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lorsqu'on done le nom de l'auteur à ses ouvrages: il a lu Cicéron, Horace, Virgile; c'est-à-dire, les ouvrages de Cicéron, etc.

Jésus-Christ lui-même s'est servi de la Méronymie en ce sens, lorsqu'il a dit,parlant des Juifs: ils ont Moïse et les Prophètes (1), c'est-à-dire,ils ont les livres de Moïse et des Prophètes.

On done souvent le nom de l'ouvrier à l'ouvrage; on dit d'un drap que c'est un Van-Robais, un Rousseau, un Pagnon, c'est-à-dire, un drap de la manufacture de Van-Robais,ou de celle de Rousseau, etc. C'est ainsi qu'on done le nom du peintre au tableau; on dit : j'ai vu un beau Rembrant, pour dire un beau tableau fait par le Rembrant. On dit d'un curieux en estampes,qu'il a un grand nombre de Callots, c'est-à-dire, un grand nombre d'estampès gravées par Callot.

On trouve souvent dans l'Ecriture Sainte Jacob Israël, Juda, qui sont des noms de patriarches, pris dans un sens étendu pour marquer tout le peuple Juif. M. Fléchier, parlantdu sage et vaillant Machabée,auquel il compare M. de Turène, a dit (2): « Cet home qui réjouissoit Jacob par ses vertus et par ses exploits ». Jacob, c'est-àdire, le peuple Juif.

Au lieu du nom de l'éfet, on se sert souvent du nom de la cause instrumentale qui sert à le produire; ainsi, pour dire quelqu'un écrit bien, c'est-à-dire, qu'il forme bien les caractères de l'écriture, on dit qu'il a une belle main.

(1) Luc. c. xvI. y. 29.

2) Oraison funèbre de M. de Turène.

La plume est aussi une cause instrumentale de l'écriture, et par conséquent de la composition; ainsi plume se dit par métonymie, de la manière de former les caractères de l'écriture, et de la manière de composer.

Plume se prend ainsi pour l'auteur même, c'est une bone plume, c'est-à-dire, c'est un auteur qui écrit bien: c'est une de nos meilleures plumes, c'est-à-dire, un de nos meilleurs auteurs.

Style, signifie aussi par figure la manière d'exprimer les pensées.

Les anciens avoient deux manières de former les caractères de l'écriture; l'une étoit pingendo, en peignant les lettres, ou sur des feuilles d'arbres, ou sur des peaux préparées, ou sur la petite membrane intérieure de l'écorce de certains arbres; cette membrane s'apèle en latin liber, d'où vient livre; ou sur de petites tablètes faites de l'arbrisseau papirus, ou sur de la toile, etc. ils écrivoit alors avec de petits roseaux, et dans la suite ils se servirent aussi de plumes

come nous.

L'autre manière d'écrire des anciens, étoit incidendo, en gravant les lettres sur des lames de plomb ou de cuivre ; ou bien sur des tablètes-de bois, enduites de cire. Or, pour graver les lettres sur ces lames, ou sur ces tablètes, ils se servoient d'un poinçon, qui étoit pointu par un bout, et aplati par l'autre : la pointe servoit à graver, et l'extrémité aplatie servoit à éfàcer; et c'est pour sela qu'Horace a dit stylum vertere (1), tourner (1) Lib. I. sat. x. V. 72,

le style, pour dire, éfacer, corriger, retoucher à un ouvrage. Ce poinçon s'apeloit stylus, style, tel est le sens propre de ce mot; dans le sens figuré, il signifie la manière d'exprimer les pensées. C'est en ce sens que l'on dit, le style sublime, le style simple, le style médiocre, le style soutenu, le style grave, le style comique, le style poétique. le style de la conversation, etc.

Outre toutes ces manières diférentes d'exprimer les pensées, manières qui doivent convenir aux sujets dont on parle, et que pour cela on apèle style de convenance; il y a encore le style personel: c'est la manière particulière dont chacun exprime ses pensées. On dit d'un auteur que son style est clair et facile, où au contraire, que son style est obscur, embarassé, etc. on reconoît un auteur à son style, c'est-à-dire, à sa manière d'écrire,come on reconoît un home sa voix, à ses gestes et à sa démarche.

Style se prend encore pour les diférentes manières de faire les procédures selon les diférens usages établis en chaque jurisdiction le style du Palais, le style du Conseil, le style des Notaires, etc. Ce mot a encore plusieurs autres usages qui viènent pas extension de ceux dont nous venons de parler.

Pinceau, outre son sens propre, se dit aussi quelquefois par métonymie, come plume et style: on dit d'un habile peintre, que c'est un savant pinceau.

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Voici encore quelques exemples tirés de l'Ecriture Sainte, où la cause est prise pour l'éfet. Si

peccaverit anima, portabit iniquitatem suam (1), elle portera son iniquité c'est-à-dire, la

peine de son iniquité. Iram domini portaba quoniam peccavi (2), où vous voyez que par la colère du Seigneur, il faut entendre la peine qui est une suite de la colère. Non morabitur opus mercenarii tui apud te usque mane (3), opus, l'ouvrage,c'est-à-dire, le salaire, la récompense qui est due à l'ouvrier, à cause de son travail. Tobie a dit la même chose à son fils tout sim― plement: Quicumque tibi aliquid operatus fuerit, statim ei mercedem restitue, et merces mercenarii tui apud te omninò non remaneat (4). Le prophète Osée dit, que les prêtres mangeront les péchés du peuple (5), peccata populi mei comedent, c'està-dire, les victimes ofertes pour les péchés.

11. L'ÉFET POUR LA CAUSE:Come lorsqu'Ovide dit que le Mont-Pélion n'a point d'ombres, nec habet Pelion umbras (6); c'est-à-dire, qu'il n'a point d'arbres, qui sont la cause de l'ombre; l'ombre, qui est l'éfet des arbres, est prise ici pour les arbres mêmes.

Dans la Genèse, il est dit de Rébecca, que deux nations étoient en elle (7); c'est-à-dire,

(1) Lévit. c. V. v. I.
(2) Mich. c. VII. v. 9.
(3) Lévit. c. XIX. v. 13.
(4) Tob. c. IV. v. 15.

(5) Osée, ch. IV. v. 8.

(6) Metam. L. XII. v. 513..

(7) Dua gentes sunt in utero tuo, et duo populi es ventre tuo dividentur. Gen. c. XXV. v. 23

Esau et Jacob, les pères des deux nations; Jacob des Juifs, Esau des Iduméens.

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Les poëtes disent la pále mort, les páles maladies la mort et les maladies rendent pâles. Pallidamque Pyreneh (1), la pâle fontaine de Pyrène: c'étoit une fontaine consacrée aux Muses. L'aplication à la poésie rend pâle, come toute autre aplication violente. Par la même raison, Virgile a dit la triste vieillesse.

Pallentes habitant morbi tristisque Senectus (2). Et Horace, Pallida mors (3). La mort, la maladie, et les fontaines consacrées aux Muses ne sont point pâles; mais elles produisent la pâleur: ainsi on done à la cause une épithète qui ne convient qu'à l'éfet.

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III. LE CONTENANT POUR LE CONTENU:come quand on dit, il aime la bouteille, c'est-à-dire il aime le vin. Virgile dit que Didon ayant présenté à Bitias une coupe d'or pleine de vin, Bitias la prit et se lava, s'arosa de cet or plein; c'està dire, de la liqueur contenue dans cette coupe d'or.

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Spumantem pateram,et pleño se proluit auro (4). Auro est pris pour la coupe, c'est la matière pour la chose qui en est faite; nous parlerons bientôt de cette espèce de figure, ensuite la coupe est prise pour le vin.

(1) Pers. Prol.

(2) Æn. L. VI. v. 275. (3) Lib. 1. Od. 4.

(4) Æn. I. v. 743.

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