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dit Faber, se prend souvent pour cette partie de l'ame qua impetus habet et motus.

Ira furor brevis est; animum rege, qui nisi paret (1), Imperat; hunc frenis, hunc tu compesce catenâ.

Ces sortes d'extensions doivent être autorisées par l'usage d'une langue, et ne sont pas toujours réciproques dans une autre langue; c'està-dire, que le mot français ou alemand, qui répond au mot latin, selon le sens propre, ne se prend pas toujours en français ou en alemand dans le même sens figuré que l'on done au mot latin: demander répond à petere; cependant nous ne disons point demander pour ataquer, ni pour aler à.

Oppido dans son origine est le datif d'oppldum, ville; oppido pour la ville, au datif. Les laboureurs en s'entretenant ensemble', dit Festus, se demandoient l'un à l'autre, avez-vous falt bone récolte? Sæpè respondebatur, quantùm vel opido satis esset, j'en aurois pour nourir toute la ville et de-là est venu qu'on a dit oppido adverbialement, pour beaucoup, hinc in consuetudinem venit diceretur oppido pro valdè, multum Festus, voc. Oppido.

Dont vient de unde, ou plutôt de de unde, come nous disons delà, dedans. Aliquid dederis undè utatur (2), donez-lui un peu d'argent dont il puisse vivre en le metant à profit: ce mot ne se prend plus aujourd'hui dans sa signification

(1) Hor. lib. 1, Epist. 2, v. 62.

(2) Térence, Adelp. Act. 5. sc 9. v. 24.

primitive: on ne dit pas la ville dont je viens mais d'où je viens.

Propinare, boire à la santé de quelqu'un, est un mot purement grec, qui veut dire à la lettre boire le premier. Quand les Anciens vouloient exciter quelqu'un à boire, et faire à peu près à son égard ce que nous apelons boire à la santé; ils prenoient une coupe pleine de vin, ils en bu voient un peu les premiers, et ensuite ils présentoient la coupe à celui qu'ils vouloient exciter à boire (1). Cet usage s'est conservé en Flandre, en Holande et dans le Nord: on fait l'essai c'est-à dire, qu'avant de vous présenter le vase, on en boit un peu, pour vous marquer què vous pouvez en boire sans rien craindre. De-là, par extension, par imitation, on s'est servi de propinare pour livrer quelqu'un, le trahir pour faire plaisir à un autre, le livrer, le doner comme on done à boire après avoir fait l'essai. Je vous le livre, dit Térence en se servant par extension du mot propino (2), moquez-vous de lui tant qu'il vous plaira, hunc vobis deridendum propino.

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Nous avons vu dans la cinquième partie de

(1) Hic Regina gravem gemmis auroque poposcit, Implevit que mero pateram.

et in mensâ laticum libavit honorem

Primaque libato summo tenus attigit ore :

Tum Bitiæ dedit increpitans; ille impiger hausit
Spumantem pateram, et pleno se proluit auro.
(2) Ter. Eun. Act. 5. Scène dern.

eette Grammaire, que la préposition supléoit aux raports qu'on ne sauroit marquer par les terminaisons des mots; qu'elle marquoit un rapport général ou une circonstance générale qui étoit ensuite déterminée par le mot qui suit la préposition.

Or, ces raports ou circonstances générales, sont presque infinis; et le nombre des prépositions est extrêmement borné; mais pour supléer à celles qui manquent, on done divers usages à la même préposition.

Chaque préposition a sa première signification, elle a sa destination principale, son premier sens propre; et ensuite par extension, par imitation, par abus, en un mot par catachrèse, on la fait servir à marquer d'autres raports qui ont quelque analogie avec la destination principale de la préposition, et qui sont sufisament indiqués par le sens du mot qui est lié à cette préposition; par exemple:

La préposition in est une préposition de lieu, c'est à dire, que son premier usage est de marquer la circonstance générale d'être dans un lieu. César fut tué dans le sénat, entrer dans une maison serrer dans une cassette.

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Ensuite on considère par métaphore les diférentes situations de l'esprit et du corps, les difé rens état de la fortune en un mot les diférentes manières d'être, come autant de lieux où l'home peut se trouver; et alors on dit par extension, étre dans la joie, dans la crainte, dans le dessein, dans la bone ou dans la mau

vaise fortune, dans une parfaite santé, dans le désordre, dans l'épée, dans la robe, dans le doute, etc.

On se sert aussi de cette préposition pour marquer le tems: c'est encore par extension par imitation; on considère le tems come un lieu nolo me in tempore, hoc videat senex dernier vers du quatrième acte de

c'est le

l'Andriène de Térence.

Ubi et ibi sont des adverbes de lieu; on les fait servir aussi parimitation pour marquer le tems, hac ubi dicta (1); après que ces mots furent dits, après ces paroles. Non tu ibi natum objurgasti (2)? n'alates-vous pas sur-le-champ gronder votre fils ? ne lui dîtes-vous rien alors?

On peut faire de pareilles observations sur les autres prépositions, et sur un grand nombre d'autres mots.

"La préposition après, dit M. l'abé de "Dangeau (3), marque premièrement postériorité de lieu entre des persones ou des choses: marcher après quelqu'un ; le vales » court après son maître; les Conseillers sont » assis après les Présidens ».

*

Ensuite, considérant les honeurs, les richesses, etc., come des êtres réels, on a dit par imitation, courir après les honeurs, courir après sa liberté.

(1) Virg. Æn. I, v. 85.

(a) Térence, And. Act. 1, sc.1, V. 139.
(3) Feuille volante sur la préposition après.

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Après, marque aussi postériorité de tems, » par une espèce d'extension de la quantité de ❞ lieu à celle du temps. Pierre est arrivé après » Jacques. Quand un home marche après un autre, il arive ordinairement plus tard; après demain, après dîné, etc.

"

Ce tableau est fait d'après le Titien. Ce "paysage est fait d'après nature: ces façons » de parler ont raport à la postériorité de tems. "Le Titien avoit fait le tableau avant que le peintre le copiât; la nature avoit formé le "paysage avant que le peintre le représentât»i C'est ainsi que les prépositions latines à et sub marquent aussi le tems, come je l'ai fait voir en parlant des prépositions.

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Il me semble, dit M. l'abé de Dangeau » qu'il seroit fort utile de faire voir coment on » est venu à doner tous ces divers usages à un » même mot; ce qui est comun à la plupart » des langues".

Le mot d'heure, n'a signifié d'abord que le temps; ensuite par extension il a signifié les quatre saisons de l'année. Lorsqu'Homère dit que (1) depuis le commencement des tems les heures veillent à la garde du haut Olympe, et que le soin des portes du ciel leur est confié, Madame Dacier remarque qu'Homère apèle les heures ce que nous apelons les saisons (2).

Hérodote dit (3) que les Grecs ont pris des (1) Iliad. L. v, Trab. pag. 224. (2) Rem, pag. 278.

(2) Herod, L. 2.

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