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collègue, M. Zayas. M. Dupierris, s'étant pourvu des moyens nécessaires pour faire l'injection, attendit patiemment que la délivrance arrivât à son terme; l'accouchement eut lieu trente-deux heures après qu'il avait commencé.

» Une heure après l'accouchement, une faible tranchée expulsa le placenta. L'utérus demeura inerte, gonflé, et une hémorrhagie considérable eut lieu. M. Dupierris fit de suite l'injection d'iode. La contraction de l'utérus fut complète. L'hémorrhagie cessa définitivement, Dix jours plus tard, l'accouchée était à ses occupations, un peu faible, il est vrai, mais sans autre malaise à noter. Les lochies durèrent huit jours.

>> En plus des observations qui précèdent, dit le Dr Zayas, M. le Dr Jorge Diaz Albertini a eu dans sa pratique deux cas d'injection iodée; il cite aussi celles du Dr Dupierris, et toujours le résultat a été parfait (1). »

(1) Les observations empruntées par moi à des confrères et rapportées dans le présent travail, soit pour prouver l'insuffisance des moyens généraux habituellement en usage, soit pour prouver l'efficacité et l'innocuité de ma méthode, ont été citées textuellement ou traduites littéralement. Je n'ai cru devoir y ajouter aucune réflexion, voulant en laisser aux auteurs et la valeur intacte et la responsabilité.

En lisant les observations qui me sont propres, si l'on trouve que j'aurais dû insister plus souvent sur les moyens généraux habituels, je répondrai que, plein de confiance dans mes injections iodées, je les ai toujours considérées, non comme un moyen extrême, mais comme un traitement rationnel, expérimenté et sûr, et qu'alors j'y ai eu recours de préférence à tout autre moyen.

DEUXIÈME PARTIE

DU TRAITEMENT PROPHYLACTIQUE DE LA FIÈVRE PUERPÉRALE

Si j'avais à m'occuper des diverses affections que la nouvelle école rapporte à l'état puerpéral, je devrais examiner si les limites assignées à cet état ne sont pas un peu exagérées, alors qu'on les étend à la femme pendant sa période menstruelle, aux enfants nouveau-nés, et aux fœtus dans les deux derniers mois de la vie intrautérine. Mais, n'ayant à parler de la fièvre puerpérale qu'en ce qui concerne la femme dont l'utérus, en état d'activité fonctionnelle, est le siége ou le point de départ essentiel de la maladie, je conserverai à l'état puerpéral la définition des anciens, c'est-à-dire « la période de l'accouchement et des suites de couches. »

Si l'on veut bien se rappeler que la conception apporte des modifications nombreuses dans l'état anatomique et physiologique de la matrice, on comprendra, avec Valleix, que « l'utérus doit présenter après l'accouchement » des phénomènes qui sont plus du domaine de la pa>>thologie que de la physiologie. » Comment en serait-il autrement, si cet organe, qui avait décuplé de volume,

doit, avant de revenir à l'état normal, se déterger, expulser les débris des annexes du produit de la conception?

C'est là, dit l'auteur recommandable que je viens de citer, « un immense travail physiologique; c'est là une >> immense opportunité morbide. »

C'est, en effet, dans cet état de l'utérus que je trouve la cause prédisposante de la fièvre puerpérale; et quoique cette affection puisse se présenter sous des formes diverses que l'on serait disposé à attribuer à des causes essentielles, on ne doit cependant y voir que des manifestations multiples et variées procédant d'une cause unique. Cette cause, il est vrai, pourra être modifiée par des dispositions propres aux individus, ou par un traitement agissant soit sur l'organe lésé, soit sur la cause occasionnellle.

La fièvre puerpérale attaque ordinairement sa victime dans les trois jours qui suivent la délivrance, et le danger est d'autant plus grand, que l'invasion du mal se rapproche davantage de l'instant de la parturition. Ceci est admis par la plupart des médecins qui ont traité de la fièvre puerpérale. N'est-ce pas là une preuve irrécusable que le point de départ de la maladie est la matrice, qui, frappée d'engourdissement, n'a pu revenir sur ellemême, de manière à réduire l'étendue de la plaie placentaire, à se déterger, à expulser les débris des annexes du produit de la conception, à pourvoir à la circulation de retour et à comprimer les vaisseaux utéroplacentaires fortement béants, et, par cela même, disposés à une résorption quelconque ?

L'inertie de l'utérus laisse à la plaie placentaire toute l'étendue qu'elle avait au moment de la délivrance. Cette large plaie sera, comme a dit Trousseau, « un sol fertile » où la cause déterminante se multipliera pour se pro>> pager à toute l'économie. » Ce même état favorisera

la division du sang en sérum qui s'échappe et en caillots qui se putréfient; les tissus non contractés laisseront les sinus utérins béants; ces mêmes tissus acquerront la propriété spongieuse ou d'imbibition, et, sous ce nouvel état, ils coopéreront avec les sinus à l'absorption des miasmes contenus dans un air vicié, comme le dit M. Hervieux, « par les sécrétions des femmes en cou>>ches, par l'encombrement, l'occupation permanente >> des salles; circonstances qui engendrent le principe >> infectieux et la contagion (1). »

(1) On ne me supposera pas, je pense, l'intention de prouver que la rétraction de l'utérus immédiate à la délivrance suffit, à elle seule, pour annihiler l'action des causes occasionnelles qui peuvent déterminer le développement de la fièvre puerpérale. Ce serait là une erreur que je tiens à prévenir tout d'abord. La rétraction de l'utérus, entre autres avantages, oppose une barrière à l'accumulation des fluides susceptibles de s'altérer par leur contact avec un air plus ou moins vicié, lesquels fluides, dans un état de corruption, contribueraient à donner à l'atmosphère ambiante cette virulence qui engendre les épidémies contre lesquelles les mesures les mieux combinées demeurent impuissantes. Ce à quoi il faut s'attacher avant tout, c'est d'empêcher cette combinaison des divers éléments qui peuvent concourir à la formation du méphitisme atmosphérique. Ce point admis, on devra convenir avec moi qu'en parvenant à soustraire à l'action d'une atmosphère viciée des fluides susceptibles de s'altérer, on atténuera considérablement les propriétés malfaisantes de l'air impur; car on lui soustraira l'élément de la pire des putréfactions, celle qui procède de matières animales en décomposition.

La rétraction de l'utérus, d'ailleurs, outre qu'elle prévient l'accumulation des fluides, oppose la même barrière à leur résorption, quelle que soit la nature de ceux-ci.

Mais l'air confiné, altéré par la respiration, les sécrétions, etc., des personnes qui habitent des enceintes où la ventilation est insuffisante, est déjà par lui-même assez nuisible pour réclamer des modifications radicales dans le système des Maternités actuelles. C'est là une question qui préoccupe à bon droit les Sociétés savantes. Les Maternités, telles qu'elles sont aujourd'hui, sont considérées, avec raison, comme entraînant de très-graves inconvénients à côté des avantages indéniables qu'elles offrent au point de vue de l'économie administrative et de l'enseignement pratique. C'est à ces inconvénients qu'il s'agit de remédier.

Les idées émises par M. le Dr Tarnier me paraissent dignes, sous beaucoup

Quant au mode de propagation de la maladie, par la contagion, ainsi que le veut M. Hervieux, je fais mest réserves; car je trouve que l'infection seule suffira pour expliquer la propagation de la fièvre puerpérale épidémique.

Les idées que j'émets font jouer, on le voit, un rôle essentiel à la plaie placentaire; et comme

de rapports, de l'approbation générale. Les mesures hygiéniques qu'il propose sont bien certainement celles qu'on doit mettre en pratique. Je partage son avis lorsqu'il propose de diviser le local en chambres d'une capacité suffisante pour y loger deux femmes seulement; mais j'en diffère quand il demande que les femmes accouchent dans une salle destinée à ce seul effet. Je voudrais, moi, que les accouchements se fissent dans les chambres mêmes, en employant, à cet effet, la méthode dont je fais mention dans la xve observation de ce mémoire. Il faut éviter le transport de la mère et de l'enfant d'une pièce dans l'autre, et cela d'autant mieux que la salle d'accouchement peut se trouver parfois assez éloignée de la chambre de la parturiente. Ce transport ne me paraît pas sans quelque danger pour l'un et pour l'autre ; je craindrais, en outre, que l'atmosphère de la salle ne finit par se vicier.

Si j'avais à exprimer une opinion sur la construction d'une Maternité, j'en esquisserais ainsi les traits principaux : Sur les quatres faces d'un quadrilatère de 80 mètres de côté, complètement isolé des habitations voisines par de larges rues, s'élèverait une construction à un étage seulement au-dessus du rez-de-chaussée, et divisée en séries de chambres bien aérées sur la rue par une grande fenêtre pour chacune. Sur la vaste enceinte centrale régnerait tout autour du bâtiment une sorte de cloître, ou galerie sur laquelle s'ouvriraient les portes de chaque chambre. Au-dessus de chaque porte, comme aussi de chaque fenêtre, existerait une ouverture à vitrage mobile. Tous les toits seraient en terrasses ou très-bas. Le terrain, à l'intérieur du quadrilatère, pourrait être partagé en deux ou trois divisions, par une ou deux lignes de constructions à rez-de-chaussée seulement, et chaque cour résultant de cette disposition serait convertie en jardin anglais avec fleurs (peu ou pas odorantes), arbustes et jets d'eau.

En 1846, j'ai fait construire à la Havane, à peu près sur ce modèle, une maison de santé que j'ai dirigée jusqu'à la fin de 1853. Pendant cette période, la Havane fut en proie à une violente épidémie de choléra qui dura de 1850 à 1853, puis à une épidémie de variole de 1851 à la fin de 1852. Le nombre de malades soignés dans ma maison fut considérable; néanmoins je n'eus pas l'occasion de constater des faits qui indiquassent la propagation de ces affec→ tions à d'autres malades de l'établissement.

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