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HARVARD COLLEGE

FEB 23 1923

LIBRARY

F. C. LOWELL FUND

La Société laisse à chacun de ses membres la responsabilité de ses opinions et de ses travaux.

LE DOCTEUR H. DUBOUÉ

MEMBRE CORRESPONDANT DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE
ET DE LA SOCIÉTÉ DE CHIRURGIE.

NOTICE NÉCROLOGIQUE

lue dans la Séance du 25 Novembre 1889 de la Société des Sciences, Lettres et Arts de Pau

Par

LE DOCTEUR R. DE MUSGRAVE-CLAY

Secrétaire Général.

MESSIEURS,

La pieuse et traditionnelle coutume qui veut que les Sociétés savantes, à la reprise de leurs travaux, rendent un public hommage aux hommes éminents qu'elles ont perdus dans l'intervalle de leurs séances, n'a jamais rencontré de plus légitime application qu'aujourd'hui. Votre bureau tout entier a pensé que nous ne devions pas laisser disparaître sans une parole d'adieu celui qui fut pour notre Société un ouvrier de la première heure, celui que vos suffrages portèrent jadis aux plus hautes fonctions de notre compagnie, et, sans se demander si j'étais à la hauteur d'une pareille tâche, il n'a voulu voir que la respectueuse affec

T. XIX.

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tion qui m'unissait au Dr Duboué, et m'a confié la pénible tâche de résumer devant vous sa laborieuse et trop courte carrière.

Quel que soit, Messieurs, l'intérêt que nous portons tous ici aux choses de la science, je ne dois pas oublier que je ne m'adresse pas exclusivement à des médecins, et ce n'est pas dans ses détails, mais seulement dans ses grandes lignes que je dois étudier l'œuvre considérable de notre regretté collègue.

I

En 1859, après de fortes études médicales qui l'avaient rapidement conduit à l'internat des hôpitaux de Paris, Duboué soutenait sa thèse inaugurale sur l'Expérimentation thérapeutique; au sortir de l'école, le jeune docteur y traçait d'une main sûre et prudente, sans timidité, les préceptes auxquels il allait se conformer dans l'avenir; on trouve dans ces pages une sagesse précoce, et si quelque chose y prime l'intérêt de la science, c'est l'intérêt supérieur encore du malade. Bientôt notre collègue, tournant vers la chirurgie les premiers efforts de son activité, enregistre d'heureux succès opératoires et publie des travaux que leur caractère trop technique nous interdit d'analyser ici, mais dont il nous suffira de dire qu'ils lui valurent, avant sa trentième année, le titre de membre correspondant de la Société de Chirurgie, titre presque aussi envié que celui de membre correspondant de l'Académie de Médecine, qu'il devait obtenir quelques années plus tard.

Mais durant les premiers mois de sa pratique médicale, alors que, trop modeste, et peut-être aussi trop peu favorisé par la fortune, il exerçait la médecine de campagne à Saint-Castin, dans son village natal, il avait rassemblé les matériaux d'un travail important sur l'Impaludisme; on peut conseiller la lecture de ce livre à tous les médecins, ils y trouveront sur l'action des miasmes palustres des choses qui méritent d'être sues; on pourrait peut-être la recommander spécialement aux médecins des petites localités; ils y apprendraient- quelquesuns heureusement le savent déjà — qu'il n'y a que les mauvais ouvriers qui se plaignent de leurs outils, et qu'un médecin, qui

sait et qui aime son métier, peut s'instruire beaucoup lui-même et enseigner aux autres beaucoup de choses utiles dans les milieux en apparence les moins favorables aux recherches scientifiques.

II

Messieurs, les travaux que Duboué a consacrés aux recherches de thérapeutique spéciale sont si nombreux, si touffus, que l'on ne peut guère songer à les analyser isolément; il a étudié tour à tour avec autant de prudence que de sagacité la propylamine, le permanganate de potasse, l'arsenic, l'eau froide, le sulfate de quinine, le tanin et le seigle ergoté; je me bornerai à rappeler très sommairement ses études sur ces trois derniers médicaments. Dans son étude sur l'impaludisme, il a montré d'une façon péremptoire l'innocuité, et, dans certains cas, la nécessité du sulfate de quinine à hautes doses; il a donné en outre de précieux renseignements sur la manière dont il convient d'administrer cet incomparable agent de notre thérapeutique courante; plus tard il a comparé l'action du sulfate de quinine avec celle de divers autres médicaments; mais c'est là un point sur lequel nous aurons à revenir.

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Amené par des circonstances qu'il serait trop long d'indiquer ici à employer le tanin dans les cas de pleurésie avec épanchement soit séreux soit purulent, notre collègue, qu'un succès thérapeutique ne satisfaisait pleinement que lorsqu'il avait réussi à en analyser les causes et à en étendre la portée, - fut tout naturellement conduit à rechercher si d'autres séreuses que la plèvre ne pourraient pas bénéficier de l'action de ce médicament; le tanin lui donna dans les maladies de la séreuse péritonéale, et même dans les affections des méninges les plus heureux résultats; élargissant encore le terrain de ses recherches, Duboué pensa que le tanin devait être utile dans quelques affections des muqueuses et même dans tous les cas où parmi les lésions anatomo-pathologiques figurait une desquamation épithéliale; ici encore son attente ne fut pas trompée et le succès répondit souvent à ses espérances. Il avait pensé aussi que dans la période prémonitoire et dans la période de

début, même confirmée, du choléra, le tanin, soit en fortifiant les épithéliums, soit en diminuant leur desquamation, pouvait rendre d'importants services, en modifiant ainsi les conditions de l'endosmose et de l'exosmose intestinale et en prévenant ou en restreignant la déshydratation du sang.—J'ajouterai, puisque j'ai parlé du choléra, que notre collègue avait proposé, pour les périodes avancées de cette maladie, un mode de traitement nouveau qui consistait à fournir au sang, par voie d'injection trachéale, l'eau que lui enlevait l'exosmose intestinale; la disparition de l'épidémie cholérique n'a pas permis d'apprécier la valeur du traitement très inoffensif malgré son aspect un peu intimidant pour les personnes étrangères à la médecine qu'avait imaginé notre ingénieux collègue, et que lui-même d'ailleurs se félicitait de n'avoir pas eu à expérimenter dans sa clientèle.

Messieurs, on ne cultive pas ainsi, dans des sens très divers, un champ scientifique sans que des analogies imprévues se manifestent à l'attention d'un observateur toujours en éveil et deviennent pour lui comme des révélations c'est de cette façon, si je ne me trompe, qu'apparut à notre collègue, non par une intuition soudaine, mais comme le résultat naturel de recherches conduites parallèlement dans l'ordre de la physiologie pathologique et de la physiologie thérapeutique, l'action probable du seigle ergoté sur les phénomènes morbides qui caractérisent la fièvre typhoïde. Je ne sais pas si la théorie de la fièvre typhoïde qu'a donnée Duboué demeure et demeurera inattaquable; ce que je sais bien, tout au moins, c'est que l'événement thérapeutique lui a donné raison et qu'en préconisant l'emploi du seigle ergoté dans la dothiénentérie, il a rendu au traitement de cette maladie, si fréquente et si grave, le plus signalé des services: en abaissant la température du malade, le seigle, bien mieux que le sulfate de quinine, écarte les dangers de l'hyperthermie; en relevant la contractilité des petits vaisseaux, il diminue le risque hémorrhagique toujours redoutable; en permettant une alimentation réparatrice, même pendant la fièvre, il restreint, presque au point de la supprimer, la période jadis si longue de la convalescence et de la réparation organique. Messieurs, parmi les nombreux travaux de

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