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C'est ainsi que fouvent la main de Dieu l'affiste, Ha bon! voilà parler en docte Janfenifte, Alcippe, & fur ce point fi fçavamment touché, 120 Defmâres, dans Saint Roch, n'auroit pas mieux prefché.

REMARQUES.

VERS 120. Defmâres...] Le Pere Defmares fameux Prédicateur. DESP. dans faint Roch.] Paroiffe de Paris. DES P.

Touffaint Defmares, l'un des favans Théologiens & des plus grands rédicateurs de fon temps. naquit à Vire en bafle Normandie fur la fin de l'année 1599. Il entra fort jeune dans la Congrégation de l'Oratoire, nouvellement établie. Il s'y livra tout entier à l'étude de la Théologie. L'Ecriture Sainte, faint Auguflin & faint Thomas furent les feuls guides, qu'il voulut fuivre. En 1638. il commença par l'ordre de fes Supérieurs, à prêcher; & dès-lors il s'aquit la réputation du plus grand Prédicateur, que l'on eut encore entendu dans Paris. Il la foutint jufqu'en 1648. qu'il fût obligé de le réduire au filence, & de fe foultraire par la fuite à l'effet des menées de fes ennemis. En 1653. il fut envoïé à Rome avec M. Mancier, Docteur de Sorbonne, pour aider MM, de LaLane & de Saint-Amour auf Docteurs, & M. Angran, Bachelier de Sorbonne, dans la Commiflion, dont quelques Evê ques de France les avoient chargés, au fujet de la Dorine de faint Augufiin. Dans la Congrégation qui fe tint en préfence du Pape le 19. Mai de cette année, le Pere Defmares fit pendant une beure & demie fur la Matière

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dont il s'agifloit, un Difcours Latin, qui fut fort applaudi, & dont Innocent X. lui-même lui témoigna qu'il avoit êté trèsfatisfait. En 1668. après la Paix rendue à l'Eglife de France par Clement IX. le Pere Defmares reparut en Chaire à Paris, & piêcha le Carême à faint Roch, avec un concours prodigieux d'Auditeurs, lequel vraifemblablement ne fe feroit pas démenti les années fuivantes, fi dès cellelà même, il n'avoit encore êté forcé de chercher fa fureté dans la fuite. Le Duc de Luynes le cacha quelque tems dans une de fes Maifons, & bientôt après le Duc & la Ducheffe de Liancour lui donnèrent, fous le bon plaifir du Roi, un logement dans leur Château de Liancour, avec tout ce qu'il lui falloit pour y vivre & y travailler commodément. 11 fe deftina dans cette retraite à écrire fur toute la Théologie; & il travailloit au Traité de l'Euchariftie, lorfqu'il y mourut le 19. de Janvier 1687. Il fut, par l'ordre de M. le Duc de la Rochefoucauld, enterré dans la Cave des Seigneurs à côté du Duc & de la Ducheffe de Liancour fes bienfaiteurs & fes amis. On ignore pourquoi fes Traités de Théologie n'ont jamais vû le jour. Ceux qui les ont lus, les regardent comme ce qu'il y a de plus parfait dans ce genre. Le Pere Defmares n'a jamais êté Curé de

125

Mais c'eft trop t'infulter. Quittons la raillerie,
Parlons fans hyperbole & fans plaifanterie.

Tu viens de mettre icy l'Hymen en fon beau jour. Entends donc : & permets que je prêche à mon tour. L'E'poufe que tu prens, fans tache en fa conduite, Aux vertus, m'a-t'on dit, dans Port-Royal inftruite, Aux loix de fon devoir regle tous ses defirs. Mais qui peut t'affurer, qu'invincible aux plaifirs Chez toy dans une vie ouverte à la licence, 130 Elle confervera fa premiere innocence ? Par toi-mefme bien-toft conduite à l'Opera, De quel air penfes-tu que ta Sainte verra D'un fpectacle enchanteur la pompe harmonieufe, Ces danfes, ces Heros à voix luxurieufe;

REMARQUES.

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Ces derniers mots contiennent une erreur fingulière.

VERS 134.ces Heros à voir luxurieufe ;] Le mot de luxurieux emploïé dans ce Vers, & celui de lubrique dans le Vers 141.dont le Poëte fe fert pour défigner la Morale de l'Opéra, occafionnèrent une Lettre de M. Perrault, dans laquelle il reproche à l'Auteur de s'être fervi de termes, qui bleffoient la pudeur. M. Arnauld prit la défenfe de ce dernier dans une Lettre, qu'il écrivit à ce fujet à M. Perrault. Il y juftifie pleinement M. Despréaux. ED. P. 1735.

Je ne connois point de Lettre de M. Perrault, dans laquelle il ait cenfuré les Expreffions dont il s'agit ici. C'eft à la Préface de l'Apologie des Femmes, que l'Editeur de 1735. devoit renvoïer; & c'eft à cette Préface, que M. Arnauld répond par fa Lettre,

135 Entendra ces difcours fur l'Amour feul roulans,

Ces doucereux Renauds, ces incenfez Rolands;
Sçaura d'eux qu'à l'Amour, comme au feul Dieu fuprême,
On doit immoler tout, jusqu'à la vertu même.

Qu'on ne fçauroit trop toft fe laiffer enflammer :
140 Qu'on n'a reçeu du Ciel un cœur que pour aimer ;
Et tous ces Lieux communs de Morale lubrique,
Que Lully rechauffa des fons de fa Mufique ?
Mais de quels mouvemens, dans fon cœur excités,
Sentira-t'elle alors tous fes fens agités ?

145 Je ne te répons pas, qu'au retour moins timide,
Digne Ecoliere enfin d'Angelique & d'Armide,
Elle n'aille à l'inftant pleine de ces doux fons,
Avec quelque Médor pratiquer ces leçons.

Suppofons toutefois, qu'encor fidelle & pure,

Iso Sa vertu de ce choc revienne fans blessure :

Bien-toft dans ce grand Monde, où tu vas l'entrainer,
Au milieu des écueils qui vont l'environner,

REMARQUES.

que l'on trouvera dans le IV.
Tome de cette Edition.

,

VERS 137. Sçaura d'eux qu'à Amour comme au feul Dieu fu prême, ] Maximes fort ordinaires dans les Opéra de Quinaut.

DESP.

Nôtre Auteur en citoit plufieurs autres en converfation, contre lefquelles il fe récrioit vivement, & fur tout celle-ci de l'Opéra d'ATIS.

Il faut fouvent, pour devenir heureux,
Qu'il en coûte un peu d'innocence.

IMIT. Vers 138. On doit immo- RACINE dans la Tragédie de Phé ler tout iufqu'à la vertu même. ] dre, Acte III. Scène III.

Il faut immoler tout, & même la Vertu.

VERS 142. Que Lully, &c.] Jean-Baptifte Lulli, Florentin, célèbre Muficien, qui doit paffer pour l'Inventeur des Opéra François. Ce que Cambert avoit fait avant lui dans le même gen

re, ne pouvant être regardé que comme de foibles coups d'effai.

VERS 146. d'Angelique & d'Armide, ] Voyez les Opéra de Quinaut intitulez, Roland & Armide. DESP

,

Crois-tu

Crois-tu

s-tu que toûjours ferme aux bords du précipice, Elle pourra marcher fans que le pié luy gliffe? 155 Que toûjours infenfible aux difcours enchanteurs D'un Idolatre amas de jeunes Seducteurs, Sa fageffe jamais ne deviendra folie? D'abord tu la verras ainfi dans Clélie,

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que

Recevant fes Amans fous le doux nom d'Amis,
160 S'en tenir avec eux aux petits foins permis :
Puis bien-toft en grande eau fur le fleuve de Tendre
Naviger à fouhait, tout dire, & tout entendre.

REMARQUES.

VERS 158. ainfi que dans
Clélie. ] ROMAN de Clélie, & au-
tres Romans du mefme Auteur,
DESP.

Clélie

VERS 159. Recevant les Amans
fous le doux nom d'Amis.] Dans
le Roman de Clélie, Part. I. Liv.
1. page 389. Celère raconte que
cette admirable Fille
vivoit de façon qu'elle n'avoit
,, pas un Amant qui ne fût obli-
,, gé de fe cacher fous le nom
d'Ami
& d'appeller fon
,, amour, amitié, car autre-
,, ment, dit-il, ils euffent êté

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chaffés de chés elle,,. On fait faire enfuite à Clélie elle-même cette jolie diftinétion de fes divers genres d'Amis. " Il ne faut , pas conclure de-là, dit-elle, ,, que tous ceux que j'appelle ,, mes Amis, foient de mes tendres Amis, car j'en ai de tou,, tes les façons dont on en peut ,, avoir. En effet, j'ai de ces , demi-Amis, s'il eft permis de ,, parler ainfi, qu'on appelle d'agréables connoiffances. J'en , ai qui font un peu plus avancés que je nomme mes nou

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VERS 161. fur le fleuve de Tendre,&c.] Dans la première partie du Roman de Clélie figuré la Carte du Païs de Ten dre, dont le deffein eft allégorique, pour marquer les divers genres de Tendreffe.On peut avoir de la tendreffe par trois caufes différentes: l'Eftime, la Reconnoiffance, & l'Inclination; c'est pourquoi cette Carte répréfente trois Rivières, qui portent ces

Et ne préfume pas que Venus, ou Satan, Souffre qu'elle en demeure aux termes du Roman. 165 Dans le crime il fuffit qu'une fois on débute.

Une chûte toûjours attire une autre chûte.

L'honneur eft comme une Ifle escarpée & fans bords.
On n'y peut plus rentrer dés qu'on en est dehors.
Peut-eftre, avant deux ans ardente à te déplaire;
170 Eprife d'un Cadet, yvre d'un Moufquetaire,

Nous la verrons hanter les plus honteux brelans
Donner chez la Cornu rendez-vous aux Galans,
De Phêdre dédaignant la pudeur enfantine,
Suivre à front découvert Z... & Meffaline;

REMARQUES.

trois noms,
& fur lefquelles
font fituées trois Villes nom-
mées Tendre; favoir, Tendre fur
Inclination, Tendre fur Eftime, &
Tendre fur Reconnoiffance. Petits
foins eft un des Villages répré-
fentés fur cette Carte: C'eft à
quoi le Vers précédent fait allu-
fion.

VERS 170. Eprife d'un Cadet,
yure d'un Moufquetaire. ] CADET,
fignifie ici un jeune Homme,
un jeune Militaire. En l'année
1682. le Roi établit, en plufieurs
Flaces de fon Roïaume des
Compagnies de jeunes Gens, à
qui l'on donna le nom de Ca-
dets. Ils êtoient inftruits dans

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tous les exercices militaires; & de-là placés dans les Troupes.

Moufquetaires. Les Moufquetaires du Roi, font deux Compagnies de Gens à cheval, compofées, pour la plus grande partie, de jeunes Gens de Qualité, ou de bonne Maison.

VERS 172.

Donner chez la Cornu. &c.] Une infame, dont le nom eftoit alors connu de tout le monde. DES P.

VERS 173.

De Phedre dédaignant, &c.] M. Racine a trèsheureufement exprimé le caractère de cette Princeffe, dans ces Vers de la Tragédie, qui en porte le nom, A&t. III. Sc. 1.

Je ne fuis point de ces femmes hardies.
Qui goûtant dans le crime une tranquille paix,
Ont feu fe faire un front qui ne rougit jamais.
IMIT. Ibid.
la pudeur en-
fantine. ] C'est une traduction de
l'Infans namque pudor d'Horace,
Liv. I. Satire VI. Vers 57.

VERS 174. Suivre à front dé

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couvert Z.. & Meffaline.] Cette lettre initiale Z. n'eft mife ici que pour dépaïfer les Lecteurs. Cependant malgré cette précaution, en ne laiffa pas dans les

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