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LE CHIEN D'AUBRY DE MONT-DIDIER

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LE CHIEN D'AUBRY DE MONT-DIDIER.

Sous le règne de Charles V., roi de France, un nominé Aubry de Mont-Didier, passant seul dans la forêt de Bondy, fut assassiné et enterré au pied d'un arbre. Son chien resta plusieurs jours sur sa fosse, et ne la quitta que pressé par la faim: il vient à Paris chez un ami intime de son malheureux maître, et par-ses tristes hurlements semble lui annoncer la perte qu'il a faite. Après avoir mangé il recommence ses cris, va à la porte, tourne la tête pour voir si on le suit, revient à cet ami de son maître, le tire par l'habit, comme pour lui marquer de venir avec lui. Sa singularité des mouvements de ce chien, sa venue sans son maître qu'il ne quittait jamais, ce maître qui tout d'un coup a disparu, tout cela fit qu'on suivit ce chien. Dès qu'on fut au pied de l'arbre, il redoubla ses cris en grattant la terre, comme pour faire signe de chercher en cet endroit. On y fouilla, et on y trouva le corps de cet infortuné Aubry. Quelque temps après, ce chien aperçut par hasard l'assassin, que tous les historiens nomment le chevalier Macaire; il lui saute à la gorge, et on a bien de la peine à lui faire lâcher prise: chaque fois qu'il le rencontre, il l'attaqué et le poursuit avec fureur; l'acharnement de ce chien, qui n'en veut qu'à cet homme, commence à paraître extraordinaire. On se rappelle l'affection qu'il avait marquée pour son maître, et en même temps plusieurs occasions où ce chevalier Macaire avait donné des preuves de haine et d'envie contre Aubry de Mont-Didier: quelques circonstances augmentèrent les soupçons. Le roi, instruit de tous les discours qu'on tenait, fait venir ce chien, qui paraît tranquille jusqu'au moment qu'apercevant Macaire, au milieu d'une vingtaine de courtisans, il aboie et cherche à se jeter sur lui.

Dans ce temps-là on ordonnait un duel entre l'accusateur et l'accusé, lorsque les preuves du crime n'étaient pas convaincantes: on nommait ces sortes de combats : Jugement de Dieu, parce qu'on était persuadé que le ciel aurait plutôt fait un miracle que de laisser succomber l'innocence. Le roi, frappé de tous les indices qui se ré

unissaient contre Macaire, ordonna le duel entre le chevalier et le chien. Le champ clos fut marqué dans l'île Notre-Dame, qui n'était alors qu'un terrain vide et inhabité.

Macaire était armé d'un gros bâton, le chien avait un tonneau pour sa retraite et les relancements. On le lâche, aussitôt il court, tourne autour de son adversaire, évite ses coups, le menace, tantôt d'un côté, tantôt d'un autre, le fatigue, et enfin s'élance, le saisit à la gorge, et l'oblige à faire l'aveu de son crime en présence du roi et de toute

sa cour.

LES ANCIENS MEXICAINS.

MALGRE la barbarie de leur religion, les anciens Mexicains approchaient de la civilisation. Les Européens, en venant les armes à la main dans le Mexique, pour s'emparer de ce beau pays qui n'avait jamais eu aucune relation avec eux, furent tout étonnés de trouver des villes bien peuplées, ornées de temples, de palais, d'aqueducs, et de jardins, et entourées de campagnes parfaitement cultivées et traversées de chemins commodes. Ce fut surtout la ville de Mexico qui excita leur étonnement. Cette ville, bâtie sur le lac Tezcuco, dans une plaine charmante, était entrecoupée de canaux, comme quelques-unes de nos villes maritimes. Les temples et les palais étaient munis de tours et de remparts. De grands marchés offraient une variété étonnante des riches productions du pays. Des jardins et des parterres de fleurs couvraient les petites îles du lac. Dans cette capitale, comme dans les autres grandes villes de l'empire mexicain, les ateliers et les boutiques brillaient d'objets de luxe.

On y voyait des ouvrages artistement travaillés en or, en argent, et en cuivre, de la vaisselle en terre cuite et recouverte d'un vernis doré, des pierres précieuses habilement façonnées, des peintures et sculptures, des tableaux faits en plumes brillantes et en coquilles, des étoffes de poil de lièvre et de coton, des armures et beaucoup d'autres objets curieux.

LES ANCIENS PERUVIENS.

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La nature a peuplé le Mexique de charmants oiseauxmouches dont le plumage a un reflet métallique, ainsi que d'autres oiseaux de toutes couleurs. Les Mexicains en

luminaient un dessin tracé sur une feuille d'aloès, en y appliquant les parties les plus fines du plumage d'oiseaux, et en exprimant ainsi toutes les nuances de couleurs.

Ils avaient érigé des pyramides semblables à celles d'Egypte, et ils avaient construit des temples dignes d'un grand peuple.

Les Mexicains avaient des connaissances assez exactes de la révolution des astres: ils parlaient une langue douce et riche; au lieu de l'écriture, ils employaient des peintures hieroglyphiques, c'est-à-dire qu'ils peignaient les choses par des figures, au lieu de les exprimer par des mots. Au lieu de monnaie, ils se servaient de noix de cacao, parce que cette production est commune dans le Mexique. On sait que dans l'Inde on paie en petits coquillages. Comme les monnaies ne servent qu'à représenter la valeur des choses, il est assez indifférent qu'on y emploie telle ou telle matière; seulement il faut donner la préférence aux matières qui se transportent facilement, et qui ne sont pas sujettes à l'altération: sous ce rapport, les monnaies usitées dans les pays civilisés ne laissent rien à désirer.

LES ANCIENS PÉRUVIENS.

LES Péruviens, ou habitants du Pérou, étaient comme les Mexicains, assez avancés dans les arts et les sciences; et ils avaient de plus une douceur de caractère qui manquait aux habitants du Mexique. Le soleil était l'objet principal de leur adoration. Les ruines du fort de Cusco, où résidait leur inca ou roi, excitent encore l'admiration par les pierres énormes qui y ont été employées. Ce sont des murs gigantesques qu'on n'a pu élever sans des machines ingénieuses, ou du moins sans une très grande patience. L'or et l'argent abondaient chez eux, mais c'était aussi leur seule richesse. Le Pérou est un pays générale

ment stérile, dont le sol n'a pu être amélioré depuis plusieurs siècles, malgré le soin des Européens. Ce sont partout des mines de métaux que l'on n'exploite pas sans de grandes peines et sans danger pour la santé : les Européens et les Nègres y périssent. Les Péruviens seuls sont en état d'y résister, à cause de l'habitude qu'ils ont de vivre dans un air chargé des exhalaisons des mines. Ainsi le Pérou, pour être le dépôt de l'or et de l'argent, n'en est pas plus heureux que d'autres pays. S'il est riche en métaux, il est pauvre sous d'autres rapports, et ce pays qui a tant d'or n'a pas assez de blé pour le pain qu'il consomme.

Voilà comme la Providence répand d'une manière à peu près égale le bien et le mal dans les diverses contrées de la terre. A côté des avantages, on voit toujours des inconvénients, et les maux sont toujours adoucis par le bien qui vient s'y joindre. Les Espagnols, éblouis par l'éclat de l'or et de l'argent, assaillirent avec une avidité honteuse les paisibles Péruviens, les subjuguèrent, s'emparèrent de leurs trésors et fouillèrent leurs mines. Mais qu'y ont-ils gagnés? Par l'abondance de l'or et de l'argent le prix de ces métaux diminua en Europe, tandis que celui des marchandises haussa rapidement. Les Espagnols négligèrent leur beau pays, pour courir au Pérou; la plupart y trouvèrent leur tombeau ou la misère: les Péruviens disparurent peu à peu; le pays se dépeupla et s'appauvrit malgré ses mines; enfin, l'Espagne perdit le Pérou comme le Mexique. L'injustice s'est punie elle-même; mais elle a causé la ruine d'un peuple doux et paisible, dont la religion était à la vérité infectée d'erreurs grossières, mais il eût été aisé de lui faire goûter les avantages du christianisme et de la civilisation, sans employer la violence, et de faire avec lui un commerce aussi avantageux aux Péruviens qu'aux Espagnols.

LES GAULOIS ET LES FRANCS.

AVEZ-VOUS lu quelques relations des voyageurs qui ont visité les pays sauvages du nouveau monde, qui ont aperçu les grossières peuplades, errantes dans ses vastes soli

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LES GAULOIS ET LES FRANCS.

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tudes? Eh bien! notre terre de France, aujourd'hui, si fertile et si belle, ne fut pas jadis moins inculte que les savanes de l'Amérique. Là où des moissons aux épis dorés, des vignobles aux pampres verdoyants sourient maintenant à nos regards, il n'y avait, alors, que marais insalubres, que noires forêts de chênes dont les glands formaient la principale nourriture de quelques hordes barbares. Ces hordes furent nos premiers ancêtres. Peu à peu le génie de la civilisation qui n'est autre chose que le désir du mieux réveillé chez l'homme par ses besoins, sans cesse multipliés, éclaircit ces forêts, défricha quelques champs, construisit des huttes, puis des maisons, les groupa sur le bord des fleuves, et, lorsque le grand César, à la tête de ses légions romaines, descendit les Alpes, pour conquérir la vaste contrée qu'on appelait alors les Gaules, il y trouva des peuples régulièrement organisés, avec leurs dieux, leurs lois, leurs chefs, et leurs villes.

C'était déjà une vertu commune parmi les Gaulois, que l'amour de la patrie et de l'indépendance. Aussi la tâche du conquérant ne fut pas facile, il y eut une guerre acharnée et longue avant qu'il pût réduire la Gaule au rang de simple province romaine. Quelques siècles se passèrent. La tyrannie des Empereurs et la corruption des mœurs allaient toujours croissant. Tout à coup des nuées de barbares, chassés de l'Asie et du nord de l'Europe par l'amour du pillage et par la faim se ruèrent sur les riches pays dont Rome était le centre et la capitale. Longtemps ils furent en proie aux gigantesques luttes de ces guerriers qui, apres avoir terrassé de concert la puissance romaine, tournèrent leurs armes les uns contre les autres. Mais enfin, de guerre lassé, chacun se reposa sur la terre qui se trouva le plus à portée de sa convenance. La Gaule échut aux peuples Francs, qui, se mêlant peu à peu avec les indigènes, adoptèrent plus tard leur religion, c'est-à-dire le christianisme, que de saints apôtres y avaient déjà propagé. Clovis fut le premier roi franc, qui reçut le baptême dans les murs de Reims, et par les mains de l'évêque Remi. Ce fut lui aussi qui, le premier, étendit sa domination sur la plus grande port on du ter ritoire, qui forme aujourd'hui la France.

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