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70s La Belle tout à coup rendue infociable,

D'Ange, te font vos mots, fe transformoit en Diable:
Vous me verriez bien-toft, fans me defefperer,
Lui dire : Hé bien, Madame, il faut nous feparer.
Nous ne fommes pas faits, je le voy, l'un pour l'autre.
710 Mon bien fe monte à tant: Tenez, voilà le vostre.
Partez: Délivrons-nous d'un mutuel fouci.

Alcippe, tu crois donc qu'on fe fepare ainfi ?
Pour fortir de chez toy, fur cette offre offenfante,
As-tu donc oublié qu'il faut qu'elle y consente?
715 Et crois-tu qu'aifément elle puiffe quitter
Le favoureux plaifir de t'y perfecuter ?
Bien-toft fon Procureur, pour elle ufant fa plume,
De fes pretentions va t'offrir un volume.

Car, grace au Droit receu chez les Parifiens,
720 Gens de douce nature, & Maris bons Chreftiens,
Dans fes pretentions, une Femme eft fans borne.
Alcippe, à ce difcours je te trouve un peu morne.

REMARQUES.

VERS 708.
-il faut nous fe-
parer.] Ce Vers & les deux qui
le fuivent, font, en quelque for-
te, une paraphrafe de la formule
du Libelle de Divorce, qui êtoit
anciennement en ufage chés les
Romains. In repudiis autem, id
eft, renuntiatione comprobata funt
hac verba, RES TUAS TIBI HABE-
TO item hac TUAS RES TIBI
AGITO. Loi. 2. § 1. au Digefte
Tit. de Divortiis & Repudiis.

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VERS 719. 720. & 721.- -gra

ce au Droit receu chez les Pas
rifiens, Gens de douce nature,
Maris bons Chreftiens, Dans fes
pretentions une Femme eft fans bor-
ne.
e. ] Nôtre Auteur n'eft pas le
premier, dont la Mufe fe foit
égaiée aux dépens de la bonté
d'âme des Maris Parifiens. Cor-
neille, avant lui, leur avoit fait,
dans la I. Scéne du II. Acte de
La Suite du Menteur , un repro-
che pareil à celui qu'ils reçoivent
ici.

Il eft riche, & de plus il demeure à Paris,

Où des Dames, dit-on, eft le vrai Paradis :

Et, ce qui vaut bien mieux que toutes ces richesses,
Les Maris y font bons, & les Femmes maîtresses.

Des Arbitres, dis-tu, pourront nous accorder. Des Arbitres.... Tu crois l'empefcher de plaider ? 725 Sur ton chagrin déja contente d'elle-mesme ?

Ce n'eft point tous fes droits, c'eft le procez qu'elle aime, Pour elle un bout d'arpent, qu'il faudra disputer, Vaut mieux qu'un fief entier aquis fans contester : Avec elle il n'eft point de droit qui s'éclaircisse, 730 Point de Procez fi vieux qui ne se rajeunisse,

REMARQUES.

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,, pourtant elles n'apportent prefque rien que le bonheur de leur fexe, & la faveur de nos Coûtumes. Enfin à bien parler, elles font les principales héritières de leurs Maris,,.

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93

VERS 726. c'est le procez qu'elle aime.] Ce Portrait de la Femme Plaideufe eft fait fur la Comteffe de Criffé, dont on a parlé ci devant fur le Vers 105. de la Satire III, L'Antiquité a produit auffi des Monftres de cette espèce: témoin la fameufe Afrania, Femme du Sénateur Licinius Buccio laquelle dit Valere - Maxime, Liv. VIII. Ch. III. N. 2. êtoit" toûjours ,, prête à faire des Procès, &

Ce que M. Despréaux ajoute, que
grace au Droit reçu chés les Pari-
fiens , une Femme eft fans borne
dans fes pretentions, eft fondé fur
ce qu'il n'y a peut-être aucune
Coutume dans le Roïaume,qui foit
auffi favorable aux Femmes que
celle de Paris. Dans le cas de fé-
paration, s'il n'y a point de
Communauté, le Mari eft obli-
gé de rendre à la Femme tout ce
qu'il a reçu d'elle, & qu'on a
fouvent eftimé dans le Contrat
le double ou le triple de fa jufte
valeur. Sorte d'eftimation qu'un
Mari Parifien trouve plus que lé-
gitime. Si ce qu'elle reprend,
ne lui fuffit pas pour vivre, il
lui faut,fur les biens de fon Ma-
ri, une penfion, que les Juges
fixent felon le rang & la fortu-
ne des Perfonnes. S'il y a Com-
munauté & que la Femme l'ac-
cepte elle emporte, outre la
moitié de la Communauté tout
se qui n'y eft point entré, & le
Mari doit de même fuppléer à ce
qui peut lui manquer pour vivre.
Après la mort du Mari, la Fem-
me a bien d'autres prétentions.
Parmi nous, dit PATRU;
Plaid, IX. les Femmes ont des
Douaires & des Préciputs:elles,,
partagent la Communauté, où

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plaidoit toujours elle-même fes Caufes devant le Préteur, ,, non qu'elle manquât d'Avo,, cats, mais parce qu'elle abon

"

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doit en impudence. C'est pour,quoi, fatiguant continuellement les Tribunaux de cris, auxquels ils n'êtoient point accoutumés elle devint un exemple très célèbre, de ce ,, que c'eft que l'efprit de chica,, ne dans les Femmes; enforte ,. que depuis elle on appliqua

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comme une efpèce de note d'infamie, le nom d'Afrania à

Et fur l'art de former un nouvel embarras,

Devant elle Rolet mettroit pavillon bas.

Croy-moy, pour la fléchir trouve enfin quelque voye ;
Ou je ne répons pas dans peu qu'on ne te voye
735 Sous le faix des procez abbatu, consterné,

Trifte, à pié, fans Laquais, maigre, fec, ruiné,
Vingt fois dans ton malheur refolu de te pendre,
Et, pour comble de maux, reduit à la reprendre.

REMARQUES.

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L

A onzième Satire traite du Vrai & du Faux Hon neur. Elle fut composée à l'occafion d'un Procès que le Commis à la recherche des Ufurpateurs du titre de Nobleffe, avoit intenté à M. Gilles Boileau Paieur des rentes de l'Hôtel de Ville de Paris, en exécution de la Déclaration du Roi du 4. de Septembre 1696. M. l'Abbé Boileau, Docteur de Sorbonne, Chanoine de la Sainte-Chapelle, & M. Boileau Defpréaux fon Frère, intervinrent dans ce Procès, auquel ils avoient le même intérêt que M. Gilles Boileau leur Coufin. Ils produifirent des titres inconteftables, par lesquels ils prouvèrent leur Nobleffe depuis Jean Boileau, Secretaire du Roi, anobli avec Jean fon Fils, en l'année 1371. & ils furent maintenus en la qualité de Nobles & d'Ecuïers par Arrêt du 10. d'Avril 1699.

Ce Procès excita la mauvaise humeur de M. Defpréaux, qui ne pouvoit fouffrir l'injustice ni les vexations des Partifans. Il en vouloit fur tout à ce Traitant fi fameux, Paul Poiffon de Bourvalais, qui étoit un des principaux Intéreffés à la recherche des faux Nobles: & ce fut prefque uniquement pour fe vanger de lui, que M. Defpréaux entreprit cette Satire. Il commença à la compofer au mois de Novembre 1698. dans la chaleur des poursuites de ce Procès; & il avoit deffein de peindre l'Auteur de cette injufte recherche avec de terribles couleurs. Mais quand il eut obtenu un Arrêt favorable, content de Ja victoire, il oublia fa vangeance, & crut même ne devoir pas relever la nobleffe de fon origine, après en avoir parlé fi modeftement en d'autres endroits de fes Ouvrages. Voïés Epit. V. Vers 112. Epit. X. Vers

96.

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'Secretaire Général de la Marine, & des Comman demens de Monfeigneur le Comte de Toulouse.

OUI, l'Honneur, Valincour, eft cheri dans le monde :
Chacun pour l'exalter en paroles abonde ;

A s'en voir revêtu chacun met fon bonheur ;
Et tout crie ici-bas l'Honneur! vive l'Honneur !

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