Et du bruit dangereux d'un livre temeraire, 60 A vos propres perils enrichir le Libraire ? , Vous vous flattez peut-eftre en vostre vanité, D'aller comme un Horace à l'Immortalité : Et déja vous croyez dans vos rimes obfcures, Aux Saumaises futurs préparer des tortures. 65 Mais combien d'Ecrivains, d'abord fi bien reçeus, Sont de ce fol efpoir honteusement deçeus : Combien, pour quelques mois, ont veu fleurir leur Livre, Dont les vers en paquet se vendent à la livre ; Vous pourrez voir un temps vos écrits estimez, 70 Courir de main en main par la Ville semez : REMARQUES. VERS 64. Aux Saumaifes futurs préparer des tortures. ] SAUMAISE, celebre Commentateur. DE SPRE' AUX. Claude Saumaife, favant Critique a éclairci une infinité d'endroits obfcurs & difficiles des Auteurs anciens. Il mourut en 1653. C'eft ce Vers qui m'a infpiré la première penfée de faire un Commentaire Hiflorique fur les Oeuvres de M. Despréaux, afin de donner une entière connoiffance des endroits fur lefquels l'éloignement des tems ne manqueroit pas de jetter de l'obfcurité. BROSSETTE. VERS 69. Vous pourrez voir un temps vos écrits estimez, &c.] On a parlé fur le Vers 94. de la Satire I. de la jaloufie, que Gilles Boileau l'Académicien avoit contre fon Frère, à caufe du grand fuccès des nouvelles Satires, ON les lira pendant quelque tems, difoit-il d'un air méprifant mais à la fin elles tomberont dans l'oubli comme font la plufpart de ces petis Ouvrages: & le tems leur ôtera les charmes, que la nouveauté leur a donnés. Nôtre Poëte fe fervit à propos des mêmes termes contre fon Frère lui-même, en les appliquant à deux petits Ouvra ges que ce Frère avoit publiés, l'un contre Collar & l'autre contre Menage. Il avoit mis en cet endroit : Vous pourrez voir un tems vos écrits estimez Mais quand il donna au Public derniers Vers, & mit comme l'on voit ici, Puis Puis de là tout poudreux, ignorez fur la terre, 75 Le bel honneur pour vous, en voyant vos Ouvrages, Et fouvent dans un coin renvoyez à l'écart, Mais je veux que le Sort, par un heureux caprice, 30 Faffe de vos écrits profperer la malice, Et qu'enfin voftre Livre, aille au gré de vos vœux REMARQUES. VERS 72. - Neuf-Germain.] Poëte extravagant. DESP.--La Serre. Auteur peu eftimé. DESP. (Voies Sat. III. Vers 76.) Louis de Neuf-Germain êtoit un Poëte ridicule & extravagant, qui vivoit fous le regne de Louis XIII. II êtoit le jouet de la Cour, & des beaux Efprits de ce tems-là. Sa méthode favorite êtoit de faire des Vers, qui finif foient par les fillabes du nom de ceux qu'il vouloit louer. On en peut voir des exemples dans fes Oeuvres imprimées à Paris en 1637. & des Imitations Satiriques dans quelques uns de nos Poëtes. VERS 74. les rebords du Pont-neuf.] Où l'on vend ordinairement les Livres de rebut. DES P. VERS 78. Servir de fecond tome aux airs du Savoyard. ] Fameux Chantre du Pont-neuf, dont on vante encore les Chanfons. DESP. Ed. 1701. Elles font imprimées en un petit volume, fous ce titre : Recueil nouveau des Chanfons du Savoyard, par lui feul chantées à Paris. Il les chantoit fur le Pont neuf, aidé de quelques jeunes Garçons, qu'il avoit inftruits à chanter avec lui; & il accompagnoit fes Chanfons de plu fieurs bouffonneries qui atti roient le Peuple. Il fe nommoit Philippot, autrement Le Savoyard. Son Père avoit fait le même métier, & dans fon tems avoit chanté les Chanfons de Guédon & du vieux Boiffet. 85 Et ne produisent rien pour fruit de leurs bons mots, Quel Démon vous irrite, & vous porte à médire ? 90 Un Auteur ne peut-il pourir en feureté ? Quel mal cela fait-il? Ceux qui font morts font morts. 95 Le tombeau contre vous ne peut-il les défendre? Et qu'ont fait tant d'Auteurs pour remuer leur cendre? Que vous ont fait Perrin, Bardin, Pradon, Hainaut Colletet, Pelletier, Titreville, Quinaut, REMARQUES. VERS 91. 92. 93. Le Jonas, &c. Le David, &c. Le Moife, &c.] Ces trois Poëmes avoient êté faits, le Jonas par Coras, le Dapar Las-Fargues, & le Moife par Saint-Amand. DES P. vid Le Poëme de Jonas ou Ninive pénitente, parut en 1663. Jacques de Coras, fon Auteur, en a fait un autre intitulé: David, ou la Vertu couronnée, qu'il publia en 1665. Mais nôtre Auteur nous apprend lui-même, que c'eft le David de Las-Fargues, Touloufain, qu'il avoit en vuë. VERS 97. Que vous ont fait Perrin, &c.] Ce Vers & le fuivant font allufion aux Vers 44. & 45. de la Sat. VII, où la plufpart des mêmes noms font placés. Dans les premières Editions il y avoit: Que vous ont fait Perrin, Bardin, Mauroy, Bourfaut? A la place de cès deux derniers, l'Auteur a mis Pradon & Hainaut. Nous parlerons de Pradon dans la fuite. A l'égard du fecond, c'est Hénaut, Poëte de ce tems-là, connu par le fameux Sonnet de l'Avorton, dont il êtoit l'Auteur; & par quelques autres Pièces tant en Vers qu'en Profe, qui furent imprimées à Paris en 1670. Il mourut en l'année 1682. M. Defpréaux le trouvoit affés bon Poëte, & difoit que fa meilleure Pièce, non pas pour le fujet, mais pour la compofition, êtoit un Sonnet contre M. Colbert, qui commençoit par ce Vers: Miniflre avare & lâche, Efclave malheureux. M. Colbert fit là-deffus une action pleine de grandeur. On lui parla de ce Sonnet: Il demanda s'il n'y avoit rien contre le Roi, on lui dit que non. Cela étant répondit-il,je n'en veux point de mal`à l'Auteur, Dont les noms en cent lieux, placez comme en leurs niches, ioo Vont de vos vers malins remplir les hemiftiches? Ce qu'il font vous ennuie. O le plaifant détour! Sans que le moindre edit ayt, pour punir leur crime, Peut perdre impunément de l'encre & du papier. REMARQUES. VERS 108.. -au dixiéme vo- CHANG. Ibid. Il y avoit dans les premières Editions: au douziéme volume; ce qui êtoit tout aufi-bien, Pharamond aïant ef fectivement douze volumes, auffibien que Cléopatre, que notte Poëte ne nomme pas dans fa Note. IMIT. Vers 119. Gardez-vous.... de cet efprit critique. ] HORACE Livre I. Satire IV. Vers 34. Fænum habet in cornu, longè fuge: dummodo rifum Mais c'est un jeune Fou, qui fe croit tout permis, Et croit regler le monde au gré de fa cervelle. REMARQUES. C'est ce que La Frefnaie Vauquelin a paraphrafé de cette forte dans la première Satire de fon quatriéme Livre, en ajoûtant de -Gardez-vous, car ce toreau-la porte porte fur la croupe une claire fonnette, Qui dit aux approchans, il frape, qu'on s'en guette, La Frefnaie Vauquelin, & peut- loit au Palais que pour obferver les manières de plaider des autres Avocats, & pour les contrefaire quand il êtoit avec fes amis. Il en faifoit autant à l'égard des Prédicateurs, & des Comédiens. VERS 128. N'est qu'un gueux revêtu des dépouilles d'Horace, &c.] Saint Pavin reprochoit à l'Auteur, qu'il n'êtoit riche que des |