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et bien loin que la traduction du P. Sanadon fasse sur moi un plus bel éfet, je regrète le sentiment tendre qu'elle me fait perdre. Mais re venons à la synecdoque.

Come il est facile de confondre cette figure avec la métonymie, je crois qu'il ne sera pas inutile d'observer ce qui distingue la synecdoque de la métonymie : c'est 1.9 Que la synecdoque fait entendre le plus par un mot qui dans le sens propre signifie le moins,ou au contraire elle fait entendre le moins par un mot qui dans le sens propre marque le plus.

2. Dans l'une et dans l'autre figure, il il y a une relation entre l'objet dont on veut parler, et celui dont on emprunte le nom; car s'il n'y avoit point de raport entre ces objets, il n'y auroit aucune idée accessoire, et par conséquent point de trope: mais la relation qu'il y a entre les objets, dans la métonymie, est de telle sorte, que l'objet dont on emprunte le nom subsiste indépendament de celui dont il réveille l'idée, et ne forme point un ensemble avec lui. Tel est le raport qui se trouve entre la cause et l'éfet, entre l'auteur et son ouvrage, entre Cérès et le blé; entre le contenant et le contenu, come entre la bouteille et le vin: au lieu que la liaison qui se trouve entre les objets, dans la synecdoque, supose que ces objets forment un ensemble come le tout et la partie; leur union n'est point un simple raport, elle est plus intérieure et plus indépendante : c'est ce qu'on peut

remarquer dans les exemples de l'une et de l'autre de ces figures.

ས.

L'ANTON O MASE,

L'ANTONOMASE est une espèce de synecdoque, par laquelle on met un nom comun pour un nom propre, ou bien un nom propre pour un nom comun. Dans le premier cas, on veut faire entendre que la persone ou la chose dont on parle excèle sur toutes celles qui peuvent être comprises sous le nom comun, et dans le second cas, on fait entendre que celui dont on parle ressemble à ceux dont le nom propre est célèbre par quelque vice ou par quelque vertu.

1. Philosophe, Orateur, Poëte, Roi, Ville, Monsieur, sont des noms communs; cependant l'antonomase en fait des noms particuliers qui équivalent à des noms propres.

Quand les anciens disent le philosophe, ils entendent Aristote.

Quand les Latins disent l'Orateur, ils entendent Cicéron.

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Quand ils disent le Poëte ils entendent Virgile.

Les Grecs entendoient parler de Démosthène, quand ils disoient l'Orateur

quand ils disoient le Poëte.

et d'Homère

Quand nos théologiens disent le Docteur

Angélique

on l'ange de l'Ecole, ils veulent parler de S. Thomas. Scot est apelé le Docteur subtil, S. Augustin le Docteur de la grace.

Ainsi on done par excélence par antonomase, le nom de la science ou de l'art à ceux qui s'y sont le plus distingués.

Dans chaque royaume, quand on dit simplement le roi, on entend le roi du pays où l'on est; quand on dit la ville, on entend la capitale du royaume, de la province ou du pays dans lequel on demeure.

Quo te, Mori, pedes ? an quó via ducit in urbem (1) ? Urbem en cet endroit veut dire la ville de Mantoue:ces bergers parlent par raport au territoire où ils demeurent. Mais quand les anciens parloient par raport à l'Empire Romain, alors par urbem ils entendoient la ville de Rome.

Dans les comédies grèques, ou tirées du grec la ville (astu) veut dire Athènes : An (2) in astu venit? Est-il venu à la ville? Cornélius Népos parlant de Thémistocle et d'Alcibiade s'est servi plus d'une fois de ce mot en ce sens (3).

Dans chaque famille, Monsieur veut dire le maître de la maison.

Les adjectifs, ou épithètes sont des noms

(1) Virg. Ec. IX, v. I.

(2) Térence. Eun. act, V, sc. VI, selon Madame Dacier, et sc. V, v. 17, selon les éditions vulgaires.

(3) Xerxes protinus accessit astu.

Corn. Nep. Themist. 44 Alcibiades postquàm astu venit. Idem. Alcib. 6.

comuns, que l'on peut apliquer aux diférens objets auxquels ils conviènent, l'antonomase en fait des noms particuliers: l'invincible, le conquérant, le grand, le juste, le sage, se disent par antonomase, dc certains princes ou d'autres personnes particulières.

Tite-Live (1) apèle souvent Annibal le Carthaginois; le Carthaginois, dit-il, avoit un grand nombre d'homes: Abundabat multitudine hominum pœnus, Didon dit à sa sœur (2) vous mettrez sur le bûcher les armes que le perfide a laissées, et par ce perfide, elle entend Enée.

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Le destructeur de Carthage et de Numance, signifie par antonomase, Scipion Emilien.

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Il en est de même des noms patronymiques dont j'ai parlé ailleurs, ce sont des noms tirés du père ou d'un aïeul et qu'on done aux descendans; par exemple, quand Virgile apèle Enée Anchisiades (3), ce nom est doné à Enée par antonomase, il est tiré du nom de son père, qui s'apeloit Anchise. Diomède, héros célèbre dans l'antiquité fabuleuse, est souvent apelé Tydides, parce qu'il étoit fils de Tydée, roi des Etoliens.

Nous avons un recueil ou abrégé des lois des anciens Français, qui a pour titre Lex Salica:

(1) Tit. Liv. I. 21, n. 8.

(2) Arma viri thalamo quæ fixa reliquit, Impius... super imponas. Æn. 1. IV, v.

.495

(3) Æn. 1. V, v. 4C7.

parmi ces lois, il y a un article (1) qui exclut les femmes de la succession aux terres saliques, c'est-à-dire, aux fiefs: c'est une loi qu'on n'a observée inviolablement dans la suite qu'à l'égard des femmes qu'on a toujours excluses de la succession à la Couronne. Cet usage toujours observé est ce qu'on apèle aujourd'hui loi salique, par antonomase, c'est-à-dire, que nous donons à la loi particulière d'exclure les femmes de la Couronne, un nom que nos pères donèrent autrefois à un recueil général de lois.

II. La seconde espèce d'antonomase est lorsqu'on prend un nom propre pour un nom comun, ou pour un adjectif.

Sardanapale dernier roi des Assyriens, vivoit dans une extrême molesse ; du moins tel est le sentiment commun; de-là, on dit d'un voluptueux, c'est un Sardanapale.

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L'empeur Néron fut un prince de mauvaises mceurs et barbare jusqu'à faire mourir sa propre mère; de-là, on dit des princes qui lui ont ressemblé, c'est un Néron.

Caton, au contraire, fut remarquable par l'austérité de ses mœurs ; de-là S. Jérôme (2) a dit d'un hypocrite, c'est un Caton au déhors un Néron au dedans, intus Nero, foris Cato. Mécénas, favori de l'empereur Auguste, pro

(1) De terrâ veró salicâ nulla portio hæreditatis mulieri veniat, sed ad virilem sexum tota terræ hæreditas proveniat. Lex Salica, art. 62, de Alode, S. 6.

(1) Hier. 1. 2, Ep. 13. Rus. Monache. sub. fin. Ludg. P, 227, et Paris, edit. 1718, p. 386,

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