres lieux :
Mais il n'y fait plus voir qu'un visage incommode.

y peut plus fouffrir ses Vertus hors de mode, 195 Et lui-même traité de Fourbe & d'Imposteur

Est contraint de ramper aux piés du Seducteur.
Enfin las d'essuyer outrage sur outrage,
Il livre les Humains à leur triste esclavage,

On

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2

R E M A Rev E S.
IMIT. Vers 180. Qu'on vit Fer. ] OVIDE, Métamorph. Lib. I.
naisire ici . bas le noir Siecle de Vers 128.

Protinys irrupit vena pejoris in avum
Omne nefas : fugere pudor , verumque , fidesque ;
In quorum subiêre locum fraudesque , dolique ,
Infidiæque , & vis, « amor /ceteratus habendi , &c,

Fratrum quoque gratia rara est..
Filius ante diem patrios inquirit in annos.
VERS 184. Du Tanais au Nil porte que les premiers Conqué.
porta les Conquerans. ] Le Tantis rans sortirent de la Scythie , &
est un Fleuve du pais des Scy- chassèrent V exoris
thes, DESB.

Roi d'Egypte , qui les vouloit Jullin, ( Liv. II. Ch. 3. ) rap. soumettre à la domination.

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ou Séjolris,

s'en va trouver sa Sæur , & dés ce même jour. 200 Avec elle s'envole au celeste Séjour.

Depuis, toûjours ici riche de leur ruine,
Sur les tristes Mortels le faux Honneur domine ,
Gouverne tout,

fait tout dans ce bas Univers, Et peut-estre est-ce lui qui m'a dicté ces vers. 205 Majs en fut-il l'Auteur , je conclus de sa Fable ,

Que ce n'est qu'en Dieu seul qu'est l'Honneur veritable.

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IMIT. Vers 204. Et peut- tire contre l'Honneur : c'est la VI. estre , &c.] Regnier a fait une sa. où il dit à la fin ;

Mais, mon Nieu, que ce Traitre eft d'une étrange forte !
Tandis qu'à le blåmer , la raison me transporte ,
Que de lui je médis , il me flatte , e me dit ,

Que je veux par ces Vers acquérir son crédit.
C'est tout ce que M. Despréaux a mier de ceux qui mettoient leurs
imité de cette Satire de Regnier. noms à des Traités , où ils con-

M. Pascal a dit auisi dans ses dannoient le detir des louanges : Pensées , ch. 24. Ceux qui écri. Ipfi illi Philofophi, etiam in illis vent contre la gloire , veulent avoir libellis quos de contemnenda glorit la gloire d'avoir bien écrit ; & ceux cribunt, nomen suum inscribunt, qui le lifent, veulent avoir la gloire in eo ipso in quo prædicationem , node l'avoir lứ : 6 moi qui écris ceci, bilitatemque dispiciunt , prædicari j'ai peut-être cette envie , & peut- de le. ac nominari volunt. Cic. pro être que ceux qui le liront, L'auront Archia Poëta. Voïés les Tuscula. anli.

nes ,- L. I. & Valère Maxime, La CICERON s'est moqué le pre. VIII. c. XIV. n. 3.

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QUELQUE heureux fuccés qu'ayent eu mes Ouvrages , j'avois résolu ( 2 ) depuis leur derniere Edition de ne plus rien donner au Public, & quoiqu'à mes heures perdues, ( 3 ) il y a environ cinq ans, j'eusse encore fait contre l'Equivoque une Satire, que tous ceux à qui je l’ay communiquée, ne jugeoient pas inferieure à mes autres écrits , bien loin de la publier , je la tenois soigneusement cachée, & je ne croyois pas que, moy vivant

REM ARQU E S.

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(1) Cet Avertissement est in- 1710. l'Auteur faisant alors une titulé par M. Brossette & par tous nouvelle Edition de ses Ouvrales Editeurs qui l'ont suivi: ges dans laquelle il vouloit inDiscours de l' Auteur , pour ser- férer la Satire contre l'Equivoque. vir d'Apologie à li Satire luivante. Mais quelques-uns de ses enneOn a cru bien faire en lui don. mis obtinrent un ordre du Roi , nant un titre pareil à celui que pour empêcher que cette Pièce l'Auteur a donné lui-mêine à ne parût ; & M. Delpréaux ne l'Avertissement qui précède la voulut plus que l'on continuat Satire X.

l'Edition commencée. Un pareil (2) Depuis leur dernière Édi. ordre fut aussi cause que cette tion. ] En 1701.

Satire ne fut point mile dans l’E( 3 ) Il y a environ cinq ans. ] dition poithume de 1713. Du Cet Avertisement fut composé en MONTEIL.

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